Achondroplasie

L'achondroplasie est une maladie constitutionnelle de l'os donnant un nanisme avec raccourcissement surtout de la racine des membres et un visage caractéristique. Si les capacités cognitives ne sont en règle générale pas affectées, il ne faut pas négliger certaines difficultés d'apprentissage ou la possibilité d'hydrocéphalie. C'est le cas le plus fréquent des nanismes d'origine génétique.

Achondroplasie
Chromosome Chromosome 4 humain
Gène FGFR3
Liste des maladies génétiques à gène identifié
Achondroplasie
Jason Acuña, alias "Wee-Man", vedette de la série Jackass, est atteint d'achondroplasie.
Spécialité Génétique médicale
CIM-10 Q77.4
CIM-9 756.4
OMIM 100800
DiseasesDB 80
MedlinePlus 001577
eMedicine 1258401
eMedicine radio/809 
MeSH D000130

Mise en garde médicale

Description

L'achondroplasie est la forme la plus commune de nanisme, avec une prévalence de 1,3 pour 100 000 naissances viables[1].

L'achondroplasie est caractérisée par un nanisme par atteinte dite rhizomélique (racine des membres), avec humérus (épaule, bras) et fémur (hanche, cuisse) plus courts relativement que l'extrémité du membre (avant-bras, main et jambe, pied). La croissance des os du visage est également perturbée.

Chez le nouveau-né, le diagnostic est souvent porté, même si près d'un cinquième des personnes atteintes ne sont reconnues que plus tardivement[2].

Les personnes atteintes, à l'âge adulte, mesurent entre 120 et 130 centimètres pour les femmes et 125 à 135 centimètres pour les hommes. Le raccourcissement des membres est surtout marqué au niveau des humérus et des fémurs. La main est normale mais en extension, elle prend un aspect en trident. Il existe souvent une limitation de l’extension de l’avant-bras sur le bras. L'examen radiologique des os y montre des anomalies caractéristiques.

Étiologie

La maladie est due à une mutation du gène FGFR3 situé au niveau du locus du chromosome 4. Ce gène est responsable de la synthèse du récepteur du facteur de croissance des fibroblastes (Fibroblast growth factor receptor (en)). La mutation augmenterait l'activité du récepteur du facteur de croissance des fibroblastes dans un certain nombre de tissus. Dans le cartilage, ce récepteur a un rôle inhibiteur sur la croissance et la différenciation des chondrocytes, cellules cartilagineuses ayant un rôle important dans la croissance osseuse. La transmission de type autosomique dominante homozygote (mutation chez les deux chromosomes 4) est gravissime, en général létale : si seul un parent est atteint, les enfants ont un risque sur deux d'être atteints.

Il existe deux types de mutations responsables de l’achondroplasie, toutes deux avec une pénétrance proche de 100 % (tout porteur de la mutation a le morphotype de la maladie). Une hypothèse, à confirmer, serait la présence d'un avantage sélectif pour les spermatozoïdes porteurs de la mutation[3].

Le fait que les parents de la plupart des enfants achondroplasiques ne sont pas atteints, indique que cette mutation a presque toujours lieu lors de la gamétogénèse. Dès 1955 une étude britannique avait constatée qu'un âge parental supérieur à 35 ans[4],[5] augmentait le risque d'apparition de cette mutation. Une étude récente[6] suggère que ce risque augmente effectivement avec l'âge et que plus un donneur mâle est âgé, plus l'ADN transporté par ses spermatozoïdes est fragmenté ; le gène impliqué dans l'achondroplasie (codant le récepteur 3 des facteurs de croissance des fibroblastes (en), ou FGFR3) est notamment plus souvent et de plus en plus lésés avec l'âge du donneur ; avec en moyenne une augmentation de 2 % par année d'âge des mutations de ce gène.
- Le risque augmente aussi en raison de facteurs ethniques, environnementaux ou sociaux non encore élucidés (pour certaines anomalies, certaines populations produisent un sperme plus dégradé que d'autres[6]).
- Si l'augmentation du nombre de mutations (moindre intégrité de la chromatine, mutations génétiques et aneuploïdies) est déjà observable chez les jeunes sujets, elle se poursuit tout au long de la vie.

Ceci signifie donc que la qualité génomique du sperme ne peut pas être évaluée en ne testant qu'un seul spermatozoïde ou un trop petit nombre de spermatozoïdes, ceci d'autant plus que le donneur est âgé[6].

Incidence

Elle est comprise entre 1 sur 10 000 et 1 sur 30 000 naissances[7].

Évolution

Gène porté par le spermatozoïde et codant le récepteur du facteur de croissance des fibroblastes 3 (FGFR 3). Ses mutations augmentent avec l'âge du donneur et sont corrélées au risque d'achondroplasie ou de nanisme. Le taux de spermatozoïde portant la mutation augmente de 2 % pour chaque année d'âge.

L'achondroplasie est la maladie constitutionnelle de l'os la moins rare (250 000 cas dans le monde) et nombre d'auteurs en décrivent les diverses complications médicales et le retentissement social susceptible de compromettre une existence productive et remplie. Parmi les complications, citons, entre autres : compression cervico-médullaire ; canal rachidien étroit ou rétréci ; affection pulmonaire de type restrictif et/ou obstructif ; otite moyenne ; et incurvation tibiale.

De telles complications bien décrites amènent à proposer certaines mesures de prévention. Seules existent de rares données sur le taux réel et la date de survenue de ces complications.

Il existe un risque d'hydrocéphalie par inadaptation de la taille du rachis. Elle est alors traitée par la mise en place d'une dérivation du liquide céphalo-rachidien dans près de 10 % des enfants achondroplasiques[7]. De même, il peut exister une compression de la moelle épinière cervicale pouvant nécessiter une intervention de décompression.

Du fait des déformations crâniennes, les otites sont fréquentes, souvent chroniques, ainsi que des problèmes d'élocution[8]. De même, les problèmes d'orthodontie ne sont pas rares du fait de la taille réduite de la mâchoire.

L'apnée du sommeil atteint un individu sur 6[7]. Une courbure exagérée du tibia se voit dans près de la moitié des cas chez l'adulte[8]. Le risque principal chez l’adulte est la compression de la moelle épinière (cône terminal en L2) et surtout des racines au niveau lombaire de la colonne vertébrale, nécessitant une intervention chirurgicale de décompression.

Diagnostic

Il est fait le plus souvent sur des caractéristiques morphologiques du patient. Rarement, l'identification de la mutation est nécessaire (en particulier lors d'une suspicion d'atteinte fœtale).

Diagnostic et suivi anténataux

Les fœtus à risque sont ceux dont l'échographie au troisième trimestre font évoquer une atteinte, sans certitude. Le diagnostic anténatal est possible en suivant la croissance du fémur au cours du second trimestre (Patel MD et Filly RA., 1995). La détermination du type de mutation est indispensable pour faire le diagnostic anténatal par prélèvement de trophoblaste.

À la suite de l’échographie vers les semaines 21-23, la mesure des longs os du fœtus permet d'établir que les risques de développement de cette maladie seront faibles.

Naissance et après

L'achondroplasie est reconnue ou reconnaissable à la naissance sur l'aspect physique :

  • le bébé a les membres courts et une grosse tête, surtout disproportionnée ;
  • la longueur du tronc est normale ;
  • les traits du visage montrent un aplatissement de l'ensellure nasale, une saillie du maxillaire inférieur ou mandibule et un front large ;
  • les mains présentent un espace entre médius et annulaire : main « en trident » ;
  • une rétraction des coudes en flexion (flessum) et une luxation de la tête radiale sont parfois notées ;
  • les membres inférieurs peuvent être incurvés (« arqués ») ;
  • les muscles paraissent volumineux.

Chez un faible nombre de ces petits enfants, il y a risque de troubles respiratoires :

  • par compression de la trachée ;
  • d’origine centrale.

Diagnostic différentiel

Génétique

Les patients porteurs de cette maladie sont hétérozygotes c’est-à-dire qu'ils ne possèdent qu'une seule copie mutée du gène. L'autre copie, portée par le chromosome homologue est saine. Les fœtus homozygotes, c'est-à-dire possédant deux copies du gène muté ne sont pas viables, et la grossesse s'interrompt naturellement. Cette mutation est dominante, c'est-à-dire qu'elle s'exprime plus fortement que la copie saine du gène.

Ainsi, si une personne atteinte fait un enfant avec une personne non atteinte, il existe un risque sur deux que cet enfant soit porteur du gène et par conséquent atteint par la maladie. Les enfants non porteurs de la maladie issus de cette union ne possèdent pas de copie du gène muté.

Traitements

Le traitement de la petite taille fait l'objet de controverses. L'achondroplasie a connu, surtout en Europe, un certain enthousiasme, le recours à la méthode dite d'Ilizarov, d'allongement progressif des membres inférieurs chez l'enfant ou l'adolescent[9],[10]. On peut aussi s'interroger sur le retentissement lombaire chez l'adulte (sténose) des « brillants » allongements de membres obtenus chez l'enfant.

Le recours à l'hormone de croissance recombinante a fait l'objet d'études et a pu s'avérer un peu efficace chez quelques patients[11],[12],[13],[14], mais, finalement, l'hormone de croissance humaine est donc peu efficace[7]. L'hormone de croissance produite auparavant par extraction d'hypophyses de cadavres a causé un certain nombre de contaminations par le prion, occasionnant certains cas de maladie de Creutzfeldt-Jakob mortelle (117 décès en France, au 14 janvier 2009).

Les voies de recherche concernent avant tout l'inhibition du récepteur FGFR3, soit de manière directe, soit en jouant sur les systèmes activateurs ou inhibiteurs en aval de ce récepteur.

Divers

Plusieurs sculptures de la terrasse des éléphants à Angkor Thom représenteraient des nains achondroplasiques[15].

Les acteurs Paul Cagelet, Peter Dinklage[16] (américain) et Mimie Mathy en sont atteints, ainsi que la plus petite femme au monde Jyoti Amge[17]. Parmi les autres personnalités : la nageuse britannique Ellie Simmonds, quadruple championne paralympique et plus jeune récipiendaire de l'ordre de l'Empire britannique[18].

Notes et références

  1. (en) Andersen PE Jr, Hauge M, « Congenital generalised bone dysplasias: a clinical, radiological, and epidemiological survey », J Med Genet, vol. 26, no 1, , p. 37-44. (PMID 2783977, PMCID PMC1015534)
  2. (en) Trotter TL, Hall JG, « Health supervision for children with achondroplasia » Pediatrics 2005;116:771–783. PMID 16140722
  3. (en) A. Goriely, G. A. McVean, M. Rojmyr et al. « Evidence for Selective Advantage of Pathogenic FGFR2 Mutations in the Male Germ Line », Science 2003;301(5633):643-646. PMID 12893942 DOI:10.1126/science.1085710
  4. (en) L.S. Penrose, « Parental age and mutation », The Lancet, vol. 266, no 6885, , p. 312–313 (DOI 10.1016/S0140-6736(55)92305-9)
  5. C. Stoll, M.P. Roth et P. Bigel, « A reexamination on parental age effect on the occurrence of new mutations for achondroplasia. », Progress in Clinical and Biological Research, no 104, (ISSN 0361-7742, PMID 6891789)
  6. (en) Wyrobek AJ, Eskenazi B, Young S, Arnheim N, Tiemann-Boege I, Jabs EW, Glaser RL, Pearson FS, Evenson D, « Advancing age has differential effects on DNA damage, chromatin integrity, gene mutations, and aneuploidies in sperm », Proc Natl Acad Sci U S A., vol. 103, no 25, , p. 9601-6. (PMID 16766665, PMCID PMC1480453, lire en ligne [html])
  7. (en) Horton WA, Hall JG, Hecht JT, « Achondroplasia » Lancet 2007; 370:162-172
  8. (en) Hunter AG, Bankier A, Rogers JG, Sillence D, Scott Jr CI, « Medical complications of achondroplasia: a multicentre patient review » J Med Genet. 1998;35:705–712. PMID 9733026
  9. (en) Ganel A, Horoszowski H, « Limb lengthening in children with achondroplasia. Differences based on gender », Clin Orthop Relat Res, no 332, , p. 179-83. (PMID 8913161)
  10. (en) Yasui N, Kawabata H, Kojimoto H, Ohno H, Matsuda S, Araki N, Shimomura Y, Ochi T, « Lengthening of the lower limbs in patients with achondroplasia and hypochondroplasia », Clin Orthop Relat Res, no 344, , p. 298-306. (PMID 9372781)
  11. (en) Horton WA, Hecht JT, Hood OJ, Marshall RN, Moore WV, Hollowell JG, « Growth hormone therapy in achondroplasia », Am J Med Genet, vol. 42, no 5, , p. 667-70. (PMID 1632435)
  12. (en) Nishi Y, Kajiyama M, Miyagawa S, Fujiwara M, Hamamoto K, « Growth hormone therapy in achondroplasia », Acta Endocrinol (Copenh), vol. 128, no 5, , p. 394-6. (PMID 8317186)
  13. (en) Yamate T, Kanzaki S, Tanaka H, Kubo T, Moriwake T, Inoue M, Seino Y, « Growth hormone (GH) treatment in achondroplasia », J Pediatr Endocrinol, vol. 6, no 1, , p. 45-52. (PMID 8374688)
  14. (en) Weber G, Prinster C, Meneghel M, Russo F, Mora S, Puzzovio M, Del Maschio M, Chiumello G, « Human growth hormone treatment in prepubertal children with achondroplasia », Am J Med Genet, vol. 61, no 4, , p. 396-400. (PMID 8834055)
  15. Barbet P, Fisher JL, Jacques C, Les nains d'Angkor, Pour la Science, août 2007, p96-97
  16. (en) Hughes SA, « Peter Dinklage draws attention to ‘dwarf tossing’ victim, Martin Henderson », 17 janvier 2012, Washington Post
  17. (en) « Indian student Jyoti Amge named world's shortest woman » BBC, 16 décembre 2011
  18. (en) Fiche biographique : Ellie Simmonds, The Daily Telegraph

Liens externes

  • Page en français sur Orphanet
  • (en) Online Mendelian Inheritance in Man, OMIM (TM). Johns Hopkins University, Baltimore, MD. MIM Number:100800 ncbi.nlm.nih.gov
  • (en) Clair A Francomano, Achondroplasia In : GeneReviews at GeneTests: Medical Genetics Information Resource (database online). Copyright, University of Washington, Seattle. 1997-2005. genetests.org.
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