Vie et opinions de Tristram Shandy, gentilhomme

Vie et opinions de Tristram Shandy, gentilhomme, en abrégé Tristram Shandy (The Life and Opinions of Tristram Shandy, Gentleman) est un roman de Laurence Sterne, publié en neuf volumes, les deux premiers à York en 1759 sous la date de 1760, les sept autres dans les dix années suivantes.[réf. souhaitée]

Vie et opinions de
Tristram Shandy, gentilhomme

Une des illustrations de l'ouvrage par Henry William Bunbury, datée de 1773.

Auteur Laurence Sterne
Pays Angleterre
Genre Roman
Version originale
Langue Anglais
Titre The Life and Opinions of Tristram Shandy, Gentleman
Éditeur Ann Ward (vol. 1–2),
Dodsley (vol. 3–4),
Becket & DeHondt (vol. 5–9)
Lieu de parution Londres
Date de parution 1759
Version française
Traducteur M. Frénais
Éditeur Ruault
Lieu de parution Paris
Date de parution 1776

Ce roman, relativement peu connu en France[pertinence contestée], est pourtant considéré comme l'un des plus importants de la littérature occidentale.

Argument

Le texte se présente comme une tentative d'autobiographie de Tristram Shandy. Mais très vite le récit est accaparé par des digressions et par l'omniprésence des membres de la famille Shandy. Chacun semble poursuivre une idée fixe : le père de Tristram cherche à expérimenter sur son fils sa théorie éducative, l'oncle Toby ne pense qu'à chevaucher son hobby-horse et à construire des fortifications dans son jardin, etc. Plus qu'un récit, Tristram Shandy se présente donc plutôt comme un tissage minutieux de thèmes qui se répondent, tels que la création, l'impuissance, la maîtrise du temps.[réf. souhaitée]

Sources

Le texte de Sterne est tissé d'allusions et de références aux plus grands penseurs et écrivains des XVIIe siècle et XVIIIe siècles. Alexander Pope, John Locke, et Jonathan Swift, furent les principales influences de Sterne dans l'écriture de Tristram Shandy. On s'aperçoit facilement que la satire de Pope et de Swift constitue la plus grande part de l'humour de Tristram Shandy, mais les sermons de Swift et l'Essai sur l'entendement humain de Locke forment le cadre intellectuel que Sterne explora dans son roman.[réf. souhaitée] Sterne était très au fait de la science et de la philosophie de son époque,[réf. souhaitée] et les paragraphes sur l'obstétrique et les fortifications, par exemple, montrent qu'il maîtrisait les sujets principaux de ces domaines.

Quatre œuvres ont principalement influencé Tristram Shandy, au point d'éclipser les autres références[réf. souhaitée] : Rabelais, Cervantes, les Essais de Montaigne et John Locke. Sterne avait déjà écrit un texte appelé A Rabelaisian Fragment (Un Fragment rabelaisien), qui témoigne de la connaissance qu'il avait de cet auteur[1]. Mais il n'est pas besoin de cette œuvre de jeunesse pour voir l'influence que Rabelais a exercée sur Tristram Shandy, que de multiples allusions rendent évidente, comme l'humour paillard, particulièrement en ce qui concerne le corps. La première scène de Tristram Shandy, où l'on voit la mère de Tristram interrompre son père pendant le coït qui entraînera la conception de Tristram, témoigne de la dette que Sterne a envers Rabelais.

L'ombre de Cervantès est tout aussi présente dans le roman de Sterne. Les fréquentes références à Rossinante, le personnage d'Oncle Toby (qui ressemble à Don Quichotte par bien des manières) et la description que fait Sterne de l'humour « cervantesque » de ce personnage, la composition même de Tristram Shandy et son genre, tout cela doit beaucoup à la seconde partie du roman de Cervantès et démontre l'influence de l'écrivain espagnol.[réf. souhaitée]

Le roman utilise brillamment les théories de John Locke sur l'empirisme[réf. souhaitée], c'est-à-dire sur la manière dont nous nous servons de ce que nous savons de nous-mêmes et du monde par des associations d'idées qui proviennent de nos cinq sens. Sterne se montre tour à tour respectueux et satirique à l'égard des théories de Locke.[réf. souhaitée] Font également partie de l'intertexte du roman l’Anatomie de la mélancolie (Anatomy of Melancholy) de Robert Burton, La Bataille des livres (Battle of the Books) de Jonathan Swift, ainsi que Les Mémoires de Martin Scriblerus (The Memoirs of Martinus Scriblerus).

Première parution

Le roman a été publié entre 1759 et 1767, en neuf volumes : les volumes 1 et 2 en 1759, les volumes 3 and 4 en 1761, les volumes 5 and 6 en 1762, les volumes 7 and 8 en 1765 et le volume 9 en 1767.

La première édition française date de 1776, chez Ruault.

Réception et influence

Si le livre connut un succès immédiat auprès du public britannique et très vite européen, une partie de la critique se montra réservée sur ce qu'elle considérait comme un simple jeu d'esprit élaboré et ingénieux.[réf. souhaitée] Ainsi, Samuel Johnson en 1776 affirmait : « Aucune chose bizarre ne dure. Tristram Shandy n'a pas résisté au temps » (« Nothing odd will do long. Tristram Shandy did not last »[2]). Au XIXe siècle, Tristram Shandy fut considéré comme démodé dans sa patrie.[réf. souhaitée] La fortune du roman fut plus heureuse sur le continent.[réf. souhaitée] Diderot honore lui-même sa dette à son égard et s'en inspire pour écrire Jacques le fataliste. Les romantiques allemands Jean Paul et E.T.A. Hoffmann, ou encore le Français Charles Nodier se sont eux aussi clairement inspirés du Tristram.[réf. souhaitée] Le Brésilien Joaquim Maria Machado de Assis le cite comme inspiration de son Bras Cubas.

Le roman fut également très apprécié en Russie.[réf. souhaitée] Les théoriciens russes Victor Chklovski et Mikhaïl Bakhtine le considéraient comme le roman le plus important de la tradition occidentale.[réf. souhaitée]

Les modernistes tels que James Joyce redécouvrirent la richesse du texte, appréciant notamment son caractère réflexif.[réf. souhaitée]

Traductions en français

Les traductions suivantes sont rangées par ordre chronologique de première parution :

  • 1776, trad. (de la première partie), par Joseph-Pierre Frénais, chez Ruault, en deux volumes.
  • 1785, trad. (de la seconde partie) par Charles François de Bonnay, chez Volland ; réédition chez Cazin[3],[4].
  • 1785, trad. par Joseph-Pierre Frenais, chez Volland. Texte sur Wikisource (édition de 1803).
  • 1838, trad. par Francisque Michel, éd. Delloye, Lecou.
  • 1890-1891, trad. par Alfred Hédouin, chez Alphonse Lemerre.
  • 1858, Traduction par Léon de Wailly, G. Charpentier. texte de l’édition de 1882 sur Gallica (tome I, tome II)
  • 1946, traduction par Charles Mauron, coll. Amalthée, Robert Laffont ; rééd. coll. Les Portiques no 37, Le Club français du livre, préface de Jean-Louis Curtis, 1965 ; rééd. 10/18, 1975 ; rééd. GF, 1999.
  • 1998-2004, traduction par Guy Jouvet, éd. Tristram. Nouvelle édition en 2012, coll. « Souple ».
  • 2012, traduction par Alfred Hédouin, révisée et éditée par Alexis Tadié, Folio « Classique ».

Polémique autour d’une traduction française

Dans un article intitulé Qui a peur de Tristram Shandy ? paru en octobre 2006 dans le journal Le Monde , Sylvie Martigny et Jean-Hubert Gailliot, gérants des éditions Tristram, attaquent avec virulence la traduction de Charles Mauron, alors choisie par le Ministère de l'éducation nationale pour le concours de l'Agrégation de Lettres modernes, comme étant : « le pensum le plus appauvrissant et anti-shandéen qui se puisse concevoir », ajoutant que Mauron dépouille « le texte de Sterne de ses attributs les plus remarquables », et que « cette vieille traduction réussit le tour de force d'en donner une version ennuyeuse, fautive et incomplète, de nature à faire fuir tout lecteur innocent ».

Un mois plus tard, dans les mêmes colonnes du Monde, la fille de Charles Mauron réplique par un droit de réponse intitulé Une défense de Charles Mauron , dans lequel elle s'insurge contre les « appréciations négatives » au « caractère particulièrement abrupt et méprisant » portées à l'encontre de la traduction de son père, parue chez Laffont en 1946, et reprise ensuite au Club français du livre, dans la collection « 10/18 », chez Garnier-Flammarion.

Adaptations

Tristram Shandy a été adapté en 1996 en bande dessinée par le dessinateur Martin Rowson[5].

La première adaptation connue au cinéma est de 2006 : Tournage dans un jardin anglais (A Cock and Bull Story), film britannique réalisé par Michael Winterbottom, écrit par Martin Hardy, avec Steve Coogan, Rob Brydon, Kelly Macdonald, Naomie Harris et Gillian Anderson.

Références

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Helene Moglen, The Philosophical Irony of Laurence Sterne, The University Presses of Florida, , VIII + 172 p., compte-rendu par Jean Ducrocq, dans Dix-Huitième Siècle, 1976, no 8, p. 508-509 (lire en ligne)
  • Alain Montandon, La réception de Laurence Sterne en Allemagne, Association des publications de la Faculté des lettres et sciences humaines de l'Université de Clermont-Ferrand II, , 391 p., compte-rendu Francis Claudon, dans Dix-Huitième Siècle, 1987, no 19, p. 520 (lire en ligne)<
  • Marie-Hélène Chabut, « Tristram Shandy, ou l'histoire de l'écriture », Dix-Huitième Siècle, no 19, , p. 391-409 (lire en ligne)

Articles connexes

Liens externes


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