Théologie de la prospérité

La théologie de la prospérité (appelée également doctrine de prospérité, évangile de la prospérité, évangile de prospérité) est une croyance religieuse chrétienne évangélique qui prétend que la Bible enseigne que l'aisance financière des chrétiens est un signe de santé spirituelle et que la pauvreté est une malédiction ou une punition de Dieu.

Histoire

La théologie de la prospérité s’est répandue dans les années 1970 et 1980 aux États-Unis principalement par des télévangélistes pentecôtistes et charismatiques[1].

Les principaux défenseurs de cette doctrine sont des pasteurs américains, tels Kenneth Hagin avec [2]. Certaines de ses figures, comme Paula White, Kenneth Copeland ou Edir Macedo, ont soutenu des leaders politiques comme Donald Trump ou Jair Bolsonaro.

Doctrine

Cette doctrine est centrée sur l’enseignement de la foi chrétienne comme un moyen de s’enrichir financièrement et matériellement, par une « confession positive » et une contribution aux ministères chrétiens[3].

Dans certaines églises évangéliques, le sujet de la prospérité, lié à la dîme obligatoire et aux offrandes occupe une grande partie de chaque culte [4], [5] , [6]. Des responsables surveillent les dons de près chez les croyants, dans le but, selon eux, d'évaluer leur niveau spirituel[7], [8]. Des promesses de guérison divine et de prospérité sont garanties en échange de certains montants de dons [9] ,[10], [11]. La fidélité dans la dîme permettrait de s’éviter les malédictions de Dieu, les attaques du diable et la pauvreté [6],[12], [13].

Ce courant évangélique s’inspire, selon Stéphane Lavignotte, pasteur protestant à la Mission populaire, de la « théologie rétributive » de l’Ancien Testament : « C’est une théologie qui fonctionne à tous les coups : vous donnez votre vie à Jésus, vous donnez votre argent, si ça marche tant mieux, si ça ne marche pas c’est peut-être que vous devriez examiner votre morale. »[14].

Critiques

Depuis les années 1970, divers scandales financiers de détournements de fonds ont été rapportés dans des églises et des organisations évangéliques[15]. Le Conseil évangélique pour la responsabilité financière a été fondé en 1979 pour renforcer l’intégrité financière dans les organisations et les Églises évangéliques qui désirent volontairement être membres et se soumettre à des vérifications comptables annuelles[16].

En 2012, le Conseil national des évangéliques de France a publié un document dénonçant cette doctrine, en mentionnant que la prospérité était bien possible pour un croyant, mais que cette théologie poussée à l'extrême amène au matérialisme et à l’idolâtrie, ce qui n'est pas le but de l’Évangile [17],[18].

Souvent associée avec la dîme obligatoire, cette doctrine est parfois comparée à un business religieux[19],[20].

Aux États-Unis, des télévangélistes ont demandé des offrandes pour acheter des jets privés [21].

Les pasteurs pentecôtistes qui adhérent à la théologie de la prospérité ont été critiqués par des journalistes pour leur style de vie bling-bling (vêtements luxueux, grandes maisons, voitures haut de gamme, avion privé, etc.) [22],[4],[23].

Les « pasteurs » qui soutiennent cette théologie sont présents en Afrique, Amérique latine, Asie et désormais Europe. Leur message « plus vous semez, plus vous récolterez » se fonde sur « la loi divine du retour au centuple » : « Donnez 10 euros, Dieu vous en rendra 1 000 ! ».[24] Mais il est ruineux pour des millions de chrétiens parmi les plus pauvres qui croient qu'en donnant au profit des « théologiens de la prospérité » jusqu'au tiers de leur salaire, Dieu multipliera leur don au centuple. Paradoxalement, c'est parmi les évangéliques, historiquement les plus critiques vis-à-vis des « indulgences plénières » qui permettaient aux catholiques de s'assurer une place au paradis, moyennant finances, que fleurit le commerce des « prophètes de la prospérité ».[24].

Le 5 février 2015, le pape François a affirmé dans l'homélie qu'il a prononcée à la maison Sainte-Marthe que « Le salut n’est pas une théologie de la prospérité ». Pour François, l’Église doit proclamer l’Évangile « dans la pauvreté » et cette annonce doit avoir pour seul but de soulager les misères des pauvres, en n’oubliant jamais que ce service est l’œuvre de l’Esprit Saint et non de la force humaine[25]. François a renouvelé sa critique dans une méditation prononcée le 19 mai 2016 en la chapelle de la maison Sainte-Marthe, disant que « c’est une erreur » de penser que « Dieu te fait voir que tu es juste s’il te donne beaucoup de richesse »[26].

En 2018, la revue jésuite italienne proche du Vatican La Civiltà Cattolica s’est livrée à une analyse critique de cette version évangélique du rêve américain, dans laquelle elle voit une « tentative de justification théologique du néolibéralisme économique »[27].

Liens externes

Notes et références

Source

Notes

  1. Randall Herbert Balmer, Encyclopedia of Evangelicalism: Revised and expanded edition, Baylor University Press, USA, 2004, p. 562
  2. Michael Horton, Evangelicals should be deeply troubled by Donald Trump’s attempt to mainstream heresy, washingtonpost.com, USA, 3 janvier 2017
  3. Kate Bowler, Blessed: A History of the American Prosperity Gospel, OUP USA, USA, 2013, p. 59
  4. Trésor Kibangula, RDC : pasteur, un job en or, jeuneafrique.com, France, 06 février 2014
  5. Marie-Claude Malboeuf et Jean-Christophe Laurence, Églises indépendantes: le culte de l'argent, lapresse.ca, Canada, 17 novembre 2010
  6. (en) John Blake, « How passing the plate becomes the 'Sunday morning stickup' », sur cnn.com, .
  7. Yannick Fer, Le système pentecôtiste de gestion de l'argent : Entre illusion subjective et rationalité institutionnelle, Congrès de l'association française de sociologie (AFS), p. 7, France, 2011
  8. Sophie Bouillon, Nigeria «Dieu vous enverra un texto pour vous remercier», liberation.fr, France, 11 avril 2014
  9. Laure Atmann, Au nom de Dieu et… du fric!, notreafrik.com, Belgique, 26 juillet 2015
  10. Bob Smietana, Prosperity Gospel Taught to 4 in 10 Evangelical Churchgoers, christianitytoday.com, USA, 31 juillet 2018
  11. Gina Meeks, Megachurch Pastor Ed Young Promises to Refund Tithe if God Doesn't Open the Windows of Heaven, charismanews.com, USA, 16 juin 2014
  12. Raoul Mbog, Le juteux business du pasteur évangélique Dieunedort Kamdem, lemonde.fr, France, 25 décembre 2015
  13. Venance Konan, Églises évangéliques d’Abidjan - Au nom du père, du fils et... du business, Journal Le Nouveau Réveil sur koffi.net, Côte d’Ivoire, 10 mai 2007
  14. Timothée de Rauglaudre, « Les habits religieux de l’ultralibéralisme », Revue du Crieur, vol. N°17, no 3, , p. 14 (ISSN 2428-4068 et 2649-7565, DOI 10.3917/crieu.017.0014, lire en ligne, consulté le )
  15. Michael J. Anthony, Introducing Christian Education: Foundations for the Twenty-first Century, Baker Academic, USA, 2001, p. 284
  16. Randall Herbert Balmer, Encyclopedia of Evangelicalism: Revised and expanded edition, Baylor University Press, USA, 2004, p. 239
  17. Henrik Lindell, Théologie de la prospérité : quand Dieu devient un distributeur de miracles, lavie.fr, France, 8 aout 2012
  18. Jean-Marie Ribay et Thierry Huser, Dossier sur la théologie de la prospérité, lecnef.org, France, 25 février 13
  19. Harding Djakou Chati, Nouveaux lieux de culte en Afrique : qui fait bien son travail, prie au moins 100 fois, jeuneafrique.com, France, 12 novembre 2015
  20. Jean-Christophe Laurence, Le business religieux, lapresse.ca, Canada, 17 novembre 2010
  21. Arwa Mahdawi, Jet-set Jesus: televangelist to donate old private jet when he gets new $54m one, theguardian.com, UK, 1 juin 2018
  22. Cathleen Falsani, Falsani: Get real, ‘Preachers of L.A.’, ocregister.com, USA, 7 octobre 2013
  23. Mfonobong Nsehe, Les pasteurs les plus riches du Nigéria, forbesafrique.com, France, 28 novembre 2015
  24. AFP, « Le ruineux Evangile des « théologiens de la prospérité » », Le point, 26 mars 2013, lire en ligne
  25. La Croix, 5 février 2015, lire en ligne, consulté le 18 mars 2020
  26. Méditation matinale en la chapelle de la maison Sainte-Marthe, L'Osservatore Romano, Édition hebdomadaire n° 21 du 26 mai 2016, lire en ligne, consulté le 18 mars 2018
  27. Timothée de Rauglaudre, « Les habits religieux de l’ultralibéralisme », Revue du Crieur, vol. N°17, no 3, , p. 14 (ISSN 2428-4068 et 2649-7565, DOI 10.3917/crieu.017.0014, lire en ligne, consulté le )
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