Siduri


Siduri est un personnage de l'Épopée de Gilgamesh, une sage divinité féminine associée à la fermentation.

Au début de la tablette X de l'Épopée, Gilgamesh après une marche épuisante, parvient à l'extrémité du monde où se dresse la taverne de Siduri, au bord du rivage.

Comme l'explique Jean Bottéro, historien assyriologue et traducteur de L'Épopée : "Elle [Siduri] est une femme et même une femme mariée comme l'indique le voile qu'elle porte. Elle appartient au monde surnaturel car son nom est précédé en cunéiforme du signe indicatif des divinités. Et c'est une tavernière c'est-à-dire, selon l'usage en vigueur vers le milieu du IIe millénaire av. J.-C. (ensuite le rôle a été pris par les hommes) qu'elle tient une sorte d'estaminet dans lequel elle vend de la bière - boisson "nationale" du pays - qu'elle confectionne à l'aide de son attirail professionnel mentionné au vers 3 [de la tablette X, il y est mentionné une "cuve à bière"]. Outre le "débit de boisson" de tels établissements représentaient le "commerce de carrefour" où se détaillait bien des denrées de premières nécessités et dont les tenancières étaient les mieux placées pour donner des renseignements, non seulement sur leur clientèle mais sur le pays. Siduri est donc le modèle, projeté dans la légende, de ces "commerçants de carrefour", même si on voit mal, ici au bout du monde, quels pouvaient être ses clients". Mais comme poursuivait Jean Bottéro : "Elle était surtout nécessaire à l'auteur pour renseigner Gilgamesh, et le folklore n'a pas toujours besoin de logique."[1]

Dans la version récente, elle réagit d'abord par la peur puis par une espèce de compassion mêlée d'étonnement:

« Si c'est toi qui as mis à mort le gardien de la forêt;
Occis ce Humbaba qui demeurait en la forêt des pins,
Tué des lions aux passes des montagnes,
Vaincu et abattu le Taureau géant descendu du ciel,
Pourquoi as-tu les joues si amaigries,
Le visage aussi abattu,
Le cœur si triste, les traits aussi exténués ?
Pourquoi une pareille angoisse en ton ventre ?
Pourquoi cette apparence d'un voyageur arrivé de très loin ? »
(X, l, 40-47).

Puis elle lui indique où trouver le bateau Urshanabi (Sursunabu dans la version ancienne) le nocher qui, à son tour, guidera Gilgamesh vers Uta-Napishtim (Le Noé mésopotamien) où il compte lui demander conseils pour trouver la vie-sans-fin.

Mais dans la version ancienne (antérieure au milieu du IIe millénaire), elle tente d'abord de dissuader de Gilgamesh dans sa quête de l'immortalité, l'incitant à profiter de la vie comme elle est. L'exhortation qu'elle lui adresse alors constitue sans doute un des textes les plus célèbres de l'Épopée :

« Gilgamesh, où donc cours-tu ?
La vie que tu poursuis, tu ne la trouveras pas.
Quand les dieux ont créé l'humanité, c'est la mort qu'ils ont réservée aux hommes.
La vie ils l'ont retenue pour eux entre leurs mains.
Toi Gilgamesh, que ton ventre soit repu,
Jour et nuit réjouis-toi,
Chaque jour fais la fête,
Jour et nuit danse et joue de la musique ;
Que tes vêtements soient immaculés ;
La tête bien lavée, baigne-toi à grande eau ;
Contemple le petit qui te tient par la main,
Que la bien-aimée se réjouisse en ton sein !
Cela, c'est l'occupation des hommes.»

C'est en quelque sorte l'expression mésopotamienne du Carpe Diem latin.

Siduri joue un rôle parallèle à celui de Circé dans l'Odyssée : comme Ulysse, Gilgamesh lui demande sa route afin d'atteindre la terre des morts pour y trouver une aide divine. Comme Circé, Siduri habite au bord de la mer à l'extrémité de la terre. Sa maison est également associée au soleil : Gilgamesh atteint la demeure de Siduri en passant par un tunnel sous le mont Jumeau (Mashu), la haute montagne à partir de laquelle le soleil passe dans le ciel.

Le nom Siduri signifie « jeune femme » en hourrite. En akkadien, ce nom pourrait également s'articuler Si-dûri Elle est mon rempart. Sous cette forme, il est devenu plus tard une épithète d'Ishtar.

Notes et références

  1. L'Épopée de Gilgamesh, le grand homme qui ne voulait pas mourir, traduit de l'Akkadien par Jean Bottéro, Gallimard, 1992. , note de bas de page 1, page 165.
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