Satrape

Un satrape (du grec σατράπης / satrápês, lui-même adapté de l'iranien xšaθrapā, du vieux perse xšaθrapāvan, signifiant « protecteur du pouvoir [royaume] ») est le gouverneur d'une satrapie, c'est-à-dire une division administrative de l'empire achéménide (Perse), du royaume de Macédoine et de l'empire séleucide. Il est le représentant direct du roi dans une province, où il exerce toutes les prérogatives royales[1].

Pour les articles homonymes, voir Satrape (homonymie).

Partage de l'empire d'Alexandre après les accords de Triparadisos (321 av. J.-C.)

Prérogatives

Selon Hérodote (III, 89), Darius Ier « établit dans l'empire des Perses vingt gouvernements (nomoi) qu'ils appellent eux-mêmes satrapies ». Cette organisation demeure la base du gouvernement territorial ultérieur. Cependant, le principe des satrapies est déjà connu sous Cyrus le Grand et Cambyse II, comme le montre l'inscription de Behistun. Selon le livre biblique de Daniel 6:1, Darius nomma jusqu'à 120 satrapes.

Le satrape a pour rôle principal de faire régner l'ordre dans sa province, et d'agrandir le territoire de l'Empire. En effet, selon la titulature achéménide, le Grand Roi est « roi de l'univers » et « roi des quatre directions ». Demander à un peuple « la terre et l'eau », signe de soumission, revient donc simplement à réclamer son dû. À la fin du VIe siècle, le satrape Oroitès (en) se voit ainsi reprocher de n'avoir pas « su ajouter l'île de Samosya aux domaines du roi » (Hérodote, III, 126).

Le territoire confié à un satrape peut être très important. Ainsi, quand Hérodote mentionne qu'Oroitès a été nommé « gouverneur de Sardes (Sardiôn hyparkhos) » (III, 120), il veut dire en fait l'ensemble de la Lydie et de l'Ionie, Oroitès résidant tantôt effectivement à Sardes, tantôt à Magnésie du Méandre. En 535, un dénommé Gubāru reçoit une satrapie comprenant la Babylonie et le Transeuphratène, c'est-à-dire un immense territoire allant du Tigre au Nil.

Pour contrôler leur territoire, les satrapes ont à leur disposition une armée permanente, composée à la fois de soldats levés dans la satrapie et de troupes perses apportées par les aristocrates à qui l'on avait concédé une terre dans la satrapie.

Certains satrapes finissent par s'émanciper, faisant de leur satrapie un véritable royaume. Mausole agit ainsi pour la Carie.

Parmi les satrapes célèbres, on peut citer :

Terminologie

« Hyparque » redirige ici. Pour l’article homophone, voir Hipparque.

Le satrape répond directement au roi, est responsable devant lui et est nommé par lui. En dessous du satrape se trouve l'hyparque (ὕπαρχος / hyparkhos pour les Grecs, ou piḫātu pour les Perses).

Au-dessus du satrape et en dessous du roi peut se trouver le karana, commandant militaire regroupant plusieurs satrapies. Sorte de missi dominici, il est nommé et répond uniquement devant le roi ; les satrapes lui sont inféodés par nature ; par exemple, Cyrus est envoyé en Asie Mineure en tant que « karana », souverain militaire. Les satrapes peuvent mal prendre de devoir supporter ainsi la tutelle d'un autre que le roi et faire défection ou intriguer contre ce karana. Ce titre est exceptionnel, et dans le cas de Cyrus, il a pour tâche de reprendre le contrôle de la côte, et d'en chasser les Grecs.

Dans l'inscription de Behistun, Darius Ier réfère à Vivāna, satrape en Arachosie et à Dadarši, satrape en Bactriane, sous le terme bandaka, qui met l'accent sur la relation personnelle entre le souverain et son dignitaire, et non sur le territoire. Bandaka est traduit par vassal.

Voir aussi

Sources

Bibliographie

  • Thierry Petit, Satrapes et satrapies dans l'empire achéménide de Cyrus le Grand à Xerxès Ier (coll. « Bibliothèque de la Faculté de philosophie et lettres de l'université de Liège », 254), Paris, Droz, 1990, 316 p. (ISBN 9782251662541).
  • Pierre Briant, Histoire de l’Empire perse, de Cyrus à Alexandre, [détail de l’édition].

Postérité

Le titre de satrape a été porté en Inde par les Satrapes occidentaux (35-405).

Dans la ville de Sauve (Gard) en France, les seigneurs portaient le titre de « satrape », bien avant les croisades, trace sans doute de la longue présence sarrasine[2].

  • Le mot « satrape » est maintenant utilisé pour désigner un homme exerçant un pouvoir personnel fort.
  • Le terme « satrape » a été repris par le Collège de 'Pataphysique.
  • Dans l'album de bande dessinée Tintin au Tibet (1960), le Capitaine Haddock traite le yéti de « satrape » (voir la liste des jurons et insultes du capitaine Haddock).
  • Le mot « satrape » apparaît dans le roman de Romain Gary La Promesse de l'aube (1960). Dans le chapitre premier, il est utilisé pour désigner les dieux absurdes, insidieux et masqués qui possèdent le monde en cultivant la soumission de ses habitants : « [...] ces satrapes qui chevauchent le monde devinrent pour moi plus réels et plus visibles que les objets les plus familiers et leurs ombres gigantesques sont demeurées penchées sur moi jusqu'à ce jour; lorsque je lève la tête, je crois apercevoir leurs cuirasses étincelantes et leurs lances semblent se braquer sur moi avec chaque rayon du ciel ».
  • Le terme « satrapie » apparaît aussi dans le roman de Frank Herbert, La Maison des mères (1985). Dans le Coda Bene Gesserit : « Les règles créent des fortifications à l'abri desquelles les esprits étroits édifient des satrapies. État de choses dangereux quand tout va bien, désastreux quand tout va mal ».
  • Le mot « satrape » apparaît dans le roman de Dominique Bona, Le Manuscrit de Port-Ebène (1998).

Articles connexes

Notes et références

  1. Pierre Briant, « Achéménides : le premier empire-monde », L'Histoire, .
  2. Le Satrape de Sauve et Aperçus historiques, Hervé Michel et Jean Germain.
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