Roxelane

La sultane Hürrem[1], connue aussi comme Roxelane (la Ruthène) (v. 1500 - ) fut l'épouse du sultan Soliman le Magnifique après en avoir été l'esclave.

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Roxelane
Hürrem Sultan

Titre

Favorite puis épouse du Sultan ottoman

en 1521 (favorite) - juin 1534 (épouse) – 15 avril 1558

Biographie
Dynastie ottomane
Nom de naissance Aleksandra Lisovska
Naissance Vers 1500
Ruthénie (Royaume de Pologne)
Décès 15 avril 1558
Palais de Topkapı, Constantinople (Empire Ottoman)
Père Lisowski(?)
Conjoint Soliman le Magnifique
Enfants Şehzade Mehmed
Mihrimah Sultan
Sélim II
Şehzade Bayezid
Şehzade Cihangir
Résidence Palais de Topkapı
Religion Christianisme orthodoxe
Islam

Biographie

Origines

Si les sources du XVIe siècle sont muettes à ce sujet, la tradition ruthène lui donne comme nom de naissance Anastasia ou Alexandra Lisovska (en version polonaise) née à Rohatyn ; il pourrait cependant s'agir d'une création littéraire d'écrivains nationalistes ukrainiens du XIXe siècle[2]. Stanisław Rzewuski (pl) (1806-1831), fils de l'explorateur Wenceslas Séverin Rzewuski, est un des premiers auteurs à la dire originaire de cette localité[3]. Le poète Samuel Twardowski (en) qui fit partie d'une ambassade dans l'Empire ottoman au tournant des XVIe et XVIIe siècles rapporte avoir appris à la cour de Constantinople qu'Hürrem était la fille d'un pope probablement ruthène de Galicie, alors partie du Royaume Polonais. Elle aurait été capturée par des Tatars de Crimée lors d'un de leurs raids et emmenée comme esclave, probablement d'abord à Kaffa, en Crimée, puis vendue à Constantinople.

Entrée au harem

La date précise de son entrée au harem du sultan Soliman n'est pas connue mais se situe aux alentours de l'accession au trône du prince en (il est possible qu'elle ait été un présent fait au souverain à cette occasion)[4]. Elle lui donne un premier fils en 1521, Mehmed. Elle devient rapidement la favorite (hasseki) du sultan, qui délaisse ses autres concubines (dont Mahidevran, mère de son fils aîné Mustafa) et entretient avec Hürrem (« La rieuse ») une relation exclusive.

Probablement vers , elle est affranchie et devient l'épouse légitime de Soliman, ce qui constitue une rupture avec la tradition ottomane[5]. Selon une anecdote répandue par des sources occidentales dès la seconde moitié du XVIe siècle, elle aurait obtenu le mariage grâce à une série de stratagèmes : après s'être convertie à l'islam et avoir été affranchie, elle se serait ainsi refusée à Soliman au motif qu'une femme libre ne pouvait avoir de relations avec un homme hors du mariage[6].

Sultane

Mausolée de Roxelane, mosquée Süleymaniye, Istanbul.

Au cours des années 1530, elle quitte l'« ancien palais », résidence habituelle de la famille du sultan, et s'installe dans le « nouveau palais » (Topkapı) où elle se retrouve plus proche du Sultan[7].

Roxelane est parfois considérée comme ayant joué un rôle plus ou moins actif dans l'élimination de Pargali Ibrahim Pacha, un favori de Soliman, en 1536.

Le principal prétendant à la succession au trône était alors Sehzade Mustafa, fils aîné de Soliman (de Mahidevran). En 1553, une fausse lettre du prince héritier Mustafa au chah d’Iran lui demandant son aide pour renverser Soliman est interceptée. Mustafa se précipite chez son père pour se justifier, seul et sans arme. Soliman tue son fils le , tout en le pleurant.

Intérieur du mausolée de Roxelane, mosquée Süleymaniye, Istanbul.

À sa mort le , Roxelane est enterrée dans un mausolée décoré en tuiles d'İznik décrivant le jardin du paradis, en hommage à sa nature joyeuse et souriante. Son mausolée est adjacent à celui de Soliman, structure séparée et plus sombre située dans la mosquée Süleymaniye.

Influence

Elle est aussi la conseillère de Soliman et semble avoir eu une influence considérable sur la politique étrangère de ce dernier. Deux de ses lettres au roi de Pologne Sigismond II Auguste ont ainsi été conservées, et, de son vivant, l'Empire ottoman conserve des relations généralement pacifiques avec cet État. Les ambassadeurs de l'Europe entière s'adressent à elle et lui font parvenir des cadeaux. Elle est en effet chargée de missions diplomatiques auprès des diplomates venus de pays chrétiens[8]. Certains historiens pensent aussi qu'elle est intervenue auprès de son époux pour contrôler le trafic d'esclaves organisé par les Criméens sur sa terre natale.

À côté des affaires politiques, Roxelane s'engage aussi dans un certain nombre de grands travaux, de La Mecque à Jérusalem, peut-être en s'inspirant du modèle des fondations caritatives créées par Zubaida, femme du calife Haroun ar-Rachid. Parmi ces premières fondations on trouve une mosquée, deux écoles coraniques, une fontaine et un hôpital pour femmes à côté du marché aux femmes esclaves de Constantinople[8].

Descendance

Roxelane a six enfants :

  • Cinq fils :
    • le premier, Mehmet (1521-1543), mourut jeune de maladie,
    • le second, Abdullah (1523-1526), mourut très jeune de maladie,
    • Selim (le futur Selim II) (1524-1574), le troisième, était son élu, car Roxelane pensait qu’il ne devrait pas assassiner ses frères, étant d'un naturel plutôt doux. Morte avant son époux, elle ne verra pas ses plans s'accomplir,
    • le quatrième, Bayezid, (1525-1561),
    • le cinquième, Cihangir (1531-1553), bien que brillant était atteint d’épilepsie ;
  • Une fille, Mihrimah (1522-1578), épouse du grand vizir Rüstem Pacha.

Bayezid et Selim s’affrontèrent contrairement à ce qu’avait supposé leur mère, ce qui amena Bayezid à se réfugier en Perse auprès du Chah. Selim parvient à le faire extrader pour l'assassiner rapidement.

Évocations artistiques

Roxelane a inspiré aussi bien des peintures qu'une symphonie de Joseph Haydn, un opéra de Denys Sichynsky, un ballet, des pièces de théâtre, des romans, principalement en ukrainien, mais aussi en anglais, français ou allemand.

Littérature

Fontenelle fait comparer par Roxelane et Agnès Sorel leurs stratégies sentimentales et maritales respectives[9] dans son Dialogue des morts publié en 1683.

Robert E. Howard se sert de Roxelane comme MacGuffin motivant le personnage de Sonya la Rousse dans sa nouvelle L'Ombre du Vautour, publiée dans The Magic Carpet Magazine en 1934[10].

Isaure de Saint Pierre a écrit la biographie de Roxelane, dans La Magnifique (Albin Michel, 2002)

Elle est le personnage principal d'une série de manga, Yume no Shizuku, Ougon no Torikago de Shogakukan, sortie en 2010.

Romans

  • Pavlo Zahrebelnyï, Roxelane, 1980.
  • Isaure de Saint-Pierre, La Magnifique, Albin Michel, 2002, 357 pages (ISBN 978-2226132529).
  • Vintila Corbul et Mircea Burada, Roxelane et Soliman, Olivier Orban, 1987, 431 pages (ISBN 2-85565-375-4).
  • Colin Falconer, Les nuits de Topkapi, 1999, Pocket.

Cinéma

La série turque Muhteşem Yüzyıl retrace la vie de Roxelane. Dans la série, Roxelane est interprétée par l'actrice turco-allemande Meriem Uzerli[11].

Hommages

Le bain turc Bains Sainte-Sophie Hurrem Sultan qu'elle a fondé est nommé en son honneur.

Bibliographie

Notes et références

  1. Du perse خرم - Khurram, « La Joyeuse ».
  2. Galina Yarmolenko, « Roxolana in Europe » dans Roxolana in European Literature, History and Culture, 2010, p. 49.
  3. J. de Hammer, Histoire de l'Empire ottoman depuis son origine jusqu’à nos jours, vol. 5, Paris, 1836, p. 487.
  4. Peirce 1993, p. 58.
  5. Peirce 1993, p. 61-62.
  6. Galina Yarmolenko, « Roxolana in Europe » dans Roxolana in European Literature, History and Culture, 2010, p. 25.
  7. Peirce 1993, p. 62.
  8. Jean-Michel Normand, « « Sexe et pouvoir » : Roxelane, l’esclave chrétienne devenue diplomate de l’Empire ottoman », sur Le Monde, (consulté le )
  9. Œuvres de Fontenelle : des Académies française, des Sciences, des Belles-Lettres, de Londres, de Nancy, de Berlin et de Rome, De Fontenelle (Bernard Le Bovier), publié par Jean-François Bastien, 1790, pages 180-185.
  10. Sonya y affirme que Roxelane est sa sœur.
  11. « Muhtesem Yüzyil », sur Internet movie database (consulté le )

Voir aussi

  • David Chataignier, « Roxelane on the French Tragic Stage (1561-1681) », dans Fortune and Fatality: Performing the Tragic in Early Modern France, éd. Desmond Hosford and Charles Wrightington (Newcastle-Upon-Tyne: Cambridge Scholars Publishing, 2008), p. 95-117.

Article connexe

Liens externes

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