Productivité marginale

La production d'un bien, ou d'un service, est le résultat de la combinaison d'autres biens (telles les matières premières et l'énergie) et de "services" rendus par le travail et des biens durables (machines, équipements, locaux, etc.), qualifiés d'intrants ou d'inputs en microéconomie, de facteurs de production en macroéconomie. On appelle productivité marginale d'un intrant (ou d'un facteur de production), l'augmentation de la quantité de production provoquée par l'augmentation d'une unité de cet intrant (ou de ce facteur de production), la quantité des autres intrants demeurant inchangée - condition toutes choses égales par ailleurs (ou ceteris paribus). Quand la relation entre intrants et produit est donnée par une fonction mathématique - une fonction de production -, alors la productivité marginale de l'intrant i est caractérisée par la dérivée partielle, par rapport à sa i-ème variable, de la fonction de production.

Une notion controversée

La notion de productivité marginale transpose au niveau de la production celle d'utilité marginale, relative à la consommation. Mais alors qu'on peut parler raisonnablement de l'augmentation de l'utilité, ou de la satisfaction, provoquée par la consommation supplémentaire d'un bien, il n'en est pas de même en ce qui concerne l'effet de l'augmentation d'un des ingrédients intervenant dans la production, en supposant les autres inchangés. Car, en règle générale - si ce n'est toujours - les biens produits sont le résultat de plusieurs matières premières ou "services". Le boulanger qui travaille "un peu plus" pour augmenter sa production de pain ne pourra le faire que s'il fait appel à plus de farine (et d'énergie, de levure, etc). Pour augmenter la production en faisant appel à un outil ou à une machine supplémentaire, il faudra faire appel à du travail et des matières premières supplémentaires. Si on l'exclut d'office, comme le suppose la définition même de la productivité marginale, alors celle ci ne peut qu'être nulle - la production ne peut augmenter si un seul intrant (input) le fait. La productivité marginale est nulle, sauf cas exceptionnel - tel un travailleur qui fournit "une heure de service supplémentaire" sans faire appel à rien d'autre de plus que son temps de travail.

Pour surmonter cette difficulté fondamentale, certains évoquent le cas où il y a un seul intrant (exemple des bergers qui gardent un troupeau de moutons de Alfred Marshall)[1]. D'autres, comme John Bates Clark, supposent que la forme des autres facteurs de production (en l'occurrence le capital) se modifie pour en quelque sorte s'adapter à la variation de l'un d'entre eux (le travail, en l'occurrence ), sans que leur quantité globale ne soit modifiée[2]. Clark parle de la "transmutation" du capital. George Stigler évoque la "métamorphose" de 10 pelles en 11 pelles "plus petites ou moins durables" quand on rajoute un travailleur supplémentaire à une équipe de 10 personnes qui creusent une tranchée[3]. Exemples qui n'arrivent guère à convaincre, ce qui n'empêche pas l'omniprésence, du moins dans les écrits théoriques, aussi bien en microéconomie qu'en macroéconomie, de la notion de productivité marginale. Ce qui peut s'expliquer, en partie, par les possibilités offertes au traitement mathématique par le calcul de dérivées partielles (notamment la recherche d'extremums). Une autre explication provient de la place essentielle que joue la productivité marginale dans la théorie de la répartition néoclassique.

La question de la pertinence de la notion de productivité marginale est étroitement associée à celle de la substituabilité des intrants, qui est donnée, par définition, par un rapport de productivité marginales - l'effet de l'augmentation de la quantité d'un intrant est "compensée" (production inchangée) par la diminution de la quantité d'un autre. Ce qui n'a aucun sens si les productivités marginales sont nulles.

Notes et références

  1. (en) Alfred Marshall, Principles of Economics, Mac Millan, (www.econlib.org/library/Marshall/marPApp.pdf), p 517
  2. (en) John Bates Clark, The Distribution of Wealth, New York, (www.econlib.org/library/Clark/clkDW.html), p 159
  3. (en) George Stigler, « Production and Distribution on the Short Run », Journal of Political Economy, no 47(3), (lire en ligne)

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