Adhésion de la Suisse à l'Union européenne

L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne est une des trois procédures (avec celles de la Norvège et de l'Islande) qui n'ont pas abouti. À la suite du rejet par référendum (vote) de l'accord sur l'EEE le , la Suisse gèle les négociations d'adhésion, sans retirer formellement sa candidature.

Adhésion de la Suisse à l'Union européenne

La Suisse en orange et l'Union européenne à 27 en vert.

Dépôt de candidature 20 mai 1992
Chapitre(s) ouvert(s) 0
Chapitre(s) clos 0
Décision candidature retirée en 2016

(sur demande de la Suisse)

Site web Direction des affaires européennes (DAE)
Relations avec l'Union européenne
avant l'adhésion
Accords Accord de libre-échange (1972)

Accords bilatéraux sectoriels

Informations
Superficie

En dehors des micro-États (Andorre, Monaco, Saint-Marin, le Vatican et le Liechtenstein), la Suisse est l'un des seuls pays d'Europe occidentale (avec la Norvège et l'Islande) à ne pas faire partie de l’Union européenne. Néanmoins, le pays continue son processus d'intégration à l'Union européenne comme partenaire par le biais d'accords bilatéraux.

Le , le Conseil national vote la motion n° 14.3219 de Lukas Reimann (UDC/SG) intitulée « Retirer la demande d'adhésion à l'UE et dire les choses telles qu'elles sont » à 152 voix pour et 31 contre[1] qui demande au Conseil fédéral de retirer officiellement la demande d'adhésion de la Suisse à l'Union européenne[2].

Le , le Conseil des États adopte une motion qui demande au Conseil fédéral de retirer formellement la demande d’adhésion de la Suisse à l’Union européenne[3].

Historique

Positionnement avant la candidature

Le Conseil fédéral annonce, le , son intention d'adhérer au processus d'intégration européenne. Le , le Conseil fédéral décide que l’option de l'adhésion à l’Union européenne était l'objectif final de la Suisse, l'adhésion à l’espace économique européen (EEE) devant constituer une étape vers celle-ci (l'adhésion à l'EEE permettant une transposition importante du contenu de l'acquis communautaire nécessaire à l’adhésion)[4].

Le Conseil fédéral considère que l'adhésion permettrait à la Suisse de participer à la définition du contenu de l'union politique créée par le traité de Maastricht, qui venait d'être signé[4]. Par ailleurs, le Conseil souhaite profiter du « convoi » formé par les candidats à l'adhésion que sont l'Autriche, la Suède et la Finlande[4].

Cependant, le , l'adhésion à l'EEE est rejetée par référendum obligatoire par une double majorité du peuple et des cantons[5]. En conséquence, dès le de l'année suivante, le Conseil fédéral propose un ensemble de programmes afin de compenser les désavantages économiques résultant de la non-participation à l'EEE. Parmi ceux-ci se trouve le programme (ps)[Quoi ?] visant à adapter la législation suisse dans les domaines économiques couvert par l'EEE, mais sur une base volontaire et sans lien avec les institutions de l'Union[5].

Candidature

Demande d'adhésion du 20 mai 1992.

La lettre de candidature est datée du [6]. La candidature suisse à la CEE est remise au gouvernement portugais, lequel est chargé à l'époque de la présidence du Conseil de l'Union européenne. La demande est de nouveau remise au ministre des Affaires étrangères portugais João de Deus Pinheiro[6].

« Le gouvernement suisse a l'honneur de demander, par la présente, l'adhésion de la Confédération suisse à la Communauté économique européenne en application de l'article 237 du traité instituant la Communauté économique européenne, c'est-à-dire l'ouverture des négociations à ce sujet. »

 René Felber et François Couchepin, demande officielle d'adhésion de la Suisse à l'Union européenne[6]

Rejet

La Suisse demande officiellement son adhésion en 1992, mais celle-ci est avortée à la suite du refus du peuple et des cantons suisses de ratifier par référendum obligatoire l'accord sur l'EEE le . Le vote négatif au référendum revient à désavouer la classe politique suisse sur la demande d'adhésion.

Un vote contraire aurait vraisemblablement pu amener la Suisse à engager les négociations d'adhésion et à la faire entrer dans l'Union après un nouveau référendum, en même temps que l'Autriche, la Finlande et la Suède en 1995.

Conséquence du rejet de l'adhésion : vers le bilatéralisme

Par la suite, le Conseil fédéral entreprend une série de négociations bilatérales avec l'Union européenne. Celles-ci aboutissent le par la conclusion des accords bilatéraux I et leur signature le .

En juin 2001, la Suisse et l'Union européenne décident d'ouvrir de nouvelles négociations bilatérales sur 10 thèmes. Les 7 premiers sont des questions qui ne pouvaient être traitées lors des précédentes négociations et pour lesquelles la Suisse et l'UE se sont engagées, dans l'acte final des accords bilatéraux I, à entamer des négociations. Les thèmes de la fiscalité de l'épargne et de la lutte contre la fraude correspondent à des demandes de l'UE, le thème des conventions de Schengen et de Dublin à une demande de la Suisse. Le , les accords bilatéraux II sont conclus et signés le 26 octobre. Ils marquent la poursuite de la voie bilatérale sur laquelle la Suisse s'est engagée. Elle consiste pour celle-ci à défendre ses intérêts et à régler les problèmes concrets rencontrés dans ses relations avec l'UE de manière pragmatique.

Les Accords bilatéraux II de 2004 entrent en vigueur à des dates différentes. Les accords suivants sont déjà en vigueur : produits agricoles transformés (), pensions (), fiscalité de l'épargne (), MEDIA et environnement (), statistique () ainsi que Schengen/Dublin (). La date d'entrée en vigueur de l'accord sur la lutte contre la fraude, elle, n'a pas encore été arrêtée.

Retrait de la candidature

Le , une motion du Conseiller national UDC Lukas Reimann est acceptée par le Conseil national (chambre basse) de l'Assemblée fédérale et demande un retrait de la demande d'adhésion de la Suisse. Le Conseil fédéral y est opposé[7]. Le , 27 des 46 membres du Conseil des États (chambre haute) approuvent le retrait de la demande d’adhésion à l'Union européenne[3].

Questions liées à l'adhésion suisse

Initiatives populaire

Deux questions se posent quant à l'effet d'une adhésion de la Suisse sur son système de démocratie directe : les conséquences de l'applicabilité du droit communautaire et les adaptations juridiques et institutionnelles éventuelles. En effet, du fait de la primauté du droit de l'Union, le droit national contraire ne serait plus applicable[8].

Neutralité

La question de la neutralité de l’État suisse est soulevée dans le cadre de la procédure d'adhésion. La Commission exprime sa position sur la neutralité des États candidats dans une position du concernant la demande d'adhésion de l'Autriche[9]. La Commission souhaite s'assurer que l'Autriche n'invoquera pas sa neutralité pour bloquer le processus décisionnel de la PESC[10].

Selon la Commission européenne, il incombe à l’État neutre de décider si l'adhésion à l'Union est compatible avec le statut de neutralité et, si nécessaire, de l'ajuster afin – notamment – d'adhérer aux objectifs de l'Union, donc celui d'une défense commune[10],[11].

Fonctionnement du Gouvernement et de l'Assemblée

Le Conseil fédéral juge, dans son rapport d'intégration de 1999, que l'adhésion nécessiterait d'augmenter le nombre de membres du gouvernement (Conseil fédéral) et certaines de ses compétences. Cela pourrait être compensé par l’augmentation des droits de participation du Parlement et des cantons[12].

Position quant à l'adhésion

Position des partis politiques

Le tableau suivant résume les positions des partis représentés au Conseil fédéral.

Parti Position Arguments principaux
   Parti socialiste Oui « Le PS Suisse […] est le seul parti gouvernemental à prôner l'ouverture rapide de négociations d'adhésion avec l'UE, afin que la Suisse cesse de dilapider sa souveraineté en reprenant de façon « autonome » les décisions de l'UE sans avoir été aucunement associée à leur élaboration[13]. »
   Parti démocrate-chrétien Non « Le PDC reconnaît le besoin de développer la voie bilatérale. Notamment dans le domaine de l'accès au marché européen, la Suisse a tout intérêt à développer les accords bilatéraux. […] L'adhésion à l'UE n’est pas à l'ordre du jour[14]. »
   Parti libéral-radical Non « Le système des accords bilatéraux est la meilleure solution pour notre pays. Le PLR souhaite approfondir cette voie en excluant toute politique isolationniste ou adhésion à l'UE[15]. »
   Union démocratique du centre Non « L'adhésion à l'UE n'est pas une option pour la Suisse. Elle serait diamétralement opposée aux piliers porteurs de la Confédération suisse, à savoir la souveraineté, la neutralité, la démocratie directe et la structure fédéraliste[16]. »

Votations concernant l'Espace économique européen

DateOrganismeSujetPourcentage
1999 (janvier)Center for Security Studies de l'EPFZ[17]Adhésion UE53 %
1999 (août)57 %
2000Center for Security Studies de l'EPFZ[17]Adhésion UE48 %
2000 (mai)Référendum sur les Accords Bilatéraux IAdoption Bilatérales67.2 %
2001 (mars)Initiative populaire « Oui à l'Europe ! »Adhésion UE76,8%
2001Center for Security Studies de l'EPFZ[17]Adhésion UE40 %
200240 %
200332 %
38 %
200433 %
200540 %
200632 %
200729 %
200827 %
200931 %
2010Center for Security Studies de l'EPFZ[18]Adhésion UE31 %
2011Adhésion UE19 %
2012 (mai)Sophia pour L'Hebdo[18]Adhésion UE16 %
2012 (novembre)Isopublic pour SonntagsZeitung[19]Adhésion UE11,5 %
Adhésion EEE32 %
2013Center for Security Studies de l'EPFZ[17]Adhésion UE17 %
201417 %
2014 (novembre)MIS Trend pour L'Hebdo[20]Adhésion UE17,3 %
2015Center for Security Studies de l'EPFZ[17]Adhésion UE21 %
201616 %
2016 (novembre)gfs.berne [21]Soutien aux Bilatérales81 %
Rejet des Bilatérales19 %
Adhésion EEE50 %
Adhésion UE10%
2017 (mars)gfs.berne pour InterPharma[22]Soutien aux Bilatérales75 %
Adhésion UE15 %
2017 (mai)Center for Security Studies de l'EPFZ[23]Adhésion UE15 %
2017 (novembre)gfs.berne pour SRF[21]Soutien aux Bilatérales60 %
Rejet des Bilatérales40 %
Adhésion EEE51%
Adhésion UE21 %
2018 (avril)gfs.berne pour NZZ am Sonntag[24]Soutien aux Bilatérales82 %
Rejet des Bilatérales18 %
Adhésion EEE45 %
Adhésion UE13 %
2018 (septembre)Sotomo pour SSR[25]Accord-cadre59 %
2018Center for Security Studies de l'EPFZ[26]Adhésion UE16 %
2019Center for Security Studies de l'EPFZ[26]Adhésion UE15 %
2019 (oct)Baromètre européen de Credit Suisse[27]Accord-cadre63 %
Adhésion EEE8 %
Adhésion UE7 %
2020Center for Security Studies de l'EPFZ[26]Adhésion UE13 %
2020 (nov)Baromètre européen de Credit Suisse[28]Accord-cadre53 %
Adhésion EEE9 %
Adhésion UE7 %
Titre Statut Domaine Date votation Oui
(votants et cantons)
Non
(votants et cantons)
Référendum sur l'adhésion de la Suisse à l'Espace économique européen Refusée Politique extérieure 49,7 % (8) 50,3 % (18)

Votations concernant l'Union européenne

Titre Date de dépôt Statut Domaine Comité Date votation Oui
(votants et cantons)
Non
(votants et cantons)
Initiative populaire « Négociations d'adhésion à l'UE : que le peuple décide ! » Refusée Politique extérieure Démocrates suisses et Lega 25,9 % (0) 74,1 % (26)
Initiative populaire « Oui à l'Europe ! » Refusée Politique extérieure ad hoc 23,2 (0) 76,8 (26)

Sources

Références

  1. Procès-verbal de vote Motion - 14.3219, Conseil national, consulté le 7 mars 2016
  2. Retrait définitif de la demande d'adhésion à l'UE demandé, Swissinfo, consulté le 7 mars 2016
  3. La Suisse vient de retirer sa demande d'adhésion à l'Europe ! Ouf..., sur le site Internet suisse humanosphere.info. La tête du serpent de mer UE est tranchée, sur le site Internet suisse 24heures.ch
  4. Conseil fédéral - 18 mai 1992, p. 2
  5. Rapport d'intégration 1999, p. 290
  6. Felber et Couchepin 1992
  7. « 14.3219 | Retirer la demande d'adhésion à l'UE et dire les choses telles qu'elles sont », sur parlament.ch (consulté le )
  8. Rapport d'intégration 1999, p. 330
  9. Conseil fédéral - 18 mai 1992, p. 20
  10. Conseil fédéral - 18 mai 1992, p. 21
  11. Rapport d'intégration 1999, p. 208
  12. Rapport d'intégration 1999, p. 342
  13. Programme 2009 - Parti socialiste
  14. Programme 2013 - Parti démocrate-chrétien
  15. Programme 2014 - Parti libéral-radical
  16. Programme 2008 - Union démocratique du centre
  17. (de)Studie «Sicherheit» 2017, p. 139, EPFZ, consulté le 6 décembre 2017
  18. Sylvain Besson, « Les Suisses sont plus européens, mais plus eurosceptiques que jamais », Le Temps, (consulté le )
  19. L'adhésion à l'Union européenne au plus bas dans les sondages, Le Nouvelliste, consulté le 6 décembre 2017
  20. Pour les Suisses, les accords avec l'UE doivent primer, La Tribune de Genève, consulté le 6 décembre 2016
  21. La voie bilatérale Suisse-UE perd du terrain, La Tribune de Genève, consulté le 6 décembre 2017
  22. (en) , lenews.ch, consulté le 6 décembre 2017
  23. Deux tiers des Suisses ne font pas confiance à l'UE, La Tribune de Genève, consulté le 6 décembre 2017
  24. UE/Suisse - Les Suisses approuvent le plan de Cassis pour l'UE, Le Matin, consulté le 30 avril 2018
  25. Les Suisses favorables à un accord-cadre avec l'Union européenne, RTS, consulté le 4 octobre 2018
  26. (de) Studie «Sicherheit», consulté le 19 février 2021
  27. Baromètre européen: majorité pour la poursuite des accords bilatéraux, credit-suisse.com, consulté le 19 février 2021
  28. Le soutien à l'accord-cadre avec l'UE faiblit, selon un sondage, RTS, consulté le 19 février 2021

Bibliographie

Compléments

Articles connexes

Liens externes

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