Diable de mer méditerranéen

Le Diable de mer méditerranéen (Mobula mobular), aussi appelé raie aigle géante, est un élasmobranche (poisson cartilagineux) de la famille des Myliobatidae ou Mobulidae (ITIS) selon les classifications.

Description

Spécimen en aquarium.

Mobula mobular a été décrite pour la première fois en 1788 par Bonaterre. Cette espèce est en voie d’extinction. C’est la seule espèce de Mobulidés qui vit en Méditerranée et son aire de distribution s’étend sur toute la zone intertropicale. Elle est considérée comme éteinte en Martinique. On la retrouve entre 0 m et 1115 m de profondeur. On n'observe pas de variation morphologique entre les différentes populations autour du monde. C’est la troisième plus grande espèce de Mobulidés après les raies Manta océaniques et récifales[2].

Morphologie

Mobula mobular a une bouche large et subterminale qui représente 11 à 13% de la largeur du disque avec des bandes dentaires supérieures et inférieures, les dents sont bien séparées les unes des autres. Les marges antérieures du disque sont droites à légèrement convexes, elle a des stigmates situés sur la face dorsale de la tête, de larges bandes dentaires, une épine caudale dentelée généralement présente derrière la nageoire dorsale et une nageoire dorsale avec une pointe blanche. Sa queue très longue est en forme de fouet, inférieure ou supérieure à la largeur du disque lorsqu'elle n'est pas endommagée[3]. Les Mobula mobular ont une couleur noire bleuâtre sur la face dorsale et la face ventrale est blanche avec parfois des points noirs[3]. Les mâles atteignent leur maturité sexuelle vers 200 à 220 cm de diamètre et les femelles vers 215 à 240 cm de diamètre[2]. Les individus adultes font en général 350 cm de diamètre[3].

Cette espèce a souvent été confondue avec les Manta birostris, mais ce sont des espèces différentes. Les M. Mobular ne dépassent pas 350 cm de diamètre à l’âge adulte alors que les M. Birostris peuvent atteindre jusque 5 m de diamètre.

Biologie

Régime alimentaire

Les diables de mer méditerranéens se nourrissent principalement de crustacés planctoniques et de petits bancs de poissons. Ils piègent les poissons et le plancton à l’aide de leurs plaques branchiales. Ils mangent principalement des crevettes euphausiacées (Meganyctiphanes norvegica) et de petits poissons mésopélagiques et clupéides[4].

Reproduction et espérance de vie

Une fois la maturité sexuelle atteinte, les Mobula mobular se reproduisent via une reproduction vivipare aplacentaire. La gestation dure 12 mois et il n'y a en général qu'un seul petit, mais il peut arriver qu’il y en ait deux. À la naissance le jeune individu à une taille de 90 à 160 cm de diamètre. Le cycle de reproduction est de 2 à 3 ans car il y a des périodes de repos entre les gestations. La maturité sexuelle des femelles est souvent atteinte vers l’âge de 5 à 6 ans et elles peuvent vivre jusque 20 ans. Ce qui fait que la durée d'une génération est de plus ou moins de 12,8 ans[2].

Comportement

La Mobula mobular peut atteindre des profondeurs de 1115 m[5].

Habitat et répartition

La raie aigle géante est une espèce pélagique, mais on la retrouve à la fois sur les côtes et au large. Elle vit dans les mers chaudes, c’est pourquoi on la retrouve dans toute la zone intertropicale, et c’est la seule espèce de Mobulidés que l'on retrouve en mer Méditerranée.

Aire de répartition Mobula mobular.

Les individus vivent en général seul mais peuvent se regrouper pour la chasse ou la reproduction. Ils ne restent pas toute l’année au même endroit et peuvent se déplacer sur plus de 1800 km par an à raison de 63 km par jour en fonction des disponibilités en nourriture et des tendances saisonnières. Elle est considérée comme éteinte en Martinique[2].

Menaces et conservation

Le nombre de Mobula mobular est en décroissance dans le monde. Il n’y a pas d’estimation de la population complète de l’espèce dans le monde mais des relevés aériens ont fait une estimation de 12700 individus dans le nord de la Méditerranée en 2014. Les populations de Mobular ne semblent pas constantes dans le temps et sont dépendantes de la disponibilité en nourriture et de la pêche dans les différents secteurs où elles se situent.

Dans la région de l’Inde et du Sri Lanka, l’estimation des populations via les quantités d’individus pêchés tendent à donner une diminution de 50% de la taille des populations sur les 10 dernières années. Le nombre d’individus pêchés a diminué par deux alors que le nombre de pêche de cette espèce a été doublé. En Asie du Sud-Est, le constat est le même, avec une décroissance des populations encore plus marquée, avec des estimations de réduction de 95% dans certaines contrées (Tanjung Luar). En effet, dans ces endroits, des pêches dirigées sur ces espèces sont réalisées[2].

Les Mobula mobular sont victimes de la pêche. Elles sont souvent prises accidentellement dans les pêcheries industrielles ou artisanales. Elles sont capturées dans une grande partie des systèmes de pêches qui existent. Dans 13 pêcheries de 12 pays, elles sont ciblées, ce qui fait qu’on a des milliers de raies vendues chaque année. Cependant, elles sont souvent destinées aux marchés locaux mais aussi à l’exportation. Elles sont, aussi, souvent attrapées involontairement dans les pêcheries de thons mais sont gardées pour leur grande valeur. Si elles sont renvoyées à la mer, elles sont souvent blessées ou déjà mortes.

Cette espèce a été inscrite à la Convention pour la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS) et à la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES). Dans certains pays comme la Nouvelle-Zélande, l’Australie on observe une diminution de la pression sur les populations grâce à des gestions de pêche plus rigoureuses[2]. En mer Méditerranée, les prises de Mobula mobular se font principalement dans la mer de Levantine au large de Gaza et par les Thoniers sarde. Les prises étaient dans les environs de 170 individus capturés par an entre 2013 et 2016 mais les estimations sont de plus ou moins 500 individus touchés par la pêche par an ces dernières années[2]. L'association française Ailerons, œuvrant à la protection des raies et des requins de Méditerranée, mène le projet Diable de mer depuis 2009[6]. Il s'agit d'un projet de recensement des observations des diables de mer méditerranéens basé sur la science participative. Les observations sont récupérées via une adresse mail prévue à cet effet et stockées dans une base de données. L'objectif est la mise à disposition de ces données aux scientifiques qui souhaiteraient travailler sur ce modèle biologique et en connaître un peu plus sur cet animal encore largement méconnu. Aussi, grâce à l'association, cet animal très rare a pu être observé en août 2014 au port de Fontvieille à Monaco[7].

Depuis 2012, l'association Corsica - Groupe de Recherche sur les Requins de Méditerranée[8] s'est associée au projet Diable de mer. Elle a, parmi ses missions, le recensement de toutes les observations du "Diavulu di mari" qui s'effectuent autour de la Corse.

Le 23 décembre 2020, un spécimen de 150 kg et de 3,8 m d'envergure s'est échoué sur la plage de Marseillan (Hérault, France). Les efforts du Service Départemental d'Incendie et de Secours ont permis de lui faire retrouver la pleine mer[9].

Culture

Les Mobulidés sont largement utilisés pour leur viande, leur peau, leur huile de foie et leurs plaques branchiales[10]. Les plaques branchiales atteignent des prix élevés en Asie et sont utilisées pour la médecine chinoise. La viande de Mobulidés est souvent utilisée pour la nourriture et les appâts ou attractifs pour les requins, et la peau est parfois utilisée pour les produits en cuir (chaussures, portefeuilles et manches de couteaux). Les Mobulidés, y compris le diable de mer méditerranéen, sont populaires dans les aquariums publiques, par exemple dans certains pays du Golfe aux États-Unis, en Europe et au Japon[2].

Voir aussi

Références taxinomiques

Liens externes

Références

  1. ITIS, consulté le 8 juin 2015
  2. Sonja Fordham (Shark Advocates International) et Rima Jabado (Gulf Elasmo Project), « IUCN Red List of Threatened Species: Mobula mobular », sur IUCN Red List of Threatened Species, (DOI 10.2305/iucn.uk.2020-3.rlts.t110847130a176550858.en, consulté le )
  3. P. R. Last, Rays of the world, (ISBN 978-0-643-10914-8 et 0-643-10914-5, OCLC 967717812, lire en ligne)
  4. (en) « Devil fish », dans Wikipedia, (lire en ligne)
  5. (en) S. Weigmann, « Annotated checklist of the living sharks, batoids and chimaeras (Chondrichthyes) of the world, with a focus on biogeographical diversity: annotated global checklist of chondrichthyes », Journal of Fish Biology, vol. 88, no 3, 2016-03-xx, p. 837–1037 (DOI 10.1111/jfb.12874, lire en ligne, consulté le )
  6. « Projet Diable de mer », sur asso-ailerons.fr (consulté le )
  7. Jean-Luc Goudet, « Un diable de mer – une raie très rare – aperçu à Monaco », sur Futura Sciences, (consulté le ).
  8. - Groupe de Recherche sur les Requins de Méditerranée
  9. Lydie I.E. Couturier, Michael B. Bennett et Anthony J. Richardson, « Mystery of giant rays off the Gaza strip solved », Oryx, vol. 47, no 4, , p. 480–480 (ISSN 0030-6053 et 1365-3008, DOI 10.1017/s0030605313000793, lire en ligne, consulté le )
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