Martinus von Biberach

Maître Martinus de Biberach (mort en 1498) était un clerc allemand du XVe siècle de Heilbronn, dans le Saint-Empire. Son nom se trouve après un quatrain, retrouvé sur la couverture d'un manuscrit (haec magister Martinus in Bibrach. 1498)[1], mais le quatrain est certainement bien antérieur à l'année indiquée. On ne sait rien de la vie de ce scripteur, et ce qui a été désigné plus tard fautivement comme son épitaphe[2], n'est qu'un prologue versifié, devenu familier dans le monde chrétien et qui est fréquemment cité ou détourné dans la littérature allemande (cf. Bertolt Brecht, Der Radwechsel) :

« Ich leb und waiß nit wie lang,
ich stirb und waiß nit wann,
ich far und waiß nit wahin,
mich wundert das ich [so] frölich bin. »
Je vis, et je ne sais pas pour combien de temps,
Je mourrai et je ne sais pas quand,
Je m'en vais, et je ne sais pas où,
Je m'étonne d'être [si] joyeux.
Croquis (XVIIIe siècle) du dicton de Martinus, dans l'ancienne abbaye franciscaine de Heilbronn.

La paternité de Martinus de Biberach est fréquemment remise en cause ; ainsi Konrad Bollstatter, dont le recueil de proverbes (1468-69) est la plus ancienne source[3], attribue ces vers à Walther von der Vogelweide. On en retrouve des variantes dans divers manuscrits de la fin du XVe siècle[4],[5]. Ils ont aussi été désignés comme la « devise » de l'empereur Maximilien Ier. Sur l'un des murs historiés du château de Tratzberg, on peut lire ce graffiti calligraphié à la craie : « Leb, waiß nit wie lang und stürb, waiß nit wann mueß faren, waiß nit wohin mich wundert, das ich so frelich bin.[6] »

D'après une chronique, ce texte est un extrait d'un poème relevé sur un tableau de l'abbaye franciscaine de Heilbronn, détruite en 1688: « Ich leb und weiß nicht wie lang / ich sterb und weiß nicht wan / ich fahr und weiß nicht wahin / mich nimmt wunder daß ich so frelich bin / wan ich bedenk den dot und di ewige pein / so mecht ich nicht so frelich sein. »

Martin Luther connaissait ce dicton et le citait comme le « psaume des impies » (Reim der Gottlosen), car selon lui la situation des Chrétiens était exactement opposée : eux savent d'où ils viennent et où ils vont, à savoir de Dieu, mais redoutent néanmoins la mort car ils savent qu'en tant que « fils d'Adam », ils doivent mourir dans la souffrance. Luther a développé cette idée dans l'un de ses sermons du dimanche, Judica, consacré à l'interprétation de Jn 8 46-59, et où il propose sa version « rectifiée » : Ich lebe, so lang Gott will, / ich sterbe, wann und wie Gott will, / ich fahr und weiß gewiß, wohin, / mich wundert, daß ich traurig bin![7]

Notes

  1. Cf. Franz Joseph Mone, « Denksprüche », Anzeiger für Kunde der teutschen Vorzeit, 4e série, no 21, , p. 206-208, et ici Sp. 207 (lire en ligne) version numérisée par la bibliothèque universitaire régionale de Düsseldorf
  2. Cf. Joseph von Radowitz, Die Devisen und Motto des späteren Mittelalters : ein Beitrag zur Spruchpoesie, Stuttgart et Tübingen, Cotta’sche Verlagsbuchhandlung, (lire en ligne), p. 86.
  3. D'après Robert Priebsch, Deutsche Handschriften in England, vol. 2 : Das British Museum, Erlangen, Fr. Junge, (lire en ligne) .
  4. D'après « Mc 32 - Grammatische Sammelhandschrift (Leipzig, 1491, 1494) 125r », sur Bibliothèque Universitaire de Tübingen.
  5. Bibliotheque d’État d'Augsbourg, Cim. 31, Bl. 1-46 [früher 4° Cod. H. 27] Bl. 14
  6. D'après Erich Egg et Wolfgang Pfaundler, Kaiser Maximilian I. und Tirol, Innsbruck, , p. 136 et suiv.
  7. D'après Kurt Aland, Martin Luther Gesammelte Werke (Weimarer Ausgabe), vol. 8, Vandenhoek & Ruprecht, p. 153.
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