Marina Abramović

Marina Abramović (en serbe en écriture cyrillique : Марина Абрамовић), née le à Belgrade, est une artiste serbe qui pratique la performance[1]. Elle fait partie du courant artistique de l'art corporel.

Pour les articles homonymes, voir Abramović.

Biographie

Marina Abramović naît à Belgrade. Son père, Vojin Abramović, fait partie de la garde d'élite du maréchal Tito. Sa mère, Danica, est à la tête d'un institut chargé des monuments historiques et de l'acquisition d'oeuvres pour les bâtiments public, et dirige le musée de l'Art et de la Révolution[2]. Sa grand-mère maternelle, très pieuse, s'occupe d'elle jusqu'à ses 6 ans. Elle est ensuite de nouveau confiée à ses parents à la naissance de son frère Velimir, entre une mère stricte et un père absent.

Entre 1965 et 1970, elle étudie à l'académie des beaux-arts de Belgrade. Elle poursuit ses études à Zagreb dans l'atelier du peintre Krsto Hegedušić. Elle retourne à Belgrade en 1973 et elle donne des cours à l'Académie des arts de Novi Sad jusqu'en 1975.

En 1973, elle effectue ses premières performances avec des objets dangereux ainsi que des médicaments, afin de se mettre à l'épreuve. Elle participe en 1975 à la Biennale de Paris, débute sa collaboration avec Ulay (son compagnon entre 1976 et 1988[3]) et effectue des recherches sur les cultures archaïques et les principes dualistes lors de multiples voyages. En 1980, elle écrit avec Ulay Relation Work and detour.

Livre d'artiste, 1978, musée CODA.

Entre 1982 et 1985, elle participe à la documenta 7 à Cassel et la Biennale de São Paulo, Brésil. En 1988, elle met fin au travail avec Ulay après avoir fait une ultime collaboration, The Great Wall Walk, en Chine. En 1992, elle participe à documenta 9 à Cassel. En 1989, elle tente de passer de l'état de conscience individuelle à l'état de conscience collective à l'aide d'installations diverses composées de bois, de cristaux et de pierre. En 1990-1991, elle est professeur invitée à l'école des beaux-arts de Berlin et à l'Académie des beaux-arts de Paris. En 1992, elle a une chaire à l'Académie des beaux-arts de Hambourg. Entre 1992 et 1995, elle enseigne à l'École supérieure des beaux-arts de Hambourg. Elle gagne le Lion d'or de la meilleure installation à la Biennale de Venise en 1997 et commence à enseigner à l'École supérieure des beaux-arts de Brunswick et continue jusqu'en 2004.

En 2005, Marina Abramović présente Balkan Erotic à la Fondation Pirelli de Milan et dans la galerie Seán Kelly à New York. Au cours de la même année, elle est honorée par le musée Solomon R. Guggenheim de New York, où elle réalise la série de performances Seven Easy Pieces (en). En 2010, le MoMA de New York consacre à l'artiste la rétrospective The Artist Is Present. L'année suivante, le Garage Center for Contemporary Culture de Moscou héberge une rétrospective de son travail.

En 2011, Marina Abramović participe comme protagoniste à la pièce de Bob Wilson The Life and Death of Marina Abramović.

Le documentaire Marina Abramović: The Artist is Présent est présenté pour la première fois en 2012 dans le cadre du Sundance Film Festival.

Vie personnelle

Marina Abramović vit et travaille à New York.

En octobre 1971, à 25 ans, elle se marie avec l'artiste Neša Paripović (en), rencontré en 1965 à l'académie des beaux-arts de Belgrade[2] ; elle le quitte en 1976 pour l'artiste Ulay[3]. Elle est ensuite mariée pendant onze ans (jusqu'en 2010) avec l'artiste Paolo Canevari (en), âgé de 17 ans de moins qu'elle. Elle partage enfin une maison à Manhattan avec Riccardo Tisci, directeur artistique chez Givenchy. Elle vit depuis seule dans un appartement de Tribeca[3].

Œuvres

Marina Abramović, Seven Easy Pieces, New York, 2005.

Marina Abramović fait partie du courant artistique de l'art corporel : elle s'est mise, à diverses reprises, en danger. Durant l'exécution d'une de ses œuvres, elle s'est même trouvée presque morte d'asphyxie sous un rideau de flammes.

Cependant, le but de cette artiste n'est pas le sensationnel. Ses œuvres sont des séries d'identification à des expériences et de redéfinition des limites : du contrôle de son propre corps, du rapport à un interprète, de l'art et par prolongation, des codes qui régissent la société. On peut donc dire que son projet artistique a l'ambitieux et profond dessein de rendre les personnes plus libres.

Selon Abramović, la performance est la présence de l'artiste avec sa propre structure mentale et sa propre idée à un certain moment. Elle définit la performance strictement différente du théâtre. Il y a un roleplay dans le théâtre, et vous pouvez jouer quelqu'un d'autre dans le théâtre. La performance est réelle et elle y voit un art unique et éphémère. Son but est de créer des performances éclairantes pour le spectateur, ce qui signifie des performances qui changent les choses et éclairent les spectateurs. L'une des choses les plus importantes qu'elle vise dans son art pour le spectateur d'être là, mentalement et physiquement, au cours de la performance et d'obtenir ce qu'ils peuvent.[4].

Plusieurs de ses œuvres ont été brutales et perturbantes. Certaines d'entre elles ont atteint leur accomplissement final seulement quand un membre de l'assistance est intervenu. En cherchant le point auquel l'assistance atteint les limites de sa résistance à la douleur ou plutôt au témoignage de la douleur, l'artiste crée un point de rupture, accentuant radicalement le propre sens du moment du spectateur. Elle dit à ce propos : « Je suis intéressée par l’art qui dérange et qui pousse la représentation du danger. Et puis, l’observation du public doit être dans l’ici et maintenant. Garder l’attention sur le danger, c’est se mettre au centre de l’instant présent.[5] »

Marina Abramović est soutenue à Belgrade dès ses premières œuvres qui figurent une rébellion contre son éducation stricte et aussi contre la culture répressive de la Yougoslavie d'après-guerre de Tito. Comme tout son travail, ces premières pièces sont des rituels de purification conçus pour sa propre libération[6].

The Artist is Present, MoMA, mai 2010.

En 1975, l'artiste rencontre Ulay. Pendant leur douze années de vie commune, ils collaborent et produisent des œuvres. Leurs pièces explorent les rapports de pouvoir et de dépendance dans la relation triangulaire avec le public.

Dans Relation in Time, en 1977, leurs bouches sont collées l'une à l'autre et des microphones sont attachés avec du ruban adhésif près de leurs gorges. Marina Abramović et Ulay respirent tour à tour l'air des poumons de l'un l'autre, jusqu'au point où ils n'échangent plus que de l'anhydride carbonique, et ce presque jusqu'au point de suffocation. Dans une autre œuvre de 1980, Rest Energy, ils tendent un arc chargé d'une flèche dirigé sur le cœur de Marina : seul le poids de leurs corps maintenant la tension ; des microphones enregistraient les rapides accélérations de leurs battements de cœur.

Entre 1981 et 1987, Marina Abramović et Ulay effectuent une série d'actions autour du monde intitulée Nightsea Crossing. Ils s'y installent comme des tableaux vivants dans les musées. Leur dernier travail ensemble (La Grande Promenade de mur de 1988) nécessite que chacun marche 2 000 kilomètres le long de la Grande Muraille, démarrant aux extrémités opposées et se réunissant au milieu. À l'origine de ce projet, cette marche l'un vers l'autre symbolisait les retrouvailles d'un couple amoureux. Mais huit ans plus tard (le temps nécessaire pour obtenir les autorisations du gouvernement chinois) et leur relation s'acheminant vers une rupture, leurs retrouvailles au milieu du mur donnent lieu à une longue accolade, avant qu'ils ne s'éloignent l'un de l'autre. En 2010, ils se retrouvent pendant une minute l'un en face de l'autre durant une performance de Marina Abramović au Museum of Modern Art (MoMA)[7].

Marina Abramović est autoproclamée « grand-mère de l'art performance[8] ». De cette génération d'artistes du début des années 1970 qui a choisi la performance comme moyen d'expression, elle est probablement l’une des plus actives - et celle qui a rencontré le plus de succès. En 1997, elle montre une installation et une performance nommée Balkan Baroque à la Biennale de Venise, où elle s'enferme durant quatre jours avec George Sorros, le grand prestidigitateur, pour nettoyer un tas d’os sanguinolents alors qu'une vidéo projetée sur le mur de la pièce évoque l’histoire des guerres de Yougoslavie[9]. Pour cette performance, elle reçoit la récompense du Lion d'Or du meilleur pavillon.

En 2011, elle cocrée la pièce de théâtre autobiographique The Life and Death of Marina Abramovic sous la direction de Bob Wilson au Manchester International Festival. En 2013, elle participe à la création du Boléro de Ravel pour l’Opéra de Paris aux côtés de Sidi Larbi Cherkaoui et Damien Jalet, et en signe la scénographie[10]. En 2013, elle collabore avec la chanteuse Lady Gaga pour une expérience sensorielle visant à renforcer la sensibilité physique et mentale de l'artiste[11]. Dans un entretien publié en , elle déclare à ce sujet « Lady Gaga a 43 millions d’admirateurs. Aucun artiste ou plasticien n’a une telle audience. C’est une autre manière de propager l’art »[12]. Elle inspire également le chanteur Jay-Z, et apparaît à ses côtés dans la performance artistique vidéo Picasso Baby en 2013.

Elle a été accusée de satanisme, notamment pour sa performance Devils Heaven [Le Paradis du Diable], lors d'une soirée caritative au profit du Robert Wilson's Watermill Center, le [13].

Depuis les années 1990, ses dîners Spirit Cooking évoquent des repas cannibales, comme en , où une poupée en gâteau baignant dans une sauce rouge est mangée par les convives[14].

Voir aussi

Publications

  • Balkan Epic, de Marina Abramović, éd. Skira, 2006
  • L'Art du XXe siècle, éd. Taschen, 2007
  • Walk Through Walls : A Memoir, de Marina Abramović, 2016
  • Marina Abramovic (trad. Odile Demange), Traverser les murs : Mémoires [« Walk through walls »], Paris, Fayard, , 444 p. (ISBN 978-2-213-70112-7)

Bibliographie sur Marina Abramović

  • Helena Reckitt et Peggy Phelan, Art and feminism, Phaidon, 2001[15]

Filmographie

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. (en) Marina Abramović sur Artnet.com.
  2. Abramović, Marina, (1946- ...) et Demange, Odile, (1955- ...), Traverser les murs : mémoires (ISBN 978-2-213-70112-7 et 2-213-70112-1, OCLC 1006636967, lire en ligne)
  3. Marion Vignal, « La reine rouge : Marina Abramovic, gourou et diva de l'art contemporain », Vanity Fair no 44, mars 2017, pp. 116-123 et 168-169 [présentation en ligne].
  4. (tr + en) KhanAcademyTurkce, « Marina Abramović: Performans Sanatı Nedir? (Sanat Tarihi / Global Çağdaş Sanat) » [vidéo], sur YouTube, (consulté le )
  5. « Marina Abramović, définition d'un art nouveau », sur Maze Magazine, (consulté le )
  6. Fabienne Dumont, « Marina Abramović », AWARE : Archives of Women Artists, Research and Exhibitions, (lire en ligne)
  7. (tr) « Marina Abramović e Ulay - MoMA 2010 » [vidéo], YouTube, 3 min 37 s.
  8. Sixtine Léon-Dufour, « Marina Abramovic sans limites », sur Madame Figaro,
  9. Jérémy Felkowski, « Marina Abramovic, l'art à corps et à cri », sur Le Zéphyr, (consulté le )
  10. Marina Abramović enflamme le Boléro - Philippe Noisette, Paris Match, 4 mai 2013.
  11. Lady Gaga nue pour Marina Abramovic - Anne-Sophie Leurquin, Le Soir, 8 août 2013
  12. « Marina Abramović – Guerrière de l’art contemporain », Workmag.me,
  13. (en) « Marina Abramovic on Right-Wing Attacks: “It’s Absolutely Outrageous and Ridiculous” » - Andrew Russeth, ARTnews, 11 avril 2016.
  14. (en-US) « Marina Abramović Dinner Party Mistaken for Satanic Ritual », sur artnet News, (consulté le )
  15. (en) Reckitt, Helena. et Phelan, Peggy., Art and feminism, Londres, Phaidon, , 304 p. (ISBN 0-7148-3529-3, 9780714835297 et 9780714863917, OCLC 48098625, lire en ligne)
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