Marguerite Delamarre

Marguerite Delamarre est une religieuse française née le [1] et morte après 1790. Elle est connue pour le procès qu'elle a vainement intenté en 1758 pour être libérée de ses vœux et avoir inspiré la trame de La Religieuse de Denis Diderot.

Biographie

Née en 1717, elle est la fille de Claude Delamarre, orfèvre et marchand joailler et de Marguerite née Roussin, fille d'un receveur de l'Hôtel-Dieu de Paris[1]. Elle est placée en nourrice à Auteuil puis entre en tant que pensionnaire à l'abbaye royale de Longchamp, régi par l'ordre des Pauvres Dames, à l'âge de 3 ans. Neuf mois plus tard, ses parents la changent de couvent et la font entrer au couvent des Ursulines à Chartres le [1].

En 1724, elle revient à Paris et entre chez les Dames de la Visitation rue du Bac, une institution très cotée de la capitale, et y reste 7 ans[1]. Elle est sortie du couvent en 1732 pour être fiancée mais le mariage est finalement annulé. Plusieurs versions existent : la première parle d'une rupture liée à la conviction religieuse très forte de Marguerite Delamarre, la seconde dit qu'elle aurait commis le « péché de la chair » avant son mariage[1]. Elle repart donc au couvent, chez les Bénédictines du Val-de-Grâce en vue de prononcer ses vœux mais la mère supérieure de l'abbaye, Mme Gabrielle du Quesnay de Saint-Paul refuse, du fait de l'absence de vocation de Marguerite Delamarre[1]. Finalement, elle entre comme postulante à l'abbaye royale de Longchamp le , prend l'habit le suivant et fait profession de foi le [2].

L'abbaye réfléchissant à élever des vers à soie, le cardinal André Hercule de Fleury envoie Jacques Vaucanson rencontrer les religieuses pour en discuter. Là, il rencontre Marguerte Delamarre qui lui fait part de son envie de protester contre ses vœux[3]. Sous l'instance de la mère supérieure du couvent, il contacte Mme Delamarre, la mère de Marguerite, pour lui demander de verser une pension convenable à sa fille pour la faire rester au couvent. Cette dernière refuse, considérant que sa fille a pris le voile de son plein gré[3]. Le , un appel comme d'abus est déposé devant le tribunal ecclésiastique (Officialité) présidé par Nicolas Renault[2],[3]. Dedans, elle clame être la fille illégitime de la Duchesse de Berry, que sa mère a fait annuler son mariage pour de fausses raisons et accuse ses parents d'être responsables de la mort de ses frères en bas-âge[2]. Fille aînée du Régent, la duchesse de Berry scandalisait la Cour par sa sexualité débridée et ses grossesses illégitimes. En mai 1717, le jeune Arouet fut embastillé pour avoir brocardé cette jeune veuve devant un informateur de police, affirmant qu'elle s'était retirée au château de La Muette en attendant d'accoucher des oeuvres de son père.

Le procès est pris en charge par le Parlement de Paris[2]. En 1753, il est décidé de procéder à l'interrogatoire de Marguerite Delamarre, qui a finalement lieu du 5 au . Finalement, le tribunal rejette sa demande, la considérant comme non-recevable et le , elle reçoit l'ordre de retourner sous huit jours au couvent[3]. Le , elle fait appel de la décision du tribunal[3]. Un arrêté du confirme la décision de l'Officialité et oblige la sœur Delamarre à réintégrer la clôture[4],[2]. L'année suivante, elle est probablement transférée au couvent de Saint-Eutrope près d'Arpajon[4].

Peu de choses sont connues sur sa vie après. Elle est toujours cloîtrée à l'abbaye royale de Longchamp lorsqu'en , la loi générale sur la dissolution des congrégations religieuses entre en vigueur et oblige l'abbaye à fermer ses portes[5]. Elle fait partie des sœurs signataires d'une déclaration collective par laquelle les religieuses affirment leur envie de rester vivre dans leur monastère[5].

On retrouve sa trace dans une déclaration de l'abbesse de Longchamp, affirmant que sœur Marguerite a été transférée au couvent de Meaux en Brie en Normandie puis à l'abbaye royale de Vernon[4]. On perd sa trace après cette date[4].

Liens avec La Religieuse de Diderot

Le trame du roman de Denis Diderot (son contemporain), La Religieuse s'inspire de son procès.

Notes et références

  1. Pierre de Gorsse, p. 101-102.
  2. Mita Choudhury, p. 105.
  3. Pierre de Gorsse, p. 103-104
  4. Annie Flandreau, p. 411-419
  5. Pierre de Gorsse, p. 105.

Bibliographie

 : Sources utilisées pour la rédaction de cet article.

  • Annie Flandreau, « Du nouveau sur Marguerite Delamarre et La Religieuse de Diderot », Dix-Huitième siècle, no 24, , p. 411-419 (lire en ligne)
  • Pierre de Gorsse, « La Procès de Marguerite Delamarre », Historia, no 238,
  • Jean-Olivier Majastre (dir.), Christian Vogels, Du canular dans l'art et la littérature, L'Harmattan, (lire en ligne), « Marguerite Delamarre, la véritable religieuse », p. 190-195
  • Briquet de Mercy, Mémoire pour les héritiers et la dame veuve du sieur Claude de La Marre..., Paris, imp. de la veuve Paulus-Du-Mesnil, (OCLC 467098219)
  • Georges May, Diderot et La Religieuse, Paris, Presses Universitaires de France, , « Inventaire des pièces [du procès] déposées à la Bibliothèque nationale ».
  • (en) Mita Choudhury, Convents and Nuns in Eighteenth-century : French Politics and Culture, Cornell University Press, , 234 p. (ISBN 978-0-8014-4110-3, lire en ligne), chap. 4 (« 9780801441103 »)
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