Les Vêpres siciliennes

Les Vêpres siciliennes est un grand opéra en cinq actes de Giuseppe Verdi, sur un livret d'Eugène Scribe et Charles Duveyrier créé le à l'Opéra de Paris salle Le Peletier.

Cet article concerne l'opéra. Pour l'événement historique, voir Vêpres siciliennes.

Pour les articles homonymes, voir Vêpres (homonymie).

Les Vêpres siciliennes
I vespri siciliani
I vespri siciliani par Francesco Hayez (1791-1882)
Galleria Nazionale d'Arte Moderna (Milan)
Genre Grand opéra
Nbre d'actes 5
Musique Giuseppe Verdi
Livret Eugène Scribe, Charles Duveyrier
Langue
originale
Français
Durée (approx.) 190 minutes
Création
Opéra de Paris France

Versions successives

Version italienne :

Personnages

  • Hélène (Elena), soprano
  • Henri (Arrigo), ténor
  • Guy de Montfort (Guido di Monforte), baryton
  • Jean Procida (Giovanni da Procida), basse
  • Le sire de Béthune, basse
  • Le comte de Vaudemont, basse
  • Ninette (Ninetta), contralto
  • Daniéli (Danieli), ténor
  • Thibault (Tebaldo), ténor
  • Robert (Roberto), basse
  • Mainfroid (Manfredo), ténor
  • Soldats, peuple (chœur)

Airs

  • Sicilienne « Merci, jeunes amies » (« Merce, dilette amiche ») - Elena (acte V)

Genèse

Dans les années 1830, se développe en France sous l'impulsion de compositeurs tels que Giacomo Meyerbeer et Jacques Fromental Halévy le genre du « grand opéra » : œuvres en quatre ou cinq actes, avec distribution et orchestre de grande envergure, ballet, décors et effets de scène spectaculaires, basées sur des intrigues d'origine historique.

En 1852, un contrat est signé entre Verdi, qui vient de remporter un immense succès en Italie avec son Rigoletto d'après Victor Hugo[1], et l'Opéra de Paris, alors même que la mode est un peu passée. C'est le premier opéra en français de Verdi, si l'on ne tient en compte Jérusalem, qui est une version fortement remaniée des Lombards. Le livret, confié au plus grand dramaturge français de son époque, Eugène Scribe, ne plaît pas à Verdi qui met du temps à le mettre en musique, Scribe refusant toute modification[2].

Les répétitions sont également marquées par l'absence de la chanteuse principale, Sophie Cruvelli, plus occupée par sa vie privée que par sa carrière[3]. Verdi écrit à son collaborateur Francesco Maria Piave : « La Cruvelli s'est enfuie !!! Où ? Le diable seul le sait. Au début, la nouvelle m'a quelque peu ennuyé mais maintenant je ris sous cape. […] Cette disparition me donne le droit de résilier mon contrat et je n'ai pas laissé échapper l'occasion ; je l'ai officiellement demandé[4]. » Bien que se plaignant de la mauvaise volonté de Scribe et de l'ambiance délétère des répétitions[5], Verdi essuie toutefois un refus de la part de François-Louis Crosnier, alors administrateur du Théâtre impérial de l'Opéra, et continue son travail.

L'opéra est créé le suivant, salle Le Peletier, en présence de Napoléon III, de l'impératrice Eugénie et du duc de Porto[6].

Distribution de la création

Affiche pour la première des Vêpres au Théâtre impérial de l'Opéra

Argument

L'action, inspirée d'un évènement historique, se situe à Palerme en , durant les fêtes de Pâques.

Acte I

La duchesse Hélène, dont le frère a été condamné à mort, est contrainte par un soldat français à chanter. Celle-ci, avec son chant excite la haine des Siciliens contre les Français. Montfort, le gouverneur, intervient et calme tout le monde. Arrive Arrigo, qui vient juste d'être gracié. Ignorant que Montfort est présent, il se met à l'insulter. Le gouverneur demande à tout le monde de partir afin de rester seul avec le jeune imprudent. Il lui demande son nom mais celui-ci refuse puis il tente de l'acheter en lui offrant un grade dans son armée et essuie un nouveau refus. Montfort interdit alors à Arrigo de parler avec la duchesse : celui-ci, à nouveau, brave l'interdit.

Acte II

Dans une vallée proche de Palerme, se rencontrent Arrigo, Hélène et Procida, arrivés clandestinement. Celui-ci annonce le soutien de Pierre d'Aragon en cas de début d'insurrection. Arrigo déclare son amour à la duchesse qui l'accepte à condition qu'il venge son frère. Arrigo reçoit une invitation de la part de Montfort et la refuse. Ce refus entraîne son arrestation et les Siciliens jurent de le venger. En outre, l'enlèvement des femmes par les soldats français ne fait qu'accentuer la haine de ceux-ci.

Acte III

Montfort, dans son cabinet, relit une lettre de la mère d'Arrigo, exécutée depuis dix mois, dont il apprend être le père d'Arrigo. Arrigo arrive et apprend la vérité concernant son père, qu'il croyait en exil. Il refuse de le reconnaître comme son père. Le soir, un bal masqué a lieu et parmi les danseurs, Arrigo reconnaît Procida et Hélène, venus le délivrer et tuer Montfort. Arrigo empêche ses amis de le faire, au moment où Hélène sort sa dague. Les conjurés sont arrêtés.

Acte IV

Procida et Hélène sont déportés à la forteresse, Arrigo les rejoint pour tenter de se disculper. S'il y arrive auprès d'Hélène qui lui conserve son amour, l'annonce de son lien de parenté avec Monfort, ruine les espoirs de Procida qui a reçu la nouvelle de l'arrivée des armes. Monfort arrive pour annoncer l'arrivée du bourreau et fait le chantage suivant à Arrigo : soit celui-ci le connait publiquement comme son père, soit ses amis sont exécutés. Celui-ci finit par céder et Monfort annonce les noces entre Arrigo et la duchesse. Celle-ci hésite à accepter mais Procida l'incite à le faire.

Acte V

Dans les jardins du palais, se prépare la fête pour le mariage. Procida retrouve Hélène et lui annonce que, dès que les cloches sonneront, l'insurrection commencera. Elle retire sa parole au grand désespoir d'Arrigo. Montfort arrive et ordonne que le mariage ait lieu. Les cloches sonnent et les Français sont massacrés.

Numéros musicaux

  • Ouverture

Acte I

  • no 1 Introduction
    • Chœur « Beau pays de France ! » (Thibault, Robert, De Béthune, Vaudemont, Soldats, Siciliens, Siciliennes) – Scène I
    • Récit « Quelle est cette beauté » (Vaudemont, De Béthune, Danieli, Hélène, Robert, Thibault, Ninetta) – Scène II
    • Air « Au sein des mers » (Hélène) – Scène II (suite)
    • Ensemble Quels accents ! quel langage ! (Peuple, Thibault, Robert, Français, Hélène, Danieli, Ninetta, Soldats) – Scène II (suite)
  • no 2 Trio « Quelle horreur m'environne ! » (Hélène, Ninetta, Monfort) – Scène III
  • no 3 Duo
    • Récit « Hélène ! - Ô ciel !… Henri !… » (Henri, Hélène, Ninetta, Montfort) – Scène IV
    • Duo « Quel est ton nom ? » (Montfort, Henri) – Scène V
    • Ensemble « Punis mon audace ! » (Henri, Monfort) – Scène V (suite)

Acte II

  • no 4 Entr'acte, Air et Chœur
    • Récit « Palerme... ô mon pays ! » (Procida) – Scène I
    • Air « Et toi, Palerme » (Procida) – Scène I (suite)
    • Récit « À tous nos conjurés » (Procida) – Scène I (suite)
    • Cavatine « Dans l'ombre et le silence » (Procida, Chœur) – Scène I (suite)
  • no 5 Récit, Scène et Duo
    • Récit « Fidèles à ma voix ! » (Procida, Hélène, Henri) – Scène II
    • Duo « Comment, dans ma reconnaissance » (Hélène, Henri) – Scène III
    • Cantabile « Près du tombeau peut-être » (Hélène, Henri) – Scène III (suite)
  • no 6 Récit, Tarantelle et Scène
    • Récit « À vous, et de la part de notre gouverneur ! » (De Béthune, Henri, Hélène, Procida) – Scènes IV-V
    • Marche des douze fiancés et Tarantelle « Voilà, par saint Denis ! » (Robert, Procida, Thibault) – Scène VI
    • Chœur « Vivent les conquêtes ! » (Robert, Thibault, Soldats français, Siciliens et Siciliennes, Ninetta) – Scène VII
    • Chœur final « Interdits, accablés » (Chœur, Danieli, Hélène, Procida, Mainfroid) – Scènes VIII-IX

Acte III

  • no 7 Entr'acte et Air
    • Récit « Oui, je fus bien coupable » (Montfort, De Béthune) Scènes I-II
    • Air « Au sein de la puissance » (Montfort) – Scène III
  • no 8 Duo
    • Récit « Je n'en puis revenir! » (Henri, Montfort) – Scène IV
    • Duo « Quand ma bonté toujours nouvelle » (Montfort, Henri) – Scène IV (suite)
  • no 9 Marche – Scène V
  • no 10 Divertissement : Les Saisons – Scène V (suite)
    • L'Hiver
    • Le Printemps
    • L’Été
    • L'Automne
  • no 11 Final « Ô fête brillante ! » (Procida, Henri, Hélène, Montfort, Danieli, Siciliens, Français) – Scènes VI-VII

Acte IV

  • no 12 Entr'acte, Récit et Air
    • Récit « C'est Guy de Montfort ! » (Henri) – Scène I
    • Cavatine « Ô jour de peine et de souffrance ! » (Henri) – Scène I (suite)
  • no 13 Duo et Romance
    • Récit « De courroux et d'effroi » (Hélène) – Scène II
    • Duo « Écoute un instant ma prière ! » (Hélène, Henri) – Scène II (suite)
    • Romance « Ami !… le cœur d'Hélène » (Hélène, Henri) – Scène II (suite)
  • no 14 Récit et Scène
    • Récit « Par une main amie » (Procida, Hélène, De Béthune, Montfort, Henri) – Scènes III-IV-V
  • no 15 Quatuor « Adieu, mon pays, je succombe » (Procida, Montfort, Hélène, Henri) – Scène V (suite)
  • no 16 Final
    • Final « De profundis ad te clamavi » (Chœur, Hélène, Henri, Montfort, Procida) – Scène V (suite)
    • Ensemble « Ô surprise! ô mystère ! » (Hélène, Henri, Montfort, Procida, Siciliens, Français) – Scène V (suite)

Acte V

  • no 17 Entr'acte et Chœur « Célébrons ensemble l'hymen glorieux » (Chevaliers, Jeunes filles) – Scène I
  • no 18 Sicilienne et Chœur « Merci, jeunes amies » (Hélène) – Scène II
  • no 19 Mélodie « La brise souffle au loin » (Henri, Hélène) – Scène II (suite)
  • no 20 Scène et Trio, Scène et Chœur final
    • Récit « À ton dévouement généreux » (Procida, Hélène) – Scène III
    • Trio « Sort fatal » (Hélène, Henri, Procida) – Scène IV
    • Scène « Ah ! venez compatir à ma douleur mortelle ! » (Henri, Montfort, Procida) – Scène V
    • Chœur « Oui, vengeance ! vengeance ! » (Chœur, Henri, Montfort, Hélène, Procida) – Scène V (suite)

Réception

La création à l'Opéra à Paris connaît un grand succès. Berlioz, entre autres, évoque « la majesté souveraine de la musique ». L’œuvre est représentée soixante-deux fois.

Version italienne

Verdi entreprend rapidement de faire adapter son opéra en italien, afin de le rendre plus « exportable ». Une première version due au poète Arnaldo Fusinato est créée le au Teatro Regio de Parme puis au Teatro Regio de Turin sous le titre Giovanna di Guzman (parfois Giovanna de Guzman ou Giovanna di Gusman), l'action étant transposée en 1640 au Portugal sous occupation espagnole afin d'éviter la censure.

La distribution est la suivante :

  • Caterina Goldberg Strossi : Giovanna di Guzman[8]
  • Antonio Giuglini : Enrico[9]
  • Francesco Cresci : Michele de Vasconcello[10]
  • Giorgio Atry : Don Giovanni Ribera Pinto[11]
  • Guglielmo Giordani : Béthune
  • Angelo Corazzani : Vaudemont
  • Teresa Lenci Marsili : Ninetta
  • Raffaele Giorgi : Tebaldo
  • Raimondo Buffagni : Roberto
  • Carlo Salvatore Poggiali : Danieli
  • Giovanni Battista Garulli : Manfredo
Concertatore : Giovanni Rossi
Chef d'orchestre : Nicola De Giovanni
Chorégraphie : Michele D'Amore
Costumes : Antonio Lanari[12],[13]

Dotée d'un nouveau livret d'Enrico Caimi, l’œuvre est reprise le à la Scala de Milan. Elle portera également les titres de Batilde di Turenna (pour sa création au Teatro San Carlo de Naples en 1857), Giovanna di Braganza et Giovanna di Sicilia avant de retrouver son titre original italianisé, I vespri siciliani, à l'indépendance de l'Italie en 1861.

La première représentation des Vêpres en italien à l'Opéra Garnier a lieu le . Prévue initialement le , elle fut annulée à la suite de la mort du président Georges Pompidou[6].

Discographie partielle

en français
en italien


Notes et références

  1. Il faudra toutefois attendre 1857 pour la création parisienne, Hugo étant parvenu jusque-là à faire interdire l’œuvre pour plagiat.
  2. Alors qu'il a repris, sans en informer Verdi, des passages entiers du livret du Duc d'Albe, écrit pour Jacques Fromental Halévy puis utilisé en 1839 par Gaetano Donizetti pour son opéra, créé de façon posthume en 1882.
  3. Bertrand Dermoncourt, L'Univers de l'opéra, p. 1122[source insuffisante].
  4. Lettre de Verdi à Piave du 30 octobre 1854 citée dans Mary Jane Phillips-Matz, Giuseppe Verdi, Fayard, Paris, 1996, p. 405 (ISBN 2-213-59659-X).
  5. Les Vêpres siciliennes (livret), op. cit., p. 5, lire en ligne sur Gallica.
  6. Les Vêpres siciliennes (livret), op. cit., p. 2, lire en ligne sur Gallica.
  7. Historiquement, Charles d'Anjou, roi de Sicile de 1266 à 1285, avait fait exécuter Conradin de Hohenstaufen, petit-fils de Frédéric d'Autriche, mort en 1250. La parenté d'Hélène semble donc fictive.
  8. Elena dans la version de 1861.
  9. Arrigo dans la version de 1861.
  10. Guido di Montforte dans la version de 1861.
  11. Giovanni da Procida dans la version de 1861.
  12. (it) Eduardo Rescigno, Dizionario verdiano, BUR Dizionari, Rizzoli, Milan, 2001 (ISBN 88-1786628-8).
  13. (it) Cronologia del Teatro Regio di Parma (1829-2001)

Annexes

Bibliographie

  • Théâtre national de l'Opéra de Paris, Les Vêpres siciliennes (livret), Billaudot, Paris, 1979, lire en ligne sur Gallica
  • Alain Duault, Pierre Enckell, Elisabeth Giuliani, Jean-Michel Brèque, Michel Orcel, Bruno Poindefert, Alain Arnaud, Anselm Gerhard, Jacques Bourgeois, Jean Cabourg, Georges Voisin, Michel Pazdro, Dominique Ravier, Les Vêpres siciliennes, L'Avant-scène opéra, Éditions Premières Loges, Paris, 1985 (ISBN 2-84385-059-2)
  • Marie-Aude Roux, « Les Vêpres siciliennes » dans Jean Cabourg (dir.), Guide des opéras de Verdi, coll. « Les Indispensables de la musique », Fayard, Paris, 1990, p. 609-683 (ISBN 2-213-02409-X)
  • Patrick Favre-Tissot-Bonvoisin, Giuseppe Verdi, Bleu Nuit Éditeur, Paris, 2013 (ISBN 978-2-35884-022-4)

Articles connexes

Liens externes

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