La Voix des femmes

La Voix des femmes était un journal féministe édité à Paris ainsi qu'une organisation dédiée à l'éducation et à l'émancipation de la femme. Il est créé le par Eugénie Niboyet, à la suite de l'abdication du roi Louis-Philippe Ier et du début de la Deuxième République. Après son succès grandissant, il devient une association, fréquentée notamment par Jeanne Deroin, Pauline Roland, Eugénie Niboyet et Désirée Gay.

Les membres de La Voix des femmes ne remettaient pas en cause le rôle maternel de la femme dans le cercle familial mais promouvaient la nécessité de leur sécurité financière et salariale, leur éducation, leurs droits à la propriété, et le droit de vote pour celles-ci. L'avènement de Napoléon III en 1852 met fin à cette expérience féministe.

Le , Colette Reynaud et Louise Bodin refondent La Voix des femmes, revue hebdomadaire socialiste féministe et pacifiste.

Fondation

Eugénie Niboyet a créé son journal le dans le but d’intéresser les institutions républicaines aux conditions de travail de ses citoyennes mais aussi de montrer l’intérêt qu’ont ces dernières pour la République française. Elle souhaite aussi mettre en lumière le courant de pensée du socialisme. Le journal se dit en effet « Journal quotidien, socialiste et politique, organe des intérêts de toutes »[1].

La rédaction du journal est mixte et on relève parmi les premiers signataires, Marcelle Capy (1891-1962), Louise Bodin (1877-1929) et Georges Pioch (1873-1953)[2].

Journal

Le journal La Voix des Femmes garde informés ses lecteurs et lectrices sur la vie et les événements politiques en général mais principalement sur l’élection présidentielle de 1848 avec notamment la publication des candidatures officielles. Les éditrices donnent leurs avis et conseils sur les candidats pour lesquels voter, ceux qu’elles soutiennent, principalement des candidats favorables aux droits et libertés des femmes.

La Voix des femmes est une publication engagée. Sur les 58 numéros parus entre octobre 1917 et février 1919, quasiment tous auront été censurés par le « Bureau de la presse »[2].

Politique

La journaliste et fondatrice Eugénie Niboyet écrit tant sur la politique intérieure que sur la politique extérieure. La ligne politique du périodique est dite « la plus à gauche possible »[3],[1].

Le journal publie des lettres ainsi que des pétitions rédigées par des femmes et qui s’adressent aux hommes politiques de l’époque. Ces lettres comprennent par exemple des demandes pour l’amélioration des conditions de travail des femmes de l’époque ou encore la reconnaissance du suffrage féminin.

Travail

Le journal est le premier de l’histoire de la presse féminine à se présenter comme un journal qui « soutiendra franchement leurs intérêts moraux, intellectuels et matériels ». Eugénie Niboyet y défend par exemple les intérêts économiques des prisonnières qui s’étaient vues accusées par les travailleuses couturières, de concurrentes. Eugénie Niboyet a donc pris le parti des prisonnières en écrivant « il faut que les prisonnières travaillent, elles en ont doublement besoin »[4],[3].

Le travail est donc l'un des principaux thèmes abordés dans le journal après celui de la politique. On retrouve dans le numéro 31 un article rédigé par une certaine Marie-Pauline s’intitulant « Que la femme doit travailler ». Dans cet article on peut lire « La femme veut être libre ? Qu’elle travaille ! Qu’elle sache se suffire à elle-même ! ». Les femmes de la rédaction utilisent également leur journal pour réclamer tous leurs droits au gouvernement dans le but d’arrêter les discriminations. Par exemple le droit de faire partie des tribunaux commerciaux, le droit à un salaire égal à celui de l’homme pour un travail égal ou encore « le droit à la recherche en paternité pour la jeune fille séduite et abandonnée »[3].

Éducation

Un autre des thèmes importants abordés par Eugénie Niboyet dans son journal est celui de l’éducation. Elle revendique l’éducation des femmes par les femmes. Dans le numéro du , une des membres du journal demande dans un article l’ouverture des classes de lycées aux femmes. Elle écrit que les femmes demandent « les mêmes professeurs, les mêmes programmes, mais à des heures différentes, ou séparément. Parce que trop sexualisées par leurs adversaires, les femmes ont peur de choquer et s'en tiennent à une ségrégation prude ». Dans le numéro du , l’une des journalistes sous-titre son article avec une phrase du philosophe Leibniz : « Celui-là qui est maître de l’éducation peut changer la face du monde »[3].

Autre

Le journal se montre aussi internationaliste. On y trouve peu d’articles patriotes à l’exception de ceux glorifiant la France pour son « tourisme républicain », c’est-à-dire le fait que le pays accueille les révolutionnaires des pays voisins tels que l’Italie, la Pologne ou bien l’Irlande. Le quotidien est aussi dit antiraciste, antiesclavagiste et très tolérant religieusement. Cependant on ne retrouve aucune prise de position athée dans les articles publiés[3].

L'affaire George Sand

Les femmes du journal, lors de la période d’élection, souhaitent faire élire une femme à l’Assemblée, à l’époque constituée d’hommes uniquement. C’est alors qu’on émet l’idée de la candidature de l’écrivaine George Sand. Les hommes de l’époque avaient déclaré que l’écrivaine possédait « un génie mâle ». Les rédactrices ont alors pensé que les hommes politiques l’accepteraient plus facilement à l’Assemblée. C’est donc dans le numéro du que l’idée sera reprise et partagée. Par la suite, les rédactrices diffuseront durant quelques jours, dans leur quotidien, des textes de George Sand. Le de la même année, cette dernière écrit une lettre au journal La Réforme, qui la publiera, dans laquelle elle dément cette candidature et déclare espérer « qu’aucun électeur ne voudra perdre son vote en faisant écrire [son] nom »[3].

Diffusion

La Voix des femmes était un quotidien diffusé du au de la même année, chaque matin à Paris et possédait ses crieurs sur la voie publique. On compte 46 numéros publiés en tout. Il coûte à l’époque 10 centimes de franc-or[5].

Archives

La bibliothèque Marguerite-Durand (13e arrondissement de Paris) en conserve des numéros. Le Musée de l'Histoire vivante (Montreuil) conserve 35 numéros sur 47.

Notes et références

  1. Alice Primi, « La « porte entrebâillée du journalisme », une brèche vers la Cité : Femmes, presse et citoyenneté en France, 1830-1870 », Le Temps des médias, , p. 28-40
  2. « DESPRÈS, Fernand, Désiré, Alfred, « A. DESBOIS » - [Dictionnaire international des militants anarchistes] », sur militants-anarchistes.info (consulté le )
  3. Evelyne Sullerot, « Journaux féminins et lutte ouvrière (1848-1849) », Revus d'Histoire du XIXe siècle - 1848, , p. 88-122
  4. Isabelle Lacoue-Labarthe, « Lettres et journaux de femmes: Entre écriture contrainte et affirmation de soi », Tumultes, , p. 113-132
  5. Adrien Ranvier, « Une féministe de 1848 : Jeanne Deroin », Revue d'Histoire du XIXe siècle - 1848, , p. 317-355

Voir aussi

Article connexe

Liens externes

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