Juana Inés de la Cruz
Juana Inés de Asbaje y Ramírez de Santillana, connue sous le nom de sœur Juana Inés de la Cruz ou Jeanne-Agnès de la Croix, née selon les sources le ou le à San Miguel Nepantla (es) (dans l'actuelle municipalité de Tepetlixpa au Mexique) et morte le à Vice-Royauté de Nouvelle-Espagne, est une religieuse catholique (hiéronymite), poétesse et dramaturge de la Nouvelle-Espagne.
Son œuvre poétique figure parmi les plus emblématiques de la langue espagnole.
Biographie
Juana Inés est née dans la propriété de son grand-père, près d'une petite communauté rurale du Mexique, San Miguel Nepantla. Elle est la fille présumée d'un militaire d'origine espagnole, Pedro Manuel de Asbaje y Vargas Machuca, qui n'a jamais reconnu sa paternité, et d'Isabel Ramírez de Santillana, propriétaire terrienne créole qui restera célibataire toute sa vie.
Jeune prodige, Juana Inés affirmera plus tard dans son autobiographie qu'elle a appris à lire dès l'âge de trois ans. Lorsque sa mère la prévient que les femmes n'ont pas le droit d'étudier à l'université, elle fait part de son projet de se déguiser en homme pour accéder au plus haut degré de savoir. Même enfant, elle dévore tous les ouvrages qui lui tombent sous la main et se plaît à écrire de la poésie. Elle rédige sa première œuvre littéraire connue vers l'âge de sept ans. En 1660, elle quitte la campagne pour la grande capitale, Mexico, où elle est rapidement introduite dans la cour vice-royale. Beaucoup sont impressionnés par le talent et la mémoire de cette adolescente qui écrit de charmants poèmes et maîtrise déjà l'art du discours et de la rhétorique. À une époque où la femme savante est une exception, Sor Juana apprend le latin en vingt leçons et s'initie aux sciences qui la passionnent : les mathématiques, la musique, la philosophie, l'astronomie, la théologie.
En 1662, Juana de Asbaje devient dame de compagnie de la vice-reine du Mexique, Leonor del Carretto, Marquise de Mancera. Son entrée à la cour lui assure un soutien pour faire avancer sa carrière littéraire. Elle compose non seulement de la poésie, mais également des pièces de théâtre et des cantiques destinés à être chantés dans les églises. Juana est jolie, pourtant elle refuse le mariage. Elle espère trouver dans la solitude d'un monastère le temps et le recul nécessaires pour mener une vie consacrée aux arts et aux sciences. La première tentative de Juana pour se faire admettre au couvent des Carmélites, un ordre religieux particulièrement austère, se solde par un échec. En 1669, elle prend le voile au couvent de Saint Jérôme et devient Sœur Juana Inés de la Cruz. Malgré son retrait du monde, elle continue d'écrire et de susciter l'admiration de ses contemporains.
Sa critique d'un célèbre sermon d'Antonio Vieira, éditée fin 1690 sans son autorisation par l'évêque de Puebla, souleva une polémique mondaine et ecclésiastique. Pour se défendre, en mars 1691, Sor Juana envoie à l'évêque la Réponse à Sœur Philotée, longue lettre autobiographique.
En 1693, juste après l'édition triomphale, à Séville, du deuxième volume de ses œuvres, Sor Juana ferme son parloir/salon, vend "sa bibliothèque" au profit des pauvres et ne répond plus aux commandes de poésie. Longtemps, le fait a été logiquement attribué à une contrainte venue du clergé, mais il a été reconnu récemment que Sor Juana a trouvé dans cette retraite une sorte de compromis lui permettant de continuer à étudier à l'abri des multiples sollicitations causées par sa célébrité.
Sor Juana s'éteint en 1695, au cours d'une épidémie de fièvre pestilentielle. On trouva 180 livres dans sa cellule.
Le plus bel essai biographique sur Sor Juana Inés de la Cruz, bien que contesté par les spécialistes, est peut-être celui d'Octavio Paz. En 1990, María Luisa Bemberg a adapté le récit d'Octavio Paz au cinéma : Moi, la pire de toutes avec Assumpta Serna et Dominique Sanda dans les rôles principaux
Les scientifiques du Centre de recherche et d'études avancées (CINVESTAV) vont tenter d'extraire l'ADN à partir d'os découverts à l'Universidad del Claustro à Mexico en 1978. En , le Cinvestav a obtenu les échantillons d'ADN des membres vivants de sa famille, les Ramirez España et Iliana Troncoso Olaguíbel, descendants de la sœur de Sœr Juana, qui vivent au Mexique. « La procédure de séquençage génétique de Sœr Juana et de ses descendants sera répétée au moins trois fois afin de garantir des résultats corrects. À la fin, une comparaison sera faite pour déterminer s'il y a une relation », a déclaré María de Lourdes Muñoz, qui étudie la génétique et la biologie moléculaire au Cinvestav[1].
Œuvres traduites en français
- Poèmes d'amour et de discrétion, La Délirante, 1987.
- Le Divin Narcisse, Gallimard, 1987.
- Le songe - Et autres poèmes, La Différence, 2014 (trad. Jean-luc Lacarrière).
Hommages
Juana Inés de Asbaje a figuré sur les monnaies de 1000 pesos en circulation de 1988 à 1992 et figure sur les billets mexicains de 100 pesos actuels.
En 1696 à Barcelone a été publié le Poema heroico (poème héroïque) du poète sarde Joseph Zatrillas Vico, dédié à la poétesse mexicaine[2].
Depuis 1979, un cratère de la planète Mercure est nommé Sor Juana en son honneur[3].
Notes et références
- (es) « Rastrean el ADN de Sor Juana Inés de la Cruz », sur cinvestav.mx, (consulté le )
- (es)Poema heroico al merecido a/plauso del el unico Oraculo de/las/Musas, glorioso assombro de los Ingenios, y/Ce/lebre Phenix de la Poesia, la Esclarecida y Ve/ne/rable Señora, Suor Juana Ines de la Cruz Religiosa Professa en el Monasterio de San Geronimo de la Imperial Ciudad de Mexico
- « Planetary Names: Crater, craters: Sor Juana on Mercury », sur planetarynames.wr.usgs.gov (consulté le )
Voir aussi
Bibliographie
- Marie-Cécile Bénassy-Berling, Humanisme et religion chez Sor Juana Inés de la Cruz, Paris IV, éditions hispaniques, 1982
- Octavio Paz, Sor Juana Inés de la Cruz ou les pièges de la foi, Gallimard, 1987
- Víctor Gerardo Rivas, Voluntad de ser, México, UNAM, 1995.
- Víctor Gerardo Rivas, La sombra fugitiva. La poética del "precipicio" en Primero sueño y la comprensión del humanismo barroco, México, UNAM, 2001.
- Jean-Michel Wissmer, La Religieuse mexicaine, Metropolis, 2000
- José Antonio Rodriguez Garrido, La carta atenogarica de Sor Juana. Textos inéditos de une polémica, México, UNAM, 2004.
- Jean-Michel Wissmer, Emmenez-moi à l'ange, Un journal mexicain, Bartillat, 2006
- Marie-Cécile Bénassy-Berling, Sor Juana Inés de la Cruz. Une femme de lettres exceptionnelle. Mexique XVIIème siècle, Paris, L'Harmattan 2010
- Luis M. Villar, The Sor Juana Ines de la Cruz Bibliography Online
Discographie
Son œuvre a été mise en musique:
- Le Phénix du Mexique - Villancicos de Sor Juana de la Cruz mis en musique à Chuquisaca au XVIIIe siècle, K617, 2001
- Arielle Dombasle, dans son disque Glamour à Mort (2009), chante "Sor Juana", chanson écrite par Philippe Katerine et Gonzales, racontant l'histoire de Sor Juana Inés de la Cruz. ''Je sentais l'amour divin en tout jusque dans les incendies mêlés aux caprices des vents fous ..." etc.
Film
- Juana Inés, 2016 (1 saison, 7 épisodes) : Série historique mexicaine mettant en scène la vie de Juana Inés de la Cruz (de son adolescence à sa mort). Cette série, parfois controversée, permet de découvrir la vie de Juana Inés ainsi que la vie à cette époque à la Nouvelle Espagne (société de castes, droits des femmes, très forte participation de l'Eglise dans la politique et l'encadrement des populations...) où le catholicisme est imposé par la monarchie catholique espagnole. Diffusion au Mexique sur Canal Once et puis mondialement sur Netflix. Acteurs :Arcelia Ramírez, Arantza Ruiz, Hernán Del Riego Créateurs :Patricia Arriaga-Jordán
Liens externes
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- (fr) Sor Juana Inés de la Cruz, américanité et féminisme par Maryse Renaud
- (fr) Spectacle de Sor Juana par Pierre Bluteau, Mariana Montalvo et l'ensemble "Eclat de Voix"
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