Johann Christoph von Wöllner

Johann Christoph von Wöllner (né le à Döberitz en Brandebourg - mort le à Groß Rietz près de Beeskow) est un pasteur et un homme d'État prussien du XVIIIe siècle.

Biographie

Johann Christoph von Wöllner était le fils d'un pasteur. Après l'obtention de son baccalauréat, en 1749, il entreprend des études de théologie à l'université de Halle, qu'il achève avec succès en 1754. Cette même année, il est appelé comme pasteur par la communauté du Grand-Behnitz à Berlin. Simultanément, le général Friedrich von Itzenplitz (1693-1759) le recrute comme précepteur.

À la mort du général, en 1760, Wöllner se démet de toutes ses charges pastorales et s'improvise administrateur des biens du défunt. Il épouse en 1768 la comtesse von Itzenplitz, fille unique de son défunt employeur. Cette mésalliance a le malheur de déplaire à Frédéric II, qui fait saisir l'héritage de « Madame Wöllner » et l'assigne à résidence au quartier de Hausvogtei (l'ancien haut-bailliage à Friedrichswerder) de Berlin. Wöllner fait paraître plusieurs pamphlets à cette époque (par ex. sur « l'abolition de la police en pays de Brandebourg »). En partie du fait de ces écrits, il fait la connaissance de Friedrich Nicolai et collabore à sa collection d'ouvrages d'économie rurale.

Le roi Frédéric II refusera toujours catégoriquement de l'anoblir. Plusieurs fois il le qualifie de « ... calotin comploteur et intrigant ». Le prince Henri de Prusse le prend pourtant comme conseiller en 1770. Après avoir été membre de la même loge maçonnique que Frédéric II, la loge « Aux Trois globes » (Zu den Drei Weltkugeln), il s'en retire et se tourne vers la société des Rose-Croix. Il fonde peu après sa propre loge, dont le prince héritier Frédéric-Guillaume devient membre le .

L'influence de Wöllner sur le prince s'accroît graduellement. Peu après son avènement le , il est nommé Directeur du conseil privé des Finances, de la Guerre et des Domaines et Surintendant du Palais. Dès le 2 octobre, il est finalement anobli, et recouvre la dot de sa femme. Au fil des mois, une rivalité politique s'enflamme entre le favori et les membres du cabinet ministériel ; elle atteint son paroxysme lorsque Wöllner obtient le renvoi du baron Karl Abraham von Zedlitz, qu'il remplace au poste de ministre des Cultes. Il sera également le principal responsable du départ de Lagrange le plus grand mathématicien d'Europe » selon Frédéric II) de l'Académie de Berlin pour l'Académie des sciences de Paris.

Comme Wöllner et le roi sont membres de la même loge maçonnique, le ministre a tout loisir de convertir le monarque à ses vues. C'est cette complicité qui rend possible l'édit religieux du , par lequel les Églises luthériennes autonomes doivent prioritairement être réprimées, et les idées des Lumières combattues. Il ne sera abrogé que plus de cinq ans plus tard, le  : les trois principales confessions religieuses, devenues illégales, étaient alors depuis peu menacées de réquisition. La Commission royale chargée d'appliquer ces mesures de censure condamne entre autres le philosophe Emmanuel Kant (1794).

La carrière politique de Wöllner prend fin avec la mort du roi Frédéric-Guillaume à l'hiver 1797. Le il est officiellement renvoyé et vit dès lors des rentes de ses propriétés dans le Brandebourg, entre autres la terre de Gross-Rietz, qu'il avait achetée en 1790. C'est là qu'il meurt le , âgé de 68 ans.

Son projet politique

De 1784 à 1786, Wœllner donna plusieurs conférences (inspirées de son engagement dans les Rose-Croix) devant le futur monarque[1], touchant pratiquement toute la politique de l’État. Il lui vanta ainsi les mérites d'une agriculture modernisée et de la manufacture. Wœllner voulait mettre un terme aux monopoles de la Couronne. La condition paysanne lui tenait particulièrement à cœur : il dénonça dans la féodalité un obstacle au progrès[2] ; mais s'il était prêt à remplacer les méthodes traditionnelles d'exploitation en nommant de nouveaux pasteurs et instituteurs dans les campagnes, il se défiait pour le reste des Lumières : la Religion naturelle risquait, pensait-il, de miner la morale et de porter atteinte aux bonnes mœurs des sujets, en mettant en cause ce qui est leur fondement : la Bible comme Parole de Dieu[3] ; car les sujets incroyants sont une menace pour la stabilité du gouvernement[4]. Wœllner voulait pour cela limiter l'autorité des prêtres et des enseignants[5], et le roi devait, par sa piété, servir d'exemple à son peuple : c'était d'ailleurs là une critique indirecte de Frédéric II, qui avait tout au long de son règne défendu une version extrême de la tolérance religieuse[6].

Articles connexes

Notes

  1. Cf. Charles Porset, Cécile Révauger (dir.) et Reinhard Markner, Le Monde maçonnique au XVIIIe siècle, vol. 3, Paris, Libr. Honoré Champion, , 2848 p. (ISBN 2745324969, lire en ligne), « Woellner, Johann Christoph (1732–1800) », p. 2820–2824 (version allemande).
  2. Uta Wiggermann, Woellner und das Religionsedikt : Kirchenpolitik und kirchliche Wirklichkeit im Preußen des späten 18. Jahrhunderts, Tübingen, Mohr Siebeck, coll. « Beiträge zur historischen Theologie 150 », , XIX+640 p. (ISBN 978-3-16-151060-1).
  3. Wiggermann, op. cit., p. 26.
  4. Wiggermann, op. cit., p. 29.
  5. Wiggermann, op. cit., p. 33.
  6. Wiggermann, op. cit., p. 30.

Bibliographie

  • Dirk Kemper: Obskurantismus als Mittel der Politik. Johann Christoph von Wöllners Politik der Gegenaufklärung am Vorabend der Französischen Revolution, in: Von „Obscuranten“ und „Eudämonisten“. Gegenaufklärerische, konservative und antirevolutionäre Publizisten im späten 18. Jahrhundert, sous la dir. de Christoph Weiß, St. Ingbert 1997, pp. 193-220.
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