Jeux isthmiques

Les Jeux isthmiques (on rencontre parfois la forme Jeux isthmiens, vieillie) sont des concours sportifs pentétériques entre les citoyens grecs antiques, organisés sur l'isthme de Corinthe, dont ils tiennent leur nom. Comme l’ensemble des Jeux panhelléniques, les jeux isthmiques ont un caractère religieux important, puisqu’ils sont célébrés en l’honneur de Poséidon, dieu de la mer et des chevaux. Le sanctuaire panhellénique de Poséidon à Corinthe a d’ailleurs été aménagé dans les années 690 av. J.-C. et les jeux Isthmiques ont débuté dès 580 av. J.-C.

Les Jeux isthmiques sont un des grands jeux panhelléniques de la Grèce antique, qui comprenaient les Jeux olympiques, les Jeux pythiques et les Jeux néméens.

Mythe

D'après la mythologie grecque, il existe plusieurs versions de la création des Jeux isthmiques. La première attribue l'origine des jeux à un conflit entre Poséidon et Hélios pour la possession de Corinthe. Ils furent départagés par Briarée, qui donna l'Isthme à Poséidon et l'Acrocorinthe à Hélios, et c'est pour commémorer cet accord que les jeux auraient été institués[1].

Une autre légende, la plus courante, attribue la fondation à Sisyphe pour une commémoration funéraire en l'honneur de son parent Mélicerte[2],[3]. Poursuivi par son père devenu fou, il se jeta à la mer et devint un dieu marin sous le nom de Palémon[4].

Selon une autre tradition, athénienne, c'est Thésée qui les a créés en souvenir du voyage qu'il effectua de Trézène à Athènes, mais leur existence historique date des années 580 av. J.-C.[5].

Histoire

L'existence des Jeux isthmiques est attestée à partir des années 580 av. J.-C.. Ils doivent leur nom à l'isthme de Corinthe où ils étaient célébrés. Ils eurent tant d'éclat qu'ils survécurent à la ruine de Corinthe elle-même en 146 av. J.-C. On y disputait successivement les prix de la lutte, de la course, du saut, du disque et du javelot et de pentathlon antique. D'après Plutarque, il y avait des concours de musique et de poésie : on décernait aux vainqueurs des guirlandes de pin[6],[7].

La présidence était dévolue aux Corinthiens, sauf de 392 av. J.-C. à 387/386 av. J.-C. avec la paix d'Antalcidas, Corinthe étant alors soumise par les Argiens qui jouèrent le rôle d'Agonothètes (magistrat élu chargé d'organiser plusieurs concours).

C'est lors de ces jeux que Flamininus proclama l'indépendance des Grecs en 196 av. J.-C., libérés de Philippe V de Macédoine[8].

Après la destruction de Corinthe par Mummius en 146 av. J.-C., ce furent les Syconiens qui récupérèrent la présidence de ces jeux avant que les Corinthiens ne la reprennent[9].

En 393, l'empereur romain Théodose Ier, sous l'influence d'Ambroise, évêque de Milan, ordonne l'abandon des rites et des lieux de culte païens dont les jeux isthmiques faisaient partie, mais l'archéologie révèle que le site est resté habité et prospère aux IIIe et IVe siècles jusqu'au règne de Théodose II († 450)[10].

Lieu

Les Jeux isthmiques avaient lieu sur les côtes du détroit de l'Isthme qui sépare la mer d'Ionie de la mer Égée, entre les villes de Léchée et Cenchrées. L’isthme de Corinthe était près d’un temple de Poséidon et d’un bois de pins consacré à celui-ci. En allant au temple de Poséidon, il était également possible d’observer les statues des athlètes qui avaient remporté des prix aux jeux isthmiques.

Organisation

À chaque jeu panhellénique, une trêve sacrée (Ekecheiria) était proclamée. Des messagers (spondophores) voyageaient de cité en cité pour annoncer la date des compétitions. Ils exigeaient l’arrêt des combats, avant, pendant et après les Jeux pour permettre aux spectateurs et aux participants de se rendre sans danger sur les sites.

Les jeux panhelléniques ayant lieu tous les quatre ans (c’est-à-dire toutes les quatre Olympiades), les jeux isthmiques avaient lieu tous les deux ans, selon Pline (2e et 4e année de chaque Olympiade), ou tous les trois ans selon Pindare. Selon lui, ils étaient organisés au printemps de la seconde année suivant les Jeux olympiques[11].

Cela dit, Pindare, dans ses alexandrins, ne présente les dates souvent que comme des approximations. Pour nuancer, d’après Pline & Solin (moins probables que les dires de Pindare) les jeux Isthmiques avaient lieu tous les cinq ans, au bout de quatre années révolues et au commencement de la cinquième année[12].

Les épreuves proposées aux jeux Isthmiques étaient sans doute les mêmes que dans les autres jeux Panhelléniques. Ils proposaient donc la course à pied, la lutte, le pugilat, le pancrace, le pentathlon, le saut, le disque et le javelot. Sachant qu’il existait une catégorie d'athlètes adolescents (imberbes) intermédiaires entre les hommes et les enfants, il existait des catégories spécifiques tels que la dolique pour les hommes et le Pancrace des imberbes. Puis les courses de chevaux et de chars y ont été ajoutées. Il faut également noter qu’à partir du Ve siècle av. J.-C. il y avait des concours de musique, de poésie et de rhétorique, dans le théâtre. Des découvertes archéologiques montrent qu'à l'origine, de grandes célébrations se tenaient en l'honneur de Poséidon, mais que les événements sportifs ne datent que de plus tard.

Les jeux isthmiques duraient plusieurs jours mais le nombre et l’emploi de ces jours reste imprécis. Ils commençaient à l'aube par un sacrifice à Poséidon, et continuaient sur un déjeuner. Les compétitions sportives ne commençaient que l'après-midi, dans le stade. Ils se concluaient par une grande fête.

Public

Les jeux Isthmiques étaient ouverts à tous les Grecs. Mais il faut noter que les Éléens étaient les seuls Grecs qui ne se trouvaient pas aux jeux isthmiques. Ce, pour éviter les malédictions que Molione, femme d'Actor, avait faites contre tous ceux de l'Elide qui oseraient s’y rendre. Également, une multitude innombrable de peuples s’y réunissaient, naturellement passionnés par ce spectacle, ou appréciant le lieu, placé entre deux mers et donc facile d’accès.

Avec l’avis des Corinthiens, Thésée a décidé que les visiteurs d'Athènes auraient le privilège des premiers sièges de l’Isthme (Proédrie), mais Athènes ne pouvait occuper d'espace qu'autant que la voile du navire qu'elle envoyait à l'Isthme. Mais ces jeux avaient tellement de succès que seuls les principaux membres des villes de la Grèce pouvaient y être assis.

Participants

Pour participer aux jeux Isthmiques, il fallait être un homme, être d’origine grecque et être libre. Ainsi, les femmes et les esclaves en étaient exclus. Il faut noter que la plupart des athlètes étaient issus de familles riches. Il y a également une sélection préalable des athlètes, et des entraînements réguliers de ceux-ci dans le gymnase et la palestre de chaque cité.

Par ailleurs, dès 228 av. J.-C., les Romains sont autorisés à participer aux jeux. Ils élevèrent ces jeux au plus haut rang, ajoutant par exemple des spectacles de chasse, réunissant les animaux les plus rares du monde entier.

Exemples de lutteurs célèbres : le lutteur Milon de Crotone a été célèbre dans la seconde moitié du 7e s. av. J.-C., pour être le sportif le plus couronné de l’Antiquité. Il a été six fois vainqueur à Olympie, sept fois à Delphes, neuf fois à Némée, et surtout, dix fois à l’Isthme de Corinthe. Quant au plus ancien vainqueur connu, il s’agit probablement de Théagène de Thasos, qui a été vainqueur dix fois aux Jeux isthmiques.

Récompenses

Alors qu’aux Jeux olympiques modernes les trois vainqueurs reçoivent respectivement une médaille d’or, d’argent et de bronze, aux Jeux panhelléniques, il n’y a qu’un seul vainqueur par sport, et celui-ci gagne une couronne de feuillage.

Les vainqueurs des Jeux isthmiques recevaient tout d’abord une couronne de feuille de pin, symbole de l'infécondité de ces côtes maritimes, puis de persil (selon Archias et le scoliaste de Pindare) et de sèche de marais d’ache, herbe aquatique consacrée à Neptune et aux funérailles. Ils pouvaient également être honorés avec une statue ou une ode, et la ville d'Athènes décernait aux Athéniens victorieux un supplément de 100 drachmes.

En plus de ces récompenses, les athlètes vainqueurs recevaient également des privilèges à leur retour chez eux. Ils obtenaient la gloire et l’honneur et étaient considérés comme des héros et des exemples à suivre. Ces grands athlètes étaient d’ailleurs célébrés après leur mort puisque sur leurs stèles funéraires étaient sculptées les couronnes remportées aux Jeux panhelléniques.

Notes et références

  1. Pausanias, II, I, 6.
  2. Scholies de Pindare, Isthmiques, p.35 o-2 (Abel).
  3. Apollodore I, 9, 3
  4. Scholies, ib. ; Pausanias, I, 44, II ; II, I, 3; Apollodore, III, 29.
  5. Julien, Epist. 35.
  6. Plutarque. Thésée, 25 ; Scholies de Pindare, ib. p.349.
  7. Précis élémentaire de mythologie de M. l’abbé Drioux, Belin, 1898.
  8. Polybe, Histoire, XVIII, IV, 44 et 46.
  9. Pausanias, Corinth. cap. II.
  10. Ulrich Sinn (trad. Aude Virey-Wallon) : Olympie, centre d'artisanat chrétien, pp. 229 à 231 des « actes du cycle de conférences organisées au musée du Louvre du 18 janvier au 15 mars 1999 » dans Alain Pasquier, Olympie, Documentation française et Musée du Louvre, Paris 2001, (ISBN 2-11-004780-1).
  11. A.Puech, traduction, Pindare Tome IV « Isthmiques et fragments » Paris. Les belles lettres. 1961 ; p.8.
  12. Imago Mundi – encyclopédie en ligne (www.cosmovisions.com)

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

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