Intégrale impropre

En mathématiques, l'intégrale impropre (ou intégrale généralisée) désigne une extension de l'intégrale usuelle, définie par une forme de passage à la limite dans des intégrales. On note en général les intégrales impropres sans les distinguer des véritables intégrales ou intégrales définies, ainsi : est un exemple classique d'intégrale impropre convergente, mais qui n'est pas définie au sens des théories de l'intégration usuelles (que ce soit l'intégration des fonctions continues par morceaux, l'intégrale de Riemann ou celle de Lebesgue ; une exception notable est la théorie de l'intégration de Kurzweil-Henstock).

Dans la pratique, on est amené à effectuer une étude de convergence d'intégrale impropre :

  • lorsqu'on intègre jusqu'à une borne infinie ;
  • lorsqu'on intègre jusqu'à une borne en laquelle la fonction n'admet pas de limite finie ;
  • lorsqu'on englobe un point de non-définition dans l'intervalle d'intégration.

Dans chaque cas, on évaluera l'intégrale définie comme une fonction d'une des deux bornes, et on prendra la limite de la fonction obtenue lorsque l'argument tend vers la valeur de la borne.

L'intégrale impropre partage un certain nombre de propriétés élémentaires avec l'intégrale définie. Elle ne permet pas d'écrire des résultats d'interversion limite-intégrale avec les théorèmes d'interversion de convergence uniforme. Par contre, il existe un théorème d'interversion limite-intégrale adapté aux intégrales impropres : c'est le théorème de convergence dominée.

Définition

Définition de la convergence d'une intégrale impropre

Soit (où a est réel mais b peut être infini) une fonction continue ou, plus généralement, localement intégrable, c'est-à-dire intégrable sur tout compact de [a, b[. Si la limite

existe et est finie, on appelle cette limite intégrale impropre de f sur [a, b[.

De la même manière, soit une fonction localement intégrable. Si la limite

existe et est finie, on appelle cette limite intégrale impropre de f sur ]a, b].

Dans les deux cas, on peut noter cette limite

, et l'on précise éventuellement si l'intégrale est impropre pour la borne a ou pour la borne b.

Si la limite existe et est finie, on dit que converge ; sinon, on dit qu'elle diverge.

Remarques
  • On peut généraliser facilement la définition à des fonctions qui sont définies seulement sur ]a, b[ (et localement intégrables). On dit alors queconverge lorsque pour un arbitraire, les intégralesconvergent. D'après la relation de Chasles pour les intégrales, cette définition ne dépend pas du choix de c.
  • Il existe une notation[réf. nécessaire] qui permet d'expliciter le caractère impropre de l'intégrale :peut s'écrire
  • Si f est en fait intégrable sur le segment [a, b], on obtient par ces définitions la même valeur que si l'on calculait l'intégrale définie de f.

Définition de l'intégrabilité d'une fonction

Soit I = (a, b) un intervalle réel et une fonction localement intégrable. On dit que f est intégrable sur I si

converge. On dit alors que l'intégrale de f sur I converge absolument.

Toute intégrale absolument convergente est convergente (cf. § « Majoration » ci-dessous). La réciproque est fausse. Une intégrale qui converge non absolument est dite semi-convergente.

Techniques pour établir la convergence d'une intégrale impropre

Cas des fonctions positives

Si f (localement intégrable sur [a, b[) est positive, alors, d'après le théorème de convergence monotone, son intégrale (impropre en b) converge si et seulement s'il existe un réel M tel que

et l'intégrale de f est alors la borne supérieure de toutes ces intégrales.

Calcul explicite

On peut parfois montrer qu'une intégrale impropre converge, c'est-à-dire que la limite qui intervient dans la définition ci-dessus existe et est finie, en calculant explicitement cette limite après avoir effectué un calcul de primitive.

Exemple
L'intégrale converge si et seulement si le réel λ est strictement positif[1].

Critère de Cauchy

D'après le critère de Cauchy pour une fonction, une intégrale impropre en b

converge si et seulement si :

Majoration

D'après le critère de Cauchy ci-dessus, pour qu'une intégrale impropre

converge, il suffit qu'il existe une fonction g ≥ | f | dont l'intégrale

converge.

Négligeabilité

On considère deux intégrales impropres en b,

Si, quand tb, (en particulier si ) et g est de signe constant, alors : si l'intégrale

est convergente, l'intégrale

l'est aussi[2] (d'après le § « Majoration »).

Remarque
La condition « de signe constant » est indispensable. Par exemple :
converge, mais
diverge, bien qu'en +∞,

Équivalence

Avec les mêmes notations qu'au paragraphe précédent, si f et g sont équivalentes au point b et de signe constant, alors leurs intégrales sont de même nature puisque f = O(g) et g = O(f).

Exemple
Puisque sin(s) – s est équivalent en 0+ à s3/6 < 0,converge si et seulement si λ < 2.
Remarque
La condition « de signe constant » est, là encore, indispensable (de même que dans le critère analogue pour les séries). Par exemple,
sont équivalentes en +∞ mais leurs intégrales ne sont pas de même nature, d'après la remarque du § précédent.

Règle d'Abel

Une conséquence du critère de Cauchy ci-dessus est le théorème suivant (pour g localement intégrable sur [a, b[) :

Si f est décroissante et de limite nulle en b et si la fonction est bornée, alors l'intégrale de fg sur [a, b[ converge[3].

Exemple:
Pour tout réel λ > 0, l'intégrale converge.

Autres propriétés

Intégration par parties

L'intégration par parties est une technique, parmi d'autres, permettant de calculer une intégrale définie. Pour les intégrales impropres, cette technique peut être également utilisée. Mais il faut faire attention à la définition des « objets obtenus ». Si

existe, ce n'est pas forcément le cas pour

ou pour

Donc si l'on cherche à calculer par exemple l'intégrale

impropre en b, on peut écrire :

avec ax < b puis on effectue un passage à la limite en faisant xb. On observe alors que si les termes

et

sont définis, l'intégration par parties est possible.

Exemple[4]
Pour tout complexe λ de partie réelle strictement positive, l'intégrale
est égale à
,
ce qui prouve qu'elle converge.

Linéarité

La linéarité des intégrales impropres est possible mais requiert la même condition que pour l'intégration par parties : les « objets obtenus » doivent être définis. Ainsi on peut écrire

car les intégrales

sont convergentes.

Mais par contre, l'intégrale

(convergente) ne peut être scindée car les intégrales

sont divergentes.

Exemples classiques

Exemples de Riemann

Pour tout x > 0, l'intégrale

converge si et seulement si a > 1. Dans ce cas : .

Pour x > 0, l'intégrale

(impropre en 0 si c > 0) converge si et seulement si c < 1[5]. Dans ce cas : .

Intégrales de Bertrand

Plus généralement :

  • l'intégraleconverge si et seulement si α > 1 ou (α = 1 et β > 1) ;
  • l'intégraleconverge si et seulement si γ < 1 ou (γ = 1 et β > 1)[6].

Intégrale de Dirichlet

L'intégrale

est semi-convergente et vaut .

Notes et références

  1. Voir le premier exemple du chapitre « Intégrales généralisées » sur Wikiversité.
  2. On peut ainsi justifier la convergence de l'intégrale qui définit la fonction gamma : voir par exemple le début du devoir corrigé « Fonction Gamma et formule de Stirling » sur Wikiversité.
  3. Voir la section « Règle d'Abel » sur Wikiversité.
  4. Un autre exemple classique est l'équation fonctionnelle de la fonction gamma, démontrée au début du devoir corrigé « Fonction Gamma et formule de Stirling » sur Wikiversité.
  5. Voir la section « Exemple de Riemann » sur Wikiversité.
  6. Voir l'exemple « Intégrales de Bertrand » sur Wikiversité.

Articles connexes

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