Institut historique allemand

L’ Institut historique allemand (IHA) ou Deutsches Historisches Institut Paris (DHIP) est un centre de recherche international en histoire. Il est l’un des dix instituts historiques allemands à l’étranger du ministère fédéral de l’Éducation et de la Recherche de la République fédérale d’Allemagne. Depuis 2002, l’IHA est placé sous la tutelle de la Fondation Max Weber – instituts allemands en sciences humaines à l’étranger), qui est rattachée à l’État fédéral et dont le siège se trouve à Bonn.

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L’action de l'IHA se base sur la recherche, la médiation et la qualification. Les projets de recherche portent essentiellement sur l’histoire de l’Europe de l’Ouest de l’Antiquité tardive jusqu’à aujourd’hui. Les points forts sont, au-delà de la France et de l’Allemagne, l'histoire franco-allemande, l'Europe occidentale, l'Afrique et les Digital Humanities. Depuis 1994, les chercheuses et chercheurs de l’IHA travaillent à l’hôtel Duret de Chevry, un hôtel particulier situé dans le Marais à Paris.

Histoire

En 1902, Paul Fridolin Kehr, médiéviste et futur président du Monumenta Germaniae Historica, caresse déjà l’idée de fonder un IHA à Paris, mais son initiative reste au stade embryonnaire[1]. En 1941, la proposition est reprise par un autre médiéviste allemand, Theodor Mayer. Il souhaite notamment que le travail mené à Paris légitime historiquement les « prétentions allemandes d’hégémonie »[2] sur l’Europe. Des querelles de compétences retardent ce projet que la suite de la guerre finit d’enterrer.

Ce n’est plus la domination, mais l’échange et la médiation entre historiennes et historiens de France et d’Allemagne qui président à l’ouverture du « Centre allemand de recherche historique » (Deutsche Historische Forschungsstelle in Paris - DHFS) le . Il est financé par l’État fédéral et géré par la « Commission scientifique de recherche sur l’histoire des relations franco-allemandes », basée à Mayence. Son président, le médiéviste Eugen Ewig, est le père fondateur de l’institut. Les objectifs scientifiques de la fondation du centre sont intimement liés au processus de réconciliation franco-allemande consécutif à la Seconde Guerre mondiale. À l’issue de plusieurs années de négociations, l’institut parvient le , soit un an après la signature du Traité de l’Élysée, à s’institutionnaliser dans la durée. Il prend alors le nom d’Institut historique allemand et est désormais un organisme fédéral placé sous la tutelle du ministre fédéral de la Recherche scientifique. En 1966, Alois Wachtel, médiéviste bonnois, devient son premier directeur[3].

Karl Ferdinand Werner, médiéviste de Mannheim prend sa succession et marque durablement l’institut qu’il dirige de 1968 à 1989, notamment par ses recherches sur le Haut Moyen Âge[4]. Il fonde la revue Francia et diverses manifestations, dont les « Jeudis de l’Institut historique allemand », et organise le déménagement de la rue du Havre dans un immeuble de la 9 rue Maspéro, siège actuel de la délégation allemande auprès de l’UNESCO. Le personnel comme les fonds de la bibliothèque s’accroissent constamment et l’IHA doit à nouveau déménager. Peu avant l’entrée en fonction du successeur de Werner, Horst Möller, futur directeur du Institut für Zeitgeschichte (Institut d’histoire contemporaine) à Munich, la République fédérale acquiert l’hôtel Duret-de-Chevry, un hôtel particulier situé non loin de la Place des Vosges, que Charles Duret-de-Chevry, haut fonctionnaire du roi, fit bâtir autour de 1620[TM1] . L’inauguration officielle du nouveau siège de l’institut se déroule le en présence du président de la République fédérale d’Allemagne, Richard von Weizsäcker. L’IHA est désormais dirigé par Werner Paravicini, qui focalise dans ses recherches sur la Bourgogne du Moyen Âge tardif.

En 2002, l’IHA passe sous l’égide de la fondation d’utilité publique Max Weber Stiftung, qui fédère à ce jour plus de dix instituts dans le monde[4]. Sous la direction de Gudrun Gersmann, les Digital Humanities deviennent une priorité à partir de 2007. Avec de vastes projets de (rétro) numérisation, l’IHA s’engage activement pour l’accès libre, via des initiatives comme perspectivia.net. Depuis 2013, l’IHA est dirigé par l’historien suisse Thomas Maissen, qui élargit l’horizon géographique de l’institut. En 2015, un premier projet de recherche sur l’Afrique sub-saharienne est créé en partenariat avec l’université Cheikh-Anta-Diop de Dakar au Sénégal et le Centre de recherches sur les politiques sociales (CREPOS). Avec la constitution d’un groupe de recherche transnational sur le thème de « La bureaucratisation des sociétés africaines », une deuxième phase de la coopération avec le CREPOS et l’UCAD a été amorcée en (durée : 2017–2021). Dès fin-2018, le groupe de recherche transnational sera membre du « Maria Sibylla Merian Institute for Advanced Studies in Africa » (MIASA), qui est porté par une série de partenaires, dont l’IHA, et financé par le ministère fédéral de l’Éducation et de la Recherche. Le MIASA étudiera les gouvernements démocratiques, le traitement de conflits et les transformations durables.

Directeurs

Mission et objets

Les principales missions de l’IHA sont les suivantes : Recherche, Médiation et Qualification.

Recherche

L’IHA possède ses propres équipes de recherche, travaillant la plupart du temps en coopération avec des partenaires français, et propose divers soutiens à des chercheuses et chercheurs extérieurs venant du monde entier, qui s’intéressent à l’histoire de l’Europe de l’Ouest et à l’Afrique et qui mènent à cet effet des recherches en France ou en Allemagne[5]. Les sources des bibliothèques et archives parisiennes et françaises jouent un rôle de premier plan. Les thèmes de recherche vont du Moyen Âge au XXIe siècle. À l’origine, les projets de recherche en histoire médiévale et moderne prédominaient, notamment le recensement des documents mérovingiens. À partir de 1970, les recherches sur l’histoire contemporaine et du temps présent prennent de l’ampleur. L’IHA explore de nouveaux territoires avec son département des Digital Humanities et le groupe de recherche international à Dakar (Sénégal) créé en 2015, qui travaille en partenariat avec l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar sur la « Bureaucratisation des sociétés africaines ».

Avec des projets de recherche fondamentale, des sources importantes ont été recensées et mises à disposition dans des bases de données.

Des chercheuses et chercheurs invités travaillent régulièrement à l’IHA afin de poursuivre des projets propres mais aussi d’enrichir la recherche au sein de l’institut. Ces résidences font entre autres partie de la coopération de l’IHA avec le LabEx Écrire une histoire nouvelle de l’Europe (EHNE).

Plaque commémorative d'inauguration de l'année 1994 en présence de l'ancien président allemand Richard von Weizsäcker (en latin).

Médiation

L’IHA publie régulièrement ses recherches en divers formats : online, dans des revues scientifiques et sous forme de livres. Par ailleurs, il dirige une bibliothèque scientifique plurilingue spécialisée en histoire allemande. Pour promouvoir la coopération entre historiennes et historiens français, allemands et du monde entier, l’IHA organise régulièrement des colloques internationaux, des séminaires et des conférences, tels que les Jeudis de l’Institut historique allemand. Il s’investit également comme partenaire de colloques d’historiennes et historiens franco-allemands ou internationaux.

Qualification

L’IHA possède ses propres programmes d’aide aux jeunes chercheuses et chercheurs qui travaillent sur l’histoire française, franco-allemande ou ouest-européenne. Il propose à intervalles réguliers des universités d’été, des excursions thématiques, des cours linguistiques spécialisés et des ateliers de paléographie, permettant aux étudiantes et étudiants de découvrir de nouveaux horizons de recherche et d’échanger avec des jeunes en études et des enseignantes-chercheuses et enseignants-chercheurs du monde entier. Les doctorantes et doctorants ainsi que postdoctorantes et postdoctorants peuvent bénéficier de bourses de mobilité, d’allocations de thèse ou du programme Karl-Ferdinand-Werner. L’IHA offre également des bourses de mobilité ou de résidence aux étudiants ainsi que la possibilité d’effectuer des stages scientifiques.

Organisation et projets de recherche

L’IHA emploie environ 40 collaboratrices et collaborateurs (départements scientifiques, bibliothèque, rédaction, relations publiques et presse, service événementiel et administration)[6]. Un conseil scientifique composé de neuf professeures et professeurs d’université français et allemands, toutes périodes confondues, soutient et conseille l’IHA dans son travail. Les projets de recherche sont répartis en cinq départements: Moyen Âge, Histoire moderne, Histoire contemporaine, Digital Humanities, Afrique[5].

Bibliothèque

La bibliothèque de l’IHA est accessible gratuitement à tous les chercheuses et chercheurs munis d’une carte de lecture. Elle offre 46 places de lecture et son catalogue en ligne peut être consulté sur quatre terminaux de recherche avec accès Internet. Le fonds est inventorié dans un catalogue de bibliothèque. La bibliothèque de l’institut est une bibliothèque de consultation sur place, ses ouvrages ne peuvent donc pas être empruntés. Elle est rattachée au service allemand de prêt interbibliothèques. Son fonds comprend à ce jour 120 000 volumes et 350 périodiques vivants sur l’histoire française et allemande, l’histoire des relations entre les deux pays, l’histoire de l’Europe de l’Ouest de l’Antiquité tardive à nos jours et l’histoire régionale de l’Allemagne. La collection des périodiques comprend essentiellement des revues régionales allemandes. Les blogs Franco-Fil et Germano-Fil informent sur les techniques et méthodes de recherche et de gestion de l’information et sont de précieux outils pour accroître les compétences documentaires en sciences humaines et sociales.

Publications

L’IHA publie les résultats de recherche internes ainsi que des thèses de doctorat et d’habilitation sélectionnées. Il poursuit une stratégie d’accès libre, qui permet d’accéder à toutes les publications en ligne.

La revue « Francia », qui paraît depuis 1973, est l’unique revue historique allemande consacrée à l’histoire de l’Europe de l’Ouest. Les articles paraissent en allemand, français ou anglais Son éventail thématique et chronologique va de l’archéologie du IVe siècle aux relations franco-allemandes récentes. Depuis 2008, les comptes rendus sont publiés trimestriellement en ligne dans « Francia-Recensio ».

Fidèles à l’esprit de la revue, les monographies de la collection « Beihefte der Francia » (BdF) lancée en 1975 paraissent en français, allemand ou anglais. Ceci est également valable pour la plus ancienne publication de l’IHA éditée depuis 1962, les « Pariser Historischen Studien » (PHS).

La série « Studien und Dokumente zur Gallia Pontificia » (Études et documents pour une Gallia Pontificia) publie des essais et des éditions de sources des travaux de recherche sur les documents et actes des papes et de leurs légats en France.

Enfin, la collection « Histoire franco-allemande » comprend 11 monographies sur l’histoire franco-allemande de 800 à nos jours et paraît en français et en allemand.

L’IHA, en tant que promoteur du portail germanophone de.hypotheses.org, contribue au développement de blogs en sciences humaines et sociales. Outre des blogs méthodologiques, les groupes de recherche de l’IHA entretiennent également des blogs thématiques.

L’IHA publie grand nombre de ses manifestations sous forme de podcast. Des anciennes séries comme les « Discussions » sont numérisées et accessibles en ligne. Par ailleurs, l’IHA est partenaire de la revue franco-allemande de sciences humaines et sociales Trivium, qui publie des traductions d’articles de référence en français ou en allemand.

Bibliographie

  • Karl Ferdinand Werner: Deutsches Historisches Institut 1958–1983. Institut Historique Allemand 1958–1983, Paris 1983.
  • Gerd Krumeich: Das Deutsche Historische Institut in Paris (DHIP), dans: Geschichte und Gesellschaft 13 (1987), p. 267–271.
  • Werner Paravicini (dir.): Das Deutsche Historische Institut Paris. Festgabe aus Anlaß der Eröffnung seines neuen Gebäudes, des Hôtel Duret-de-Chevry, Thorbecke, Sigmaringen 1994.
    • Id.: Du franco-allemand à l’histoire européenne. L’Institut historique allemand de Paris depuis 1964, dans: Allemagne d’aujourd’hui 162 (2002), p. 150–156.
    • Id.: L’Institut historique allemand. Un lieu de recherche européenne à Paris, dans: Précis analytique des travaux de l‘Académie des sciences, belles-lettres et arts de Rouen 2003 (paru ), p. 225–234.
    • Id.: Wie ist es eigentlich gewesen? Das Deutsche Historische Institut Paris, dans: Revue des Deux Mondes, Paris 2005, p. 223–227. – L’Institut historique allemand de Paris: ce qui s’est réellement passé. dans: Revue des Deux Mondes, Paris 2005, p. 206–210.
  • Ulrich Pfeil: Das Deutsche Historische Institut Paris. Eine Neugründung »sur base universitaire«, dans id. (dir.): Deutsch-französische Kultur- und Wissenschaftsbeziehungen im 20. Jahrhundert. Ein institutionengeschichtlicher Ansatz, Oldenbourg, Munich 2007, p. 281–308. en ligne sur perspectivia.net
    • Id.: Vorgeschichte und Gründung des „Deutschen Historischen Instituts“ Paris. Darstellung und Dokumentation, Instrumenta 17, Thorbecke, Ostfildern 2007. en ligne sur perspectivia.net
    • Id. (dir.): Das „Deutsche Historische Institut“ Paris und seine Gründungsväter. Ein personengeschichtlicher Ansatz., Pariser Historische Studien 86, Oldenbourg, München 2007. perspectivia.net
    • Id., Die Gründung des Deutschen Historischen Instituts in Paris im Jahre 1958, dans: Axel C. Hüntelmann, Michael C. Schneider (dir.), Jenseits von Humboldt. Wissenschaft im Staat 1850–1990, Francfort/M. 2010, p. 49–60.
  • Rainer Babel, Rolf Große (dir.): Das Deutsche Historische Institut Paris / Institut historique allemand 1958–2008, Thorbecke, Ostfildern, 2008. en ligne sur perspectivia.net
  • Rolf Große, Frankreichforschung am Deutschen Historischen Institut Paris, dans: Jahrbuch der historischen Forschung in der Bundesrepublik Deutschland, Berichtsjahr 2012, Munich 2013, p. 21–27. en ligne sur hypotheses.org
  • Matthias Werner, Die Anfänge des Deutschen Historischen Instituts in Paris und die Rückkehr der deutschen Geschichtswissenschaft in die „Ökumene der Historiker“, dans: Rheinische Vierteljahrsblätter 79 (2015), p. 212-245.
  • Rolf Große, Die Entstehungsgeschichte des DHI Paris, dans: Jürgen Elvert (dir.), Geschichte jenseits der Universität. Netzwerke und Organisationen der frühen Bundesrepublik, Stuttgart 2016 (Historische Mitteilungen, Beiheft, 94), p. 141‒153.

Références

  1. Rolf Große, Die Entstehungsgeschichte des DHI Paris, dans: Jürgen Elvert (dir.), Geschichte jenseits der Universität. Netzwerke und Organisationen der frühen Bundesrepublik, Stuttgart 2016 (Historische Mitteilungen, Beiheft, 94), p. 141‒153.
  2. Conrad Grau, Planungen für ein Deutsches Historisches Institut in Paris während des Zweiten Weltkrieges, in: Francia. Forschungen zur westeuropäischen Geschichte 20/3 (1994), p. 109‒128.
  3. Ulrich Pfeil: Vorgeschichte und Gründung des „Deutschen Historischen Instituts“ Paris. Darstellung und Dokumentation, Thorbecke, Ostfildern 2007 (Instrumenta, 17). en ligne sur perspectivia.net
  4. Werner Paravicini (dir.): Das Deutsche Historische Institut Paris. Festgabe aus Anlaß der Eröffnung seines neuen Gebäudes, des Hôtel Duret-de-Chevry, Thorbecke, Sigmaringen 1994.
  5. « IHA »
  6. « IHA »

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