Goguette des Bergers de Syracuse

La Goguette des Bergers de Syracuse est une goguette fondée le 11 Thermidor an XII () à Ménilmontant dans la banlieue de Paris[1]. Elle accepte autant l'adhésion des hommes que des femmes à condition qu'elles soient Poètes ou Musiciennes.

Illustration de la fête de la fondation des Bergers de Syracuse.

Son fondateur est le poète Pierre Colau dit : le berger Sylvandre[2]. Il en est le premier Grand Pasteur, c'est-à-dire président, et l'est encore en 1823[3].

Cette goguette a existé durant au moins plus de 40 ans. À ses débuts, elle comptait au maximum 20 membres[4]. Par la suite ce nombre a augmenté.

À propos de la goguette des Bergers de Syracuse

La Musette du Hameau, chansonnier de la Société lyrique des Bergers de Syracuse.

À l'ouverture de chaque séance des Bergers de Syracuse était chanté La Ronde des Bergers de Syracuse, œuvre de Pierre Colau, dont le texte est accessible sur Internet[5]. Deux autres œuvres de Pierre Colau : La Nymphe Aréthuse aux bergers et Les bocages de Belleville paraissent par leur texte avoir été visiblement utilisées aux Bergers de Syracuse[6].

Gérard de Nerval fit partie de cette goguette. Il en parle dans une description de sa visite à une goguette de Saint-Germain-en-Laye :

... En passant dans la rue de l'Église, j'entendis chanter au fond d'un petit café. J'y voyais entrer beaucoup de monde et surtout des femmes. En traversant la boutique, je me trouvai dans une grande salle toute pavoisée de drapeaux et de guirlandes avec les insignes maçonniques et les inscriptions d'usage. J'ai fait partie autrefois des Joyeux et des Bergers de Syracuse ; je n'étais donc pas embarrassé de me présenter.
Le bureau était majestueusement établi sous un dais orné de draperies tricolores, et le président me fit le salut cordial qui se doit à un visiteur. Je me rappellerai toujours qu'aux Bergers de Syracuse, on ouvrait généralement la séance par ce toast : « Aux Polonais !... et à ces dames ! » Aujourd'hui, les Polonais sont un peu oubliés[7].

Auguste Giraud, président de la Société du Caveau écrit à propos des Bergers de Syracuse :

Chaque membre de cette société portait un nom de berger de la mythologie antique. Le Président était aussi appelé Grand Pasteur et le lieu de réunion Le Hameau[1].

Louis-Agathe Berthaud écrit en 1841[8] :

L’affilié de goguette ne possède pas d’autres droits que ceux du simple visiteur, seulement, lorsqu’on l’appelle pour chanter, on fait précéder son nom de celui de la goguette à laquelle il appartient, tandis que celui du visiteur est précédé du mot ami. Ainsi on appellera le Grognard Pierre, le Braillard Jacques, et l’on dira l’ami Jean, l’ami Paul. Il n’y a pas d’autre distinction entre les affiliés et les visiteurs. Deux goguettes seulement, celle des Bergers de Syracuse et celle des Infernaux, imposent à leur affiliés des noms en rapport avec le patronage sous lequel elles sont placées ; les Bergers empruntent ces noms aux églogues et aux bucoliques ; les Infernaux à l’enfer.

Des fragments du procès-verbal de la fête de fondation[9] ont été publiés par Georges de Dubor dans un article paru dans la Revue Bleue en 1907. Il nous apprend aussi que l'article 34 du règlement de la goguette précise que « Tout berger qui oublie son flageolet aux séances paie vingt-cinq centimes d'amende. » Il s'agit d'un petit flageolet que les membres arborent comme signe distinctif pendu à leur boutonnière[10].

Émile Debraux a publié une chansonnette intitulée Les bergers de Syracuse[11].

Présentation de la goguette des Bergers de Syracuse

En 1825, cet Avis de l'Éditeur présentant les Bergers de Syracuse ouvre l'édition de La Musette du hameau Chansonnier de la société lyrique des bergers de Syracuse :

La Société Lyrique des Bergers de Syracuse, fondée le , se compose d'Amateurs de Poésie et de Musique ; son Président a le titre de Grand Pasteur ; elle a un Calendrier Pastoral et Mythologique ; les Mois y sont consacrés aux Muses et aux Nymphes, et les Saisons aux Fleurs, aux Amours, aux Jeux et aux Plaisirs. Elle se réunit le premier Mercredi de chaque mois, dans un lieu nommé, par fiction, le Hameau, et célèbre tous les ans à la campagne l'anniversaire de sa fondation par une fête pastorale dont les dames font l'ornement et reçoivent de la part des Administrateurs du Hameau, des compliments, des fleurs et des chansons : elles doivent être vêtues de blanc et décorées de rubans aux couleurs de leurs Bergers.

Une réunion de la goguette des Bergers de Syracuse vers 1839

Louis-Agathe Berthaud écrit en 1841[8] :

Il y a environ deux ans que l’auteur de cet article fut introduit pour la première fois dans une goguette, aux Bergers de Syracuse. Il s’y trouvait, ce jour-là, une centaine de bergers et quinze à vingt bergères. Pas un geste, pas un mot mal à propos ne s’y fit remarquer, et la soirée s’écoula aussi paisiblement que dans le monde le plus élégant. C’étaient pourtant des ouvriers, pauvres braves gens que l’on dit si turbulents, si barbares encore. Ils avaient achevé leur pénible journée, et ils s’en étaient venus chanter à la goguette pour se reposer un peu. Ils buvaient en chantant, et l’ordre le plus riant régnait parmi eux. C’étaient des hommes en blouses, en vestes, aux mains dures, aux visages noircis par le travail et la sueur ; c’était la richesse et la force de Paris, les bras qui construisent, pétrissent le pain, travaillent l’or et la soie, bâtissent les églises, et qui, un jour de soleil, renversent les croix et font des révolutions ! Les bergères, comme on le pense bien, étaient aussi des ouvrières, laborieuses abeilles, se levant à l’aube du jour pour composer un miel qui ne leur appartiendra pas ; c’étaient des femmes habillées d’indienne et coiffées de bonnets ou de madras à dix-neuf sous ; pauvres femmes, jolies sans le savoir, bonnes et honnêtes par habitude ; charmantes créatures prédestinées comme les fleurs des champs, et condamnées à naître et à mourir pour le plaisir du riche, dans les buissons ; et tout cela, en vérité, ces hommes et ces femmes, avaient gardé entre eux, et malgré le vin et les chansons, une admirable réserve et une retenue vraiment décente !...

Les Bergers de Syracuse vus par la Revue des deux Mondes en 1846

En 1846, Charles Louandre écrit dans la Revue des deux Mondes[12] :

Parmi les sociétés purement littéraires, celles qui nous rapprochent le plus du passé ont une sorte de privilège d 'âge, et doivent nous occuper d'abord. La Société lyrique des Bergers de Syracuse est une églogue vivante qui, sans aucun doute, eût attendri jusqu'aux larmes M. de Florian. Cette société, fondée en 1804, a pour emblème une houlette ; ses poètes n'y parlent jamais de leur lyre, mais de leur musette et de leurs pipeaux, et, quand la séance est ouverte, les qualifications prosaïques de la politesse moderne sont remplacées par les appellations quasi-virgilliennes d'aimable berger et d'aimable bergère. Estelle et Némorin auraient pu, on le voit, réclamer la présidence de cette académie pastorale, qui, à défaut d'autre mérite, a du moins l'avantage de prouver que les traditions naïves ne sont point complètement effacées parmi nous.

Notes et références

  1. Lettre d'introduction d'Auguste Giraud Président de la Société du Caveau Le Caveau, Société lyrique et littéraire, Table générale des chansons et poésies diverses, publiées en 26 volumes, par la Société du Caveau, de 1834 à 1860, ...
  2. Il est né à Paris en 1763 et mort après 1831. On[Qui ?] peut lire un certain nombre de ses œuvres sur Internet, par exemple : Les muses en goguettes, choix de chansons et rondes de table, par Pierre Colau, président de la société lyrique des Bergers de Syracuse. Il signe Napoléon au Panthéon de l'Histoire, Résumé de tout ce grand homme a fait de Merveilleux., édité Chez J. L. Bellemain, Paris 1830 : « Pierre Colau, Fondateur de la société lyrique des Bergers de Syracuse. » Notice sur Pierre Colau.
  3. Ce qui apparaît sur la couverture d'un recueil publié en 1823
  4. Article premier du règlement imprimé en 1829 :
    La Société se compose de vingt auteurs, qui se nomment Bergers, et prennent chacun un nom pastoral. Ils sont tous décorés d'un petit flageolet suspendu à a boutonnière. Leur nombre ne peut être augmenté.
    Voir l'intégralité du règlement de 1829 en version pdf.
  5. Voir le texte de la Ronde des Bergers de Syracuse. Ou bien une autre édition de la Ronde des Bergers de Syracuse.
  6. Voir le texte de : La Nymphe Aréthuse aux bergers et celui de : Les bocages de Belleville.
  7. Extrait de Promenades et souvenirs, paru dans l'Illustration des 30 décembre 1854, 6 janvier et 3 février 1855, chapitre III Une société chantante
  8. Extrait du texte de Louis-Agathe Berthaud, Le goguettier, illustré par Paul Gavarni, paru dans le tome 4 de l'ouvrage Les Français peints par eux-mêmes, Encyclopédie morale du dix-neuvième siècle. Louis Curmer éditeur, Paris 1841, pages 313-321, avec deux illustrations pleine page non numérotée hors texte.
  9. Notice bibliographique de ce document à la BNF : Statuts de la société lyrique des Bergers de Syracuse, fondée le 11 thermidor an 12 (30 juillet 1804.), signés : le grand Pasteur Sylvandre (P. Colau). - Suivi d'un procès-verbal en prose de la fête de fondation, Paris, imprimerie de Nouzou, s. d., In-8°.
  10. Georges de Dubor écrit sur Les Bergers de Syracuse en 1907, longtemps après la disparition de cette société. Ses propos sont à prendre avec beaucoup de réserve. Ils se terminent par une totale contre-vérité : la goguette des Bergers de Syracuse a disparu en 1830, car il n'a rien trouvé d'édité par celle-ci postérieur à 1829.
  11. Cette chansonnette peut être lue sur Internet .
  12. Charles Louandre De l'association littéraire et scientifique en France, I – Les sociétés savantes et littéraires de Paris, Revue des deux Mondes, 1846, p. 198.

Voir aussi

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