Georges Ripert

Louis Marie Adolphe Georges Ripert, né le à La Ciotat[1] et mort le à Paris, est un professeur de droit et homme politique français, profondément conservateur voire réactionnaire [2], frère du félibre Émile Ripert. Eminent juriste et auteur de nombreux traités, il devient doyen de la faculté de droit de Paris. Après la défaite, il se rallie au régime de Vichy et devient membre, durant toute la guerre, du Conseil national de Vichy (titre du gouvernement), ainsi que secrétaire d'Etat à l'Instruction publique et à la Jeunesse de septembre à . Echappant à l'épuration pour des « faits de résistance » sur lesquels on n'a aucun renseignement [2], il est réintégré et continue à écrire, principalement des traités conservateurs voire nostalgiques de la « Révolution nationale » [2].

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Avant-guerre

Il est doyen de la Faculté de droit de Paris. À partir de 1933, et en raison de son catholicisme pratiquant [2], il demande à ses étudiants d'accueillir fraternellement les victimes de l'antisémitisme nazi : « J'aime l'étudiant qui, sachant que les jeunes gens de son âge sont dans leur pays chassés de l'Université, à cause de leur race ou de leur religion, fait une place à côté de lui, sur son banc, au camarade qui n'est pas de sa religion ou de sa race[3] ». Il est élu membre de l'Académie des sciences morales et politiques en 1937.

Sous Vichy

Malgré ses positions contre l'antisémitisme au début des années 1930, Ripert se rallie au régime de Vichy et accepte sa nomination comme secrétaire d'État à l'Instruction publique et à la Jeunesse, poste qu'il conserve du au , avec Joseph Hamel, spécialiste de droit commercial et futur doyen, comme directeur de cabinet. Il demeure durant toute l’Occupation membre du Conseil national de Vichy.

Peu avant l'entrevue de Montoire, il adresse aux recteurs et aux inspecteurs d’académie une circulaire qui détaille les modalités à suivre afin de dresser les listes « des fonctionnaires, hommes et femmes, qui, de notoriété publique ou à votre connaissance personnelle, doivent être, aux termes de l’article 1er [de la loi du 3 octobre 1940 sur le « statut » des Juifs], regardés comme juifs. » Il procède aux premiers renvois de professeurs juifs de l'Université en application du Statut des juifs[4]. Il signe ainsi la révocation de René Cassin dont il était l'ami avant-guerre et il le fait avec des « attendus infamants »[5] selon l'intéressé[6].

Enfin, lorsqu'il ré-édite, en 1943, le Traité élémentaire de droit civil de Marcel Planiol, avec l'aide de Jean Boulanger, dans une version revue et complétée, il justifie les diverses lois sur le statut des Juifs, en déclarant qu'elles ne sont pas de simples conséquences de la « haine raciale », mais celles du « rôle néfaste que certains politiciens et financiers juifs avaient joué sous la Troisième République » [7]. La ré-édition, en 1946, de ce volume, constitue un revirement de cap, Ripert mentionnant une « grave atteinte à l’égalité » et l'annulation « en bloc par l’Ordonnance du 9 août 1944 (art. 33) rétablissant la légalité républicaine » [7] (du reste, il est inexact de parler d'annulation en bloc, certaines dispositions sur la nationalité française perdurant plus longtemps [8]).

En 1943, il préface et publie un recueil d'études sur le droit national-socialiste, Etudes de droit allemand - Mélanges Oflag II B (Paris, LGDJ, 1943) lequel inclut des contributions de H. Balazard, C.-A. Colliard, M. Doublet, P.-M. Gaudemet, M. Hubert, Robert Vouin et J. Hamelin. Dans cette préface, Georges Ripert affirme l'importance de l'étude et de la connaissance du système juridique allemand, et ce bien qu'il soit corrompu par le nazisme. Il trouve en ces quelques pages l'occasion de réaffirmer la « richesse scientifique » des doctrines et des droits étrangers, l'importance du droit comparé et envisage la possibilité d'un droit européen supranational en vue d'une organisation économique[9].

Après-guerre

Arrêté le , il est libéré le . Le , la Haute Cour de justice prononce un non-lieu en sa faveur pour actes de résistance. C'est vraisemblablement la non-continuation de son poste au Secrétariat d'Etat dans le second gouvernement Laval qui lui vaut d'échapper à l'épuration [2]; des faits allégués de résistance, aucune note sténographiée du procès n'est établie [2].

Il est réintégré, à l'Université et à l'Institut, et rédige différents traités, dont un Traité élémentaire de Droit commercial (1948), ou Le Déclin du droit (1949) puis Les Forces créatrices du droit (1955), deux ouvrages profondément réactionnaires qui, entre autres, théorisent l'impératif de l'obéissance aux lois, thème peu en vogue auprès des gaullistes et autres compagnons (communistes et autres) de la Résistance [2].

Notes et références

  1. Archives des Bouches-du-Rhône, commune de La Ciotat, acte de naissance no 80, année 1880 (consulté le 16 décembre 2014) (sans mention marginale de décès)
  2. Bio de juristes : Ripert, blog de D. Mainguy, professeur de droit à l'Université de Montpellier (date non renseignée)
  3. Discours de la rentrée universitaire de 1938, paru dans La Juste Parole, 5 mars 1939, sous le titre « Paroles humaines et chrétiennes ».
  4. Tristan Lecoq, L'inspecteur général qui a dit NON , publié dans L'Histoire no 357, 10/2010.
  5. René Cassin, Les Hommes partis de rien. Le réveil de la France abattue (1940-1941), Paris, Plon, 1975. p. 115
  6. Simon Epstein, Un paradoxe français, antiracistes dans la Collaboration, antisémites dans la Résistance, Albin Michel, 2008, p. 38-39 (ISBN 978-2-226-17915-9)
  7. Cité in S. Falconieri, Le « droit de la race ». Apprendre l’antisémitisme à la faculté de droit de Paris (1940-1944), Clio n°7, mars 2014, §50 et 63
  8. Danièle Lochak, « Les mauvais Français du maréchal », Plein droit (revue du GISTI), n° 29-30, novembre 1995
  9. Etudes de droit allemand : Mélanges Oflag II B, Paris, LGDJ, 1943. p. I-VIII

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