Francia Márquez
Francia Elena Márquez Mina est une militante afro-colombienne des droits humains et de l'environnement en Colombie. Elle reçoit le prix Goldman pour l'environnement en 2018 pour son travail contre l'extraction illégale de l'or dans sa communauté de La Toma[1]. Elle est notamment connue pour l'organisation de la « marche des Turbans », rassemblement de 80 femmes qui ont parcouru 350 miles jusqu'à la capitale Bogotá[2]. Elles revendiquent la fin de l'exploitation illégale des mineurs et des mines dans leur communauté[3],[4],[5]. L'accord conclu à la fin de la marche avec le Ministère de l'intérieur n'est pas appliqué[2].
Biographie
Francia Márquez est née en 1982[6] à Yolombo, dans la municipalité de Suárez dans le Cauca[7]. Entre 1994 et 1997, elle participe au processus d'évaluation des impacts que générerait à sa communauté et sur le territoire le gigantesque projet de déviation du fleuve Ovejas vers le barrage Salvajina.
En 2009, elle s'engage au Conseil communautaire de La Toma pour lutter contre l'exploitation des mines alentour sans l'autorisation des habitants[8], tout en menant des études de droit pour acquérir des compétences juridiques mises à profit dans ce conflit[2].
En 2013, elle se réfugie dans la ville de Cali avec ses deux enfants suite à des menaces de mort[2]. Elle est nommée représentante légale du Conseil Communautaire des communautés afro-descendantes de La Toma à partir du 12 décembre 2016. Elle participe également aux assemblées permanentes déclarées par la communauté afro-descendante de Cauca, laquelle a exigé de l'INCODER (Instituto Colombiano de Desarrollo Rural, actuellement l'Agence Nationale du Territoire en Colombie) qu'elle protège les territoires ancestraux des communautés noires et de garantir des accès à la terre.
En 2014, elle entreprend des études de droit à Cali afin de mieux comprendre le jargon juridique et les enjeux légaux autour des questions qu'elle défend. Elle participe à la messe interethnique et interculturelle dans le Nord du département du Cauca, messe lors de laquelle il est demandé au gouvernement d'arrêter les extractions minières illégales et d'octroyer des titres miniers sans consultation préalable sur des territoires ethniques. L'idée est ainsi de réaliser des actions qui permettraient d'identifier de possibles actes de corruption institutionnelle face aux extractions minières illégales qui contaminent le territoire et également de prendre en considération les nombreux accidents de personnes restées coincées sous la terre, dans les tunnels des mines. Elle mène la Mobilisation des femmes noires pour la protection de la vie et des territoires ancestraux, qui a été réalisée depuis le Nord du Cauca jusqu'à Bogota, la capitale du pays, entre le 17 novembre et le 11 décembre 2014[9]. Le but de cette mobilisation est de visibiliser les impacts que génère l'extraction minière illégale et anticonstitutionnelle dans le département du Cauca, et d'exiger de la part du gouvernement de réaliser les actions nécessaire pour protéger le territoire et ses habitants, ainsi que lutter contre les menaces et déplacements forcées que subissent les dénonciateurs de ces activités. En décembre, Francia Márquez se rend à La Havane avec une des délégations des victimes du conflit et participe à la rédaction d'un accord qui insiste sur l'aspect ethnique. Elle déclare qu'«on ne peut parler de paix lorsqu’il y a encore des victimes et sans stratégie pour préserver l’environnement»[6]. À la fin de l'année 2014, elle se voit forcée de quitter son village d'origine au vu des nombreuses menaces qu'elle reçoit pour ses activités contre l'extraction minière illégale. Elle est ainsi invitée à Cuba afin de développer des activités avec les délégations du gouvernement et les FARC dans le cadre du processus de paix colombienne[6].
En 2015, elle participe à une assemblée permanente pour l'association des Conseils Communautaires du Nord du Cauca. Au vu de menaces de mort qu'elle continue à recevoir, Francia Marquez exige alors de voir les accords préalablement passés se mettre concrètement en place entre le gouvernement et les populations locales afro-colombiennes et indigènes. Elle reçoit le Prix National de défense des Droits de l’Homme de la part de l'organisation suédoise Diakonia[8]. En 2016, elle représente sa communauté lors des négociations pour un accord de paix à La Havane entre le gouvernement colombien et les FARC[2]. En 2017, elle ouvre à Cali un restaurant avec son fils et une cousine[8].
En 2016, Francia Márquez participe au Sommet national agraire et populaire pour mettre en avant le vécu des victimes. En avril, elle voyage en Suisse pour dialoguer à propos des défis du processus des négociations de la paix en Colombie et des droits des peuples locaux afro-colombiens et indigènes.
En mai 2017, elle voyage à Paris pour le 11ème Forum CIRGL-OCDE-Groupe d’experts des Nations Unies sur les chaînes d’approvisionnement en minerais responsables[10]
En 2018, elle se présente au Congrès en Colombie pour le Conseil communautaire du fleuve Yurumangui, en collaboration avec le candidat à la présidence Gustavo Petro.
Le 4 mai 2019, avec deux autres activistes, elle est victime d'un attentat perpétré à l'arme à feu et aux grenades, dans la province du Cauca. Deux gardes du corps ont été blessés[11]. Cet attentat est un exemple de l’inefficacité des programmes de protection mis en place par le gouvernement colombien.
Francia Márquez a donc voyagé dans le monde entier, des Etats-Unis, l'Equateur, le Panama, le Mexique, Cuba, la Suisse et la France, pour visibiliser à l'international les violences systématiques et contraires aux droits humaines auxquelles est constamment soumis le peuple afrocolombien. Ella a participé à de nombreux forums, donné des conférences dans des universités et pris la parole dans des réunions avec des parlementaires du Congrès américain, dans des institutions gouvernementales et non-gouvernementales, des événements académiques. Sa parole sur le racisme structurel en Colombie, notamment envers les femmes noires victimes de violences et de viols de guerre, a eu une grande importance.
Références
- (en-US) « Francia Márquez », sur Goldman Environmental Foundation (consulté le )
- Najet Benrabaa, « Racisme – Francia Márquez : « La société colombienne m’a appris à avoir honte d’être une femme noire » », sur jeuneafrique.com, (consulté le ).
- (en) « Francia Márquez - Goldman Environmental Foundation » (consulté le ).
- (en) « This Woman Who Saved Her Afro-Colombian Community's Land From Miners Won Prestigious Prize », (consulté le ).
- (en) Anastasia Moloney, « Death threats won't stop Colombian anti-mining activist », (consulté le ).
- Anne Proenza, « D’or et de sang, le combat de Francia Marquez pour les terres des Afro-Colombiens », Le Temps, (ISSN 1423-3967, lire en ligne, consulté le ).
- (en) Robert Valencia, « Francia Márquez, Renowned Afro-Colombian Activist: What Environmental Racism Means To Me », sur earthjustice.org, (consulté le ).
- Sarah Nabli, « Francia Marquez, une femme au cœur de la lutte afrocolombienne », sur information.tv5monde.com, (consulté le ).
- « Rencontre avec Francia Márquez, Prix National pour la Défense des Droits Humains en Colombie », sur France Amérique Latine, (consulté le )
- Forum CIRGL-OCDE-Groupe d’experts des Nations Unies, « PROGRAMME 11ème Forum CIRGL-OCDE-Groupe d’experts des Nations Unies sur les chaînes d’approvisionnement en minerais responsables », sur OECD, 2-4 mai 2017 (consulté le )
- « Le peuple afro-colombien veut aussi la paix », sur Le Courrier, (consulté le )
Liens externes
- Ferry, Elizabeth et Stephen Ferry. « Mines et défense du territoire afro-colombien: la communauté de Yolombó, Colombie. " ReVista: Harvard Review of Latin America (hiver 2018)
- Kane, Patrick. "Pourquoi 22 femmes afro-colombiennes ont-elles occupé le ministère colombien de l'Intérieur pendant cinq jours?" HuffingtonPost.co.uk, (3 décembre 2014)
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