Fear and Desire

Fear and Desire est le premier long métrage de Stanley Kubrick, en noir et blanc, sorti en 1953. L'action se déroule en période de guerre et se focalise sur un groupe de soldats, thème cher à Kubrick, que l'on retrouve par la suite de manière centrale dans Les Sentiers de la gloire (1957) et Full Metal Jacket (1987).

Fear and Desire
Fear and Desire
Réalisation Stanley Kubrick
Scénario Howard Sackler
Acteurs principaux
Pays d’origine États-Unis
Genre Guerre
Durée 62 minutes
Sortie 1953


Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Ayant connu une diffusion limitée auprès du grand public à sa sortie, le film est ensuite devenu longtemps introuvable par son absence d'exploitation commerciale (aucune édition en cassette ou DVD) elle-même due à la destruction de la quasi-totalité des copies connues du film par la volonté du réalisateur. Une restauration du film a néanmoins été entreprise en 2011 à partir de l'une des rares copies conservées de la pellicule et a abouti à la première sortie du film pour le grand public en édition DVD et Blu-ray en octobre 2012 aux États-Unis[1]. Le film a fait son retour en France le avec une sortie de la version restaurée au cinéma[2]. Avant la restauration du film achevée en 2012, une édition « pirate » de mauvaise qualité circulait sur Internet et en DVD depuis quelques années[3].

Ce film marque par ailleurs les premiers pas de Paul Mazursky dans le cinéma, plus connu ensuite comme réalisateur.

Synopsis

Le scénario du film se déroule lors d'une guerre imaginaire entre deux nations volontairement non identifiées. Le cadre de l'action est défini en introduction par un narrateur en voix off qui explique : « Il y a une guerre dans cette forêt. Pas une guerre qui a eu lieu, ni une guerre qui aura lieu, seulement une guerre. Et les ennemis qui luttent ici n'existent que si nous leur donnons un caractère humain. Cette forêt, et tout ce qui s'y passe maintenant, est donc en dehors de l'Histoire. [...] Ces soldats que vous voyez parlent notre langue et sont de notre temps mais n'ont pas d'autre patrie que l'esprit. ».

Un avion transportant quatre soldats (le lieutenant Corby, Mac, Sidney et Fletcher) s'est écrasé en forêt à une dizaine de kilomètres derrière les lignes de l'armée ennemie. Les quatre hommes, tous rescapés, cherchent donc à rejoindre leur camp en s'échappant de ce territoire hostile sans se faire abattre. Ils parviennent à atteindre une rivière et construisent un radeau pour se laisser porter par le courant qui devrait les ramener en territoire allié. Alors que les quatre soldats attendent la nuit pour mettre discrètement le radeau à flot, une jeune femme faisant de la pêche tombe nez-à-nez avec eux. Le dialogue est impossible du fait que les quatre militaires et la jeune femme ne parlent pas la même langue. Craignant que leur position soit révélée à l'armée ennemie par la jeune femme, le lieutenant décide de l'attacher à un arbre et de la faire surveiller par Sidney tandis que les trois autres soldats repartent inspecter les environs. Sidney se révèle avoir l'esprit dérangé à cause des violences de la guerre et surtout à cause de son désir envers la prisonnière. Il décide de détacher la captive en espérant qu'elle l'enserrera dans ses bras, mais la prisonnière profite de l'occasion pour essayer de s'enfuir : le jeune homme panique et la tue. Alerté par les coups de feu, Mac vient à sa rencontre et trouve Sidney dans un état de folie avancé : ce dernier disparait soudainement dans la forêt dans un grand éclat de rire.

À la suite de cela, le lieutenant, Mac et Fletcher aperçoivent avec des jumelles qu'un général de l'armée ennemie se trouve de l'autre côté de la rivière avec une troupe de soldats. De plus, un avion ennemi en état de marche est stationné non loin et pourrait être utilisé pour s'enfuir de manière plus sûre qu'avec le radeau. Mac insiste pour qu'à la nuit tombée, une opération militaire soit tentée pour abattre le général ennemi et s'emparer de l'avion. L'opération mise en place est risquée : à la nuit tombée, Mac monte sur le radeau pour se rapprocher du bataillon ennemi et créer une diversion qui entraine les soldats ennemis sur la rive du fleuve, ne protégeant plus le baraquement du général qui est en conversation avec un capitaine. Le lieutenant Corby et Fletcher approchent du baraquement où se trouvent les deux hauts gradés ennemis et les abattent. Néanmoins, avant ces exécutions, Corby et Fletcher se rendent compte qu'ils font face à eux-mêmes : les deux factions opposées sont interprétées par les mêmes acteurs.

Corby et Fletcher parviennent à s'emparer de l'avion ennemi et à s'envoler. Mac est gravement touché par les répliques ennemies et dérive sur son radeau. Le film se termine sur une séquence dans laquelle Sidney avance à pied dans l'eau et rejoint le radeau de son camarade mourant pour y monter et se laisser porter par le courant et rejoindre à son tour le camp allié.

Réalisation

Après avoir réalisé en 1951 les courts métrages Day of the Fight et Flying Padre, Kubrick estimait avoir acquis suffisamment d'expérience pour commencer la réalisation d'un premier long métrage[4]. Le scénario du film fut écrit par Howard O. Sackler, un ancien camarade de classe que Kubrick avait rencontré à la William Howard Taft High School de New York, et qu'il estimait beaucoup[4].

Kubrick disposait d'un budget très faible pour son film. Des amis et des parents lui avancèrent 1 000 $ dans un premier temps, puis son oncle Martin Perveler lui donna un supplément de 9 000 $ pour réaliser le film[4].

Avec ce budget, Kubrick réunit une équipe de quatorze personnes dont les cinq acteurs[5], et débuta le tournage non loin de Los Angeles à San Gabriel[4]. Le tournage dura cinq semaines[4]. Pour réduire les frais d'équipement technique, Kubrick décida de tourner le film sans bande sonore, et de réaliser ensuite un doublage en studio. Ce choix fut perdant, car l'ajout du doublage, de la musique et des effets sonores lui coûta 50 000 $, une somme bien plus élevée que le budget initial[6]. L'aide financière nécessaire pour ce coût supplémentaire fut avancée par Richard de Rochemont, un producteur qui avait été intéressé par les premières réalisations de Kubrick[6]. L'ensemble du montage fut réalisé par Kubrick[5].

Au cours du projet, le film changea plusieurs fois de nom. À l'origine, le film devait s'intituler « The Trap[4] », qui devint « The Shape of Fear » avant de prendre sa forme définitive : « Fear and Desire »[6].

Fiche technique

  • Titre : Fear and Desire
  • Réalisation, chef opérateur, montage et production : Stanley Kubrick
  • Scénario : Howard Sackler
  • Musique : Gerald Fried
  • Distribution : Joseph Burstyn
  • Budget : 60 000 $
  • Pays d'origine : États-Unis
  • Format : noir et blanc
  • Langue : anglais
  • Genre : Guerre
  • Durée : 62 minutes
  • Sortie : 1953

Distribution

  • Frank Silvera : le Sergent Mac
  • Paul Mazursky : Sidney, le bleu
  • Kenneth Harp : le Lieutenant Corby / le Général ennemi
  • Stephen Coit : Fletcher / le Capitaine ennemi
  • Virginia Leith : la jeune femme
  • David Allen : le narrateur

Accueil critique

Mis à part l'acteur d'origine jamaïcaine Frank Silvera, qui retrouvera Kubrick dans Le Baiser du tueur (1955), aucun des autres comédiens n'a vraiment d'expérience devant la caméra.

Le film a été distribué par la société de Joseph Burstyn, spécialisée dans la promotion de films indépendants et étrangers sur le sol américain, qui était capable de remplir une salle avec un film d'art et d'essai. Il existe une affiche promotionnelle de ce film qui visiblement cible un public masculin, susceptible de réagir à un supposé parfum de scandale ; du fait de sa courte durée, il est présenté avec un autre film en double programme, The Male Brute... qui n'est autre que L'Enjôleuse de Luis Bunuel (cf. sexploitation)[7].

Les critiques ont généralement été partagées vis-à-vis de la mise en scène elle-même, mais le New York Times a salué le talent de photographe de Kubrick mis en valeur par d'intéressants cadrages dans ce film, et la scène du meurtre de la jeune fille a été considérée comme pouvant « entrer dans les annales du cinéma » par Mark Van Doren, de l'université Columbia[5].

Disparition puis restauration

Dans un premier temps, Kubrick tente de faire disparaitre son premier long métrage, le considérant comme une œuvre d'« amateur »[5]. Il se serait évertué à racheter la plupart des copies en circulation pour les détruire, cependant que la plupart des autres copies encore existantes devenaient inexploitables du fait de l'usure de la pellicule[3]. Néanmoins, il existait avant 2012 deux copies en bon état, l'une détenue par la George Eastman House à Rochester (État de New York), et une autre, par la Cinémathèque de Los Angeles[3].

Pour la première fois, une édition officielle en DVD est sortie en aux États-Unis[1]. Jusqu'à présent, seules des copies pirates de mauvaise qualité étaient disponibles en DVD et sur le net[3].

La bibliothèque du Congrès met à la disposition des lecteurs une version restaurée de ce film en libre accès.

Bibliographie

  • Paul Duncan, Stanley Kubrick, filmographie complète, Taschen, , 192 p. (ISBN 978-2-7434-5173-8)

Notes et références

Liens externes

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