Fabrice Balanche

Fabrice Balanche, né le à Belfort[1], est un géographe français, spécialiste de la géographie politique du Proche-Orient, en particulier de la Syrie et du Liban[2],[3].

Régulièrement cité dans les médias à propos du conflit syrien, son analyse fait l'objet de controverses et ses écrits à ce sujet font l'objet de critiques pour des contradictions avec les faits, selon d'autres spécialistes.

Biographie

En 2000, il soutient sa thèse Les Alaouites, l'espace et le pouvoir dans la région côtière syrienne : une intégration nationale ambiguë, qui sera reprise et publiée en 2006 sous le titre La région alaouite et le pouvoir syrien[4].

Docteur en géographie politique[5],[6] de l'Université de Tours (2000)[7] et agrégé de géographie[8], il est l'auteur de plusieurs publications[9],[10].

Il a vécu une dizaine d'années entre le Liban et la Syrie[11], pays qui représentent ses principaux champs d'étude[7] depuis 1990[5]. Son domaine de recherche se concentre sur l'interaction entre le pouvoir, la communauté et le territoire[5].

Le 29 novembre 2013, il obtient l'habilitation à diriger des recherches sur le thème : Le facteur communautaire dans l’analyse des espaces syriens et libanais[12].

Il a été maître de conférences[13] en géographie, professeur adjoint de géographie et directeur de recherche[14] à l'université Lyon 2[5], où il a dirigé le Groupe de Recherche sur la Méditerranée et le Moyen-Orient (GREMMO) jusqu'à son départ fin 2015[7],[15],[16],[17].

En 2012, il publie l'Atlas du Proche-Orient arabe, ouvrage consacré aux quatre États du Bilad el-Cham qui, selon Confluences Méditerranée, amène « dans un paysage éditorial déjà fourni (...) une réelle valeur ajoutée » notamment grâce à sa cartographie « originale et pédagogique »[18].

En 2014, la Géopolitique du Moyen-Orient paraît à la Documentation française[19],[20].

Il dépose un recours administratif pour avoir été écarté en décembre 2014 de la candidature à un poste de maître de conférences à l'Institut d'études politiques de Lyon[21],[22],[23]. Le tribunal lui donne raison en décembre 2016[24]. Selon l’universitaire Jean-Claude Pacitto, le recours de Fabrice Balanche mettrait en lumière « les vraies raisons – clientélistes, politiques – qui président à des exclusions, en particulier dans les sciences humaines et sociales » dans des établissements d’enseignement supérieur en France. Cette affaire révèlerait « la domination de certains courants de pensée sur les études consacrées au Moyen-Orient, souvent marquées soit par une complaisance envers l’islamisme, soit par un prisme d’extrême gauche, soit par les deux à la fois »[25]. Fabrice Balanche avance que sa candidature pour un poste de maître de conférences à Sciences Po Lyon avait été écartée en raison non seulement de « raisons clientélistes », mais aussi parce que ses analyses sur la Syrie allaient « à l’encontre d’une certaine posture idéologique, qui s’avérait être la ligne du ministère des Affaires étrangères à propos de la révolution syrienne »[26].

Il fustige une « vision totalitaire de la recherche », un « islamisme rampant », un « néo-féminisme radical », un « islamo-gauchisme », dont il se dit victime, il qualifie l'écriture inclusive de « dogme » dans le milieu universitaire « soumis à une idéologie totalitaire », un « terrorisme intellectuel »[27],[28].

En 2015, Fabrice Balanche décide de se mettre en disponibilité de Lyon 2 et de s'expatrier aux États-Unis où il est chercheur invité au think-tank Washington Institute for Near East Policy[7],[13],[29],[23] de 2015 à 2017, puis à la Hoover Institution, un think-tank affilié à l'Université de Stanford.

L'Atlas du Proche-Orient arabe est publié en anglais par Brill sous le titre Atlas of the Near East : State Formation and the Arab-Israeli Conflict, 1918-2010. En février 2018, Fabrice Balanche publie un ouvrage sur le conflit syrien en anglais : Sectarianism in Syria's Civil War, dans lequel il insiste sur les aspects communautaires de la guerre en Syrie[30].

En 2016, il accompagne des personnalités d'extrême-droite et élus dont André Bercoff, Thierry Mariani et Julien Rochedy en Syrie, à l'invitation de l'organisation Al Karma, dirigée par Hala Chaoui, proche du régime de Damas et en coopération avec SOS Chrétiens d'Orient, et rencontre à cette occasion Bachar el-Assad[31].

En novembre 2018, il intervient lors d'un colloque international intitulé « Cent ans après le Front de l’Est, l’Arménie et le Levant entre guerres et paix » autour de spécialistes de l'Arménie tels Richard G. Hovannisian, Claude Mutafian et Gérard Dédéyan, à la Bibliothèque municipale de Lyon[32].

Lors de la guerre civile syrienne, il est accusé par « une majorité des islamologues français » et de nombreux autres observateurs[Qui ?] du conflit d'avoir une lecture pro-Assad du conflit, ce dont il se défend en s'affirmant comme « réaliste »[33],[27].

Balanche affirme que la Syrie était surpeuplée en 2011 par rapport à son économie, ce qui serait selon lui une cause majeure de la Révolution en 2011. À propos du déplacement et de l'exil des Syriens, il évoque « une Syrie "aérée" d'une dizaine de millions de personnes »[34],[35].

Publications

Ouvrages

  • La région alaouite et le pouvoir syrien, éditeur Karthala, 2006, 313 p. (ISBN 2845868189)
  • Atlas du Proche-Orient arabe, Presses Universitaires Paris-Sorbonne RFI, 2012, 135 p. (ISBN 978-284-050-7970)
  • Géopolitique du Moyen-Orient, La Documentation française, Documentation photographique, Paris, 2014
  • (en) Atlas of the Near East : State Formation and the Arab-Israeli Conflict, 1918-2010, Brill, Amsterdam, 2017
  • (en) Sectarianism in Syria's Civil War, Washington Institute, 2018.

Ouvrages collectifs

Articles

  • "Les dés sont jetés : les Kurdes traversent l’Euphrate", in Syrie : un espoir ? Les Cahiers de l'Orient n°122, printemps 2016.
  • The battle of Aleppo is the center of the syrian chessboard, 5 février 2016, Washington Institute for Near East Policy.
  • The die is cast, the Kurds cross the Euphrates, 5 janvier 2016, Washington Institute for the Near East Policy.
  • The Alawi community and the Syrian crisis, Middle East Institute, 14 mai 2015.
  • Syrie : guerre civile et internationalisation du conflit, Eurorient , n° 42, 2013.
  • Géographie de la révolte syrienne, Outre Terre, n° 27, septembre 2011.
  • Clientélisme, communautarisme et fragmentation territoriale en Syrie, A Contrario, mars 2009.
  • Syrie, article sur l'Encyclopédie Universalis (rédaction collective)

Réception

Il est régulièrement cité dans la presse écrite sur le sujet syrien[36] afin de présenter ses méthodes de cartographie de la guerre syrienne et d'exposer son point de vue sur la situation[5],[37],[38],[39].

Il est reconnu et appelé en tant que consultant expert sur les questions de développement du Proche-Orient et de la crise syrienne[7],[40], plus précisément en tant que « one of the leading French experts on Syria »[5].

Sectarianism in Syria’s Civil War est qualifié de « mine d'informations », mais également d'étude discordante — contenant de nombreuses contradictions et des « hypothèses qui vont à l'encontre de certaines affirmations de son texte » — et « sans nuance » par Elizabeth Picard[30].

Controverses

Les chercheurs Adam Baczko, Gilles Dorronsoro et Arthur Quesnay récusent ses analyses concernant la participation de la population syrienne aux contestations pacifistes de 2011 reposant sur une lecture ethno-religieuse. En effet, selon Fabrice Balanche les quartiers qui se soulèvent seraient des « territoires exclusivement sunnites et plus précisément (...) arabes sunnites », ce qui n'est pas le cas, selon les chercheurs qui pointent le rôle décisif de la bourgeoisie d'Alep, Damas, Deraa et Homs dans les manifestations, la participation d'autres ethnies tels les Kurdes, d'autres religions tels les Druzes. Ils écrivent aussi que son analyse reposant sur des critères de pauvreté et de marginalité des populations soulevées est « pour le moins à nuancer » et fustigent son impasse sur le discours politique « évacuant ainsi la subjectivité des acteurs » et affirment que son « hypothèse économico-communautaire échoue à analyser ce qui se joue dans les protestations », « interdisant toute intelligibilité de la trajectoire du mouvement syrien »[41].

Rami Abou Diab rappelle la participation au soulèvement des Druzes, via deux symboles : le premier chant révolutionnaire de Samir Chokeir, écrit en mars 2011, et l'implication de Muntaha al-Arrash, fille de sultan, « malgré la propagande du régime » qui a selon elle, « opté pour la manipulation confessionnelle », et ces symboles, selon Diab, relativisent les propos de « Fabrice Balanche qui a considéré que "la province de Sweida ne s'est pas du tout solidarisée avec les habitant sunnites de Deraa" » et écrit que les faits contredisent cette affirmation[42].

Notes et références

  1. (en) « Fabrice Balanche | Université Lyon - Academia.edu », sur univ-lyon2.academia.edu (consulté le )
  2. Cairn.info
  3. www.asile.org/meyssan, « Fabrice Balanche », sur www.bibliomonde.com (consulté le )
  4. « Comptes rendus », A contrario, no 11, , p. 208–227 (ISSN 1660-7880, lire en ligne, consulté le )
  5. (en) « The Political Geography of Syria’s War: An Interview With Fabrice Balanche », Carnegie Middle East Center, (lire en ligne, consulté le )
  6. Fabrice Balanche, « Syrie : pourquoi l'accord de cessez-le-feu n'annonce pas la fin de la guerre », Le Figaro, (ISSN 0182-5852, lire en ligne, consulté le )
  7. (en) « Fabrice Balanche - The Washington Institute for Near East Policy », sur www.washingtoninstitute.org (consulté le )
  8. « VIDEO. Après la reprise d'Alep-Est, quels pourraient être les prochains objectifs de Bachar al-Assad? », 20minutes.fr, (lire en ligne, consulté le )
  9. Fabrice Balanche, « Transports et espace syrien », Annales de géographie, (lire en ligne)
  10. « Publications de Fabrice Balanche - Cairn.info », sur www.cairn.info (consulté le )
  11. RTS.ch, « Geopolitis », sur rts.ch (consulté le )
  12. (en-US) « The Work of Fabrice Balanche on Alawites and Syrian Communitarianism reviewed by Nikolaos van Dam », Syria Comment, (lire en ligne, consulté le )
  13. Fabrice Balanche, « Syrie : six mois pour libérer Raqqa de l'État islamique », Le Figaro, (ISSN 0182-5852, lire en ligne, consulté le )
  14. (en) « Fabrice Balanche | Université Lyon - Academia.edu », sur univ-lyon2.academia.edu (consulté le )
  15. (en) « Fabrice Balanche | Middle East Institute », sur www.mei.edu (consulté le )
  16. Gremmo.mom.fr
  17. Mom.fr
  18. Pierre Blanc, « Notes de lecture », Confluences Méditerranée, no 82, , p. 222-4 (ISSN 1148-2664, lire en ligne, consulté le )
  19. « Géopolitique du Moyen-Orient », Les Cafés Géo, (lire en ligne, consulté le )
  20. « Fabrice Balanche, Géopolitique du Moyen-Orient - Les clés du Moyen-Orient », sur www.lesclesdumoyenorient.com (consulté le )
  21. Antoine Sillières, « Nominations à l’université : le cri d’alarme d’un chercheur lyonnais », sur www.lyoncapitale.fr (consulté le )
  22. « Recalé par l’IEP de Lyon, l’enseignant spécialiste du monde arabe saisit la justice », sur Lyonmag.com (consulté le )
  23. « Nomination : l’enseignant-chercheur fait condamner l’IEP de Lyon », leprogres.fr, (lire en ligne, consulté le )
  24. , Causeur.fr
  25. Jean-Claude Pacitto, «L'indépendance d'esprit est en danger dans les universités françaises», lefigaro.fr, 26 septembre 2017
  26. Fabrice Balanche : « Sur le dossier syrien, la domination d’une école de pensée marque la fin du pluralisme », entretien Fabrice Balanche, mediapart.fr, 29 janvier 2017
  27. « Émission Entre-deux (France 3) avec Fabrice Balanche, géographe à Lyon 2 » (consulté le )
  28. « "Islamo-gauchisme": le mot qui hystérise le débat en France », sur RTBF Info, (consulté le )
  29. « Pour Fabrice Balanche, la France est forcée de faire avec Bachar », La Croix, (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le )
  30. Elizabeth Picard, « BALANCHE Fabrice, Sectarianism in Syria’s Civil War, the Washington Institute for Near East policy, février 2018, 134 p., 70 cartes et tableaux. », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, (ISSN 0997-1327, lire en ligne, consulté le )
  31. Ellen Salvi, « L'ultradroite française en week-end chez Bachar al-Assad », sur Mediapart (consulté le )
  32. « Colloque : « 100 ans après le Front de l’Est, l’Arménie et le Levant entre guerres et paix » », armenews.com, (lire en ligne)
  33. Jean-Dominique Merchet, Fabrice Balanche : «En Syrie, une reconstruction avec les moyens du bord», L'Opinion, 14 mars 2019.
  34. « Quel visage pour la Syrie de demain ? », sur L'Orient-Le Jour, (consulté le )
  35. « Les Ides de Mars… de la Révolution syrienne à Christchurch », sur Lignes de Crêtes, (consulté le )
  36. « Alep : pourquoi les rebelles ont-ils perdu ? », L'Opinion, (lire en ligne, consulté le )
  37. Steve Nadjar, Journaliste Responsable contenu du site/Spécialisé en géopolitique, « Fabrice Balanche, géographe spécialiste de la Syrie : « L’utopie mobilisatrice des djihadistes demeure la destruction d’Israël » », sur Actualités Juives (consulté le )
  38. « Syrie : «Il est trop tôt pour parler de tournant», estime Fabrice Balanche », RFI, (lire en ligne, consulté le )
  39. «Daech espère des représailles contre les musulmans», sur 24heures.ch/ (consulté le )
  40. « Fabrice Balanche : biographie, actualités et émissions France Culture », sur France Culture (consulté le )
  41. Adam Baczko, Gilles Dorronsoro, Arthur Quesnay, Syrie. Anatomie d'une guerre civile, Biblis, , 416 p. (ISBN 978-2-271-13136-2), p. 68-72
  42. Rami Abou Diaz, Le sud de la Syrie. Les enjeux géopolitiques des provinces de Deraa, de Quneitra et de Sweida., Du Cygne Eds, , 108 p. (ISBN 978-2849245590), p. 23-25

Liens externes

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