Entente internationale anticommuniste

L'Entente internationale anticommuniste (aussi connue sous le nom de Ligue internationale anticommuniste, Entente internationale contre la IIIe Internationale[1], Ligue Aubert ou simplement EIA) est une organisation de propagande anti-IIIe Internationale fondée en 1924 par Théodore Aubert et George Lodygensky. Elle avait pour siège social Genève[2].

Pour les articles homonymes, voir EIA.

Cette organisation bourgeoise et conservatrice va essayer d'enrayer le communisme international notamment en collaborant avec des ligues conservatrices allemandes comme le Bund zum Schutz der abendländischen Kultut traduit par « lutte pour la protection de la culture occidentale » dès 1929, ou en se faisant financer indirectement par le gouvernement nazi[3], par exemple via une officine semi-privée (mais qui est en fait elle-même subventionnée par le gouvernement d'Hitler), l'Union allemande des comités anticommunistes, aussi appelée Antikomintern.

En Suisse, elle aura des liens étroits avec la ligue d'extrême droite fédération patriotique suisse[4] qui était utilisée contre les grévistes notamment à partir de la grève générale suisse de 1918.

Méthodes

Tout d'abord, l'EIA sera basée à Genève, ville d'origine de Théodore Aubert, et lieu stratégique pour une organisation à prétention internationale. En effet, Genève abrite la SDN, mais aussi d'autres organisations internationales qui partagent ce qu'on appelle « l’esprit de Genève »[5].

Dès sa création, l'EIA aura pour but de rassembler un maximum d'information sur l'organisation semi-secrète soviétique, l'internationale communiste et de créer des centres anti-bolcheviques nationaux, auxquels la ligue Aubert s’efforcera d'envoyer des informations[5]. Le but est de s'assurer le soutien des parlementaires et que dans chaque parlement, il y ait des orateurs particulièrement bien renseignés et documentés pour intervenir dans les débats où l'action de l'internationale communiste est en jeu.

L'EIA aura également pour but de rallier à leur cause un maximum d'organisations patriotiques, comme l'atteste une rencontre avec Mussolini en 1924 et son rapprochement avec le national socialisme dès 1931[5].

Financement

Pour faire tourner cette organisation internationale, l'EIA demandait 50 005 francs suisses par années à ses centres nationaux. Cependant et malgré son internationalisme, l'association se voit largement financée en Suisse, à Genève surtout, par des banques, des compagnies d'assurances et des industriels.

Vers 1935, l'EIA commencera à être massivement financée par l'Allemagne et l'Italie, en effet, des archives mentionnent des versements italiens de l'ordre de 50 000 francs par année (90 000 pour l'année 1938)[5].

Pro-Deo

Elle va également servir l'église en créant une commission officieuse, nommée « Pro-Deo », à la fin de l’année 1933[6]. Pro-Deo est menée par trois hommes, George Lodygensky, orthodoxe et co-fondateur de l'EIA, Jacques le Fort, un avocat protestant, et l'abbé Henri Carlier[7].

Cette multiplicité des confessions chrétiennes s'inscrit dans la continuité de l'envie du pape Pie XI d'unir l'Église contre les persécutions religieuses soviétiques.

L’objectif principal avoué de Pro-Deo est le soutien aux victimes des persécutions religieuses[6]. Pourtant, tout au long de son existence, son aide n'a jamais été matérielle ou humanitaire. En effet, la commission n'a œuvré qu'à la propagande et au ralliement du maximum d’organisations religieuses contre le régime soviétique.

L'une de ses actions propagandistes a été l'exposition itinérante des sans-dieu, qui débute à Genève en 1934. Cette exposition ne sera pas un grand succès, elle n'aura quasiment aucun impact, puisqu'elle s'adresse à des convaincus. En effet, même si elle fait plus de 80 000 entrées en parcourant 19 villes de Suisse[7], la présence de communistes ou même de socialistes n'y est pas tolérée, comme le montre une rixe qui éclate lorsqu'une trentaine de personnes (communistes et socialistes) visitent l'exposition quelques jours avant sa fin à Genève.

Fin des activités

Lorsque la seconde Guerre mondiale se prépare, et que l'on ne peut plus accuser l'URSS de vouloir une guerre pour détruire l'ordre social en Europe (puisque l'Allemagne est l'Italie sont en train de bafouer le traité de Versailles), la situation se complique pour l'EIA.

Dès 1939, les autorités suisses recrutent Théodore Aubert afin qu'il agisse conjointement avec le renseignement, notamment dans la surveillance des milieux de gauche afin d'éviter une seconde grève générale comme ce fut le cas au sortir de la guerre en 1918. Néanmoins, la situation est complètement différente et il n'y aura pas de mouvement social d'envergure à combattre.

En 1940 les communications internationales sont compliquées par la guerre et l'EIA cesse d'exercer à l'étranger. Dès 1944, les collusions entre EIA et régimes fascistes et nazis lui donneront très mauvaise réputation en Suisse.

Finalement, au sortir de la guerre, l'EIA n'a plus les moyens d'être le centre de l'anticommunisme et les U.S.A. reprendront pleinement le flambeau de l'organisation suisse[5].

Notes et références

  1. Marie Bron, « Aubert, Théodore », sur HLS-DHS-DSS.CH (consulté le )
  2. « Face au communisme (1905-1950). Quand Genève était le centre du mouvement anticommuniste international - Slatkine Reprints SA », sur www.slatkine.com (consulté le )
  3. Bundesarchiv (BArch - Berlin-Licheterfelde) Cote R55/376 (microfilms)
  4. Andreas Thürer / PM, « Fédération patriotique suisse », sur HLS-DHS-DSS.CH (consulté le )
  5. Michel Caillat, Mauro Cerutti, Jean-François Fayet et Jorge Gajardo, « Une source inédite de l’histoire de l’anticommunisme : les archives de l’Entente internationale anticommuniste (EIA) de Théodore Aubert (1924-1950) », Matériaux pour l'histoire de notre temps, vol. 73, no 1, , p. 25–31 (DOI 10.3406/mat.2004.964, lire en ligne, consulté le )
  6. Heiniger Alex, « Un credo anticommuniste. La commission Pro Deo de l'Entente internationale anticommuniste ou la dimension religieuse d'un combat politique (1924-1945) [Stéphanie Roulin] », 61, (lire en ligne)
  7. Stéphanie Roulin, « l'exposition itinérante sur les sans-dieu (1934) », Helvétia et le Goupillon, , p. 74 (lire en ligne)
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