Emmanuel Jaffelin

Emmanuel Jaffelin, né le [1], est un philosophe et écrivain français.

Biographie

Agrégé de philosophie, Emmanuel Jaffelin est professeur de philosophie. Il a enseigné à Lyon, Fourmies, São Paulo (Brésil), Roubaix et en région parisienne, notamment au lycée Pasteur de Neuilly-sur-Seine[2] et au lycée Lakanal de Sceaux. Il a mené une carrière de diplomate en Afrique (Angola, 2009-2013) et en Amérique latine (Brésil, 2003-2007). Il a enseigné au lycée Emmanuel Mounier à Châtenay-Malabry jusqu'en 2018.

Ouvrages

Emmanuel Jaffelin a publié sept livres : Éloge de la Gentillesse (2010, Bourin éditeur), Petit éloge de la Gentillesse (2011, éditions François Bourin; 2015, éditions J'ai Lu), On ira tous au Paradis (Croire en Dieu rend-il crétin ?, 2013, Flammarion), Apologie de la Punition (2014, Plon), Éloge de la gentillesse en entreprise (2015, First) et un Petit Cahier d'Exercices de Gentillesse (2016, Éditions Jouvence). Enfin, en 2019, une Apothéose des Ronds-Points en l'honneur des Gilets Jaunes.

Il a notamment abordé la question carcérale sous l'angle d'une critique sévère du système pénitentiaire français dont il considère qu'il « ne fait plus sens »[3] en raison notamment de ses défaillances en matière de réinsertion[4],[5]. Il a régulièrement animé un atelier philosophique à la prison de Sequedin (Nord) de 2010 à 2012[6].

Dans ses quatre ouvrages sur la gentillesse, Emmanuel Jaffelin prône l'émergence d'une nouvelle éthique[7]. Il y défend une éthique de "Gente Dame" et de « Gentilhomme »[2] enracinée dans cette « vertu mineure »[8] qu'est la gentillesse, mais qui définit une morale plus accessible que les standards trop exigeants de la sainteté et du sage. Dès lors, la gentillesse aurait, selon Emmanuel Jaffelin, une efficacité particulière : « Sans faire de nous des Jésus ou des superhéros, elle a le pouvoir de nous élever un peu, de nous anoblir, en un minimum d’efforts. »[9]; et, par son caractère désintéressé, la gentillesse aurait le mérite d'échapper à toute instrumentalisation ou marchandisation[10]. Il pointe notamment les bienfaits de cette qualité dans le monde de l'entreprise, où habituellement elle est considérée comme une marque de faiblesse[11]. « Contre le cynisme, la gentillesse est un vrai combat philosophique.[…] Emmanuel Jaffelin initie le mouvement de réhabilitation (savante, en l’occurrence) de cet élément de progrès humain que constitue la gentillesse. Le jour où l’on inversera les habitudes de langage en disant : « il est bien méchant ! », au sens de : « il est bête ! », quelque chose d’important et de simple se sera produit[12]. Emmanuel Jaffelin fait partie de ces jardiniers ; explorant un petit problème comme Bergson le fit jadis avec Le Rire, il étudie « le no man’s land où (la gentillesse) se trouve reléguée », la distingue « en faisant apparaître ses racines, en déroulant ses feuilles et en goûtant son fruit[13] ». « L’origine rhizomique de la gentillesse » est superbement décrite comme une dévalorisation des mondes païens et aristocratiques […][14] Son Éloge de la gentillesse n’est pas seulement bien écrit, il vise juste de long en large, même s’il ne vise pas tout »[15] Le fait qu’une démocratie marchande se satisfasse de citoyens consommateurs et puisse en ricanant jeter ses derniers gentilshommes à la poubelle est si bien vu et décrit que l’on peut suivre Emmanuel Jaffelin dans son versant optimiste[16]".« La gentillesse renverse par ses actes la passivité du malheur, elle enjoint à « faire quelque chose plutôt que rien », dans un monde qui s’autoproclame en permanence civilisé, libre et égalitaire en produisant rationnellement ses pauvres, ses fous, ses excédentaires. Compassion ET action forment la structure « génétique » de la gentillesse qui est moins une vertu familiale que sociale. Elle sert davantage avec des inconnus, dans le métro, dans la rue qu’avec son frère ou sa sœur. Emmanuel Jaffelin interprète Le fabuleux destin d’Amélie Poulain comme une fable cruelle où « Amélie feint de choisir le bien, mais c’est pour mieux travestir ses mauvais penchants et ses pulsions morbides[17] ». "Tout me plaît à nouveau, dans les images d’Emmanuel Jaffelin : la nature, récurrente dans ses métaphores qui annoncent ses analyses – des « rhizomes » de la gentillesse à ses « feuilles » et ses « fruits » – la douceur qu’il thématise comme la vertu caressante qui anime l’esprit gentil[18] ».« S’inspirant de Simone Weil « appelant de ses vœux une sainteté plus légère et praticable », puis de Fritjof Capra, l’auteur du Tao de la physique, Emmanuel Jaffelin replace son Éloge de la gentillesse dans le cadre d’une conception de la nature dans laquelle c’est l’interdépendance harmonieuse qui domine et non telle ou telle de ses aveugles parties. C’est évidemment là où je voulais en venir. On ne peut s’empêcher de penser qu’un auteur ait raison sans avoir l’impression d’avoir rêvé son livre. La vérité qu’il écrit est mieux dite que dans notre propre tête[19] ».

Dans Apologie de la punition[20], Emmanuel Jaffelin démontre que cette action - la punition - est méprisée, honnie, chassée de la famille et de l’école. Elle subsiste marginalement dans le sport (les pénalités) et dans la diplomatie, quand il s’agit de punir les états voyous. Aujourd’hui considérée comme antidémocratique, la punition ne s’adresse en fait qu’à ceux qui se rendent coupables de comportements jugés non démocratiques (le professeur qui gifle son élève, le père qui donne une fessée à son fils et se retrouve condamné à 500 euros d’amende à Limoges). En même temps, sous couvert d’humanité, on laisse croupir une foule de détenus dans des prisons (avec un taux de récidive à 60% et un suicide tous les trois jours), sans leur proposer de vraie possibilité de se racheter aux yeux de la société par le biais d’une punition. La punition est aujourd’hui cachée, taboue, elle n’est absolument plus pensée comme la meilleure façon d’empêcher la vengeance alors qu’elle est par essence le premier pas vers le pardon, un moyen de réparer, de recoudre le tissu social. Il est temps de la réhabiliter en la repensant véritablement pour proposer une justice enfin réparatrice, fondée sur la responsabilité et le pardon.Dans Salut les Terriens (C8), Thierry Ardisson l'invite en pour reparler de la gifle et de la fessée, ce qui lui permet de critiquer d'abord le primat du droit sur la morale et, ensuite, la dictature d'une idéologie de la victimité qui fait disparaître la responsabilité.

Dans On ira tous au Paradis, Croire en Dieu rend-il crétin (Flammarion, 2013), le critique littéraire Jean-Claude Lauret, écrit dans Boulevard Voltaire: "« On ira tous au paradis, même moi, qu’on croie en Dieu ou qu’on n’y croie pas, on ira avec les chrétiens, avec les païens », chantait Michel Polnareff. Emmanuel Jaffelin, professeur de philosophie, reprend à son compte cette assertion dans un petit traité rondement mené [...] Emmanuel Jaffelin, en ce texte extrêmement cursif, montre la lente marche conduisant vers cet enterrement. La raison moderne prétendait imposer ses lumières terrestres aux illuminations célestes. Demeure la nostalgie, persiste l’espérance. Il peut y avoir, post mortem, des lendemains qui chantent. L’auteur montre dans cet exposé un bien agréable sens de l’humour, ce qui n’est pas le cas de bien des doctes personnages qui se penchent sur l’histoire de la pensée. Ses élèves ne doivent pas s’ennuyer avec un tel professeur qui se révèle être un aimable pédagogue possédant le sens de la formule".

Dans son Apothéose du Rond-Point, le philosophe aborde le fondement post-politique de la démarche des Gilets Jaunes. Le Rond-Point est d’abord un lieu, ensuite un lien, enfin une liane. Comme lieu, cette architecture se métamorphose : elle n’est plus seulement un point rond de ralentissement, mais un lieu de rencontres sociales et de désordre inspirateur. A défaut d’être au centre du monde, le Rond-Point invite le peuple à se recentrer sur la justice sociale. Comme lien, le Rond-Point rassemble les Gilets Jaunes qui étaient éparpillés et oubliés dans la périphérie. A l’image de la Gabelle (l’impôt sur le sel) qui avait amené le Tiers Etat à manifester sa colère, le diesel conduit les Gilets Jaunes à s’unir et à réveiller le peuple de cette injustice qui en masque d’autres. Comme liane, le Rond-Point fait monter la colère des Gilets Jaunes dans 4 directions : les villes, le cahier de Doléances (41 demandes), un projet sociétal (notamment un Référendum d’Initiative Citoyenne - pour mettre fin aux décisions de la technocratie-politique – et un rallongement de la durée d’exercice du chef d’Etat) et un rayonnement international (dans plus de 22 pays). Au XXIe siècle, cette micro-architecture, le Rond-Point, est devenu The Place to Be !

Bibliographie

  • Éloge de la gentillesse, Paris, François Bourin Éditeur, , 230 p. (ISBN 978-2-84941-200-8)
  • Petit éloge de la gentillesse, Paris, François Bourin Éditeur, , 130 p. (ISBN 978-2-84941-269-5)
  • On ira tous au paradis : Croire en Dieu rend-il crétin ?, Paris, Flammarion, coll. « Antidote », , 128 p. (ISBN 978-2-08-127074-9)
  • Apologie de la punition, Paris, Plon, , 300 p. (ISBN 978-2-259-22249-5)
  • Éloge de la gentillesse en entreprise, First édition, 2015, 205 p. (ISBN 275-4076255)
  • Petit Cahier d’exercices de gentillesse, Éditions Jouvence, 2016, 63 p. (ISBN 978-2-88911-705-5)
  • Apothéose du Rond-Point, Amazon, 2019, 81 p.

Notes et références

  1. Jaffelin, Emmanuel (1963-....), « BnF Catalogue général », sur catalogue.bnf.fr, 60923-frfre (consulté le )
  2. Carole Mocellin, « "Emmanuel Jaffelin : quand la gentillesse anoblit le cœur, apparaît le gentilhomme" »(ArchiveWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?), La Voix du Nord,
  3. « Un système absurde dans une démocratie moderne », article d'Emmanuel Jaffelin dans Le Monde, 2009.
  4. « Prisons, comment effacer la honte ? », interview d'Emmanuel Jaffelin dans Le Monde, 2009.
  5. « La peine de mort n'a pas été abolie en France », Ouest France, 2010.
  6. « Des ateliers de philo à la prison de Sequedin », La Voix du Nord, 2010.
  7. « La gentillesse », intervention d'Emmanuel Jaffelin dans Les Racines du Ciel sur France Culture, 2010.
  8. « Enfants de cœur », Libération, 2010.
  9. « La gentillesse : une faiblesse ? », Psychologies magazine, 2010.
  10. « L'amitié échappe-t-elle encore à la marchandisation ? », intervention d'Emmanuel Jaffelin sur Europe 1, 2010.
  11. Marlène Duretz, « Les bienfaits de la gentillesse en entreprise », Le Monde, (lire en ligne).
  12. André Guigot, Qui pense quoi? Inventaire subjectif des grands penseurs contemporains, Paris, Bayard, (ISBN 978-2-2274-8280-7), p25-26
  13. André Guigot, Qui pense quoi? Inventaire subjectif des grands penseurs contemporains, Paris, Bayard, (ISBN 978-2-2274-8280-7), p28
  14. André Guigot, Qui pense quoi? Inventaire subjectif des grands penseurs contemporains, Paris, Bayard, (ISBN 978-2-2274-8280-7), p29
  15. André Guigot, Qui pense quoi? Inventaire subjectif des grands penseurs contemporains, Paris, Bayard, (ISBN 978-2-2274-8280-7), p30
  16. André Guigot, Qui pense quoi? Inventaire subjectif des grands penseurs contemporains, Paris, Bayard, (ISBN 978-2-2274-8280-7), p31
  17. André Guigot, Qui pense quoi? Inventaire subjectif des grands penseurs contemporains, Paris, Bayard, (ISBN 978-2-2274-8280-7), p32
  18. André Guigot, Qui pense quoi? Inventaire subjectif des grands penseurs contemporains, Paris, Bayard, (ISBN 978-2-2274-8280-7), p33
  19. André Guigot, Qui pense quoi? Inventaire subjectif des grands penseurs contemporains, Paris, Bayard, (ISBN 978-2-2274-8280-7), p34
  20. Emmanuel Jaffelin, Apologie de la punition, Paris, Plon, , 350 p. (ISBN 978-2-259-22249-5)

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