Dhikr

Le dhikr (parfois prononcé zikr, arabe : ذِكْر [ḏikr], évocation ; mention, rappel, répétition rythmique (du nom de Dieu)), dans l'islam, désigne à la fois le souvenir de Dieu et la pratique qui avive ce souvenir. Il est au cœur de la pratique du soufisme.

Représentation d'artiste d'une pratique collective du dhikr

Fondements dans le Coran et les hadith

Le dhikr consiste donc à se remémorer Dieu: il est souvenir et invocation. Mais le terme recouvre aussi la pratique elle-même de remémoration[1]. Anawati et Gardet le définissent comme la répétition inlassable d'un Nom divin, comme une oraison jaculatoire, et aussi comme la technique même de cette répétition[2].

Le Coran

Le mot dhikr figure 83 fois dans le Coran[3]. On peut mentionner ainsi le verset 45 de la sourate 29, « L'araignée » : « l'invocation du nom d'Allah est ce qu'il y a de plus grand »; les versets 41-42 de la sourate 33 : « Ô vous qui croyez ! Invoquez souvent le nom de Dieu ! Louez-le matin et soir. » (v. 41-42), ou encore le verset 60 de la sourate 40, Al-Ghafir : « Invoquez-Moi, Je vous exaucerai. ».

Les hadiths

On trouve également plusieurs hadiths dans lesquels Mahomet recommande l'invocation du nom de Dieu comme étant la meilleure action possible, où il donne des indications sur le nombre de répétitions ainsi que sur la formule qui doit être prononcée:

« Le Prophète m'a dit : "T'informerai-je de la parole la plus aimée auprès de Dieu ?" La parole la plus aimée de Dieu consiste à dire : "Gloire et louange à Dieu." (Hadith rapporté par Abû Dharr et Muslim). » Et encore : « La meilleure évocation est le fait de dire : "il n'est de dieu que Dieu." (Hadith rapporté par Jâbir et Tirmidhî). »

Une idée similaire revient également dans ces hadith:

« Vous informerai-je de la meilleure de vos actions, la plus pure au regard de votre Souverain, celle qui vous élèvera davantage et qui sera meilleure pour vous que faire l'aumône de l'or et de l'argent ; celle qui sera meilleure pour vous que rencontrer votre ennemi et le tuer (litt. frapper à la nuque) ou être tué ?" Bien sûr, répondirent-ils, il s'agit de l'évocation de Dieu". Exalté soit-Il, dit le Prophète. (Hadith rapporté par Abû Dardâ, Tirmidhî et Hâkim) »

« Nous étions chez le Prophète lorsqu'il nous demanda : "L'un d'entre vous serait-il capable d'acquérir chaque jour mille bonnes actions ?" L'un de ceux qui étaient en sa compagnie rétorqua : "Comment pourrait-on acquérir mille bonnes actions ?" Le Prophète répondit : "En disant cent fois "subhân Allah" (gloire à Dieu), il vous sera inscrit mille bonnes actions ou il vous sera ôté mille péchés." (Hadith rapporté par Sa'd ibn Abî Waqqas et Muslim) »

Autres formes possibles

Mais le dhikr ne consiste pas seulement en répétition de formules. Il peut prendre la forme[réf. souhaitée] de la lecture du Coran ou de son étude dans un cercle d'étude, ainsi de l'étude de hadiths. Il peut aussi être vu comme étant au cœur de la prière canonique, ainsi que le laisse entendre le verset 14 de la sourate 20 : « Accomplis la prière m'invoquer. »

Le dhikr dans le soufisme

Le dhikr a une importance particulière dans le soufisme. Il y devient la « voie d'accès » privilégiée[1]. Le but est le renoncement au monde, en « vidant le cœur des préoccupations terrestres » pour mieux approcher Dieu et parvenir à l'anéantissement (fana')[1]. Pour ce faire, la pratique est codifiée : le rythme de la respiration et l'attitude sont des éléments susceptibles de soutenir la répétition du nom de Dieu (Allah, ou le nom du Prophète ou « l'un des 99 plus beaux noms divins », voire les attributs du Prophète, etc.) qui est au cœur de la méthode.

Il existe deux dhikr, le solitaire et le collectif sans qu'il y ait d'opposition entre les deux[1], même si, selon certaines sources, les adeptes d’une pratique plutôt que de l’autre peuvent s’affronter ou se « tourner en dérision »[4]. Si la transe qui résulte de la pratique collective a souvent été perçue comme l'aboutissement recherché, par les observateurs, les initiés la considèrent comme n'étant pas le but à atteindre[1]. Il existerait donc un « Dhikr des privilégiés », comme expérience spirituelle intérieure, parfois mentionnés comme « Dhikr du cœur » ou « Dhikr de l'intime » (par opposition au « Dhikr de la langue », à haute voix) qui serait assez éloigné des pratiques hypnotiques du Dhikr collectif[1]. Il est fondé sur la conservation du sens du Dhikr au moment de sa pratique, de telle manière qu'il ne devienne pas une répétition routinière et distraite. L'intention (niyya) est alors essentielle pour le pratiquant afin qu'il soit préservé des distractions[1].

Le dhikr s'accompagne souvent de l'usage d'une sorte de chapelet (مِسْبَحة [misbaḥa], misbaha; chapelet).

Par bien des aspects, le dhikr est proche de la prière du cœur, clef de voûte de la pratique spirituelle et mystique de l'Église d'Orient.

Notes et références

  1. Georges C. Anawati, Louis Gardet, Mystique musulmane: aspects et tendances, expériences et techniques, J. Vrin, (présentation en ligne)
  2. Anawati et Gardet 1961, p. 284.
  3. Pierre Cuperly, Présentation in Al-Ghazâli, Temps et prière, Paris, Albin Michel, coll. Spiritualités vivantes, p. 13, note 5.
  4. Adriana Piga, Les voies du soufisme au sud du Sahara, Karthala (présentation en ligne), p. 77

Bibliographie

  • Georges C. Anawati, Louis Gardet, Mystique musulmane: aspects et tendances, expériences et techniques, J. Vrin, 1986, Paris, Vrin, , 310 p., p. 187-189; 193-233; 238-240; 242-245 et passim
  • Éric Geoffroy, « Dhikr », dans Mohammad Ali Amir-Moezzi, Dictionnaire du Coran, éditions, 2007 (ISBN), 981 pages, p. 379-381, 850., Paris, Robert Laffont, , 981 p. (ISBN 978-2-221-09956-8), p. 212-215

Voir aussi

Documentaire

  • Arnaud Desjardins, Soufis d'Afghanistan : Maître et Disciple (part. 1), Au cœur des confréries (part. 2), INA, 1974.

Articles connexes

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