Daniil Harms

Daniil Harms (en russe : Даниил Хармс), né le 17 décembre 1905 ( dans le calendrier grégorien) à Saint-Pétersbourg et mort le à Léningrad, est un poète du début de l'ère soviétique considéré notamment comme un précurseur de l'absurde[1].

Daniil Harms
Nom de naissance Daniil Ivanovitch Iouvatchev
Naissance 17 décembre 1905 ( dans le calendrier grégorien)
Saint-Pétersbourg
Empire russe
Décès
Léningrad, RSFS de Russie
Union soviétique
Activité principale
Auteur
Langue d’écriture Russe

Biographie

De son vrai nom Daniil Ivanovitch Iouvatchev (Даниил Иванович Ювачев), il choisit le pseudonyme de Harms[2] pendant ses études secondaires. Il utilise également les pseudonymes de Horms, Charms, Chardam, etc.

Œuvre

Sa poèsie, tantôt lyrique, tantôt satirique, se caractérise par ses constantes inventions langagières et prosodiques. L'ironie et la tendresse s'y conjuguent avec une quête de sens philosophique. Elle se réclame essentiellement de Vélimir Khlebnikov, mais aussi de Kasimir Malevitch. D'autre part, son goût pour le poème dramatique est central et participe à sa singularité.

Son œuvre en prose est essentiellement constituée de courtes vignettes, ne faisant souvent que quelques paragraphes, où alternent des scènes de pauvreté ou de privations, des scènes fantastiques ressemblant parfois à des descriptions de rêves, et des scènes comiques. « Certes Harms appartient sans conteste à la grande famille des désespérés rigolos »[3]. Les choses, les images, les personnages disparaissent souvent même avant de commencer à exister. Dans ces vignettes, des écrivains connus font parfois des apparitions incongrues.

Le monde de Harms est imprévisible et désordonné, ses personnages répétant sans fin les mêmes actions ou se comportant de façon irrationnelle, des histoires linéaires commençant à se développer étant brutalement interrompues par des incidents qui les font rebondir dans des directions totalement inattendues.

Le travail de Harms est plus profond qu'il n'y paraît et doit être replacé dans le contexte de l'Oberiou (Association pour l'Art réel), un courant littéraire et philosophique du modernisme russe dont il a été l'un des fondateurs.

Accusé d'activités anti-soviétiques, il est exilé à Koursk en 1931. Ensuite, il est arrêté à nouveau pendant le siège de Leningrad le , dénoncé par Antonina Oranjeeva, une amie intime de la poétesse Anna Akhmatova, pour "rumeurs diffamatoires contre le gouvernement soviétique et rumeurs défaitistes ". Il est interné dans une prison du NKVD, où il meurt le , à trente-six ans.

Considéré comme un ennemi du régime stalinien, Harms ne peut publier de son vivant que deux textes[4]: l'essentiel de son œuvre fut diffusée clandestinement. Il est réhabilité en 1956, mais longtemps, seules ses poésies pour enfants sont republiées en URSS, à partir de 1962[5]. Son œuvre est aujourd'hui appréciée en Russie. Elle a été traduite en français, allemand, anglais, italien, polonais, tchèque, et suédois.

Bibliographie

  • Sonner et voler (poèmes), traduit du russe et préfacé par Gleb Urman, Littératures soviétiques, Gallimard, 1976.
  • Écrits, publ., préf. et trad. du russe par Jean-Philippe Jaccard ; notes et chronologie établies par Jean-Philippe Jaccard, Christian Bourgois, 1993, (ISBN 2-267-01071-2).
  • Anthologie de textes de l’OBÉRIOU [avec I. Bakhterev, I. Drouskine, L. Lipavski, N. Oleinikov, K. Vaguinov, A. Vvédenski, N. Zabolotski], Christian Bourgois, 1997.
  • La vieille, suivi de "Autobiographie", trad. Victor D, Saint Mont, 2001.
  • À titre posthume, récits choisis et traduits du russe par David Leblanc, Liberté, no 269 (), p. 111-130.
  • Le tombement, traduit du russe par Jean-Philippe Jaccard, L'Engouletemps, 2005.
  • Œuvres en prose et en vers, trad. du russe et annot. par Yvan Mignot, préf. de Mikhaïl Iampolski, Verdier, 2005, (ISBN 2-86432-437-7).
  • Incidents et autres proses, choix, traduction et postface de Henri Abril, Circé, 2006 et 2019; traduction qui a remporté une mention spéciale au Prix Russophonie 2007. (ISBN 978-2-84242-472-5).
  • Toujours à titre posthume, récits choisis et traduits du russe par David Leblanc, Liberté, no 272 (), p. 57-67.
  • Premièrement, deuxièmement, trad. du russe par Colette Stoianov ; ill. de Marc Rosenthal, l'École des loisirs, 1996.
  • Un tigre dans la rue, textes extraits de l'œuvre de Daniil Harms, trad. du russe par Catherine Eltchaninoff-Lancelot, ill. par Stéphanie Dallé-Asté, éditions Points de suspension, 1997.
  • Cahier bleu, texte traduit en français par Anne Arc, gravures en relief, livre d'estampes, 6 exemplaires, sur papier Himalaya, 33x45cm, 2010. Installation 2010 : "Espace poésie assassinée" dans "Le plus petit Musée du livre" (musée nomade).

Influences

  • À partir des années soixante-dix, plusieurs textes de Harms servent de support à des œuvres artistiques.
  • En 2003, Guillaume Cantillon et la Cie Hi-Han créent Cabaret Toy, à la Maison des Comoni du Revest (Var) d'après les textes de Daniil Harms.
  • En 2007, Régis Moulu adapte ses écrits pour la scène dans La pureté est proche du vide, spectacle avec dialogues complétifs d'une durée de 3h, théâtre de Saint-Maur[6]
  • En 2009, des extraits de textes de Harms sont adaptés dans "Telegrams from the Nose" de William Kentridge, François Sarhan & Ictus
  • En 2009, Marie Ballet monte "Oui, aujourd'hui j'ai rêvé d'un chien" au théâtre de la Bastille (Paris), sélection de textes de Daniil Harms appuyée par un accompagnement choral
  • En 2011, ses 'Écrits' sont adaptés au théâtre par Laurent Pelly et l'Atelier Volant du TNT à Toulouse. Le spectacle s'appelait alors 'J'ai examiné une ampoule électrique et j'en ai été satisfait'.
  • En 2012, Oscar Strasnoy utilise ses écrits "Incidents" pour en faire un opéra : Slutchaï, produit pour la première fois au Grand Théâtre de Bordeaux.
  • En 2016, Pascal Crantelle; directeur artistique et metteur et scène de la compagnie Alexander Thaliway (égyptologue et psychanalyste anglais), crée "Les éclats du bal", un spectacle théâtral et chorégraphique à l’Auguste théâtre à Paris, à partir de fragments des "Écrits" traduits par Yvan Mignot (avec deux comédiens : Harold Crouzet et Aline Lebert, Stéphane Puault pour la chorégraphie et les costumes, et Patricia Burkhalter pour les toiles peintes.) Une écriture originale de Pascal Crantelle introduit et clôt la pièce. Elle permet d’une part, une mise en abyme du spectacle : « le théâtre dans le théâtre » et d’autre part, de replacer Daniil Harms dans le contexte de l’URSS stalinienne[7].
  • En 2019, des récits courts sont adaptés en vidéo et mis en ligne sur harms-video.com.
  • Dans La Nouvelle Revue française n°642[8], La nouvelle Amen d'Arthur Larrue met en scène Harms et intègre des morceaux inédits de son journal intime.

Notes et références

  1. Jaccard Jean-Philippe, De la réalité au texte: L'absurde chez Daniil Harms. In: Cahiers du monde russe et soviétique. Vol. 26 no 3-4. . p. 269-312.
  2. La translittération du russe Хармс en français devrait être Kharms mais les éditeurs français ont pris l'habitude d'utiliser la graphie Harms.
  3. Georges Nivat « vers la fin du mythe russe », p. 236,
  4. Jaccard Jean-Philippe, Daniil Harms: bibliographie. In: Cahiers du monde russe et soviétique. Vol. 26 no 3-4. . p. 493-522.
  5. Henri Abril, introduction à l’Anthologie de la poésie russe pour enfants, Circé poche (ISBN 978-2-84242-216-5).
  6. « références et déroulé du spectacle »
  7. http://www.theatrauteurs.com/archive/2016/03/04/les-eclats-du-bal-daniil-harms-5769056.html, http://www.regarts.org/Theatre/les-eclats-du-bal.htm
  8. « La Nouvelle Revue Française », sur La Nouvelle Revue Française (consulté le )

Liens externes

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