Décret de Déclaration de paix au monde

Le décret de Déclaration de paix au monde est un décret de l’Assemblée constituante de 1789, pris dans le contexte de changement d’institutions de la Révolution française, le .

Contexte historique

L'Espagne conteste à l'Angleterre la possession de la baie Nootka (en anglais : Nootka Sound), sur la côte nord-américaine du Pacifique. La guerre menace. Comme la France est alliée à l'Espagne, elle est appelée à l’épauler si la guerre se déclarait. En France, il s’agit donc de savoir qui aura le droit de déclarer la guerre.

Décret

L’Assemblée constituante décide que c’est à elle de déclarer la guerre ou la paix, sur proposition du roi Louis XVI. Ce décret, adopté le 22 mai 1790[1], est célèbre, on l'a appelé Déclaration de paix au monde parce qu'il affirme : « la nation française renonce à entreprendre aucune guerre dans la vue de faire des conquêtes et [déclare] qu'elle n'emploiera jamais la force contre la liberté d'aucun peuple ».

Analyses

Selon Jean-Paul Bertaud, « cette déclaration de paix au monde était moins dictée par un pacifisme doctrinal que par le souci d'éviter un accroissement du pouvoir royal. Le Roi, chef des armées, en cas de victoire, en retirerait tout bénéfice et pourrait dicter sa politique aux députés de l'Assemblée »[1]. Il considère que la déclaration est « en contradiction avec les principes de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : celle-ci ne disait-elle pas que les peuples avaient le droit de disposer d'eux-mêmes ? »[1].

L'Assemblée législative déclare finalement la guerre au roi de Bohême et de Hongrie le 20 avril 1792, arguant d'une guerre contre un souverain plutôt que contre un peuple[1].

Texte intégral

Article premier. — Le droit de la paix et de la guerre appartient à la nation. — La guerre ne pourra être décidée que par un décret du Corps législatif, qui sera rendu sur la proposition formelle et nécessaire du Roi, et ensuite sanctionné par Sa Majesté.
Art. 2. — Le soin de veiller à la sûreté extérieure du royaume, de maintenir ses droits et ses possessions, est délégué au Roi par la Constitution de l'État ; ainsi, lui seul peut entretenir des relations politiques au dehors, conduire les négociations, en choisir les agents, faire les préparatifs de guerre proportionnés à ceux des États voisins, distribuer les forces de terre et de mer, ainsi qu'il le jugera convenable, et en régler la direction en cas de guerre.
Art. 3. — Dans le cas d'hostilités imminentes ou commencées, d'un allié à soutenir, d'un droit à conserver par la force des armes, le pouvoir exécutif sera tenu d'en donner, sans aucun délai, la notification au Corps législatif, d'en faire connaître les causes et les motifs ; et si le Corps législatif est en vacance, il se rassemblera sur-le-champ.
Art. 4. — Sur cette notification, si le Corps législatif juge que les hostilités commencées soient une agression coupable de la part des ministres ou de quelque autre agent du pouvoir exécutif, l'auteur de cette agression sera poursuivi comme criminel de lèse-nation ; l'Assemblée nationale déclarant à cet effet que la nation française renonce à entreprendre aucune guerre dans la vue de faire des conquêtes, et qu'elle n'emploiera jamais ses forces contre la liberté d'aucun peuple.
Art. 5. — Sur la même notification, si le Corps législatif décide que la guerre ne doit pas être faite, le pouvoir exécutif sera tenu de prendre sur-le-champ des mesures pour faire cesser ou prévenir toutes hostilités, les ministres demeurant responsables des délais.
Art. 6. — Toute déclaration de guerre sera faite en ces termes : De la part du Roi des Français, au nom de la nation.
Art. 7. — Pendant tout le cours de la guerre, le Corps législatif pourra requérir le pouvoir exécutif de négocier la paix, et le pouvoir exécutif sera tenu de déférer à cette réquisition.
Art. 8. — À l'instant où la guerre cessera, le Corps législatif fixera le délai dans lequel les troupes levées au-dessus du pied de paix seront congédiées, et l'armée réduite à son état permanent. La solde desdites troupes ne sera continuée que jusqu'à la même époque, après laquelle, si les troupes excédant le pied de paix restaient rassemblées, le ministre sera responsable et poursuivi comme criminel de lèse-nation.

Art. 9. — Il appartient au Roi d'arrêter et signer avec les puissances étrangères tous les traités de paix, d'alliance et de commerce, et autres conventions qu'il jugera nécessaires au bien de l'État ; mais lesdits traités et conventions n'auront d'effet qu'autant qu'ils auront été ratifiés par le Corps législatif.

Décret du 22 mai 1790, concernant le droit de faire la paix et la guerre.

Voir aussi

Sources

Notes et références

  1. Jean-Paul Bertaud, Mille sept cent quatre-vingt-dix-neuf, Bonaparte prend le pouvoir, Complexe, , 216 p. (lire en ligne), « De la déclaration de paix au monde à la guerre d'expansion révolutionnaire », p. 76-79.
  • Portail des années 1790
  • Portail de la Révolution française
  • Portail du droit français
  • Portail de la politique française
  • Portail de la paix
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.