Crise de salinité messinienne

La crise de salinité messinienne est un épisode géologique qui correspond à l'assèchement (ou aux assèchements successifs)[1] de la mer Méditerranée, durant le Messinien (fin du Miocène). Cet épisode a duré 630 000 ans, de 5,96 à 5,33 millions d'années (Ma) avant le présent. Sa fin, il y a 5,33 Ma, marquée par la transgression zancléenne, a été choisie par les géologues pour définir la limite entre le Miocène et le Pliocène.

Carte bathymétrique de la Méditerranée.
La version zoomée permet de voir l'érosion en aval du détroit de Gibraltar provoquée par la transgression zancléenne, et des zones planes correspondant aux zones de sédimentation (sel et gypse) durant la phase d'assèchement dite « lago-mare ».

Contexte hydrographique

La mer Méditerranée présente un bilan alimentation en eau / évaporation structurellement négatif. Les fleuves qui l'alimentent (Nil, Rhône, Èbre, ) sont en effet trop peu nombreux pour compenser l'évaporation permanente de l'eau de mer qui nourrit le cycle des précipitations sur les continents environnants. Ce bilan négatif est compensé par un apport en eau constant en provenance de l'océan Atlantique, qui produit un courant marin traversant le détroit de Gibraltar d'ouest en est.

Assèchement messinien

Vue d'artiste de la fermeture du détroit de Gibraltar. L'encadré montre l'origine tectonique.

L'assèchement messinien est en première hypothèse d'origine tectonique. Il est dû à la fermeture progressive du détroit de Gibraltar sous l'effet de la poussée vers le nord de la plaque africaine. Cette fermeture empêcha le rééquilibrage eustatique avec l'océan Atlantique.

En 2015 une publication de la revue Nature : Antarctic glacio-eustatic contributions to late Miocene Mediterranean desiccation and reflooding | Nature Communications,[2]propose une autre hypothèse: une progression des glaces qui aurait eu pour conséquence une baisse du niveau des océans d'où une remontée du fond marin par isostasie et par le changement de la gravité. Il a conduit à une baisse du niveau marin de l'ordre de 1 500 m. Cet assèchement aurait débuté il y a 5.96 Ma formant des salines entre 5.75 Ma et 5.60 Ma dont l'alimentation variait en fonction des variations de niveau de l'eau de l'océan liées aux lentes glaciations et rapides déglaciations ( Voir cycles d'environ 100 000 ans de Milankovitc) jusqu'à un dessèchement total à 5.53 Ma.

La Crise de Salinité Messinienne de termina brutalement il y a 5.33 Ma par la rupture catastrophique de Camarinal Sill. Late Miocene Desiccation of the Mediterranean | Nature. [3]

Les différents fleuves du pourtour de la Méditerranée creusèrent à cette occasion de gigantesques vallées de plusieurs centaines de mètres de profondeur, dont des traces ont été retrouvées notamment à Assouan et au Caire pour le Nil, à Lyon et à son embouchure pour le Rhône,, les gorges du Verdon,. Ces vallées furent ensuite comblées par les sédiments. Cet épisode est aussi responsable des karsts produisant des sources d'eau douce se jetant directement dan la méditerrannée.

Cet assèchement s'accompagna de dépôts massifs d'évaporites (roches salines), formant des plaines de sédimentation, que l'on observe aujourd'hui sous forme de diapirs sur les profils de réflexion sismique.

Évolution sur la période

Vue d'artiste de la Méditerranée asséchée. L'encadré montre le passage d'espèces (ici des camélidés et des rongeurs) d'un continent à l'autre.

Des profils sismiques, réalisés en Méditerranée orientale dans le cadre du programme européen MEDSALT[4], révèlent l'existence d'un vaste système sédimentaire non salin datant de la crise messinienne[5],[6]. Actuellement submergé mais situé au dessus des couches d'évaporites, il contient plus de 4 150 km3 de sédiments. Ces résultats montrent qu'après l'évaporation de la mer et le dépôt du sel, une partie du bassin profond restée exondée a été recouverte par une sédimentation d'origine continentale. L'analyse montre qu'un ancien réseau fluvial, baptisé Nahr Menashe, prenait sa source dans le sud de la Turquie et l'ouest de la Syrie, s'étendait à l'emplacement de la mer actuelle sur plus de 500 km, et s'achevait par un delta de six lobes au sud du mont sous-marin Ératosthène.

Remise en eau

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Vue d'artiste de la remise en eau de la mer Méditerranée. L'encadré montre le flot entrant par le détroit de Gibraltar.

La remise en eau de la mer Méditerranée se fit au début du Zancléen (début du Pliocène), il y a 5,33 millions d'années, de manière très brutale. En quelques décennies, la mer Méditerranée aurait été à nouveau remplie. Les traces du flot zancléen sont visibles en aval (à l'est) du détroit de Gibraltar sur les relevés topographiques (image ci-dessus).

L'étude de l'érosion des sols à l'est du détroit, ainsi que des dépôts et alluvions, a conduit à considérer que la mer pourrait s'être quasiment remplie (à 90 %) dans un intervalle de quelques mois à deux ans. Cela impliquerait un débit ayant atteint de l'ordre de 108 mètres cubes par seconde au niveau du détroit de Gibraltar (contre 1,5 × 105 mètres cubes par seconde en moyenne pour l'Amazone actuelle à son embouchure, soit environ mille fois plus).

Voir aussi

Bibliographie

  • Jean-Pierre Suc, G. Clauzon, J. Cravatte, F. Gautier et D. Violanti, « Âge et durée de la crise de salinité messinienne », Comptes-Rendus de l’Académie des Sciences de Paris (2), 318, 1994, p. 1103-1109

Article connexe

Liens externes

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  1. Julien Gargani, Christophe Rigollet. « Mediterranean Sea level variations during the Messinian Salinity Crisis ». Geophysical Research Letters, vol.34, L10405, 2007.
  2. (en) Christian Ohneiser, Fabio Florindo, Paolo Stocchi et Andrew P. Roberts, « Antarctic glacio-eustatic contributions to late Miocene Mediterranean desiccation and reflooding », Nature Communications, vol. 6, no 1, , p. 8765 (ISSN 2041-1723, DOI 10.1038/ncomms9765, lire en ligne, consulté le )
  3. (en) K. J. Hsü, W. B. F. Ryan et M. B. Cita, « Late Miocene Desiccation of the Mediterranean », Nature, vol. 242, no 5395, , p. 240–244 (ISSN 1476-4687, DOI 10.1038/242240a0, lire en ligne, consulté le )
  4. « MEDSALT : Uncovering the Mediterranean salt giant » (consulté le ).
  5. « Quand des fleuves s’écoulaient au fond de la Méditerranée… », sur INSU, (consulté le ).
  6. (en) Andrew S. Madof, Claudia Bertoni et Johanna Lofi, « Discovery of vast fluvial deposits provides evidence for drawdown during the late Miocene Messinian salinity crisis », Geology, (DOI 10.1130/G45873.1).
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