Conseil des troubles

Le Conseil des troubles, est le nom d'un tribunal d'exception mis en place par le duc d'Albe au début de son gouvernement des Pays-Bas, en 1567, pour réprimer les émeutes iconoclastes survenues l'année précédente en Flandre et en Hollande, et de façon générale les troubles religieux. À cause des nombreuses condamnations prononcées dans les premiers mois de son existence, les Brabançons le surnommèrent Conseil de Sang. Il resta en fonction près de dix ans.

Gravure de 1679

Contexte d'apparition du Conseil des troubles

Le territoire de la future Belgique occupé par Philippe II, roi d'Espagne se trouvait en ces temps dans une période tendue, notamment avec l’arrivée des répressions et des exécutions de 1568 commanditées par le duc d’Albe envers les iconoclastes qui craignait l’augmentation du nombre de calvinistes. Cela offrit un terrain fertile à la montée des insurrections des protestants venant des provinces des Pays-Bas[1]. Les répressions se sont faites particulièrement sentir par le moyen de ce Conseil des troubles. En effet, le roi Philippe II avait chargé le duc d’Albe d’assoir le prestige de l’Église romaine et le rétablissement du pouvoir politique espagnol. Ainsi, en 1567 le duc décida d’établir un tribunal destiné à sévir ce qu’il appelait les « désordres passés »[2].

Prérogatives du Conseil des troubles

Présenté à l'origine comme un simple organe consultatif devant rendre des avis pour guider les trois conseils de gouvernement (conseils d'état, privé et des finances) et le Grand conseil de Malines, le conseil des troubles cumulait en fait les compétences de ces institutions en prononçant condamnations et saisies financières. Il pouvait passer outre toutes les juridictions inférieures et ignorait les privilèges provinciaux et particuliers. Cette dernière disposition posa de graves problèmes lors du jugement des comtes de Hornes et d'Egmond, qui en qualité de chevaliers de la Toison d'or ne pouvaient être jugés que par leurs pairs ou le souverain lui-même, sans délégation. Le gouverneur général le présidait, aidé par deux vice-présidents et des juristes. Ces assistants furent recrutés uniquement dans la noblesse moyenne, comme Charles de Berlaymont, dans le milieu des conseils provinciaux, et surtout dans l'entourage espagnol du duc d'Albe. Ces derniers, seuls, avaient droit de vote, si bien que les membres espagnols au premier chef desquels se trouvaient Albe et Juan de Vargas furent de fait les juges du tribunal.

Le conseil avait compétence sur tous les faits de dissidence religieuse, alors assimilée à un crime de lèse-majesté. Après le placard sur la sédition, l'opposition politique fut également réprimée à ce titre et sous le vocable de haute-trahison. Face à ces nouvelles compétences et à la multiplication des cas, le conseil enfla: on le divisa en deux chambres civiles et deux chambres criminelles à compétences régionales. Les premières avaient la charge des appels suite aux confiscations, les deux autres jugeaient effectivement les cas. Toutes les affaires devaient passer par le conseil qui pouvait éventuellement s'en dessaisir sur les organes ordinaires du gouvernement, ce qu'il fit rarement.

Il avait la rare particularité de procéder entièrement par écrit : tout se passait par le biais de rapport et de lettres sans que l'on ne s'exprime jamais à l'oral. Cette procédure exceptionnelle était, entre autres, due au fait que le duc d'Albe parlait assez mal français, mais frustrait profondément les justiciables qui avaient l'impression de ne pas pouvoir se défendre. Du fait même de ses compétences et de ce fonctionnement, il gagna une solide réputation d'arbitraire.

Le Conseil des troubles perdurera jusqu’en 1576, lorsque la pression sociale était trop forte que pour continuer à utiliser ce tribunal. Don Luis De Requesens, le gouverneur général des Pays-Bas (aussi appelé grand commandeur), et fervent opposant au duc d’Albe avait déjà donner la voie à cette fin en écrivant une lettre en 1573 au Roi Philippe II lui dévoilant toutes les déviances du Conseil des troubles et lui proposant de donner les fonctions de ce tribunal aux provinces. Cependant, le Conseil des troubles continua d’exister (mais que de nom) jusqu’à la mort de Requesens en 1576[3]. Durant cette année, les oppositions redeviennent plus fortes et dépourvue d’un gouverneur général, le conseil d’état reprend la main sur l’autorité du territoire comme l’explique Renon de France, le roi n’ayant plus qu’à annoncer l’absolution de ce Conseil des troubles.

Notes et références

  1. Etienne Gossart, Espagnols et Flamands au XVIe Siècle. L’établissement du régime espagnol dans les Pays-Bas et l’insurrection, Bruxelles, H. Lamertin,
  2. Alphonse Verheyden, Le conseil des troubles, Flavion-Florennes, Editions le phare, coll. « Histoire du protestantisme en Belgique et au Congo belge »,
  3. Louis-Prosper Gachard, « Notice sur le Conseil des Troubles institué par le duc d’Albe », Bulletins de l’Académie royale des Sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique, vol. Tome XVI - IIème partie, , p. 50-78

Voir aussi

Source

  • Louis-Prosper Gachard, « Notice sur le Conseil des Troubles, institué par le duc d'Albe », Bulletins de l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux arts de Belgique, t. XVI, deuxième partie, , p. 50-78
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