Collection des plans et dessins du Moyen Âge de l’Œuvre Notre-Dame

La collection des plans et dessins du Moyen Âge de l’Œuvre Notre-Dame est un ensemble de dessins datant du XIIIe siècle au XVIe siècle et représentant des grands monuments gothiques, en particulier la cathédrale de Strasbourg. Propriété de la Fondation de l'Œuvre Notre-Dame, qui l’a assemblée au Moyen Âge, cette collection a été placée en dépôt au musée de l'Œuvre Notre-Dame à la création de celui-ci et est exposée au public depuis 2015, avec toutefois des restrictions en raison de la grande fragilité des documents. Comptant une trentaine de pièces, l’ensemble strasbourgeois est la troisième plus grande collection de plans médiévaux en Europe, après celles de l’Académie des beaux-arts de Vienne et des archives d’Ulm.

Historique

Salle de conservation et de présentation de la collection des plans et dessins au Musée de l’Œuvre Notre-Dame.

La collection a commencé à se constituer au Moyen Âge, au sein de l’Œuvre Notre-Dame, l’atelier de cathédrale de Strasbourg. L’institution, bien qu’employant les architectes de la cathédrale, n’était toutefois en temps normal pas propriétaire des plans que ceux-ci établissaient et qu’ils emmenaient avec eux lorsqu’ils quittaient le chantier[1]. Les plans conservés sont donc probablement soit des commandes spéciales, soit ont été rachetés aux maîtres d’œuvre ou à leurs héritiers, transactions qui apparaissent parfois dans les livres de comptes.

L’ampleur exacte de la collection au XVIe siècle n’est pas connue en détail, mais il est possible qu’elle ait compté à cette date plus de quatre cents plans et dessins. Toutefois, le déclin progressif de l’Œuvre Notre-Dame et ses difficultés financières à partir du XVIe siècle conduisirent à la déliquescence progressive de la collection : certains dessins furent ainsi utilisés au XVIIe siècle pour relier des livres et d’autres furent vendus[2].

Les restes de la collection commencèrent à attirer l’attention des érudits au XIXe siècle et l’architecte Georg Moller fut le premier à publier l’un d’entre eux dans son ouvrage Denkmählern der deutschen Baukunst en 1821. D’autres dessins furent ensuite publiés par Christian Wilhelm Schmidt en 1851, dans Faksimile der Originalpläne Deutscher Kathedralen et Schneegans envisagea d’en effectuer la publication complète, bien que le projet ne fut pas mené à terme. Cet intérêt n’amena cependant pas toujours la collection à être traitée avec plus de soin, et certains dessins encore mentionnés à cette époque disparurent alors entre les mains de collectionneurs privés[2], d’autres furent collés sur toile dans le but d’être exposés dans les bureaux de la Fondation, où ils étaient présentés aux visiteurs de marque, comme Viollet-le-Duc[3].

À la création du musée de l'Œuvre Notre-Dame dans les années trente, la collection y est mise en dépôt et quelques dessins furent alors exposés dans la salle du gâble, sans être toutefois particulièrement mis en valeur. C’est en 1989, à l’occasion de l’exposition Les bâtisseurs des cathédrales, que l’importance patrimoniale de l’ensemble des dessins est révélée. Cette événement marque toutefois également la fin de leur présentation au public : particulièrement fragiles, ils ont alors déjà souffert de leur exposition prolongée à la lumière[3].

Conservée en réserve pendant vingt-cinq ans, la collection rejoint finalement en 2015, à l’occasion du millénaire de la cathédrale, une salle du musée spécialement conçue pour leur exposition où ils peuvent de nouveau être présentés au public, avec cependant des restrictions[4].

Œuvres appartenant à la collection

Dessins A et A’

Le dessin A’.

Le dessin A, aussi appelé « projet A » est un grand dessin de 86 cm de haut et 61 cm de large représentant la façade de la cathédrale de Strasbourg[5]. Le tracé met l’accent sur les formes architecturales en omettant les détails ornementaux les plus fins, comme les remplages aveugles des gâbles ou des arcatures des contreforts. Par ailleurs, par souci d’économie, seule la moitié sud de la façade a été représentée, la moitié nord devant être déduite par symétrie.

Le verso comporte une esquisse incomplète d’un groupe de trois portails, qui pourraient être une esquisse préliminaire pour ceux de la cathédrale de Strasbourg. Roland Recht fait remarquer à ce propos qu’il n’est pas possible d’être certain de l’identification, du fait de différences assez importantes de proportions entre le dessins et le programme effectivement réalisé, mais que l’emplacement au verso du dessin A rend cette théorie assez solide[6].

Les dessins A et A’ ont été réalisés à la même période, vers 1260. Böker considère que l’esquisse des portails sur le verso du dessin A aurait été réalisée juste avant celui de la façade au recto, ce qui en ferait le plus ancien dessin de la façade de la cathédrale de Strasbourg[5].

Le dessin A’ étant très semblable au dessin A, il s’agit probablement d’une copie de celui-ci réalisée peu de temps après pour en détailler le programme ornemental. Il ne comporte en effet presque aucune trace de tracé préparatoire, ce qui tend à indiquer que son auteur avait sous les yeux un modèle lui permettant de réaliser ses traits directement à l’encre sans crainte de se tromper. Il se distingue par ailleurs du dessin A par le travail plus poussé sur l’ornementation des gâbles, des arcatures et des écoinçons de la rose[7].

Böker attribue les trois dessins à maître Rudolf, cité comme magister operis dans un document du milieu du XIIIe siècle[5]. Cette attribution n’a pourtant que peu été reprise dans les études postérieurs, dont les auteurs font remarquer que le titre de magister operis a longtemps été donné aux administrateurs de l’Œuvre Notre-Dame et que maître Erwin est le premier architecte de la cathédrale clairement identifié comme tel[8].

Dessin nº5

Le dessin nº5.

Avec sa hauteur de plus quatre mètres et ses statues colorées à la peinture à l’eau, le dessin nº5, qui représente la partie centrale de la façade de la cathédrale de Strasbourg sur toute sa hauteur, est l’œuvre la plus impressionnante de la collection[9]. Sa datation et, de là, son attribution demeurent sujettes à débat, les diverses propositions s’étendant entre 1300 et 1370 et y voyant les mains d’Erwin de Steinbach, de son fils Johannes Erwin ou de son petit-fils Johann Gerlach[9],[10].

Notes et références

Annexes

Bibliographie

  • Sabine Bengel et Cécile Dupeux, Dessins : Cathédrale de Strasbourg, Strasbourg, Musées de Strasbourg, (ISBN 9782351251669).
  • Sabine Bengel, Marie-José Nohlen et Stéphane Potier, Bâtisseurs de cathédrales : Strasbourg, mille ans de chantier, Strasbourg, La Nuée bleue, coll. « La grâce d’une cathédrale », , 275 p. (ISBN 978-2-8099-1251-7).
  • Anne-Christine Brehm, « L'influence des dessins B et B1 de la cathédrale de Strasbourg dans la réalisation des tours gothiques tardif », Bulletin de la cathédrale de Strasbourg, no 31, , p. 53-70 (ISSN 0153-3843)
  • (de) Johann Josef Böker, Anne-Christine Brehm et al., Architektur der Gotik: Rheinlande : Basel, Konstanz, Freiburg, Straßburg, Mainz, Frankfurt, Köln, Salzburg, Müry Salzmann, (ISBN 978-3990140642).
  • Cécile Dupeux et Jean-Paul Lingelser, « À propos des dessins d’architecture sur parchemins de la cathédrale de Strasbourg », Bulletin de la cathédrale de Strasbourg, no 21, , p. 73-74 (ISSN 0153-3843, lire en ligne)
  • Yves Gallet, « Le dessin 21 de l'Œuvre Notre-Dame : un projet de chevet pour la cathédrale de Strasbourg », Bulletin de la cathédrale de Strasbourg, no 29, , p. 115-146 (ISSN 0153-3843)
  • Horn Hauke, « Liaisons rhénanes : le dessin n° 6 de la cathédrale de Strasbourg et la chapelle de Werner à Bacharach dans le contexte du gothique rhénan », Bulletin de la cathédrale de Strasbourg, no 33, , p. 85-97 (ISSN 0153-3843)
  • Philippe Lorentz et Cécile Dupeux, Strasbourg 1400 : Un foyer d’art dans l’Europe gothique, Strasbourg, Musées de Strasbourg, .
  • Roland Recht, Les bâtisseurs de cathédrales gothiques, Strasbourg, Musées de Strasbourg, .
  • Carl Stehlin, Hans Reinhardt et Etienne Fels, « La façade de la cathédrale de Strasbourg : Étude comparative des anciens projets et de l’exécution », Bulletin de la Société des amis la cathédrale de Strasbourg, , p. 15-27 (lire en ligne)
  • Jean-Sébastien Sauvé, « Un projet de chœur pour la Cathédrale de Strasbourg : le dessin 28 du Musée de l’Œuvre Notre-Dame », Bulletin de la cathédrale de Strasbourg, no 30, , p. 171-192 (ISSN 0153-3843)
  • Alain Villes, « Remarques sur les premiers dessins du massif occidental de la cathédrale de Strasbourg », Bulletin de la cathédrale de Strasbourg, no 31, , p. 285-304 (ISSN 0153-3843)
  • (de) Société des amis de la cathédrale de Strasbourg, « Die alten Baurisse des Strassburger Münsters », Strassburger Münsterblatt : Organ des Strassburger Münster-Vereins, , p. 129 (lire en ligne)

Articles connexes

Liens externes

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