Code de Reed-Muller
Les codes de Reed-Muller sont des codes correcteurs linéaires. Cette famille de codes, initialement binaire, doit son nom aux travaux de David E. Muller qui proposa le principe du code et à Irving S. Reed qui proposa une technique de décodage, publiés en 1954. Depuis, cette famille a été largement étudiée et généralisée aux corps finis de plus de 2 éléments. Historiquement, un code Reed-Muller d'ordre 1 en 5 variables, qui a 64 mots de longueur 32 et corrige 7 erreurs, a été utilisé par les sondes Mariner lancées par la NASA entre 1969 et 1973 pour assurer une transmission (numérique) correcte des photos de Mars.
Un code de cette famille est identifié à l'aide de deux paramètres, en général notés et , appelés respectivement ordre et nombre de variables. Ces paramètres interviennent dans la description utilisant les fonctions booléennes : le code binaire de Reed-Muller d'ordre en , que l'on note , est l'ensemble des tables de vérité des fonctions booléennes en variables dont la forme algébrique normale (ANF) est de degré au plus . Lorsque l'alphabet est le corps fini à éléments, il suffit de considérer les fonctions -aires.
Code binaire
Une construction simple
On choisit un ordre quelconque sur les éléments de . Une fonction booléenne en variables est alors identifiée au mot binaire défini par
En d'autres termes, est la liste des valeurs prises par dans un ordre quelconque mais fixe. On peut alors définir
où est le degré de l'ANF de .
Exemple de
Dans l'exemple donné en introduction, le code Reed-Muller d'ordre 1 en 5 variables, vaut donc
- .
Les fonctions booléennes en 5 variables sont identifiées chacune à un mot binaire de longueur 32
L'ensemble des mots du code est
Ainsi le code est l'ensemble des tables de vérité des fonctions booléennes affines en 5 variables, la table de vérité de étant simplement le vecteur .
Une autre construction
On décrit comment construire une matrice génératrice d'un code de longueur . Posons :
Dans l'espace on définit, pour toute partie , les vecteurs par
On définit également dans l'opération binaire :
appelé produit extérieur.
est un espace vectoriel à dimensions sur le corps , donc on écrit
Dans l'espace , on définit les vecteurs de longueur suivants : et
où sont des hyperplans dans (de dimension ) :
Le code de Reed-Muller d'ordre et longueur est le code généré par et le produit extérieur d'au plus des (par convention, s'il y a moins d'un vecteur, le produit extérieur est appliqué comme l'identité).
En fait, derrière cette construction se cache est celle donnée par les fonctions booléennes. En effet, si est une fonction booléenne en variables, on a
- en posant
où est le vecteur défini à la section Code binaire. Il est alors facile de vérifier que
Pour terminer, il suffit de remarquer que , où est la ième forme coordonnée, i.e :
Le vecteur est donc égal à . La famille des produits extérieurs d'au plus vecteurs , est donc constituée des vecteurs de la forme
- avec .
Bien entendu, les sont des fonctions booléennes en variables dont le degré est exactement et pour tous les , , elles forment une famille génératrice des fonctions de degré au plus .
On peut montrer que lorsque est un hyperplan, la fonction est affine. Il est donc suffisant de considérer des hyperplans engendrés par des fonctions linéairement indépendantes pour obtenir de la sorte les codes de Reed-Muller.
Paramètres
L'ensemble des fonctions booléennes de degré au plus est un espace vectoriel, ce code est donc linéaire. Par définition, sa longueur est . La famille des monômes de degré au plus étant une base de cet espace, et ayant
éléments, sa dimension est .
Le poids minimal du code est obtenu, entre autres, par les monômes de degré et vaut .
L'ordre 1
Lorsque , le code est constitué des fonctions affines, c'est-à-dire des fonctions de la forme
où les sont des éléments de .
La distance minimale du code de Reed-Muller d'ordre 1 est , ce qui en fait un code optimal selon la borne de Griesmer: un code ayant au moins autant de mots et une distance minimale au moins aussi grande ne peut pas être plus court que .
On peut même facilement être plus précis. En effet, le polynôme énumérateur des poids se calcule simplement :
où désigne le poids de Hamming de . Cela signifie qu'il existe 3 poids possibles pour les mots du code, soit pour le mot nul, soit pour le mot tout à , soit pour tous les autres mots. Pour prouver ce résultat il suffit de considérer la forme d'une fonction affine donnée ci-dessus. Si les sont tous nuls pour , la seule valeur prise par est et on obtient le mot tout à zéro ou tout à un selon la valeur de , donc respectivement les termes et . Si l'un des au moins est non nul pour , alors les éléments tels que forment un espace affine de dimension . Le cardinal de cet espace est donc . On en déduit que l'ensemble des tels que a pour cardinal . Le mot associé à a donc un poids de . Les fonctions pour lesquelles l'un des au moins est non nul donnent donc le terme .
Liens externes
Article de E.F. Assmus sur les codes de Reed et Muller, détaillant de nombreuses propriétés de ces codes.
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