Centre électronique horloger

Le Centre électronique horloger est une organisation privée active de 1962 à 1984, fondée pour développer l'électronique horlogère en Suisse, qui fait aujourd'hui partie du CSEM [ksɛm] de Neuchâtel.

Histoire

Naissance du Centre

Limité en ressources naturelles, comme en surfaces cultivables, l'Arc jurassien a basé son développement sur son savoir-faire technique et ses conditions cadres adaptées[1]. La région s'est dotée d'instituts performants financés par l'économie ou par la Confédération, dont le Laboratoire de recherche horlogère en 1921, qui devient le Laboratoire suisse de recherche horlogère en 1939[2]. Comme ce laboratoire rattaché à l'institut de Physique de l'Université de Neuchâtel, manque de moyens, la Fondation en faveur d'un laboratoire de recherches horlogères est inscrite au registre du commerce le 1er juin 1939 pour le financer[2].

Par contre, fondé comme Société anonyme le à Neuchâtel (Suisse)[3], le Centre électronique horloger (CEH) est une institution privée financée par un consortium de 20 manufactures horlogères suisses en vue de développer la technique et la production commerciale de montres électroniques en Suisse[4]. Dans les années 1960, l'industrie horlogère suisse se trouve en effet à un tournant de son histoire[5],[6] ; de nouvelles techniques concernant le mode d'affichage, la réserve d'énergie et le balancier entravent les ventes de montres mécaniques traditionnelles[2]. La fondation en 1962 du Centre électronique horloger a permis aux horlogers suisses de suivre l'évolution technique les montres bracelets. En effet, Lip en France, Hamilton et Bulova aux USA, ainsi que Ebauches en Suisse ont annoncé à la fin des années 50 le remplacement des ressorts mécaniques par des micro-piles électriques et les aiguilles par un affichage numérique.

L'oscillateur à diapason a été inventé en 1918 et l'oscillateur à quartz en 1921 déjà, mais les premières horloges basées sur cette technique ne sont apparues qu'en 1928 aux USA et en 1948 en Suisse à l'EPF[2]. La fondation du CEH est porté dans les années 1960 par Ébauches SA et la fédération de l'industrie horlogère suisse. Le produit phare du CEH était la famille Bêta[5],[6] ; un mouvement de montres à quartz qui permettrait à l'industrie helvétique de rivaliser avec les montres à quartz japonaises et américaines. L'invention en 1960 de la montre à diapason par l'ingénieur suisse Max Hetzel accélère ce processus, car la firme Bulova déplace la production du mouvement Accutron de Bienne, en Suisse, aux États-Unis. En réponse à ce transfert de technologie, le CEH lance en 1970, le mouvement Beta 21 en production, à la suite des prototypes produits à partir de 1967[2],[7]

Direction helvético-américaine

Le scientifique américain d'origine suisse Roger Wellinger est le premier directeur du Centre électronique horloger de 1962 à 1984[8]. Ce Schaffhousois, qui travaille aux Etats-Unis chez General Electric est engagé en 1960 pour constituer, à Neuchâtel, une équipe de chercheurs chargée de réaliser une montre-bracelet à quartz[7],[8].

Le choix du Quartz

montre à quartz Beta1

Fin 1965, alors que la plupart des entreprises de la région jurassienne tentent toujours d'améliorer la montre mécanique, le CEH mise tout sur la montre électronique. En 1966, le plan stratégique devient la production d'une montre-bracelet à quartz, une banale montre-bracelet remplaçant son balancier par un oscillateur à quartz et son ressort par une pile électrique[1],[4],[2],[7]. Utilisant également le nom « Beta », le produit final n'est pas lié au projet Beta précédent, car le président du conseil d'administration informe les deux initiateurs du projet que l'industrie horlogère suisse n'était pas intéressée par ce nouveau type de montre.

Malgré le manque d'implication dans le projet Quartz du directeur Max Forrer, le CEH a réussi à produire un calibre utilisable de montre-bracelet à quartz, le Beta 1, en . Testée par l'Observatoire chronométrique de Neuchâtel, la montre CEH-1020, résultante de ce projet, se révèle beaucoup plus précise que les montres chronomètres mécaniques.

Le premier prototype fonctionnel délivré à l'observatoire de Neuchâtel en 1967 par l'équipe de Roger Wellinger bat en précision les meilleures montres mécaniques, mais le directeur du centre quitte le CEH un an plus tard. Finalement, l'industrie suisse autorise en 1968 le CEH de lancer la production d'un mouvement à quartz et son résultat, la montre Beta 21, est arrivé sur le marché en 1970, peu de temps après la Seiko Astron. N'ayant pas atteint ses objectif en terme technique et commercial, ce projet démontra que la Suisse pouvait rivaliser sur le marché du quartz et les entreprises helvétiques commencent à développer leurs propres mouvements basé sur un oscillateur à quartz[4],[5],[6].

Disparition du Centre

La collaboration entre les différents membres du CEH n'a pas toujours été paisible : entre les supporter de la solution électronique, comme Roger Wellinger, Armin Frei, Rolf Loschinger, René Lecoultre, et ses détracteurs, comme Max Forrer ou Armin Frei, la stratégie du centre a été erratique, ce qui a permis aux Japonais d'imposer leur produit[1],[4],[5],[6],[2],[7],[8]. En 1984, le CEH fusionne avec deux autres instituts horlogers neuchâtelois, la Fondation Suisse pour la Recherche en Microtechnique (FSRM) et le Laboratoire Suisse de Recherches Horlogères (LSRH), pour devenir le Centre Suisse d'Electronique et de Microtechnique SA (CSEM). Fermé depuis 1998, le CEH est radié du Registre du Commerce depuis le à Neuchâtel[3].

Notes et références

  1. Pierre-Yves Donzé, Histoire de l'industrie horlogère suisse, XIXe-XXe siècle, aux origine d'un succès industriel et commercial, Neuchâtel, Alphil, , 211 p. (ISBN 978-2-88950-000-0)
  2. sous la dir. de Th. Perret, « Microtechniques et mutations horlogères », cahier de l'institut neuchâtelois, n° 28,, Hauterive, Ed. Gilles Attinger, , 336 p. (ISBN 2-88256-110-5), p.146-149
  3. Etat de Neuchâtel, « Extrait Internet du registre du commerce », sur Registre du commerce de l'Etat de Neuchâtel, (consulté le )
  4. FALLET, Estelle, « Horlogerie.Développement de la recherche en microtechnique », sur Dictionnaire historique de la Suisse (DHS), 11.08,2020 (consulté le )
  5. CEH, « Neuvième rapport de Gestion », (consulté le )
  6. CEH, « Dixième rapport de gestion », (consulté le )
  7. (en) Frei, Armin H., « la première montre-bracelet à quartz », sur ETHW.org, (consulté le )
  8. FRK, « Roger Wellinger, premier directeur du Centre électronique horloger, est décédé à 95 ans », ArcInfo, (lire en ligne)

Voir aussi

Bibliographie

  • Pierre-Yves Donze, Histoire de l'industrie horlogère suisse au XIXe-XXe siècle, Neuchâtel, Editions Alphil, (ISBN 978-2-88950-000-0).
  • Th. Perret (dir.), cahier de l'institut neuchâtelois, no 28, Hauterive, Editions Gilles Attinger, , 336 p. (ISBN 2-88256-110-5), « Microtechniques et mutations horlogères ».
  • Max Forrer, René Lecoultre et André Beyner, L'aventure de la montre à quartz : mutation technologique initiée par le Centre Electronique Horloger, Neuchâtel, .
  • Hélène Pasqiet, Recherche et développement en horlogerie : acteurs, stratégies et choix technologiques dans l'arc jurassien suisse 1900–1970, Neuchâtel, Alphil, , 503 p..
  • Estelle Fallet et Béatrice Veyrassat, Dictionnaire historique de la Suisse (DHS) (lire en ligne), « Horlogerie ».
  • « Recherche d'entreprises - République et canton de Neuchâtel », sur www.ne.ch (consulté le )
  • (en) Dr Armin H. Frei (1931-2012), In mémoriam (lire en ligne).
  • (en) « Histoire de la première montre bracelet suisse à quartz ».
  • (de) « Mission impossible : L'aventure de la montre à quartz », exposition du au [lire en ligne].
  • (en) « Invention de la première montre bracelet à quartz ».

Articles connexes

Liens externes

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