Case management

Le Case Management est une méthode d'accompagnement spécifique permettant de gérer les questions complexes relevant de l'action sociale, de la santé et des assurances.

Dans un processus systématique et coopératif, des prestations de qualité répondant aux besoins individuels sont fournies afin d'atteindre de manière efficiente les objectifs et résultats convenus. Le case management requiert une coopération interprofessionnelle et institutionnelle. Il respecte l'autonomie des bénéficiaires et évite de gaspiller les ressources dans les systèmes de la personne et des services de soutien.

Histoire

L’origine du case management, d'un point de vue social, remonte à 1863 lors de la création du premier Board of Charities, dans l’État du Massachusetts. C’est à cette date qu’apparaissent les premiers services sociaux et sanitaires destinés à venir en aide aux nouveaux migrants. Dès les années 1920, cette démarche est inscrite au répertoire des méthodes du travail social aux États-Unis[1]. Il faudra attendre 1940 pour que soit mis en place le premier modèle qualifié de case management à l’occasion de la Seconde Guerre mondiale. En effet, le retour en masse des soldats polytraumatisés et leur taux élevé d’institutionnalisation affecte le bon fonctionnement du système de santé. Il y a trop de demandes et une inadéquation entre l’offre et la demande de soins. Les conséquences sont un manque d’efficacité et une augmentation très importante des coûts de santé dans une économie déjà fortement fragilisée. Le Case Management a, à cette époque, pour objectif de favoriser la désinstitutionnalisation des patients atteints de ces syndromes par la mise en place d’un interlocuteur central. Son rôle est d’informer, d’orienter les patients et d’assurer la coordination et la gestion des offres de prise en charge et d’assistance. La finalité est de renforcer l’autonomie de la personne par une participation active de celle-ci ainsi qu’une mobilisation de ses ressources grâce à un accompagnement personnalisé[2].

C’est en 1974 que l’appellation officielle case manager voit le jour. Loin d’être une pratique réservée à une seule profession, elle s’inscrit également dans l’histoire des soins infirmiers américains, qui développent des mécanismes de coordination pour assurer aux populations défavorisées l’accès aux services de santé. Il s’agit d’un processus d’interaction entre un réseau ayant à dispenser des services de façon efficace et des clients ayant à les recevoir de manière efficiente. La connotation administrative de cette définition illustre que le case management est d’abord une technique de gestion sociale qui vise à coordonner les services pour résoudre la problématique de la fragmentation des services face aux besoins complexes d’une personne. « Forte de son succès, cette stratégie s’est étendue à d’autres domaines, jusqu’à ce qu’elle parvienne dans les années 1990 dans de nombreux pays dans le domaine de la promotion de l’emploi puis des assurances »[3].

Bases conceptuelles

Le Case Management se compose de trois niveaux conceptuels[4] :

Le programme

Il se définit par l’ensemble des intentions présentées dans le but de provoquer ou de soutenir une action ou un ensemble cohérent d’actions liés à des objectifs définis en fonction de finalités d’intérêt général, et des résultats précis. Il se caractérise par[5] :

  • la motivation qui a conduit à sa mise sur pied ;
  • le public auquel il s’adresse ;
  • les objectifs qu’il poursuit ;
  • le plan de son organisation ;
  • le domaine de la mise en œuvre ;
  • la finalité ;
  • la nature des effets qu’il vise.

Exemples : un programme de maintien à domicile ou un programme d’orientation et de suivi de la formation professionnelle.

Le modèle

Il correspond à l’architecture, l’organisation générale du dispositif. Il est conçu en conformité avec le programme, dont il permet l’opérationnalisation. Il est systématiquement composé d’un référent unique (au centre du dispositif), d’un suivi personnalisé et d’un schéma d’intervention[6].

Le circuit d’intervention

Il est constitué de différentes étapes, communément admises au nombre de 6[7] :

  • l’Intake : choix par le Case Manager d’intégrer ou non le candidat dans le programme ;
  • l’Assessment : évaluation globale permettant d’identifier la problématique de la personne, ses faiblesses et les ressources sur lesquelles elle va pouvoir s’appuyer ;
  • la Planification : définition des objectifs et des moyens alloués avec le bénéficiaire ;
  • le Monitoring : mise en œuvre contrôlée du plan d’intervention ;
  • l’Évaluation : comparaison des résultats aux objectifs, évaluation de la satisfaction du bénéficiaire ;
  • la sortie ou le reassessment.

Le modèle de Moxley (1989)[8] comprend quant à lui cinq phases : assessment, planning, intervention, monitoring, évaluation.

Rôle et fonction du case manager

Le Case Manager a pour fonction principale de définir précisément et conjointement l’objectif du suivi, puis d’accompagner la personne tout au long du circuit d’intervention. En lien avec la gestion de projet, le Case Manager va ainsi définir avec la personne un objectif précis à atteindre. Puis, il va planifier dans le temps, aider à la mise en œuvre et coordonner les différentes actions nécessaires à l’atteinte de cet objectif. Outre la réalisation de missions qui relèvent de son domaine de compétences, le Case Manager doit surtout garder une vision d’ensemble du processus d’accompagnement afin d’assurer une coordination et une collaboration efficientes des différents acteurs (usagers, institutions sanitaires et sociales, Case Manager, divers professionnels). Les quatre fonctions du Case Manager sont communément définies[9] :

  • gate keeper (portier) ;
  • broker (courtier) ;
  • advocacy (défense) ;
  • upport (coaching).

Champs d'action

Le case management est appliqué par des personnes exerçant diverses professions et donc soumises à différents codes d'éthique professionnelle. Case manager n'est pas un métier mais une fonction[10]. L’étude de la littérature met en évidence le case management dans les champs de la réhabilitation sur le lieu de travail, de la formation professionnelle, de la collaboration interinstitutionnelle, des assurances et de la santé. Il est amené à jouer un rôle dans l’organisation globale de la prise en charge socio-sanitaire. exemple dans le domaine de l’emploi : le case manager met l’accent sur l’émergence et l’orientation des ressources du demandeur d’emploi et l’amène à définir un projet professionnel que la case manager va suivre tout au long de son élaboration en soutien de la personne[11],[12].

  • Exemple dans le domaine de la santé[13] : Le case manager propose au malade un accompagnement global et progressif vers le rétablissement dans son cadre de vie ordinaire, en collaboration constante avec ses proches et les intervenants du milieu médical et paramédical. Celui-ci peut être fait dans le domaine de la santé mentale, de la gériatrie ou encore dans le cadre de patients présentant de multiples pathologies chroniques (ex : cancer, diabète) nécessitant une collaboration étroite des différentes spécialités médicales. Il n’est pas rare de voir un ergothérapeute, une infirmière ou un médecin coordinateur chargés de cette mission de case management. Le but du case management dans le domaine de la santé est d’améliorer la prise en charge des soins du bénéficiaire, d’améliorer sa satisfaction et d’optimiser les coûts[14].
  • Exemple dans le domaine des assurances[15] : Depuis 1990, les assurances ont œuvré à l’essor du case management dans leur pratique quotidienne auprès d’assurés dont la capacité de travail a été altérée à la suite d'une maladie ou d'un accident. Lorsqu'une personne est confrontée à une situation très complexe où la seule indemnisation pécuniaire ne permet pas de revenir au plus proche de sa situation de vie antérieure, elle doit reconstruire l’ensemble de son projet de vie. Dans ce cadre, le case manager accompagne ces bénéficiaires dans la définition et la mise en œuvre de leur nouveau projet. Référent du projet des victimes, il coordonne à cette fin les différents intervenants dans un souci d’accompagnement transparent, décloisonné, plus efficace et plus efficient. Le but du case management dans le domaine des assurances est d’améliorer la satisfaction du bénéficiaire et d’optimiser les coûts[16],[17].

Organisation de la profession

La formation en France

En France, il existe à ce jour un diplôme universitaire, en collaboration avec la Haute École spécialisée de Suisse occidentale, permettant d’obtenir la certification en case management DU de case management . Il donne les compétences nécessaires à l’implantation d’un dispositif ou à l’exercice du case management.

Dans le monde

Au Royaume Uni[13] : il existe de nombreuses formations dont la durée et le contenu varient en fonction du domaine et du niveau de connaissances initial des participants. Ces formations sont sous le contrôle de la « Case Management Society UK ». En Allemagne et en Autriche : les formations se déroulent dans des instituts de formation agrées par la « Deutsche Gesellschaft fur Care und Case Management ». Les formations durent entre 3 et 15 mois en fonction du niveau d’entrée et des expériences professionnelles de l’étudiant. Au Canada : une large offre de formations et de spécialisations est dispensée par différentes institutions du pays.

Le cadre réglementaire

En France, l’Association Française de Case Management (AFCM) a été créée en 2015.

Le case manager est soumis à la législation sur la protection des données et de la personnalité ainsi qu'au devoir de discrétion.Il ne peut transmettre ou se procurer des informations que dans les limites légales ou dans la mesure où le client/patient a donné sa procuration écrite[18],[19].

Bibliographie

  • Pierre Gobet, Le case management en contexte, Lausanne, EESP-les outils, , définition du case management selon le réseau romand de case management,2008
  • A. Heimer, Le care management pour les PME également, Prévoyance professionnelle Suisse, , 69-70 p.
  • (en) Catherine M. Mullahy, Essentials Readings in Case Management,
  • Johanna Poetzsch, Le case management : voie royale de l’intégration dans le monde du travail ?, ()
  • Pierre Gobet, Le case management en contexte, Lausanne, EESP-les outils,
  • Deloitte, Case management-coordination de parcours de soins appliqué au secteur de la santé et des services à la personne,
  • SCOR, Case Management : l’approche globale de la victime,
  • Engel H,Engels D et Page G, Case Management dans les différents systèmes d'aide nationaux pour les personnes âgées : Rapport intégré de l'ISG Sozialforschung und Gesellschaftspolitik, Ministere allemand pour la famille,les personnes âgées,les femmes et les jeunes, GmbH.Cologne,
  • (de) Fetz B et Senn M, Case Management in der Sozialarbeit.Fallstudie uber die familiale Betreuung eines alteren Menschen.Rorschach : HFS Ostschweiz,Hochschule fur Soziale Arbeit,
  • (en) Goodwyn SE, The work of long term Care Case Managers,the Two Faces of Case Management, University of Victoria,
  • Perron N, Réseaux intégrés de services en santé mentale et enjeux des pratiques.Nouvelles pratiques sociales, t. 18(1), , 162-175 p.
  • Shaller P et Huard P, L'integration de soins.Cité Generations,un nouveau modèle d'organisation des soins ambulatoires, coll. « Care Management », , 3,5-8 p.

Notes et références

  1. Catherine M. Mullahy, Essential Readings in Case Management, 1998
  2. P. Gobet, D. Galster, M. Repetti, F. Scherer, E. Constantin, Le case management en contexte, 2012, p. 36-37, Les origines du case management
  3. Johanna Poetzsch, Le case management : voie royale de l’intégration dans le monde du travail ?, 2007
  4. Pierre Gobet, Le Case Management en contexte, Éditions EESP Lausanne, 2012
  5. Pierre Gobet, Le Case Management en contexte, 2012, Éditions EESP Lausanne, p. 22
  6. Pierre Gobet, Le Case Management en contexte, 2012, Éditions EESP Lausanne, p. 25
  7. Pierre Gobet, Le Case Management en contexte, 2012, Éditions EESP Lausanne, p. 26-27-28
  8. David P.Moxley, The Practice of Case Management, Sage Human Service Guides, 1989
  9. Pierre Gobet, Le Case Management en contexte, 2012, Éditions EESP Lausanne, p. 33-34
  10. R. Woodtley, Coordonner – connecter – renforcer. La Gestion des cas: définition et objectifs, Panorama, 1/2006, 4-6.
  11. J. Poetzsch, Le cas emanagement: voie royale d'intégration dans le monde du travail, 2006, p. 11-12
  12. C. Kälin, Chômage des jeunes : la stratégie à long terme du canton d’Argovie. Sécurité sociale CHSS, 3/2010, 144 - 146
  13. Étude Deloitte (5 février 2013) « Case management-coordination de parcours de soins appliqué au secteur de la santé et des services à la personne »
  14. C. De Cangas, P. José, Le Came Management affirmatif : une évolution complète d'un programme en milieu hospitalier, Santé Mentale au Québec, volume 19, no 1, 1994, p. 75-91
  15. Étude Scor (janvier 2003) « Case Management : l’approche globale de la victime »
  16. S. Pacheco, Gazette du Palais, édition spécialisée du 5 au 8 août, no 217-220 p. 16-17
  17. A. Heimer, Le care management pour les PME également (le rôle de l'institution de prévoyance dans la prévention des cas d'ivalidité), Prévoyance Professionnelle Suisse juin 2010, p. 69-70
  18. A. Corvol, Gestionnaire de cas : Nouveau métier, nouvelles questions, Eréma août 2011 (www.espace-ethique-alzheimer.org)
  19. 17 mars 2011 : Revue Zeso (aide sociale) no 1

Liens externes

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