Camille Noûs

Le prénom Camille est épicène. Le nom de famille Noûs est un jeu de mots sur le pronom personnel nous, évoquant la communauté des chercheurs[1], et le grec ancien noûs (νοῦς), qui signifie « raison »[2]. Sa première action, le 20 mars 2020, est de signer une lettre ouverte protestant contre la politique scientifique française en matière de financement de la recherche[3]^,[4].

Un an plus tard, Camille Noûs, membre du laboratoire imaginaire Cogitamus[5], a co-signé 180 articles scientifiques dans des domaines aussi divers que l'astrophysique, la biologie moléculaire et l'écologie, et accumulé des citations[2]^,[4]^,[6]^,[7].

Que Camille Noûs devienne un auteur très prolifique est censé montré l'absurdité du système d'évaluation quantitative de la recherche[7]^,[8]^,[9], à un moment justement où Thierry Coulhon prend la tête du Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (HCERES) et entend y développer l'évaluation quantitative de la recherche[10]. Il s'agit en particulier de rompre « avec la rhétorique de la trouvaille géniale et solitaire qui justifie le marketing de soi-même, la course au chiffre, l’évaluation à l’impact et la mise en concurrence des scientifiques »[5]^,[11].

Révélée par la revue Science en mars 2021, l'initiative donne lieu à une couverture médiatique importante, en France[5] et dans le monde, suscitant des commentaires notamment en Allemagne où Die Zeit[12] parle de "guérilla scientifique", en Italie[13], en Norvège[14] ou aux Pays-Bas, où la NRC compare les objectifs politiques de RogueESR à ceux de mouvements néerlandais engagés par la transformation éthique du système de recherche comme Science in Transition[15].

Le 27 avril 2021, Camille Noûs fait paraître dans la revue AOC un appel aux chercheurs les encourageant à le/la citer dans leurs publications. Cet appel reprend la défiance déjà exprimée sur la personnalisation des découvertes favorisée par la bibliométrie mais prend également un tour politique incriminant l'instrumentalisation du travail scientifique et dénonçant la "promotion de prétendues « preuves scientifiques », dégagées de leur contexte de débat contradictoire, qui visent à modeler l’opinion afin de légitimer des décisions politiques engageant la société entière"[16].

En juin 2021, plus de 140 documents scientifiques (articles dans des revues scientifiques, communications dans un congrès, chapitres d'ouvrages....) sont référencés sur le profil de Camille Noûs dans l'archive ouverte HAL[17]. Au même moment, le magazine d'actualité scientifique Horizons, édité par le FNRS suisse, dénombre 180 articles signés Camille Noûs[18].

L'utilisation d'un nom de chercheur fictif pose des problèmes éthiques ; la responsabilité et l'obligation de rendre des comptes doivent accompagner le crédit qui accompagne la qualité d'auteur[2]. Onze éditeurs ont refusé de mentionner ce co-auteur sur des articles[5]. Selon la bioéthicienne Lisa Rasmussen, « Cette campagne est naïve et éthiquement douteuse. Elle bafoue le principe de base de la responsabilité et fait fi de la paternité de l’article »[2]^,[4].

Le chercheur Yves Gingras répond[5]:

« La réaction des revues était prévisible, comme celle des “éthiciens” de la science, qui ont tendance à intérioriser sans distance critique les pratiques dominantes. La rhétorique de “l’éthique” renforce un système qui impose des normes simplement pour assurer la validité des modes d’évaluation, qui comptent plus que les contenus. »

Un article paru dans le journal Physical Review B a été corrigé pour indiquer que l'inclusion du nom de Noûs était contraire à la politique du journal et qu'il avait été supprimé[19]. RogueESR encourage désormais explicitement les auteurs et autrices à expliquer leur démarche aux éditeurs, pour éviter ces corrections ou rétractations. Un groupe de mathématiciens a choisi de retirer un article de la revue Proceedings of the Royal Society of Edinburgh après que le comité de rédaction a refusé d'inclure Noûs[2].

Certains observateurs ont noté qu'il est « préoccupant que l'on puisse si facilement ajouter [dans un article] un co-auteur qui n'a même pas de carte d'identité », d'autant que l'ajout de faux co-auteurs est parfois utilisé pour tromper, pour simuler une collaboration internationale[20].

• Loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030
• F. D. C. Willard, chat siamois et co-auteur fictif du physicien américain Jack Hetherington[7]

• Ressources relatives à la recherche :
  • Cairn
  • Google Scholar
  • Hyper articles en ligne
  • ResearchGate
• Site officiel

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