Côte d'Albâtre

La Côte d'Albâtre est un choronyme qui correspond à une région côtière française du pays de Caux située sur la Manche. Constituée de 130 kilomètres de bordures maritimes et de falaises entrecoupées de valleuses, elle constitue la quasi-totalité du littoral de la Seine-Maritime. Depuis 2009, une partie est classée site Natura 2000 sous la dénomination littoral cauchois.

Côte d'Albâtre

Carte de situation du pays de Caux (en jaune) et de sa Côte d'Albâtre.
Pays France
Région Normandie
Département Seine-Maritime
Coordonnées géographiques 49° 46′ 00″ N, 0° 22′ 00″ E
Étendue d'eau Manche (océan Atlantique)
Longueur 130 km
Extrémités Dieppe - cap de la Hève
Nature des rivages Falaises
Principales plages Grèves de galets
Cours d'eau Arques, Bresle, Valmont
Caps et péninsules Antifer, Fagnet, La Hève
Îles aucune
Ports Dieppe, Fécamp, Havre-Antifer, Saint-Valery-en-Caux
Origine du nom Falaises de craie
Géolocalisation sur la carte : Seine-Maritime
Géolocalisation sur la carte : Normandie
Géolocalisation sur la carte : France
Falaise de la côte d'Albâtre (Le Tilleul).

Présentation

Le nom de la Côte d'Albâtre fait référence à la couleur blanc-laiteux que prend parfois la mer au pied des hautes falaises quand la craie dont elles sont constituées commence à se dissoudre.

Entre les portions de falaises allant de 30 à 120 m de hauteur (dont les plus renommées sont celles d'Étretat et les plus hautes celles du Tréport), se sont formées des valleuses, ou vallées suspendues de petits fleuves côtiers, et exceptionnellement quelques secteurs d'accumulation de sables, argiles et galets (baie de Somme).

Quelques ports s'abritent dans les échancrures les plus importantes :

La côte d'Albâtre, d'ouest en est, délimite d'abord le pays de Caux (depuis Le Havre), puis le petit Caux (jusqu'au Tréport) de part et d'autre du port de Dieppe .

La blancheur de ses falaises, qui s'étirent sur 130 km, forme un paysage unique au monde. Seuls trois fleuves perçant une brèche ont permis l'implantation de villes :

Géologie

La côte d'Albâtre se développe dans les craies à silex du Crétacé supérieur (du Cénomanien au Sénonien), parfois couvertes par les formations cénozoïques (terrains sablo-argileux au cap d'Ailly, Bois de Cise). Le passage du Crétacé inférieur (Albien) au Crétacé supérieur (Cénomanien) se traduit par une succession de niveaux sableux, argileux et crayeux qui indique une invasion marine de grande ampleur, caractérisée par une « mer de la craie » tropicale de faible profondeur (250 à 300 m au-dessus du niveau actuel[1]) favorable au développement de coccolithes dont l'accumulation et la sédimentation (à un taux moyen de cm / 1 000 ans) pendant 30 millions d'années est à l'origine de la craie[2]. Ce littoral correspond en effet à la terminaison nord-occidentale du Bassin parisien qui est recouvert au Crétacé supérieur par cette mer alors que le climat est dominé par un effet de serre considérable (température supérieure à celle actuelle de près de 10 °C due à un volcanisme[3] intense)[4] à l'origine de la dilatation thermique des eaux et de la fonte des calottes polaires. Ces deux facteurs n'expliquent pas à eux seuls l'augmentation du niveau marin de plusieurs centaines de mètres au crétacé. C'est probablement le regain d'activité des dorsales consécutivement à l'accélération de l'ouverture de l'océan Atlantique qui est le facteur principal à l'origine de la transgression du Crétacé supérieur[5].

Hauts murs verticaux et subverticaux de calcaire s'élevant de 30 à 105 m au-dessus du niveau de la mer, les falaises sont formées de couches alternées de silex foncé et de marnes jaunâtres. La mer les attaque, et gagne ainsi jusqu'à plusieurs centimètres par an (recul en moyenne de 20 cm/ an, soit 200 m pour 1000 ans), rongeant le pied des falaises par vagues incessantes : la partie haute finit par céder, ne reposant plus sur rien.

Les strates de sédiments ont des épaisseurs irrégulières en raison des variations du niveau de la mer. Les bancs de silex sont issus d'organismes capables de précipiter et de fixer la silice pour la construction de leur squelette (silicoflagellés, radiolaires, diatomées, éponges, épines d'oursins). À leur mort, la boue crayeuse devient riche en silice issu de la dissolution de ces squelettes[6]. En suivant les falaises du SW au NE, les couches de craie dessinent des ondulations de grande amplitude[7] : un synclinal (synclinal d'Ailly affecté par la faille de Fécamp – Lillebonne) et un anticlinal (anticlinal de Penly), à grands rayons de courbure. Des ondulations de plus faible amplitude, voire une stratification oblique avec une pente pouvant dépasser 45°, due aux courants marins qui déplacent les dunes hydrauliques mobiles. La partie supérieure de ces dunes peut être ultérieurement érodée car un hardground et une surface d'abrasion discordants constituent le toit de la couche. La stratification peut également être perturbée par des plis et des contacts mécaniques. Ces déformations sont pénécontemporaines du dépôt de la couche et attribuables à des slumpings gravitaires, des secousses sismiques ou des houles violentes[8].

Les éléments crayeux du Crétacé supérieur se dissolvent dans l'eau, lui donnant une couleur gris bronze laiteux, tandis que la partie dure, les morceaux de silex, sont roulés et érodés par le remous jusqu'à former des galets aux formes lisses et parfaites.

Jusqu'en 1985, les Normands ramassaient des galets et certaines familles en vivaient. Il était vendu pour la construction de maisons. Ces galets réduits en poudre entrent dans la fabrication de la porcelaine, comme additif de dentifrice ou de peinture et sont utilisés dans l'industrie chimique.

Galerie

Bibliographie

  • Monique Ragot et Jacques Ragot, Guide nature de la côte d'Albâtre, éditions des Falaises, coll. « Guides Nature », , broché (ISBN 978-2-84811-073-8 et 2-84811-073-2)
  • Bernard Hoyez, Les Falaises du Pays de Caux : lithostratigraphie des craies turono-campaniennes, Publication des Universités de Rouen et du Havre, , 348 p. (ISBN 978-2-87775-463-7 et 2-87775-463-4, lire en ligne)

Notes et références

  1. Seuls le Massif armoricain et central sont émergés à cette époque.
  2. Marguerite Bruneau, Seine-Maritime, Christine Bonneton, , p. 193.
  3. Des traces de ce volcanisme sont visibles dans des niveaux de marne bentoniteuse, la bentonite étant une cendre volcanique altérée en argile.
  4. (en) Karen L. Bice, Richard D. Norris, « Possible atmospheric CO(2) extremes of the Middle Cretaceous (late Albian-Turonian) », Paleoceanography, vol. 17, no 4, , p. 22-1–22-17 (DOI 10.1029/2002pa000778).
  5. Dynamique et méthodes d'études des bassins sédimentaires, Éditions Tehnip, (lire en ligne), p. 174.
  6. Par le phénomène d'épigénie, les molécules de silice remplacent une par une les molécules de carbonate de calcium lorsque l'eau s'enrichit en oxygène (upwelling). En effet, l'oxygène dissocie l'hydrogène sulfuré produit par les bactéries sulfato-réductrices vivant dans la zone dysoxique de la boue crayeuse, ce qui baisse le pH et a pour conséquence la dissolution du carbonate de calcium. Bernard Hoyez, Les Falaises du Pays de Caux : lithostratigraphie des craies turono-campaniennes, Publication des Universités de Rouen et du Havre, , p. 17.
  7. Schéma panoramique des falaises du Pays de Caux, sur planet-terre.ens-lyon.fr
  8. Bernard Hoyez, « À la découverte géologique des falaises d'Étretat : de l'anse de la Valaine à la porte d'Amont (Étretat Nord) », sur [planet-terre.ens-lyon.fr], .
  9. Ce type d'exsurgence s'explique lorsque la rivière ne se jette plus dans la mer à cause du recul de la falaise ou lorsqu'elle rencontre une couche imperméable (marne au-dessus des hardgrounds comme ici).
  10. Alternance de niveaux gris de marnes (marne gris foncé contenant de 20 à 40 % d'argiles) et de niveaux blancs de craie (craie marneuse gris pâle contenant de 10 à 20 % d'argiles). Ces « couplets sédimentaires (en anglais « bedding couplets », ou « clay clock » (horloge-argile) en cyclostratigraphie) de l'ordre de 50 cm correspondent à une durée de 20 000 ans (20 ka), soit celle d'une précession des équinoxes. La diminution progressive de la fraction argileuse dans la série crayeuse est l’expression probable de l’aridité croissante, d’une moindre érosion continentale et de la submersion des surfaces continentales.
  11. (en) B.W. Lauridsen, A.S. Gale and F. Surlyk, « Benthic macrofauna variations and community structure in Cenomanian cyclic chalk–marl from Southerham Grey Pit, SE England », Journal of the Geological Society, no 166, , p. 115-127 (DOI 10.1144/0016-76492007-164).
  12. Cette rythmicité ne peut s’expliquer que par un phénomène autocyclique ou allocyclique. « Cf » A la recherche de rythmes dans la craie

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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