Biais des survivants

Le biais des survivants est une forme de biais de sélection consistant à surévaluer les chances de succès d'une initiative en concentrant l'attention sur les sujets ayant réussi mais qui sont des exceptions statistiques (des « survivants ») plutôt que des cas représentatifs.

Exemples

Finance et économie

Dans le domaine de la finance, le biais des survivants survient lors de l'exclusion des entreprises ayant fait faillite des études de performance. Ainsi, par exemple, si une étude évalue la performance des entreprises pour une certaine période de temps, les entreprises n'ayant pas « survécu » à cette période seront exclues de l'étude.

En 1996, Elton, Gruber et Blake montrent que le biais des survivants est plus étendu dans le domaine des petits fonds mutuels que dans celui des gros, probablement en raison du plus grand nombre de faillites chez les petits[1].

Militaire

Les endroits endommagés des avions revenus du front montrent les endroits où ils peuvent être endommagés et espérer revenir à la base. Les avions endommagés aux autres endroits ne reviennent pas.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, le statisticien Abraham Wald a pris en compte le biais des survivants dans ses calculs afin d'évaluer comment minimiser la perte de bombardiers sous le feu ennemi. En étudiant les dommages causés à des aéronefs revenus de mission, l'étude a recommandé de blinder les endroits des appareils qui présentaient le moins de dommages. En effet, Wald a constaté que les études précédentes ne tenaient compte que des aéronefs qui avaient « survécu » à leur mission, sans tenir compte de ceux qui avaient disparu. Ainsi, les endroits endommagés des aéronefs revenus représentent les endroits où ces derniers peuvent encaisser des dommages et réussir à rentrer à la base. La conclusion de Wald est que lorsqu'un aéronef est endommagé à un autre endroit, il ne revient pas de sa mission. En conséquence, ce sont ces endroits - ceux non endommagés chez les « survivants » - qui devraient être renforcés, et non les endroits endommagés[2],[3].

Chats

Une étude réalisée en 1987 montre que les chats qui chutent d'une hauteur équivalente à moins de six étages et qui survivent ont des blessures plus graves que les chats tombant d'une hauteur plus élevée[4],[5]. L'une des hypothèses proposées affirme que cela est causé par la baisse du stress chez l'animal une fois la vitesse terminale atteinte, ce qui l'amène à être plus « mou » lors du choc au sol[6]. La situation pourrait cependant s'expliquer par un biais des survivants. Il est beaucoup moins probable que les chats qui meurent à la suite d'une chute soient emmenés chez le vétérinaire par rapport aux chats blessés par une chute. Les chats morts à la suite d'une chute de plus de six étages sont donc retirés des statistiques, ne laissant la place qu'aux chats « survivants »[7].

Production industrielle

Le biais des survivants entre souvent en cause pour expliquer certains lieux communs (parfois vrais aussi souvent faux) comme « les produits étaient mieux fabriqués avant » car cette assertion se base évidemment sur les objets artisanaux ou manufacturés qui ont survécu et ne tient absolument pas compte de tous ceux qui sont en décharge, à la poubelle ou recyclés depuis longtemps.

Bien que le biais des survivants puisse expliquer une part importante de l’idée commune que les vieux produits étaient plus solides et durables, d'autres effets peuvent entrer en jeu, tels que l'obsolescence programmée ou la suringénierie (en). Pour cette raison, il est difficile de réellement comparer deux produits dans le temps, et de déterminer, si globalement, la qualité est meilleure ou non. Les biens manufacturés évoluent constamment, les procédés industriels, les composants, matières, techniques également. Pour ces raisons, il est possible de concevoir et produire des produits durables également, mais la pression sur les coûts de production et les délais ont également augmenté, aboutissant à l'apparition de produits plus techniques, mais parfois plus éphémères. De manière générale, le consommateur a accès à des produits d'une durabilité au moins comparable à celle des produits des générations précédentes [source insuffisante]. Encore une fois, le biais des survivants fait que ne sont pris en considération que les produits ayant survécu au temps tandis que la masse d'objets de faible qualité et ayant disparu est ignorée.

Architecture et construction

En architecture également, les bâtiments de plus de cent ans encore debout donnent une fausse impression de "qualité de la construction d'antan" alors qu'ils ne représentent qu'une infime part de ce qui a été construit depuis l'invention de la construction, le reste s'étant écroulé ou ayant été démoli.

Notes et références

  1. (en) Elton, Gruber et Blake, « Survivorship Bias and Mutual Fund Performance », Review of Financial Studies (en), vol. 9, no 4, , p. 1097–1120 (DOI 10.1093/rfs/9.4.1097).
  2. (en)(en) Marc Mangel et Francisco Samaniego, « Abraham Wald's work on aircraft survivability », Journal of the American Statistical Association, vol. 79, no 386, , p. 259–267 (DOI 10.2307/2288257, JSTOR 2288257) Reprint on author's web site.
  3. Wald, Abraham. (1943). A Method of Estimating Plane Vulnerability Based on Damage of Survivors. Statistical Research Group, Columbia University. CRC 432 — reprint from July 1980. Center for Naval Analyses.
  4. (en) WO Whitney et CJ Mehlhaff, « High-rise syndrome in cats », Journal of the American Veterinary Medical Association, vol. 191, no 11, , p. 1399–403 (PMID 3692980)
  5. Highrise Syndrome in Cats.
  6. « Falling Cats »(ArchiveWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?) (consulté le ).
  7. (en) Cecil Adams, « Do cats always land unharmed on their feet, no matter how far they fall? », sur The Straight Dope, (consulté le )

Voir aussi

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