Bernardo Provenzano

Bernardo Provenzano, né le à Corleone en Sicile et décédé le à Milan[1], est un criminel italien, membre dirigeant de la mafia sicilienne Cosa Nostra, surnommé « Le tracteur », puis « Le Comptable ».

Pour les articles homonymes, voir Provenzano.

Bernardo Provenzano
Cosa nostra - Corleonesi

Bernardo Provenzano en 1959
Information
Nom de naissance Bernardo Provenzano
Naissance
Corleone, Sicile,
Royaume d'Italie
Décès
Milan, Italie
Cause du décès Cancer de la vessie
Surnom Binnu u tratturi (Nanard le tracteur)
"Zio Binnu" (Oncle Bernardo)
"Il ragioniere" (Le comptable)
Condamnation 2007
Sentence Prison à vie
Actions criminelles Multiple assassinats, racket
Victimes Multiples victimes directes et des centaines d'assassinats ordonnés
Pays Italie
Régions Sicile
Ville Corleone
Arrestation

Il entre dans la clandestinité en 1963 pour être arrêté en 2006, soit une cavale de près de 43 ans. Durant cette période, il devient le bras-droit de Toto Riina et ils prennent l'ascendant sur les familles palermitaines durant la seconde guerre de la mafia dans les années 1980. Lorsque Riina est arrêté en 1993, Provenzano devient Capo di tutti capi (Chef de tous les chefs) de Cosa Nostra. Sous son règne, Cosa Nostra cesse les attentats et les meurtres spectaculaires et se fait discrète pour se recentrer sur des activités plus lucratives.

Jeunesse

Il est né et a grandi à Corleone, troisième de sept frères nés dans une famille de paysans. Provenzano quitte l'école à dix ans sans avoir terminé son primaire[2]. Il travaille dans les champs. Il rejoint la Mafia à la fin de son adolescence et commence par voler du bétail et de la nourriture pour le compte de Michele Navarra. À l'époque, Michele Navarra est le chef de la famille Mafieuse de Corleone. Puis il participe à son premier règlement de comptes à 21 ans. Il en résulte une blessure à la tête. Provenzano devient proche de Luciano Leggio, un mafieux jeune et ambitieux. Navarra et Leggio entrent en guerre l'un contre l'autre au milieu des années 1950.

En août 1958, Provenzano est l'un des 14 hommes de Leggio qui se sont mis en embuscade et assassinent Michele Navarra[3]. Leggio devient parrain. Au cours des cinq années suivantes, Provenzano aide Leggio à traquer et à tuer un grand nombre de partisans survivants de Navarra. C'est à cette époque qu'il gagne son surnom de « tracteur ». Car selon RFI « Il labourait partout où il passait. Il était comme Attila, après lui, l'herbe ne repoussait plus », comme le notifie l'un de ses complices[4].

Clandestinité et ascension au sein de Cosa Nostra

En mai 1963, Provenzano entre dans la clandestinité après l'échec d'une tentative d'assassinat contre le mafioso Francesco Paolo Streva, homme de main de Navarra. À cette époque, il ne craignait pas la police, mais la vendetta lancée par la mafia. Leggio dit de Provenzano: "Il tire comme un dieu, mais malheureusement, il a une cervelle d'oiseau"[2]. Le 10 septembre 1963, un mandat d'arrêt est émis contre Provenzano pour la tentative d'assassinat contre Streva et association mafieuse[5]. Dès lors, Provenzano, comme le reste des Corleonesi, passera la majeure partie de sa vie dans la clandestinité. Leggio va en prison pour l'assassinat de Michele Navarra en 1974, laissant effectivement Totò Riina prendre sa succession[3]. Provenzano devient le commandant en second des Corleonesi, le bras droit de Riina.

Le 10 décembre 1969, Provenzano participe au massacre de Viale Lazio avec le meurtre de Michele Cavataio et de ses trois gardes du corps pour son rôle dans la première guerre de la mafia. Mais l'attaque tourne mal. Cavataio riposte et tue Calogero Bagarella (un des frères aînés de Leoluca Bagarella, lui-même le beau-frère de Totò Riina). Selon la légende, Provenzano aurait sauvé la situation avec sa mitraillette Beretta 38/A et aurait gagné une réputation de tueur[6]. Cependant, selon Gaetano Grado , l'un des participants au massacre qui, plus tard, est devenu un témoin du gouvernement, Provenzano a failli faire rater l'attaque en tirant trop tôt[7]. Il est le parrain du maire de Palerme en 1970-71, Vito Ciancimino (qui devint en 1992 le premier politicien à être condamné suite aux révélations de Tommaso Buscetta).

Pendant le règne de Riina comme parrain, les autorités pensent que Provenzano faisait fonctionner en coulisse l'aspect financier des entreprises criminelles que lui et Riina orchestraient par le biais de sociétés écran et de différents prête-noms. Ils percevaient des commissions sur les travaux publics, le trafic d'armes mais surtout sur le trafic d'héroïne (la French Connection)[5]. On ne sait pas dans quelle mesure Provenzano a participé à la seconde guerre Mafia de 1981/82, initiée par Riina. Cette guerre a entraîné la mort de plus d'un millier de mafiosi et a fait des Corleonesi la faction dominante de la Mafia en Sicile sur les factions palermitaines.

Capo de tutti Capi : Chef de Cosa Nostra

Salvatore Riina est arrêté en janvier 1993 et est condamné à la prison à vie pour avoir ordonné des dizaines de meurtres, dont les deux célèbres attentats à la bombe de 1992 (le massacre de Capaci et celui de via D'Amelio) qui ont tué les procureurs Giovanni Falcone et Paolo Borsellino[5]. Falcone et Borsellino étaient chargés du Maxi-Procès du milieu des années 1980. Provenzano a été condamné par contumace pour les mêmes meurtres.

Bernardo Provenzano devient le chef de la famille des Corleonesi, et donc de ce fait le capo di tutti capi de toute la Cosa Nostra[5]. Il avait entretenu auparavant des relations conflictuelles avec Riina, ex-patron de la « cupola », le « parlement » de la mafia sicilienne. Parce qu'il se sent puissant et invulnérable, sa femme et ses deux enfants, qui l'avaient suivi dans la clandestinité, réapparaissent et reviennent vivre à Corleone[5]. Dès lors, les autorités le croient mort. Mais en 1993, il envoie une lettre dans laquelle il désigne ses avocats pour un futur procès le concernant[5]. La traque reprend, il faudra 15 ans de plus pour l'interpeller[5]. Provenzano change de tactique par rapport à Riinà : il comprend que le bras de fer avec l'État est néfaste à l'organisation. Il ordonne donc la fin des attentats et des meurtres spectaculaires dans le but d'endormir l'attention des autorités et ainsi mieux pénétrer la société sicilienne[4]. Il espère ainsi faire modifier le régime carcéral, le 41-bis, extrêmement dur pour les cadres de Cosa Nostra[5].

Inculpé dans des centaines de procédures pénales, il a été cité dans de nombreux procès antimafia depuis le début des années 1980 par les « repentis ».

La plupart de ses collaborateurs des clans corleonais ne connaissaient pas son visage. Il ne communiquait que par des messages codés sur papier avec ses hommes de confiance.

Arrestation

Fugitif depuis 1963, la dernière photo de lui datait de 1959 où il porte un costume pour la Saint-Valentin avec de la gomina dans les cheveux. Un portrait-robot avait pu être établi en 2005 grâce aux témoignages des médecins d'une clinique à Marseille, où il avait été soigné plusieurs semaines fin 2002 pour une tumeur à la prostate remboursée par la sécurité sociale italienne, alors qu'il est fugitif. Il se fait passer pour un boulanger[2]. Les autorités ne connaissent que trois éléments : son poids, sa taille et une cicatrice qu'il a au cou[4]. Après des remontées de filières criminelles entre la Belgique et l'Italie entre 2003 et 2006 et l'installation de micros dans tous les alentours de Corleone, même dans les oliviers[4], après 43 ans de cavale, Provenzano a finalement été arrêté le dans une ferme à Montagna dei Cavalli, à trois kilomètres de Corleone en Sicile par Renato Cortese, chef de la police palermitaine affectée à la traque des chefs mafieux, après une traque de huit ans[8].

Procès

Le le procès des deux derniers chefs de la mafia sicilienne, Bernardo Provenzano et Toto Riina a commencé devant la cour d'assises de Palerme. Les faits remontent à 1969 où il est considéré être l'un des acteurs directs de la fusillade survenue le et connue comme le « massacre de Viale Lazio », qui permit au clan des Corléonais de Provenzano et de Toto Riina d'éliminer plusieurs chefs rivaux dans laquelle six hommes de Cosa Nostra avaient trouvé la mort à Palerme.

Âgé de 74 ans, il a été condamné par contumace et douze fois à la réclusion criminelle à perpétuité, notamment pour son rôle de commanditaire dans les assassinats des juges antimafia Giovanni Falcone et Paolo Borsellino en 1992 et ordonnés par Riinà.

Fin 2009, le général Mario Mori, ex-chef du Raggruppamento operativo speciale des carabinieri puis directeur du SISDE (it), fut inculpé, étant accusé d'avoir délibérément retardé la capture de Provenzano. Ce procès est lié de près aux révélations faites par Massimo Ciancimino, le fils de l'ex-maire de Palerme.

Incarcération et mort

Il est incarcéré dans différentes prisons de haute sécurité d'Italie, sans radio, ni télévision[4]. Sa santé commence à décliner. En 2011, on lui détecte un cancer de la vessie. En 2012, il tente de se suicider en voulant s'étouffer avec un sac plastique[4]. Il souffre aussi de la maladie de Parkinson. Des images de caméras de surveillance sont diffusées à la télévision. On le voit en pleine confusion mentale alors qu'exceptionnellement, il a pu rencontrer sa famille. Il décède le 13 juillet 2016 à l'hôpital pénitentiaire de Milan[4].

Notes et références

  1. Voir Philippe Ridet, "Mort de Bernardo Provenzano, Le Monde, 13 juillet 2016 :. Voir aussi: "Décès de Bernardo Provenzano, l'ex-chef historique de Cosa Nostra", Libération, 13 juillet 2016.
  2. (en) Guardian Staff, « Rory Carroll on mafiosi Bernardo Provenzano », The Guardian, (lire en ligne, consulté le ).
  3. http://news.bbc.co.uk/2/hi/europe/4899512.stm
  4. Marie-Violette Bernard, « Qui était Bernardo Provenzano, le chef historique de la mafia sicilienne, mort à l'âge de 83 ans ? », sur francetvinfo.fr, (consulté le ).
  5. Philippe Ridet, « Mort de Bernardo Provenzano, ancien chef suprême de la Cosa Notra sicilienne », Le Monde, (lire en ligne , consulté le ).
  6. http://www.repubblica.it/2006/04/sezioni/cronaca/provenzano2/provenzano2/provenzano2.html
  7. (it) « La strage di viale Lazio /spiegata dal pentito chiave - Live Sicilia », sur Live Sicilia, (consulté le ).
  8. http://www.repubblica.it/2006/04/dirette/sezioni/cronaca/provenzano/provenzano/

Voir aussi

Sources et bibliographie

  • (en) Alexander Stille, Excellent Cadavers, Vintage, , 467 p. (ISBN 0-09-959491-9)
  • (en) Alison Jamieson, The Antimafia : Italy's Fight Against Organized Crime, MacMillan Press Ltd, , 257 p. (ISBN 0-312-22911-9)
  • (en) John Dickie, Cosa Nostra : A History of the Sicilian Mafia, Coronet, , 483 p. (ISBN 0-340-82435-2)
  • Clare Longrigg, Bernardo Provenzano, le parrain des parrains, Buchet Chastel, 2010, (ISBN 978-2-283-02372-3)

Articles connexes

Liens externes

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