Andreï Markov (mathématicien)

Andreï Andreïevitch Markov (en russe : Андрей Андреевич Марков) (1856-1922) est un mathématicien russe.

Pour les articles homonymes, voir Andreï Markov et Markov.

Andreï A. Markov
Naissance [1]
Riazan (Empire russe)
Décès
Pétrograd[2] (RSFS Russie)
Domicile Russie
Nationalité russe
Domaines mathématiques
Institutions Université d'État de Saint-Pétersbourg
Diplôme Université d'État de Saint-Pétersbourg
Directeur de thèse Pafnouti Tchebychev
Étudiants en thèse Abram Besicovitch
Nikolai Günther (en)
Veniamine Kagan
Jacob Tamarkin
James Victor Uspensky (de)
Gueorgui Voronoï
Renommé pour Propriété de Markov
Chaine de Markov
Processus de Markov, etc.

Il est considéré comme le fondateur de la théorie des processus stochastiques.

Biographie

La mère d'Andreï Markov, Nadejda Petrovna, était la fille d'un ouvrier d'État. Son père, Andreï Grigorievitch Markov, membre de la petite noblesse, servit dans le département des forêts, puis devint gestionnaire de domaine privé.

Dans ses premières années, Markov était en mauvaise santé et jusqu'à l'âge de dix ans, il ne pouvait marcher qu'à l'aide de béquilles[3]. Durant sa scolarité secondaire, il démontra des talents exceptionnels pour les mathématiques mais réussissait plutôt mal dans les autres matières[4]. Il écrivit son premier article de mathématiques sur la résolution des équations différentielles linéaires mais les résultats qu'il présentait n'étaient pas nouveaux[4]. Cependant, l'écriture de cet article lui fit rencontrer Korkine (de) et Zolotarev (en), deux des principaux professeurs à l'université, stimulant sa carrière scientifique. 

En 1883, Markov épousa Maria Ivanova Valvatieva. Ils se connaissaient depuis l'enfance car elle était la fille du propriétaire de la propriété gérée par son père. Cependant, la mère de Maria Ivanova n'autorisa sa fille à se marier avec Markov que lorsque ce dernier eut acquis un statut social suffisant[4]

Il a pour fils Andreï Andreïevitch Markov, un des fondateurs de l'école russe des mathématiques constructives.

Carrière scientifique

En 1874, il entra à la faculté de physique et de mathématiques de l'université impériale de Saint-Pétersbourg. Il participa au séminaire dirigé par Korkine et Zolotarev, et assista à des conférences de Tchebychev, le directeur du département de mathématiques. Celles-ci étaient particulièrement stimulantes pour Markov, car Tchebychev encourageait souvent une atmosphère de recherche en posant de nouvelles questions et problèmes pour que ses étudiants y réfléchissent.

En 1878, il est diplômé et remporte la médaille d'or pour le meilleur essai sur le thème du prix fixé par la faculté de cette année - Sur l' intégration des équations différentielles au moyen de fractions continues. Il voulut dès lors devenir professeur d'université et travailla pour sa maîtrise au cours des deux années suivantes (ce qui était équivalent à un doctorat). Il obtint le diplôme en 1880 pour sa thèse, Sur les formes quadratiques binaires avec déterminant positif. Selon Boris Delaunay, « ce travail, particulièrement apprécié par Tchebychev, représente l'une des plus belles réussites de l'école de théorie des nombres de Saint-Pétersbourg, et peut-être même de toutes les mathématiques russes. Il suffit de rappeler les sortes de questions dans le domaine de l'approximation rationnelle qui, à cette époque, préoccupaient les théoriciens les plus éminents de France et d'Allemagne, pour apprécier […][5] »

Markov a commencé à enseigner à l'université de Saint-Pétersbourg en tant que privatdozent tout en travaillant pour son doctorat (équivalent à l'habilitation). En 1884, il a obtenu son doctorat pour sa thèse Sur certaines applications de fractions continues.

Sous la tutelle de Tchebychev et en 1886, il devint membre de l'Académie des sciences de Saint-Pétersbourg.

Ses premiers travaux portent sur la théorie des nombres, les formes quadratiques, les fractions continues, les limites d'intégrales et les convergences de séries.

Ses travaux sur la théorie des probabilités l'ont amené à mettre au point les chaînes de Markov qui peuvent représenter les prémices de la théorie du calcul stochastique.

Il a officiellement pris sa retraite en 1905, mais a continué à enseigner jusqu'à la fin de sa vie.

Dès 1906, il commence ses recherches sur le calcul de probabilités. Il introduit de façon précise les processus aléatoires et démontre rigoureusement le théorème de la limite centrale.

Il publia une série d'articles théoriques dans le Bulletin de l'Académie impériale où il présenta des modèles successifs et de plus en plus élaborés de probabilités en « chaînes » que l'on nomme « chaînes de Markov ».

Chaîne de Markov

Le fonctionnement des chaînes de Markov repose sur un principe de prédiction basé sur le modèle stochastique. Les modèles stochastiques tendent à rendre compte de la variabilité des phénomènes à l'aide de probabilités, à l'inverse des modèles déterministes.

En 1902, il introduit la notion de chaîne dans le but de formaliser des problèmes d'épistémologie et de cryptage. Elles modélisent des phénomènes dynamiques aléatoires dans lesquels le passé n'intervient que via le dernier instant de la chaîne. Il s'agit donc de phénomènes aléatoires à mémoire courte[6].

Son modèle propose une alternative aux impasses du calcul des probabilités en formalisant les relations existant entre les probabilités de transition permettant ainsi de prendre en compte un ou plusieurs états antérieurs du système considéré.

En 1913, il expérimenta son processus dans un cadre de linguistique statistique en utilisant la séquence des 20 000 lettres d'Eugène Onéguine d'Alexandre Pouchkine. Il remarqua que l’apparition de celles-ci dépendait fortement des précédentes (on parle de contraintes). Cette remarque reste valable quels que soient la langue ou l’alphabet[7].

Quelque dix années plus tard, presque aveugle, il entreprit le même travail sur les 100 000 premières lettres d'un roman d'Aksakov ; cette étude ne paraîtra que dans la 4e édition posthume de son manuel Calcul des probabilités (1924)[8].

Opinions politiques

Markov a participé au mouvement libéral en Russie au début du vingtième siècle. Dans une série de lettres caustiques aux autorités académiques et étatiques, il protesta contre l'annulation, sur ordre du tsar, de l'élection en 1902 de Maxime Gorki à l'Académie de Saint-Pétersbourg, il refusa de recevoir des décorations (1903) et il repoussa son appartenance à l'électorat après la dissolution de la deuxième Douma d'État par le gouvernement (1907). Les autorités choisirent de ne pas faire un exemple de répression sur un académicien âgé et distingué[4].

Dans le cadre des émeutes d'étudiants en 1908, les professeurs de l'université de Saint-Pétersbourg reçurent l'ordre de surveiller leurs élèves. Markov refusa d'appliquer ce décret, et écrivit une explication dans laquelle il refusait d'être un « agent du gouvernement ». Markov fut démis de ses fonctions d'enseignant à l'université de Saint-Pétersbourg, et décida de se retirer de l'université[3].

Hommage dans l'art

    • Cité par le rappeur Freeze Corleone dans son morceau Tarkov sur l'album LMF: «J'suis là pour les sous, à propos des chiffres, s/o Andreï Markov» ("s/o" veut dire "shout out" soit "dédicace" en anglais). Freeze a un goût prononcé pour des génies peu connus par le grand public.

    Voir aussi

    Articles connexes

    Liens externes

    Bibliographie

    • (ru) А. А. Марков, « Распространение закона больших чисел на величины зависящие друг от друга ». Известия физико-математического общества при Казанском университете, 2-я серия, t. 15, 1906, p. 135-156.
    • (en) A. A. Markov, « Extension of the limit theorems of probability theory to a sum of variables connected in a chain », réimpr. dans l'appendice B de : R. Howard (en), Dynamic Probabilistic Systems, vol. 1: Markov Chains, John Wiley & Sons, 1971.
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    1. 2 juin dans le calendrier julien utilisé à l'époque.
    2. Autrefois enterré au Mitrofanievskoïe. Transféré en 1954 à la Passerelle des écrivains.
    3. (en) « Markov, Andrei Andreevich », sur http://www.encyclopedia.com (extrait du Complete Dictionary of Scientific Biography).
    4. (en) John J. O'Connor et Edmund F. Robertson, « Andrei Andreyevich Markov », dans MacTutor History of Mathematics archive, université de St Andrews (lire en ligne).
    5. (en) B. N. Delone, The St Petersburg School of Number Theory, Providence, RI, AMS, (lire en ligne), p. 93.
    6. Jacques Istas, Introduction aux modélisations mathématiques pour les sciences du vivant, Springer, p. 65.
    7. « Markov et la Belle au bois dormant », sur Images des mathématiques, .
    8. Micheline Petruszewycz, « Chaînes de Markov et statistiques linguistiques », Mots, vol. 7, no 1, , p. 85-95 (lire en ligne).
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