Abbaye Notre-Dame de Gomerfontaine
L'abbaye de Gomerfontaine est une ancienne abbaye de moniales cisterciennes située à Trie-la-Ville, dans le département de l'Oise. Fondée en 1207 en tant que simple prieuré, elle est érigée en abbaye dès 1226.
Abbaye de Gomerfontaine | ||||
L'abbaye à la fin du XVIIIe siècle | ||||
Diocèse | Rouen puis Beauvais |
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Patronage | Notre-Dame | |||
Fondation | 1207 | |||
Dissolution | 1792 | |||
Abbayes-filles | Chimay | |||
Période ou style | ||||
Coordonnées | 49° 16′ 39″ nord, 1° 51′ 00″ est | |||
Pays | France | |||
Région | Hauts-de-France | |||
Département | Oise | |||
Commune | Trie-la-Ville | |||
Géolocalisation sur la carte : France
Géolocalisation sur la carte : Hauts-de-France
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Comme l'immense majorité des abbayes européennes, elle est en crise aux XVIe et XVIe siècles et choisit, pour se réformer et retrouver la règle initiale, de passer à la Stricte Observance.
À la Révolution, l'abbaye est dissoute. Toutefois, la communauté survit à l'exil, et se rétablit dès le premier Empire en Picardie dans trois sites différents. L'expulsion des congrégations chasse les moniales hors de France ; elles s'établissent en Belgique, et fondent l'abbaye Notre-Dame-de-la-Paix de Chimay.
Historique
Fondation
Le prieuré de Gomerfontaine est fondé en 1207 par Hugues de Chaumont et sa femme Pétronille. Il est rattaché à l'Ordre cistercien qui le transforme en abbaye autonome dès 1226[1].
En 1256, Louis IX approuve la fondation de l'abbaye et l'exempte de péages[2].
Bas Moyen Âge
L'église est consacrée en 1266. L'abbaye souffre grandement de la guerre de Cent Ans et en particulier des incursions anglaises qui ruinent les bâtiments[3],[4].
Commende et réforme
Avant le XVIe siècle, les abbesses sont peu connues. Cependant, on conserve leur nom à travers quelques actes datés. Au XVIIe siècle, l'abbaye est en commende et est administrée par la famille de Médavy-Grancey. Trois abbesses de cette famille se succèdent : Judith de Rouxel de Médavy, de 1604 à 1614 ; Madeleine, de 1614 à 1638 qui réforme l'abbaye ; enfin la sœur de cette dernière, Marguerite, abbesse en titre jusqu'en 1705[5]. Elles redressent l'institution tant sur le plan matériel que spirituel.
Judith de Médavi restaure le temporel de l'abbaye qui a souffert de la guerre et d'une "incurie extrême sous les abbatiats précédents". Elle fait récupérer les biens qui avaient été aliénés.
En 1626, Madeleine de Médavi accueille à Gomerfontaine Mère Agnès Arnauld de Port-Royal qui, selon Charles de Condren, « n'y fit pas grand fruit, et y trouva toutes choses 1626... La Mère Agnès, lisons-nous encore dans la chronique, alla cette même année à l'abbaye de Gomerfontaine où l'abbesse la désirait, mais elle n'y fit pas grand fruit, et elle y trouva toutes choses... en si pitoyable état qu'écrivant à la Mère Angélique..., elle lui mandait agréablement que Dieu l'avait envoyée en ce lieu pour y honorer l'article du symbole : descendit ad in feros »[6]. L'année suivante, Madeleine introduit dans son abbaye, non le jansénisme, mais la réforme de l'« étroite observance » (premier nom de l'Ordre Cistercien de la Stricte Observance)[4]. En 1636, la guerre contraint l'abbesse à prendre la fuite et à trouver refuge à Argentan avec ses cinquante religieuses. Pour se prémunir contre de futures invasions, elle fait construire un hospice dans le faubourg Saint-Germain à Paris.
Marguerite de Médavi améliore les bâtiments: elle fait construire un dortoir de cent quatre-vingt pieds de long, un réfectoire, une salle pour le chapitre, une infirmerie et plusieurs autres dépendances. Elle meurt centenaire[7].
En 1705, Marie-Anne de la Viesville lui succéde. Elle le doit à Madame de Maintenon qui cherche alors une maison située à quelques distances de la cour pour y créer, pour les filles de la bourgeoisie, une succursale de Saint-Cyr, d'où le "luxe serait absent et l'éducation simple et peu coûteuse". Il lui faut pour cela une abbesse "jeune, active, intelligente". Elle porte son choix sur une de ses anciennes élèves, Marie-Anne de la Viesville, moniale à Argensol et surtout alliée de la riche et puissante famille de Noailles. Elle décide cinq ou six jeunes filles de Saint-Cyr à se faire cisterciennes et à entrer à Gomerfontaine. Elle leur adjoint comme institutrice, Mademoiselle d'Aumale que d'aucuns ont surnommée la "première institutrice laïque". Marie-Anne de la Viesville se révèle excellente gestionnaire et, il est vrai, avec l'aide de Madame de Maintenon et du cardinal de Noailles, parvient à faire vivre dans son abbaye cent soixante personnes, tant religieuses que pensionnaires et domestiques. Les religieuses sont au nombre d'environ 50. L'abbesse rédige un réglement pour les novices[8]. La mort de Madame de Maintenon, puis la banqueroute de Law diminuent brusquement le revenu des moniales qui, par ailleurs vivent pauvrement "d'eau claire, de petits brochets et de pois chiches". Madame de la Viesville meurt en 1751[9].
Vers 1767, sous l'abbatiat d'Anne-Jeanne du Pouget de Nadaillac, Jean-Jacques Rousseau séjourne à Gomerfontaine. Dans une de ses lettres, il décrit l'abbesse comme une personne bienfaisante et éclairée[10].
L'abbaye passe en 1782 dans les mains d'Elisabeth de Sarcus. Elle ne compte plus qu'une vingtaine de religieuses[10].
Révolution et exil
Sous la Révolution, en 1792, conformément aux décrets de l'Assemblée Nationale, l'abbaye est supprimée et vendue comme bien national. La communauté dissoute. Les moniales sont dispersées et, pour la plupart, retournent dans leur famille. Cependant, sous la conduite de l'une d'entre elles, Pauline Ducastel, la communauté tente de se reformer dès 1802, à Ham. Sans succès. En revanche, elle y parvient en 1804 et s'installe à Nesle, dans un modeste couvent d'une ancienne congrégation de Filles de la Croix. En 1816, elle s'installe dans un cadre plus vaste, l'ancien prieuré bénédictin de Saint-Paul-aux-Bois. L'expulsion des congrégations (1904) chasse à nouveau les religieuses, qui trouvent refuge en Belgique, à Fourbechies (commune de Froidchapelle), puis à Chimay où elles fondent l'abbaye Notre-Dame-de-la-Paix[1].
Liste des abbesses
- Guillemine I (+1248)
- Marguerite I d'Harcourt (+ 1251)
- Emmeline I (mention en 1251 et en 1256)
- Agnès I (mention en 1264 et 1266)
- Clémence de Chenevrières (mention en 1295)
- Emmeline II (+1330)
- Sédilie ou Odile d'Oinville (mention en 1367 et 1371)
- Eustachie de Bois-Gilout (mention en 1371 et en 1372)
- Pétronille I de Franconville (mention en 1373)
- Isabelle I de Marines (mention en 1377 et en 1379)
- Agnès II du Fayel (mention en 1381 et 1383)
- Jeanne I du Fresnoy (mention en 1386)
- Agnès III du Fayel (mention en 1395-1397)
- Jeanne II Hardouin (1409- +1409)
- Isabelle II Tabletier ou la Tablettiere (1409)
- Lucie de Montmorency (mention en 1412 et 1414)
- Guillemine II Couronne (mention en 1434)
- Marguerite II de Beauvoir (mention en 1437)
- Jeanne III (mention en 1468 et 1469)
- Marguerite III (mention en 1474)
- Jeanne IV de la Mare (mention en1475 - +1483)
- Pétronille II le Prévost (1484- déchue en1503)
- Nicole de Saint-Hilaire (mention en 1506,1513 et 1519)
- Marie I Langlois (1533-1568)
- Elisabeth le Monnier(1569-1580)
- Marie II Langlois (1580-1583)
- Jeanne V du Bouillonné (1583-1604 - abdication)[11]
- Judith de Rouxel de Médavi, coadjutrice (1604 -1614)
- Madeleine de Rouxel de Médavi (1604-1638)
- Marguerite IV de Rouxel de Médavi (1638-1705)[12]
- Marie-Anne de la Viesville (1705-1751)[13]
- Anne-Jeanne du Pouget de Nadaillac (1751-1782)
- Marie-Elisabeth de Sarcus (1782-1792)[14]
Notes et références
- « Gomerfontaine - N.-D.-de-la-Paix », Commentarii cistercienses, 1966, n°4, p. 311
- Maricourt & Driart, Une abbaye de filles au XVIIIe siècle Gomerfontaine, 1907, p. 449.
- « Trie-la-Ville : abbaye Notre-Dame de Gomerfontaine », Communauté de communes du Vexin-Thelle, (consulté le ).
- « Abbaye de Gomerfontaine (Trie-la-Ville, Oise) », IDref, (consulté le ).
- Marivourt & Driart 1907, II. Les abbesses de Gomerfontaine, p. 450 et 451.
- Henri Bremond, Histoire littéraire du sentiment religieux en France depuis la fin des guerres de religion jusqu'à nos jours, vol. IV (lire en ligne), p. 199
- Victor des Diguères, Etude historique et généalogique sur les Rouxel de Médavy-Grancey dan sles armées, à la cour et dans l'Eglise, Paris, Demoulin, , pp. 471-475
- HENNEAU Marie-Elisabeth, « – « Une abbesse cistercienne à l’écoute de Madame de Maintenon, Marie-Anne de la Viesville, abbesse de Gomerfontaine », XL », Cîteaux Commentarii cistercienses, XL, , p.355-375.
- De Maricourt, « Madame de la Viesville Abbesse de l'Abbaye de Gomerfontaine Une amie de Mme de Maintenon », Mém. com. arch. Senlis, VII (1905), , pp. 254-273
- Barraud, « Quelques mots sur l'Abbaye de Gomerfontaine », Mémoires de la Société Académique d'Archéologie, Sciences & Arts du Département de l'Oise, , p.588
- (la) Gallia christiana, t. XI, p. 322-324
- Victor des Diguères, Etude historique et généalogique sur les Rouxel de Médavy-Grancey dans les armées, à la cour et dans l'Eglise, coadjutrice, Paris, Dumoulin, , pp. 473-474
- de Maricourt, « Une amie de Mme de Maintenon Madame de la Viesville Abbesse de l'Abbaye de Gomerfontaine », Mém. com. arch. Senlis, VII, , pp. 254-273
- Barraud, « Quelques mots sur l'Abbaye de Gomerfontaine », Mémoires de la Société Académique d'Archéologie, Sciences et Arts du Département de l'Oise, 1862, t. v, p. 588
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- Baron de Maricourt et A. Driart, « Une abbaye de filles au XVIIIe siècle : Gomerfontaine », Revue des questions historiques, Bureau de la Revue, vol. T. XXXVII, no LXXXI, , p. 447-482 (lire en ligne)
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