Öküz Mehmed Pacha

Öküz Mehmed Pacha (dit « Mehmed le Taureau » ; assassiné le ), alias Kara Mehmed Pacha Mehmed le Noir ») ou "Kul Kıran" Mehmed Pacha Mehmed le bourreau d’esclave »[1]), est un général et homme d’État ottoman du début du XVIIe siècle. D'abord gouverneur de la Province ottomane d'Égypte[1],[2],[3],[4],[5] (1607-1611), il fut ensuite par deux fois Grand vizir : sous le règne d'Ahmet Ier (1614-1616) puis d'Osman II le Jeune[6] (1619-1619).

Origines

Fils d'un forgeron du quartier de Karagümrük à Constantinople, Mehmed Pacha devient un silahdar, c'est-à-dire un officier de la garde du sultan[2]. Il épouse la princesse Gevherhan Sultan, fille du sultan Ahmet Ier et de Kösem Sultan[3].

Gouverneur d’Égypte

En 1604, le gouverneur d’Égypte Maktul Hacı Ibrahim Pacha est assassiné par des sipahis de sa propre garde[7],[8],[9]. Cet assassinat inaugure trois années d'instabilité en Égypte : les deux gouverneurs envoyés successivement pour pacifier la province, Hadım Mehmed Pacha puis Yemenli Hasan Pacha, ne parviennent pas à mater la rébellion. C'est ainsi qu'en 1607, Mehmed Pacha est nommé gouverneur de la province ottomane d'Égypte, poste qu'il conservera[1],[2],[3],[4],[5] jusqu'en 1611.

À son arrivée à Alexandrie, Mehmed Pacha s'assure la ferveur populaire en allant se recueillir devant les tombeaux des saints locaux et en annonçant une politique d'apaisement envers les Mamelouks, dont il ordonne la réparation des forteresses[2]. Puis il s'impose par sa brutalité : il dissout le corps des spahis et abolit l'impôt illégal (tulba) que ces mercenaires avaient imposé au peuple d’Égypte[2]. Enfin pour mieux soumettre les beys, il fait exécuter ceux de ces gouverneurs de district qui avaient complaisamment fermé les yeux sur la pratique de la tulba[2].

Mehmed Pacha encourage l'architecture, tout en s'attachant à réformer le recouvrement des impôts et l'armée provinciale : il réduit le nombre de beys, ramené à douze[10].

Néanmoins, les tensions reprennent en  : des conjurés mamelouks se réunissent à Tanta, autour du tombeau d'Ahmed el-Badawi, le saint le plus révéré d’Égypte ; ils regroupent leurs forces puis pillent quelques villages pour amasser du ravitaillement[2]. Alors, contre l'avis de plusieurs de ses officiers, Mehmed Pacha lève une armée, non sans avoir délégué un moufti (du nom d’Altıparmak Mehmed Efendi) pour tenter de raisonner les rebelles[10].

L'armée du sultan défait les rebelles au nord du Caire. Mehmed Pacha fait exécuter 250 officiers, et ordonne l'exil des prisonniers au Yemen[10]. Après cette victoire, Mehmed Pacha est surnommé Kul Kıran le bourreau d’esclave » en turc). Le sultan le rappelle à Constantinople[10] en 1611.

Grand vizir

Mehmed Pacha a exercé les fonctions suprêmes de Grand vizir du au , puis du au . Au cours de son premier mandat, il organisa de son propre chef un raid sur Vienne, avec seulement 47 hommes, sans même en avoir informé le sultan ; ce fut un échec cuisant, qui faillit lui coûter sa mise à mort.

Governeur d'Aidin

Remparts du caravansérail Öküz Mehmed à Kuşadası.

Entre ses deux mandats de grand vizir, Öküz Mehmed exerça les fonctions de gouverneur de la province de Smyrne (qui recouvrait alors une grande partie de l'Anatolie occidentale). Son règne est marqué par la construction du caravansérail de Kuşadası, destiné à favoriser le commerce avec l'Occident grâce à son port maritime (mais celui-ci déclina aux siècles suivants, compte tenu de la préférence des marchands génois et vénitiens pour le port d'İzmir). Aujourd'hui, ce caravansérail est un hôtel de luxe doublé d'un centre commercial. Öküz Mehmed fit fortifier un autre caravanserail à Ulukışla, alors qu'il était en campagne contre les Séfévides[11].

Il est étranglé à son bureau en 1619 par un jeune janissaire dont il avait recherché les faveurs.

Notes

  1. (en) Jane Hathaway et Karl K. Barbir, The Arab lands under Ottoman rule, 1516-1800, Harlow/New York, Pearson Longman, , 319 p. (ISBN 978-0-582-41899-8, lire en ligne), p. 63, 255
  2. M. W. Daly et Carl F. Petry, The Cambridge History of Egypt, Cambridge University Press, , 478 p. (ISBN 978-0-521-47211-1, lire en ligne), p. 18
  3. A. Zuhuri Danışman, Osmanlı İmparatorluğu tarihi, Z. Danışman Yayınevi, , p. 243
  4. Michael Winter, Egyptian Society Under Ottoman Rule, 1517-1798, Taylor & Francis, , 336 p. (ISBN 978-0-203-16923-0), p. 47
  5. Société des Études turques, Turkish Studies Association Bulletin, Turkish Studies Association., , p. 93, 95
  6. (tr) İsmail Hâmi Danişmend, Osmanlı Devlet Erkânı, Türkiye Yayınevi, Istamboul,, .
  7. Cf. Michael Winter, Egyptian Society Under Ottoman Rule, 1517-1798, Taylor & Francis, , 336 p. (ISBN 978-0-203-16923-0), p. 45, 96
  8. M. W. Daly et Carl F. Petry, The Cambridge History of Egypt, Cambridge University Press, , 478 p. (ISBN 978-0-521-47211-1, lire en ligne), p. 40
  9. (en) 1=Michael A. Cook, Asad Ahmed, Behnam Sadeghi et Michael Bonner, The Islamic scholarly tradition : studies in history, law, and thought in honor of Professor Michael Allan Cook, Leiden/Boston, BRILL, , 385 p. (ISBN 978-90-04-19435-9, lire en ligne), p. 154
  10. Cf. M. W. Daly et Carl F. Petry, The Cambridge History of Egypt, Cambridge University Press, , 478 p. (ISBN 978-0-521-47211-1, lire en ligne), p. 19
  11. Prof.Yaşar Yücel-Prof Ali Sevim:Türkiye tarihi vol.III, AKDTYKTTK Yayınları, 1991, 43-44

Sources

  • B. Lewis, V.L Ménage, Charles Pellat, J. Schacht, Encyclopédie de l’Islam, G-P Maisonneuve & Larose SA, Paris, 1990, tome VI
  • (en) Alexander Mikaberidze, Conflict and Conquest in the Islamic World, A Historical Encyclopedia, vol. 1, Santa Barbara (Calif.), ABC-CLIO, , 1042 p. (ISBN 978-1-59884-336-1 et 1-59884-336-2, lire en ligne).


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