Île de Sable (Canada)

L'île de Sable est une petite île canadienne située à 170 km au sud des côtes de la Nouvelle-Écosse dans l'océan Atlantique. L'île est, dans son intégralité, un refuge d'oiseaux migrateurs depuis 1977 et comporte une population remarquable de chevaux sauvages.

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Île de Sable
Sable Island (en)

L'île de Sable vue de l'espace, en avril 1994.
Géographie
Pays Canada
Archipel Aucun
Localisation Océan Atlantique
Coordonnées 43° 55′ 51″ N, 59° 55′ 04″ O
Superficie 31 km2
Géologie Banc de sable
Administration
Statut Refuge d'oiseaux migrateurs

Province Nouvelle-Écosse
Démographie
Population Aucun habitant
Autres informations
Géolocalisation sur la carte : Nouvelle-Écosse
Île de Sable
Géolocalisation sur la carte : Canada
Île de Sable
Îles au Canada

Toponymie

L'île apparaît sur les cartes en 1505 sous le nom de « Santa Cruz ». On retrouve aussi l'île dans les cartes du XVIe siècle sous le nom de « I. da Crus » et « Isolla del Arena ». Son nom actuel apparaît en 1546 quand le cartographe portugais Joannes Freire la nomme « I. do Sable ». Le nom descriptif proviendrait du français. Bien que la version « Sandy Island » ait existé dans les très vieilles cartes, le nom de l'île est maintenant connu sous le nom de « Sable Island »[1]. L'île fait partie des 81 noms d'intérêt pancanadien[2].

Géographie

L'île de Sable est une barre de sable en forme de croissant longue de 42 km, mais dont la largeur ne dépasse pas 1,3 km[3]. Elle a une superficie d'environ 3 100 ha[4]. Elle émerge d'une vaste zone de haut et bas-fonds du plateau continental.

L'île de Sable est recouverte d'herbes et de végétation basse. On pense qu'elle s'est formée à partir de grandes quantités de sable et de graviers déposés sur le plateau continental à la fin de la dernière ère glaciaire. La forme de l'île change continuellement à cause des vents violents et des tempêtes.

Les effets contrastés du courant du Labrador et du Gulf Stream provoquent les nombreux brouillards dans cette région. En hiver, l'influence du Gulf Stream donne parfois à l'île de Sable les températures les plus élevées du Canada.

Géologie

L'île est composée de sable ayant été déposé il y a environ 19 000 ans lors du retrait de la dernière glaciation[5]. Celui-ci est composé à 90 % de quartz[5]. La roche mère est située à environ 40 m de profondeur[6]. Bien que l'île ne soit composée que de dépôts meubles, celle-ci est quand même entretenue par les tempêtes qui ramènent du sable provenant du banc Western[7].

Le courant du Labrador, qui longe le sud banc Western en direction ouest, bifurque au niveau de ce dernier dans le sens des aiguilles d'une montre sur le banc donnant au haut-fond des eaux calmes[7]. Le sable déposé sur l'île est stabilisé par l'ammophile à ligule courte (Ammophila breviligulata) grâce à son important système racinaire qui permet l'accumulation du sable et la formation de dunes[8].

Faune

Poneys de l'île de Sable.

L'île de Sable abrite environ 250 chevaux sauvages, protégés de toute influence humaine. L'origine de ces animaux n'est pas connue ; l'une des théories courantes explique qu'il s'agit des descendants de chevaux confisqués aux Acadiens lors de leur expulsion et abandonnés sur l'île par Thomas Hancock, un marchand de Boston. Selon Joseph Charles Taché, il s'agit plutôt de chevaux provenant d'une première tentative de colonisation menée par le Baron de Lery vers 1539[9].

Par le passé, les chevaux sauvages en excès furent capturés et transportés dans les mines de charbon de l'île du Cap-Breton, vendus ou euthanasiés. La colonie n'a pas été dérangée depuis 1960[10], mis à part quelques parachutages de foin pendant certains mois d'hiver. Ces actions ont été arrêtées afin de laisser la population des chevaux se stabiliser naturellement, bien que le sujet provoque parfois des débats entre les partisans du maintien des chevaux sur l'île et les avocats de leur déplacement afin de laisser l'île de Sable retourner à son état naturel. Ces animaux profitent de mesures de protection votées sous le mandat du Premier ministre John Diefenbaker, qui s'était engagé, au nom du gouvernement fédéral, à ne jamais les déplacer afin de ne pas mettre la race en péril[11]. Ces chevaux sont l'emblème de la Nouvelle-Écosse depuis 2008[12].

L'île de Sable compte également plusieurs colonies d'oiseaux, des sternes arctiques et une sous-espèce du bruant des prés endémique de l'île (Passerculus sandwichensis princeps). Des phoques communs et des phoques gris s'y reproduisent. Une espèce d'éponge d'eau douce, Heteromeyenia macouni, est endogène aux mares de l'île.

Histoire

Atlantic Sea Pilot (1884).
Station météorologique de l'île de Sable.

La première tentative de colonisation aurait été effectuée par le Baron de Lery vers 1539[13] (certains historiens dont l'historien Benjamin Sulte rapportant plutôt l'année 1519[14]), alors que bétail et chevaux auraient été emmenés sur l'île.

La première expédition documentée de l'île de Sable fut effectuée par l'explorateur portugais João Álvares Fagundes qui parcourut la zone en 1520-1521.

Une tentative de colonisation par la France à l'initiative de Troilus de Mesgouez à la fin du XVIe siècle échouera.

En 1597, Troilus de Mesgouez alors influent à la cour de France, confie au capitaine Chefdhostel une mission de reconnaissance en Amérique et, à la suite du rapport[15] de celui-ci, décide qu'il installera une colonie sur l'Île de Sable (Canada), isolée dans l'océan Atlantique, au large de l'actuelle Nouvelle-Écosse.

Le , le roi Henri IV renouvelle la commission du sieur de la Roche selon les termes suivants[16] :

« Henry, par la grâce de Dieu roi de France et de Navarre, à tous ceux qui ces présentes lettres verront, salut[17]

« Savoir faisons que pour la bonne et entière confiance que nous avons de la personne de notre amé et féal Troillus des Mesgoüets (…) le sieur de la Roche, (…) et de ses louables vertus, qualités et mérites, aussi de l'entière affection qu'il a au bien de notre service et avancement de nos affaires : icelui, pour ces causes et autres à ce nous mouvant, nous avons, conformément à la volonté du feu roi dernier décédé, notre très honoré sieur et frère, qui jà avait fait élection de sa personne pour l'exécution de ladite entreprise, icelui fait, faisons, créons ordonnons et établissons par ces présentes signées de notre main, notre lieutenant-général ès dits pays de Canada, Hochelaga, Terre-Neuve, Labrador, rivière de la Grande Baye de Norembègue et terres adjacentes des dites provinces et rivières, lesquels étant de grande longueur et étendue de pays, sans icelles être habitées par sujet de nul prince chrétien (…)[18] »

Cette commission lui accordait aussi le pouvoir de concéder des terres. Toutefois, il ne semble pas qu'il ait fait usage de ce pouvoir de concession.

En 1598, il embarque une quarantaine de colons, « choisis parmi un groupe de gueux et de mendiants », sur deux navires, la Catherine du capitaine Chefdostel et la Françoise du capitaine Jehan Girot, et il les installe à l'île de Sable, qu'il baptise Isle de Bourbon et où il fait construire des habitations et un magasin. Puis il laisse le poste sous les ordres du commandant Querbonyer et accompagne les navires aux pêcheries de Terre-Neuve. En septembre, sur le chemin du retour, une violente tempête empêche les navires de faire escale à l'île Bourbon et les rabat sur les côtes de France[19]. L'île reçoit des ravitaillements de 1599 à 1601, mais pas en 1602. Les colons se révoltent et tuent les deux dirigeants, Querbonyer et le capitaine Coussez. En 1603, Chefdhostel revient sur l'île et ne trouve que 11 survivants, qu'il rapatrie en France[17].

Le , la Compagnie de la Nouvelle-France concède[20] à l’île à Claude de Launay-Razilly[21], qui la vendit avec ses autres concessions acadiennes à Charles de Menou d'Aulnay, le . Selon le Dictionnaire généalogique du Canada, on aurait demandé à Isaac de Razilly de venir au secours de naufragés réfugiés sur cette île. Cependant le document du XVIIIe siècle qui en fait état ne semble pas très fiable.

Un phare fut construit dans les années 1790 par le gouvernement britannique et l'équipe chargée de sa maintenance constitua les premiers habitants permanents de l'île. Au début du XXe siècle, la compagnie Marconi y établit une station de télégraphie sans fil et le gouvernement canadien une station météorologique. Cette station météo est justifiée par le fait que l'île n'est pas très éloignée des grandes routes maritimes entre Londres et Boston et reste exposée à des conditions météo délicates, en plus d'être entourée de hauts-fonds. Les pêcheurs de Nouvelle-Écosse vont souvent sur le banc de l'île de Sable, moins poissonneux que celui de Terre-Neuve mais appréciable.

Située dans la zone de rencontre entre les courants du Gulf Stream et du Labrador, l'île est exposée à des brumes épaisses et des tempêtes violentes. Les bateaux s'y sont souvent égarés et ensablés sur ses côtes, qui sont le sommet d'un erg sous-marin. Le gouvernement canadien a recensé près de 500 naufrages tout autour de l'île et dressé une carte répertoriant chacun d'entre eux[22].

Jusqu'au début du XXIe siècle, l'île possédait deux phares, l'un à l'ouest, l'autre à l'est, et abritait les familles des gardiens respectifs, ainsi que l'équipe d'un poste de secours. Les phares sont désormais automatiques, mais les services des ministères d'Environnement Canada et de Pêches et Océans Canada effectuent des mesures météorologiques et atmosphériques dans une station occupée en permanence, du fait de la situation unique de l'île de Sable.

La constitution du Canada précise que l'île est sous la responsabilité du gouvernement fédéral. L'île est administrativement une partie de la municipalité régionale et du district électoral d'Halifax, bien qu'Halifax soit distante de 300 km.

Afin de préserver l'écologie fragile de l'île, l'autorisation spécifique de la Garde côtière canadienne est nécessaire pour y débarquer. Les forces armées canadiennes patrouillent en continu la zone, en partie à cause de la présence de gaz naturel et donc de plate-forme pétrolières et d'un gazoduc sous-marin. L'héliport de l'île peut servir de base d'urgence pour d'éventuelles opérations de secours en mer.

Évènements et naufrages

Protection du territoire

L'île a été reconnue en 1977 comme refuge d'oiseaux migrateurs en vertu de la loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs.

En 2008, le gouvernement fédéral a suggéré de changer le statut du refuge pour celui de réserve nationale de faune. Le , le gouvernement fédéral a conclu une entente avec la Nouvelle-Écosse dans le but de donner le statut de parc national ou de réserve nationale de faune à l'île. Ils tiendront des consultations publiques en 2010 avant de choisir le statut le plus approprié pour l'île[25]. Le , le gouvernement a confirmé qu'il prendra les mesures nécessaires pour que l'île devienne un parc national[26]. L'accord transformant l'île en réserve de parc national a été signé entre la Nouvelle-Écosse et le gouvernement fédéral canadien, le [27].

Notes et références

  1. (en) Gouvernement de la Nouvelle-Écosse, « Nova Scotia Geographical Names : Sable Island », sur Service Nova Scotia and Municipal Relations (consulté le )
  2. Gouvernement du Canada, « Services cartographiques : Noms d'intérêt pancanadien », sur Ressources naturelles Canada (consulté le )
  3. Parcs Canada, « Histoire naturelle de L'île de Sable », sur Parcs Canada (consulté le )
  4. Gouvernement du Canada, « Île de Sable, Refuge d'oiseaux de l' », Rapport sur les aires protégées, sur Environnement Canada (consulté le )
  5. Nova Scotia Museum of Natural History, « Regardez le sable de près », sur museum.gov.ns.ca, (consulté le )
  6. Nova Scotia Museum of Natural History, « Une montagne de sable », sur museum.gov.ns.ca, (consulté le )
  7. Nova Scotia Museum of Natural History, « Une île de sable : Les tempêtes, le sable et la survivance de l'île », sur museum.gov.ns.ca, (consulté le )
  8. Nova Scotia Museum of Natural History, « Vaincre le sable et le vent : L'ammophile, l'amie des sables », sur museum.gov.ns.ca, (consulté le )
  9. Joseph Charles, Les Sablons (L'île de Sable) et l'île Saint-Barnabé, Montréal, Librairie Saint-Joseph, Cadieux & Derôme#, , 176 p. (lire en ligne), p. 38
  10. (en) Judith Dutson, Storey's Illustrated Guide to 96 Horse Breeds of North America, North Adams (Massachusetts), Storey Publishing, 2005, p. 217-219.
  11. [PDF] John George Diefenbaker, 13e premier ministre du Canada
  12. Le cheval de l’île de Sable
  13. Joseph Charles, Les Sablons (L'île de Sable) et l'île Saint-Barnabé, Montréal, Librairie Saint-Joseph, Cadieux & Derôme#, , 176 p. (lire en ligne), p. 45
  14. Benjamin Sulte, Histoire des Canadiens-français, Montréal, Wilson et Cie, , 176 p. (lire en ligne), citant J.-C. Taché, Recensement de 1871, page XIII
  15. Annick Le Douguet, Langolen, Chronique d'un village de Basse-Bretagne, 1998
  16. Denis Vaugeois et Jacques Lacoursière, Canada-Québec, Synthèse historique, 1969
  17. William Bennett Munro, Documents Relating to the Seigniorial Tenure in Canada, Champlain Society, Toronto, 1908
  18. Édits et Ordonnances, texte reproduit dans W.B. Munro, Documents Relating to the Seigniorial Tenure in Canada
  19. Gustave Lanctot, Dictionnaire biographique du Canada
  20. ainsi que l’habitation de Port-Royal, l’habitation de La Hève et les terres avoisinantes sur 10 lieues à la ronde.
  21. frère d'Isaac de Razilly.
  22. Île de Sable: Les trésors de l'île de sable
  23. Étienne Taillemite, Dictionnaire des marins français, Tallandier, 2002, p. 407
  24. Thomas E. Appleton, Ravenscrag : the Allan Royal Mail Line, Toronto, « McClelland and Stewart », , 222 p. (ISBN 0-7710-0720-5), p. 203-204
  25. « L'Île de Sable sera protégée en vertu des lois fédérales », sur Parcs Canada, (consulté le )
  26. « L'île de Sable sera protégée en tant que parc national », sur Parcs Canada (consulté le )
  27. « Accord historique entre le Canada et la Nouvelle Écosse désignant l’île de Sable en tant que réserve de parc national du Canada », sur Parcs Canada, (consulté le )

Annexes

Liens externes

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