Île d'Anticosti

L'île d'Anticosti (en innu-aimun : Notiskuan ; en micmac : Natigostec) est une île naturelle du golfe du Saint-Laurent faisant partie de la municipalité régionale de comté (MRC) de Minganie, dans la région québécoise de la Côte-Nord, au Canada[1]. Elle se trouve face à Havre-Saint-Pierre, séparée de la Côte-Nord par le détroit de Jacques-Cartier et de la Gaspésie par le détroit d'Honguedo.

Pour les articles homonymes, voir Anticosti.

Île d’Anticosti

Image satellite de l’île d’Anticosti.
Géographie
Pays Canada
Localisation Golfe du Saint-Laurent (océan Atlantique)
Coordonnées 49° 30′ N, 63° 00′ O
Superficie 7 892,52 km2
Côtes 530 km
Point culminant Sommet Louis-Jolliet (312 m)
Géologie Île continentale
Administration
Statut Forme la municipalité de L'Île-d'Anticosti

Province Québec
Région administrative Côte-Nord
Municipalité régionale de comté Minganie
Démographie
Population 117 hab. (2018 hiver)
Densité 0,01 hab./km2
Plus grande ville Port-Menier
Autres informations
Découverte Préhistoire
Fuseau horaire UTC-5
Géolocalisation sur la carte : Canada
Île d’Anticosti
Îles au Canada

Anticosti est la plus grande île du Québec avec 7 900 km2, soit une taille comparable à la Corse. Mesurant 222 km de long et 16 à 48 km de large, elle est plus grande que la province canadienne de l'Île-du-Prince-Édouard, mais très faiblement peuplée (environ 300 habitants, quoique ce nombre puisse doubler durant la période de l'exploitation forestière ou de la chasse), principalement dans le village de Port-Menier, sur la pointe ouest de l'île, où se situent le port et l'aéroport. Elle est accessible par bateau à partir de Sept-Îles, Havre-Saint-Pierre ou Rimouski. On peut aussi s'y rendre par avion, à partir de Sept-Îles, Havre-Saint-Pierre ou Mont-Joli. L'île est un milieu où la nature règne. Elle est reconnue pour ses activités de plein air, sa pêche, sa chasse (plus de 150 000 chevreuils sont sur l'île). Des études portent à croire qu'on pourrait y trouver du pétrole de schiste (entre 30 et 46 milliards de barils[2],[3]).

Géographie

Réserve de pêche et de chasse, Anticosti est couverte d'une forêt d'épinettes et de sapins. Les cours d'eau tranquilles coulant au fond des gorges peuvent se transformer, à la fonte des neiges, en de furieux torrents, telle la rivière Vauréal dont les chutes s'élancent d'une hauteur de 76 mètres.

L'île jouit d'un climat sud-boréal plus tempéré que celui du continent. En été, le thermomètre oscille entre 15 et 25 °C et en hiver de 0 à −20 °C.

Principaux cours d'eau:

Rive Sud de l'Île d'Anticosti (de l'Ouest vers l'Est)

Rive Nord de l'Île d'Anticosti (de l'Ouest vers l'Est)

Histoire

De la préhistoire jusqu'aux explorations européennes

Depuis des centaines d'années, les Amérindiens du continent utilisaient l'île comme zone de chasse. Les Innus l'appelent Notiskouan, ce qui se traduit par « où les ours sont chassés » (en raison du grand nombre de ces plantigrades à l'époque) et les Micmacs l'appelent Natigôsteg qui signifie « la terre avancée »[4].

Il existe plusieurs théories, qui s'apparentent parfois plus à des légendes, sur la présence de plusieurs peuples européens, africains ou même asiatiques au Québec avant l'arrivée de Jacques Cartier. Un récit de Sextius Sullus rapporté par Plutarque[réf. nécessaire] en 75 av. J.-C. rapporte que des pèlerins partent à tous les trente ans de l'Angleterre vers le refuge de Cronos, le père de Zeus, qui pourrait être à l'île du Cap-Breton ou à l'île d'Anticosti[5]. Ce récit a été recueilli à Carthage, et on sait[Qui ?] que les Carthaginois se sont rendus jusqu'à la mer des Sargasses[Information douteuse][5].

Ancien régime

Détail de la carte de la Nouvelle-France par Marc Lescarbot, 1609. On y trouve Anticosti I. de L'Aʃsomption.

Jacques Cartier fut le premier Européen à mentionner l'île lors de son voyage en 1534. Puis, le 15 août 1535 contournant à nouveau l'île, il la nomma, en l'honneur de la fête du jour, Assomption[6],[7]. En 1680, les premiers colons arrivent et la seigneurie de l'archipel Mingan et l'île est offerte à Louis Jolliet par Louis XIV en récompense de son exploration du Mississippi et de sa découverte de la région des Grands Lacs. De la taille du quart de la Belgique, c'est la plus grande île à avoir été possédée par un particulier.

« Ce Fleuve a 20. ou 21. lieues de largeur à son embouchure au milieu de laquelle on voit l'Isle d'Anticostie, qui en a vingt de longueur. Elle appartient au Sieur Joliet, Canadien, qui y a fait faire un petit Magasin fortifié, afin que les marchandises et sa famille soient à l'abri des surprises des Eskimaux, dont je vous parlerai dans la suite : c'est avec d'autres Nations Sauvages savoir les Montagnois & les Papipanachois, qu'il trafique d'armes & de munitions pour des peaux de Loups Marins, & quelques autres Pelleteries. »

 Baron de Lahontan, 1728

À la mort de Louis Jolliet, l'île est léguée à ses trois enfants qui s'en départent à la suite d'un long procès.

Régime britannique

Après la conquête britannique, l'île est annexée en 1763 à la colonie de Terre-Neuve puis à la province de Québec en 1774.

Premier habitants

En 1873, Pierre Doucet et Elisabeth Bezeau s’installèrent à l'île d'Anticosti ainsi que le frère de madame Bezeau, François Bezeau. Ces deux seules familles habitent l'Anse-aux-Fraises; ils y vécurent 34 ans, s'occupant de culture, chasse et pêche. Là naquit sept autres enfants. A la famille de Pierre Doucet et de François Bezeau établies à l'Anse-aux-Fraises, viennent s'ajouter quelques autres familles dont un frère, Philias Bezeau, la plupart venant des îles de Shippagan et de Caraquet. A l'arrivée de Meunier en 1896, il y avait une quinzaine de familles. Pendant cette période, il n'y avait ni médecin, ni garde-malade à l'île; aucune communication avec l'extérieur pendant six mois de l'année.Le prêtre missionnaire ne venait qu'une fois par année. Plus tard, vers 1888, un prêtre vient y résider et il se retira chez la famille Doucet jusqu'à un an après l'arrivée de Meunier en 1896. On ajouta une «allonge» à la maison pour y loger le prêtre: ce fut son presbytère. Trois missionnaires se succédèrent.Tout était donné gratuitement, logis, nourriture, services, etc. L'arrivée de Meunier à l'île d'Anticostie fut un grand événement, mais bientôt la liberté des anciens résidents fut restreinte, leurs propriétés furent pour ainsi dire confisquées; les vieilles familles surtout quittèrent l'île. L'Anse-aux-Fraises se vida en 1906.


Propriété d'Henri Menier

Ce n'est qu'à partir de 1895 que l'île connaît vraiment son développement. À cette date, elle est vendue pour la somme de 125 000 dollars au riche chocolatier français Henri Menier qui en fait une réserve de chasse et de pêche personnelle. Il fait rechercher en Amérique du Nord des espèces animales pouvant s'adapter au rude climat de l'île : castors, lièvres d'Amérique, orignaux, cerfs, bisons, visons, rennes et wapitis. Au nord de l'île, il fait construire le petit village de Baie-Sainte-Claire, nommé ainsi en l'honneur de sa mère. Puis, vu la grande difficulté pour les bateaux d'y accoster en raison du récif, plate-forme rocheuse s'avançant parfois à quelques kilomètres de la rive, Henri Menier fait déménager tout le village à une vingtaine de kilomètres de là. Port-Menier voit le jour, où son fondateur fait bâtir un château et équipe le village pour la pêche au poisson en attendant de pouvoir en exploiter les ressources minières et forestières ainsi que la tourbe. En 1913, la mort subite d'Henri Menier fait basculer le projet qu'il avait développé et planifié avec Georges Martin-Zédé. Son frère Gaston hérite de l'île. La jugeant peu rentable, il la vend en 1926 à une firme forestière canadienne, la Wayagamack Pulp and Paper Company (devenue la Consolidated Paper Corporation Ltd en 1931).

La Wayagamack

La Wayagamack Pulp and Paper Company deviendra quelques années plus tard la Consolidated Bathurst. Sous la gestion de Frank Wilcox, employé de la dite compagnie, l'île fait l'objet d'un « haut risque d'incendie ». Ainsi, sous le prétexte de mesures préventives, Wilcox ordonne que l'édifice appelé « château Menier » par les insulaires et autres employés de la compagnie, soit incendié. Ce fut un jour bien triste pour les habitants de l'île, que ce magnifique manoir dont un des murs était décoré avec une fenêtre d'environ cinq mètres de haut en forme de fleur de lys, soit incendié[8]. Le 3 octobre 1953, Wilcox lui-même et son assistant répandent de l'essence sur les planchers de cette somptueuse résidence, ce bien culturel qui témoignait de l'esprit d'entreprise français.

Rachat par le gouvernement du Québec

En 1974, l'île est rachetée par le gouvernement du Québec pour environ 25 millions $. Aujourd'hui, le principal village, Port-Menier, compte près de 250 habitants.

En 1982, le gouvernement du Québec procède au découpage du territoire, attribuant 40 % des terres aux insulaires, qui y ont aménagé trois pourvoiries privées d'une superficie totale de 2 052 km2 ainsi qu'une zone résidentielle de 352 km2 autour de Port-Menier. Le reste du domaine est géré par la SÉPAQ.

Arrivée de l'exploitation pétrolière

Vers la fin des années 2000, alors que l'industrie forestière (principal moteur économique de l'île avec le tourisme de chasse et d'aventure) décline, les nouvelles méthodes de fracturation hydraulique permettent d'entrevoir une éventuelle exploitation pétrolière de l'île, le pétrole de schiste. En 2013, le sujet est toujours débattu, notamment à cause des risques environnementaux d'une telle entreprise.

En 2014, le gouvernement Marois fait un premier pas vers l'exploitation pétrolière à l'île d'Anticosti en investissant 115 millions $ dans deux projets visant à confirmer le potentiel estimé à quelque 46 millions de barils. Une entente a ainsi été signée avec les entreprises Pétrolia, Corridor Resources, et la pétrolière française Maurel & Prom, et une autre avec Junex, pour la réalisation de deux programmes d'exploration qui se dérouleront chacun en deux phases[3].

En 2017, le gouvernement du Québec met fin au projet d'exploitation pétrolière sur l'île afin de préserver son environnement.

Faune

Pêcheur au saumon sur la rivière à l'Huile

Le cerf de Virginie y a été introduit par Henri Menier au nombre de 220 individus et s'est multiplié sur l'île, qui est reconnue pour sa chasse (plus haut taux de succès à la chasse au cerf de Virginie en Amérique du Nord, avec plus de 85 %). En 1897, 150 cerfs de Virginie sont commandés au trappeur Boulay de Cap-St-Ignace et amenés par le vapeur Savoy qui assurait la liaison avec Québec. La population du cerf de Virginie est estimée entre 160 000 et 200 000 bêtes, alors que celle de l'orignal (également introduit par Menier) ne dépasse pas 1 000. La très forte densité de population de cerfs entraîne même parfois des problèmes de régénération du sapin baumier, qui constitue l'une des bases de l'alimentation de l'animal. Menier fit également introduire le castor, la gélinotte huppée et quelques autres espèces encore visibles aujourd'hui.

La société des établissements de plein air du Québec (SÉPAQ) gère environ la moitié des territoires pour la chasse et la pêche (au saumon surtout) ainsi que le Parc national d'Anticosti. Des pourvoiries privées et une appartenant aux Anticostiens gèrent le reste du territoire. L'île est aussi fréquentée par des paléontologues, des ornithologistes, des chasseurs, des pêcheurs à la ligne et des randonneurs.

Principaux lieux connus

Baie de la Tour

Archives

Galerie

Notes et références

  1. « Anticosti, l'île aux fossiles ! - Revue À bâbord ! », sur ababord.org, À bâbord! (consulté le )
  2. Alexandre Shields, « Pétrole - Gisement de classe mondiale à Anticosti », Le Devoir, (lire en ligne)
  3. lapresse.ca: "Québec enclenche l'exploration pétrolière sur Anticosti", 13 février 2014
  4. www.ababord.org
  5. Marcel Moussette et Gregory A. Waselkov, Archéologie de l'Amérique coloniale française, Montréal, Lévesque Éditeur, , 458 p. (ISBN 978-2-924186-38-1), p. 19-26
  6. Municipalité de L’Île-d’Anticosti - Histoire
  7. Marc Lescarbot écrit : « Ile de l’Aſſumption, autrement dite Anticosti, laquelle a environ trente lieuës de longueur : & eſt à l’entrée de la grande riviere de Canada. »
  8. Le paradis retrouvé, Anticosti / Donald MacKay ; adapt. de l'anglais par Willie Chevalier. Éditeur Montréal : La Presse, 1983. p. 95
  9. Fonds Georges Martin-Zédé (P186) - Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ).

Annexes

Bibliographie

  • Lionel Lejeune. Époque des Menier à Anticosti, 1895-1926. (1987) Éditions JML, Saint-Hyacinthe. (ISBN 2-89234-029-2)
  • Documentaire par Jean-Claude Labrecque (1999) : Anticosti, au temps des Menier.
  • Essai par Charlie McCormick. Anticosti. (1979) Les éditions JCL, Édition révisée : 1982, 1996. (ISBN 978-2-89431-152-3)
  • Le paradis retrouvé, Anticosti / Donald MacKay ; adapt. de l'anglais par Willie Chevalier. Éditeur Montréal : La Presse, 1983.

Articles connexes

Liens externes

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