Étiquette à la cour de France

L'étiquette est l'ensemble des règles qui organisent la vie de la famille royale, des courtisans et du personnel qui les entoure. L'étiquette s'occupe donc de la « vie privée » (bien que continuellement en public) du monarque ; la vie publique du roi (celle des cérémonies d'État) relève du cérémonial.

En France, l'étiquette s'est développée à partir du règne du roi François Ier et connut son apogée et sa forme la plus codifiée et la plus rigide d'Europe sous le règne du roi Louis XIV[1],[2].

L'étiquette participe du culte monarchique. Elle permet au roi de manifester sa distinction[3], sa satisfaction ou son mécontentement vis-à-vis des courtisans à qui il procure ou retire l'honneur de le servir de près. Elle permet aussi aux courtisans de s'affirmer, de marquer leur place (quelquefois provisoire) face à la concurrence des autres membres de la cour.

L'étiquette sous le règne du roi Francois Ier

Francois Ier créa la charge de maître des cérémonies qu'il confia à Jean Pot de Chemault, à qui succéda son fils Guillaume Pot de Rhodes.

L'étiquette sous le règne du roi Henri III

La reine Catherine de Médicis et son fils Henri III introduisent les modes espagnoles à la cour de France. En 1585, Henri III promulgue l'édit qui fixe « l'ordre que le roi veut être tenu en sa cour tant au département des heures que de la façon dont il veut être honoré et servi ». Il crée alors la charge de grand maître des cérémonies qu'il confie à Guillaume Pot de Rhodes. Ce dernier est l'inspirateur des règles qui vont former l'étiquette de la cour.

L'étiquette sous le règne du roi Louis XIV

Dans ses Mémoires Louis XIV révèle sa conception de l'étiquette : « Les peuples sur qui nous régnons, ne pouvant pénétrer le fond des choses, règlent d'ordinaire leur jugement sur ce qu'ils voient au dehors, et c'est le plus souvent sur les préséances et les rangs qu'ils mesurent leur respect et leur obéissance ». Les différentes étapes de la journée royale sont codifiées par l'étiquette.

Le lever du roi

On participe au lever du roi, cérémonial qui est divisé en trois parties, le « petit lever », la « première entrée » et le « grand lever ».

Le repas du roi

Pour le petit couvert, le roi est servi dans sa chambre. Pour le grand couvert, la famille royale est installée dans l'antichambre de la reine. Les princesses et les duchesses y assistent, assises sur des ployants ou des formes ; les autres dames restent debout.

Quand l'ordre de mettre le couvert est donné, l'huissier de salle se rend chez les gardes du corps du roi, en mobilise un et se rend au service du « gobelet ». Ainsi escorté, le chef du gobelet apporte la nef (pièce d'orfèvrerie refermant des serviettes et des coussins de senteurs), tandis que d'autres officiers du gobelet en font de même avec le reste du couvert. Toute personne passant devant la nef doit la saluer. Puis l'huissier retourne chez les gardes du corps et avec une nouvelle escorte se rend à la « bouche ». Les plats de viande sont alors transportés vers la salle du repas. L'huissier de salle marche en premier, suivi par le maître d'hôtel, puis par le gentilhomme servant pour le premier plat et d'autres officiers pour les autres plats. Chaque plat est escorté par trois gardes carabine à l'épaule. Arrivés dans la salle, les plats sont reçus par le gentilhomme dit de prêts.

Le gentilhomme porteur du premier plat, le goûte avant de le poser sur la table dite de prêts qui est entourée de trois gardes. Il en est de même pour les autres plats. Ensuite les gentilshommes servants les portent sur la table du roi, qui alors se sert.

Quand il y a le grand cérémonial, la nef est déposée à droite sur la table du roi ; c'est l'aumônier de service qui en ôte le couvercle lorsqu'un gentilhomme servant vient y puiser une serviette pour le roi. Il y a 14 gardes autour de la table, dont un en permanence près de la nef, un autre accompagne le gentilhomme servant lorsqu'il apporte à boire au roi. Le roi est entouré par deux officiers de la bouche en grand uniforme et en arme, le capitaine des gardes du corps se tient derrière le fauteuil du roi.

Le coucher du roi

Le grand coucher : après que l'aumônier a dit la prière du soir, en présence d'une assistance nombreuse, le roi est déshabillé par le maître de la garde-robe et les valets de chambre. Un des honneurs les plus recherchés de la cour est de tenir le bougeoir du roi. Ensuite vient le petit coucher : seuls les familiers y assistent ; le roi termine sa toilette pour la nuit et donne ses ordres pour le lendemain (heure du lever, costume à lui préparer…). Puis tous se retirent, hormis le premier valet de chambre qui va passer la nuit sur un lit de veille au pied du lit royal.

L'étiquette au XVIIIe siècle

À la mort du roi Louis XIV, l'étiquette de la cour se perpétue même si elle subit quelques évolutions. Par exemple, les souverains ne dormaient plus dans la Chambre du roi qui devint alors une chambre d'apparat, préférant se réfugier dans leurs appartements privés ou dans les résidences royales des environs et obligeant ces derniers à se déplacer pour se plier à ce cérémonial du « Grand lever » (ainsi que celui du « Grand coucher ») qui se fit ainsi plus rare.

Durant le règne du roi Louis XV, l'étiquette, certes moins rigide par certains côtés que du temps du roi Louis XIV, ne semble cependant pas avoir subi d'évolutions sensibles.

Sous le règne suivant, celui du roi Louis XVI, les historiens s'accordent à dire que la jeune Marie-Antoinette bouscule des conventions séculaires de la cour de France. Des courtisans, des titulaires de hautes charges au sein de la Maison du roi, s'en offusquent : « (…). Respectueusement, la grande maîtresse rappelle à la reine ce que faisait (ou ne faisait pas) Marie Leczinska. Elle s'attire cette réponse cinglante : "Madame, arrangez cela comme vous l'entendrez. Mais ne croyez pas qu'une reine, née archiduchesse d'Autriche, y apporte l'intérêt et l'abandon qu'y donnait une princesse polonaise devenue reine de France" »[4].

Jacques Levron dans son ouvrage qui a pour titre La cour de Versailles aux XVIIe siècle et XVIIIe siècle, écrit : « En dépit de ces secousses, l'étiquette et le cérémonial règnent toujours. "La grande machine continue de fonctionner et les rouages grincent à peine" (André Castelot) »[4].

Dans les Mémoires de Madame Campan, première femme de chambre de Marie-Antoinette, celle-ci rapporte que l'étiquette du XVIIe siècle fut maintenue au XVIIIe siècle mais avec moins de dignité selon ses propos[5].

L'étiquette d'octobre 1789 à 1792

Charles-Éloi Vial dans l'ouvrage Les derniers feux de la monarchie. La cour au siècle des révolutions 1789-1870 écrit : « Dans les jours qui suivirent le retour à Paris, peu à peu, le cérémonial reprit ses droits et les habitants des Tuileries renouèrent avec leurs habitudes »[6].

« L'étiquette reprit rapidement ses droits aux Tuileries, car le roi [Louis XVI] tenait à affirmer sa dignité de chef d'État »[7].

« En , l'Assemblée nationale vint ainsi présenter ses vœux au roi et à sa famille, le cérémonial versaillais reprenant partiellement ses droits (…) »[8].

Le "lever du roi" était appelé "lever constitutionnel". Il y avait toujours les "entrées de la chambre" et les "entrées du cabinet" et des audiences.

Charles-Éloi Vial écrit toutefois que le cérémonial était dégradé en raison de la nouvelle situation politique et des lieux (le palais des Tuileries situé en plein centre de Paris) et que dans ce contexte le cérémonial religieux évolua également.

L'étiquette au XIXe siècle

Le XIXe siècle connut le phénomène curial sous le Ier Empire, la Restauration, la Monarchie de Juillet, le second Empire.

Notes et références

  1. G. Lenotre, Versailles au temps des rois, Paris, éd. Grasset, , 300-[4] p., 19 cm (notice BnF no FRBNF41661545), p. 144.
  2. Emanuelle Baumgartner, Adelin Charles Fiorato, Augustin Redondo « Problèmes interculturels en Europe, XVe - XVIIe siècles : mœurs, manières, comportements, gestuelle, codes et modèles » Presses de la Sorbonne Nouvelle, 1998, p. 144.
  3. Selon les travaux sur « les usages de cour » de Norbert Elias.
  4. Jacques Levron, La cour de Versailles aux XVIIe siècle et XVIIIe siècle, 2010, p. 293, 318.
  5. Mémoires de Madame Campan, première femme de chambre de Marie-Antoinette, page 17, année 1979, Ramsay éditeur.
  6. Charles-Éloi Vial, Les derniers feux de la monarchie. La cour au siècle des révolutions 1789-1870, Perrin, 2016, p. 42.
  7. Charles-Éloi Vial, Les derniers feux de la monarchie. La cour au siècle des révolutions 1789-1870, Perrin, 2016, p. 52.
  8. Charles-Éloi Vial, Les derniers feux de la monarchie. La cour au siècle des révolutions 1789-1870, Perrin, 2016, p. 68.

Voir aussi

Bibliographie

  • Henri Brocher, Le rang et l'étiquette sous l'Ancien Régime, éditions Alcan 1934
  • Mémoires de Madame Campan, première femme de chambre de Marie-Antoinette, 1979, éditions Ramsay
  • Bernard Hours Louis XV et sa cour : Le roi, l'étiquette et le courtisan ; essai historique, éditions Presses Universitaires de France, 2002
  • Jacques Levron, La cour de Versailles aux XVIIe siècle et XVIIIe siècle, 2010, éditions Perrin
  • Jean-François Solnon, La Cour de France, éditions Fayard, 1987
  • Charles-Éloi Vial, Les derniers feux de la monarchie. La cour au siècle des révolutions 1789-1870, éditions Perrin, 2016
  • Daria Galateria, L'étiquette à la cour de Versailles, Flammarion, 2017, 320 p.

Articles connexes

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