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Par souci de lisibilité, nous noterons la dérivée première d'une variable comme ceci : . Même chose pour la dérivée seconde, notée . De plus, toutes les dérivées sont par rapport au temps. En clair, et .

Résoudre l'équation du fluide de Friedmann n'est pas très complexe, mais demande quand même quelques astuces mathématiques. Une solution pour simplifier les calculs consiste à réduire le nombre d'inconnues à un seule. Au lieu de travailler avec la pression et la densité, il est possible de ne travailler qu'avec la densité. Cela demande de postuler une relation entre la densité d'énergie et la pression. Cette relation est ce qu'on appelle une équation d'état.

Généralement, on postule que la pression est proportionnelle à la densité d'énergie. La relation entre pression et densité est donc de la forme :

La valeur de dépend selon que l'on considère la matière, le rayonnement ou l'énergie noire.

  • Pour la matière, on part du principe que celle-ci est un gaz parfait qui emplit l'espace. La pression d'un tel gaz est alors définie par la formule , avec la densité du gaz et v la vitesse moyenne de ses particules. Cependant, par souci de simplification, il est supposé que la vitesse des particules du gaz est très faible, au point qu'on peut la supposer nulle (ce qui marche bien pour de la matière qui va à faible vitesse). Dans ces conditions, la pression s'annule, peu importe la densité. On a alors : .
  • Pour le rayonnement, il est établi par la physique du rayonnement que .
  • Pour l'énergie noire, on sait que la pression est négative pour une densité positive. On sait donc que , mais guère plus. Pour simplifier les calculs, on suppose que . Empiriquement, les mesures réalisées par le satellite Planck semblent compatibles avec la valeur w = −1.028 ± 0.032.

Précisons que ces valeurs pour la matière et le rayonnement proviennent des résultats des chapitres précédents. Par exemple, le fait que n'est qu'une reformulation du fait que . Pareil pour la relation pour le rayonnement, qui trahit simplement le fait que .

Intuitivement, on peut les justifier en faisant usage de la loi des gaz parfaits, qui nous dit que :

Sachant que , on a:

On peut retrouver les résultats précédents. Si on suppose que la température ne dépend pas du facteur d'échelle, on retrouve le résultat pour la matière, à savoir : . Par contre, on a établi que pour le rayonnement, ce qui donne pour le rayonnement.

Le cas général, avec w indéterminé

Pour commencer, nous allons étudier le cas général, dans lequel la valeur de n'est pas précisée. Nous allons étudier comment les équations de Friedmann se reformulent quand on injecte l'équation à l'intérieur. Dans ce qui va suivre, nous allons supposer que la courbure de l'univers est nulle, afin de simplifier les calculs. Cette simplification est cependant une très bonne approximation de l'univers réel, toutes les observations semblant indiquer une courbure nulle.

La seconde équation de Friedmann

Injectons la formule dans la seconde équation de Friedmann :

On simplifie par  :

Puis, on factorise  :

Puis on simplifie par 3 :

L'équation du fluide de Friedmann

En introduisant dans l'équation du fluide de Friedmann, on obtient l'équation différentielle suivante :

Qui peut se reformuler comme suit :

La résolution de cette équation différentielle donne :

Les équations générales du modèle

L'équation précédente nous dit que le facteur d'échelle suit une loi de puissance, ce qui fait qu'on peut utiliser les formules du chapitre "Une introduction aux modèles cosmologiques". On trouve donc les résultats suivants :

Le facteur de décélération et les équations de Friedmann

Maintenant, étudions le comportement de l'accélération de l'univers. Pour cela, étudions le facteur de décélération, qui vaut dans le cas général des modèles de Friedmann :

Démonstration

On peut démontrer cette valeur d'une autre manière, en partant de sa définition. Pour rappel, la définition du facteur de décélération est la suivante :

Le terme de gauche se calcule à partir de la seconde équation de Friedmann, alors que se calcule à partir de la première. Dans le cas qui nous intéresse, on a alors :

, vu que la courbure est considérée comme nulle.
, du fait de l'hypothèse .

On a alors :

On simplifie par  :

D'où on dérive :

Elle nous dit en effet sous quelles condition l'expansion ralentit, accélère ou reste stable. Pour cela, calculons la valeur de pour laquelle . On a donc :

On trouve alors que :

En étudiant un petit peu la relation , on en déduit le tableau suivant.

L'expansion accélère L'expansion est constante (modèle à croissance linéaire) L'expansion ralentit

L'accélération de l'univers ne peut donc s'expliquer que si l'énergie noire a une équation d'état de la forme :

Faisons maintenant le rapprochement avec les valeurs de obtenues pour le rayonnement, la matière et l'énergie noire. Pour un univers composé uniquement d'énergie noire, on déduit que l'expansion accélère sans cesse, vu que l'on a . Mais pour la matière et le rayonnement, on a , ce qui fait qu'un univers composé intégralement de matière et de rayonnement doit voir son expansion décélérer. Pour un univers qui contient un mélange d'énergie noire et de matière/rayonnement, tout dépend des parts respectives de chaque composant.

Le modèle cosmologique dominé par la matière

Le cas de l'univers qui ne contient que de la matière, sans rayonnement, ni constante cosmologique est le second cas que nous allons aborder. Dans ce modèle, la matière est un gaz parfait dont les particules sont des galaxies ou des amas de galaxies. Cette hypothèse est crédible dans le sens où les amas de galaxies sont relativement éloignés et interagissent peu. Comme autre simplification, nous allons prendre le cas d'une matière froide, au zéro absolu. Cette autre hypothèse n'est pas si abusive vu l'état actuel de l'univers : seul 10% de la matière sert à fabriquer des étoiles, le reste étant localisé dans des nébuleuses et des nuages moléculaires dont la température ne dépasse pas la dizaine de degrés au-dessus du zéro absolu. L'univers est donc vraiment très froid ! En appliquant la loi des gaz parfaits avec une température au zéro absolu, on trouve que la pression est nulle quelle que soit la densité. Dit autrement, .

Avec cette hypothèse, les équation de Friedmann deviennent les suivantes :

Le calcul du facteur d'échelle

Partons de l'équation du fluide de Friedmann :

Ou encore :

La résolution de cette équation différentielle (laissée en exercice au lecteur) nous donne l'équation suivante. Avec quelques manipulations algébriques triviales, on trouve que la densité de matière diminue avec le cube du facteur d'échelle.

Dans un tel modèle, le facteur d'échelle évolue avec le temps en suivant cette équation :

On remarque que cette équation est une loi de puissance, à savoir une loi de type :

, avec l'origine de temps choisie arbitrairement et le facteur d'échelle à ce même instant.

Nous avons vu les modèles cosmologiques basés sur des loi de puissance dans le chapitre "Une introduction aux modèles cosmologiques", ce qui fait que l'on pourrait réutiliser les résultats de ce chapitre directement. On a en effet établit des formules pour le facteur de Hubble, le décalage vers le rouge, le rayon de l'univers observable et bien d'autres pour de tels modèles. Autant dire que nous réutiliserons beaucoup ces formules dans ce qui va suivre.

Le calcul du facteur de Hubble

Les résultats sur les modèles à loi de puissance nous disent que :

Sachant que pour le présent modèle, on a , on trouve :

Le calcul de l'âge de l’univers

Les résultats sur les modèles à loi de puissance nous disent que :

Sachant que pour le présent modèle, on a , on trouve :

Une autre démonstration est donnée ci-dessous.

Démonstration

Partons de la première équation de Friedmann et simplifions-la en ne tenant en compte que de la matière :

En se souvenant que , on a :

Multiplions par des deux côtés :

Prenons la racine carrée :

On utilise la formule  :

On isole le terme  :

En intégrant, il vient :

On peut alors déduire la valeur de la variable t, qui n'est autre que l'âge de l'univers. En supposant que le facteur d'échelle actuel vaut 1, l'équation se simplifie. Après quelques manipulations algébriques, on trouve que celui-ci est égal à :

On utilise alors la définition du temps de Hubble () pour simplifier l'équation précédente :

Le calcul du rayon de l’univers observable

On a vu dans le chapitre sur l'univers observable que le rayon comobile de l'univers se calcule avec l'équation suivante :

On peut remplacer le facteur d'échelle par la valeur calculée ci-dessus, ce qui donne :

Le résultat de cette intégrale est le suivant :

Le calcul du rayon de Hubble

Maintenant, utilisons la formule qui donne le rayon de Hubble, pour un univers à loi de puissance. Celle-ci nous dit que :

Sachant que , on trouve :

On peut comparer ce résultat avec le rayon de l'univers observable, ce qui donne :

On voit que le rayon de l'univers est le double du rayon de Hubble.

Le paramètre de décélération

Le paramètre de décélération vaut . Le paramètre de décélération étant positif, on en déduit que l'expansion de l'univers ralentit progressivement avec le temps.

Pour le calculer, on peut utiliser la formule vue plus haut, ce qui donne ici :

La densité en fonction du temps

Il est possible de combiner les deux équations suivantes :

Ce qui donne :

En appliquant les lois des puissances, on trouve :

On voit que la densité diminue avec le carré du temps.

Le modèle cosmologique dominé par le rayonnement

Dans le cas où on considère un univers entièrement rempli de rayonnement, on, postule que le rayonnement est formé d'un gaz parfait de photons. Dans ces conditions, le comportement des photons fait que :

.

En injectant dans l'équation du fluide, on trouve :

Ou encore :

La résolution de cette équation différentielle (laissée en exercice au lecteur) nous donne l'équation suivante. Avec quelques manipulations algébriques triviales, on trouve que la densité de matière diminue avec la puissance quatrième du facteur d'échelle.

L'équation nous dit que le rayonnement se dilue plus rapidement que la matière. Sa densité d'énergie chute plus vite et il en est donc de même pour la gravité. La force de gravité du rayonnement chutant lus rapidement que pour la matière, l'expansion est plus rapide (rappelons que la gravité lutte contre l'expansion). L'univers a donc une expansion plus rapide qu'avec l'univers dominé par la matière. L'âge de l'univers doit donc être plus faible, alors que le rayon de Hubble et de l'univers observable doivent être plus grands.

L'évolution temporelle du facteur d'échelle

Dans un tel modèle, le facteur d'échelle évolue avec le temps en suivant cette équation :

On remarque que cette équation est une loi de puissance, à savoir une loi de type :

Dans le cas présent, on a .

Nous avons vu les modèles cosmologiques basés sur des loi de puissance dans le chapitre "Une introduction aux modèles cosmologiques", ce qui fait que l'on va réutiliser les résultats de ce chapitre directement.

Le calcul du facteur de Hubble

Utilisons la formule pour calculer le facteur de Hubble. Dans le cas présent, on a et , ce qui donne :

L'équation nous dit que le facteur de Hubble décroît au cours du temps.

La détermination de l'âge de l’univers

Maintenant, utilisons la formule établie dans le chapitre sur les modèles cosmologiques à loi de puissance. Sachant que dans notre exemple, on a , on trouve :

Une autre démonstration, basée sur la première loi de Friedmann, est donnée ci-dessous.

Démonstration

Partons de la première équation de Friedmann et simplifions-la en ne tenant en compte que du rayonnement :

En simplifiant par on a :

Prenons la racine carrée :

Multiplions par  :

En intégrant, il vient :

On peut alors déduire la valeur de la variable t, qui n'est autre que l'âge de l'univers. En supposant que le facteur d'échelle actuel vaut 1, l'équation se simplifie. Après quelques manipulations algébriques, on trouve que l'âge d'un tel univers est égal à :

On utilise alors la définition du temps de Hubble  :

Le calcul du rayon de Hubble

Maintenant, utilisons la formule qui donne le rayon de Hubble, pour un univers à loi de puissance. Celle-ci nous dit que :

Sachant que , on trouve :

Le rayon de l’univers observable

On a vu dans le chapitre sur l'univers observable que le rayon comobile de l'univers se calcule avec l'équation suivante :

On peut remplacer le facteur d'échelle par la valeur calculée ci-dessus, ce qui donne :

Le résultat de cette intégrale est le suivant :

On voit donc que le rayon de l'univers est le double du rayon de Hubble.

Le paramètre de décélération

Le paramètre de décélération vaut , ce qui donne ici :

Le paramètre de décélération étant positif, on en déduit que l'expansion de l'univers ralentit progressivement avec le temps.

La densité en fonction du temps

Il est possible de combiner les deux équations suivantes :

Ce qui donne :

En appliquant les lois des puissances, on trouve :

On voit que la densité diminue avec le carré du temps, comme dans l'univers dominé par la matière. Par contre, le coefficient de proportionnalité est différent.

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